Nous sommes enfin
libérés ! » : la chute du tyran Assad
REPORTAGE. Le régime dirigé par la famille Assad s’est effondré en
quelques jours après un demi-siècle de terreur et une guerre civile qui a fait
500 000 morts. La Syrie est entrée dans l’inconnu.
De notre envoyé spécial à Damas, Guillaume
Perrier, avec Daham Alasaad
Publié le 09/12/2024 à 13h51
Des dizaines de personnes célèbrent la chute du régime de Bachar el-Assad
en agitant les drapeaux des rebelles syriens, à quelques kilomètres de la
frontière syrienne, le 8 décembre 2024. © SOPA Images/SIPA / SIPA / SOPA
Images/SIPA
Le 8 décembre 2024 restera une date historique. Après plus
de treize ans de guerre et d'un demi-siècle de dictature sous la houlette
de la famille Assad, la
Syrie s'est libérée de son tyran en moins de deux semaines. Dimanche, la
télévision publique syrienne a proclamé officiellement, en direct sur ses
écrans, « la victoire de la grande révolution syrienne et la chute du
gouvernement criminel des Assad ».
Le Premier ministre du régime déchu, Mohammad Ghazi al-Jalali, réfugié
chez lui, s'est dit prêt à « coopérer » avec les nouveaux dirigeants
« choisis par le peuple » et a appelé à préserver les institutions
nationales.
Les ministères, les banques et les palais ont été investis et pillés par
des manifestants. Même les branches les plus secrètes des services de
renseignement syriens, les redoutés moukharabat, ont abandonné leur mission et
ouvert leurs centres de détention. Le cœur de l'appareil sécuritaire, à Damas
comme dans tout le pays, s'est effondré comme un château de cartes.
Abasourdis et
désorientés, les Syriens naviguent entre euphorie et attentisme
Les Syriens se frottent encore les yeux, incrédules face à ce scénario
que plus personne n'osait envisager ces dernières années. Soutenu par la Russie
depuis 2015, réinstallé au sein de la Ligue arabe par les pays du Golfe, de
nouveau courtisé par des pays européens, Assad paraissait avoir remis son pays
sous contrôle. Mais son régime répressif n'était qu'une façade prête à
s'effondrer.
Les rebelles islamistes venus de la province d'Idlib sont entrés dans
toutes les villes, une à une, quasiment sans résistance, prenant des positions
désertées au fur et à mesure de leur avancée. Dimanche, les rues de la capitale
étaient parcourues par des habitants, abasourdis et désorientés, des groupes de
jeunes tirant des coups de feu en l'air, sans qu'aucune force ne canalise les
manifestants ni qu'aucun soldat ne s'interpose. L'État policier qui régissait
tout ne contrôlait plus rien.
En Syrie, le destin du
Proche-Orient a basculé
Près du siège de la branche 235 des services de sécurité, la
fameuse branche Palestine, crainte pour ses méthodes de torture
particulièrement cruelles, des détenus sortent en courant, après des années de
détention, sans être rattrapés par leurs geôliers. L'un d'eux arrive à peine à
marcher et file en claudiquant. « Que se passe-t-il ? Cela fait dix
ans que je suis enfermé », demande-t-il à une passante. « Le régime
est tombé », hurle-t-elle à l'homme, qui ouvre grand les yeux et lève les
mains vers le ciel.
À 30 kilomètres au nord de Damas, la célèbre prison de Saydnaya,
symbole de « l'État de barbarie » syrien, a elle aussi été ouverte,
libérant des milliers d'opposants, dont certains avaient « disparu »
depuis des années. Les plus anciens ont appris la mort de Hafez el-Assad, le
père de Bachar, décédé en 2000… Un ex-pilote de l'armée de l'air syrienne qui
avait refusé de bombarder les populations civiles lors des massacres
de 1982 et avait été jeté en prison pour cet affront, est ressorti
après quatre décennies de détention… Un autre homme, tenu par ses compagnons de
cellule et ressuscité d'entre les morts, raconte que son exécution était prévue
le lendemain.
C’était un rêve et on l’a fait. Assad est tombé !Hassan al-Hariri
Dans tout le pays, les scènes de liesse se sont multipliées pour célébrer
ce jour historique, déboulonner les statues des anciens maîtres de Damas, et
piétiner les portraits qui ornaient chaque bâtiment officiel. À Qamishli, dans
la région autonome du Nord-Est dominée par les Kurdes ; à Deraa, dans le
Sud, d'où était partie la révolution syrienne en 2011 ; et même à Tartous,
fief des Alaouites, la minorité chiite à laquelle appartient le clan Assad, où
se trouve la base de la marine russe, une immense lame de fond a dispersé les
derniers symboles du régime baasiste.
Une offensive éclair
minutieusement préparée
La débandade de l'armée syrienne et de ses alliés, russes et iraniens, a
commencé dès le 27 novembre, exposant à leurs ennemis toute leur
fragilité. Une offensive éclair a percé toutes les lignes. Elle est partie
de la poche d'Idleb, au nord, où s'étaient retranchés depuis 2016 les
groupes d'opposition les plus radicaux, sous la bannière des anciens
djihadistes de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), et où se trouvent aussi des
centaines de milliers de déplacés de toute la Syrie, entassés dans des camps à
la frontière turque.
Ni les milices syriennes pro-iraniennes, ni les troupes du Hezbollah
libanais qui contrôlaient le nord d'Alep – affaiblies par la guerre au Liban et
par les frappes israéliennes –, ni la Russie, accaparée par le conflit en
Ukraine, n'ont été en mesure de faire obstacle à l'avancée des rebelles. En
moins d'une semaine, Alep a été capturée et le drapeau de la révolution
syrienne a été hissé sur la citadelle.
Puis les combattants sont descendus vers le sud. Ils ont successivement
libéré les villes de Hama et de Homs, avant de fondre sur Damas. À chaque fois,
en rencontrant très peu de résistance et en investissant des casernes, des
dépôts d'armes et des check-points abandonnés.
Abou
Mohammed al-Joulani, le chef des rebelles syriens qui a renversé AssadL'offensive
des islamistes de HTS a été minutieusement préparée pendant plusieurs mois
et en partie coordonnée avec la Turquie. Les factions de l'Armée nationale
syrienne (ANS), une coalition de groupes islamistes à la solde d'Ankara, se
sont lancées dans la bataille à l'est d'Alep et sont descendues ensuite vers le
sud, via la région de Palmyre.
Mais cette troupe de « bachi-bouzouks », parachutés par la
Turquie pour ses opérations en Libye, dans le Haut-Karabakh ou encore plus
récemment au Niger, tient plus d'un gang de pillards que d'une armée et s'est
illustrée par ses nombreuses exactions. Et son offensive, reflet des intentions
d'Ankara, s'est rapidement concentrée sur la zone kurde, plus que sur les
troupes loyalistes. Les frictions avec HTS, groupe beaucoup plus structuré et
discipliné, n'ont pas tardé à apparaître.
Avec l'effondrement des positions de l'armée syrienne, le Sud s'est
également soulevé. D'anciennes brigades de l'Armée syrienne libre, peu
influencée par les groupes islamistes, se sont reformées et sont arrivées à
Damas en quelques jours. « Je me trouve sur la place des Omeyyades à
Damas, c'était un rêve et on l'a fait. Assad est tombé !, jubile Hassan
al-Hariri, 25 ans. J'ai rejoint les rebelles à Deraa, il y a une
semaine. Les forces du régime ont fui comme des rats. Des soldats se sont même
rendus. C'est incroyable ! »
Incertitudes autour de
la transition politique
La transition est fulgurante. À peine le régime renversé, un nouveau
pouvoir se dessine et les anciens djihadistes de HTS en sont le fer de lance.
Dans les villes libérées, ce sont eux qui ont pris en main la nouvelle
administration, organisé les distributions de pain et la sécurité. À Damas, ils
ont été appelés à la rescousse pour mettre fin au pillage des administrations
et rétablir les services. Ils ont instauré un couvre-feu, ordonné l'évacuation
des combattants des centres-villes et appelé à préserver les bâtiments publics.
Les forces rebelles ont aussi gagné la guerre de communication. Leur
leader, Abou Mohammed al-Joulani, un ancien chef de l'État islamique en Irak,
fondateur du Front Al-Nosra, prédécesseur de HTS, dit avoir rompu avec Al-Qaïda
en 2016. Son organisation est toujours considérée par les pays occidentaux
comme un mouvement terroriste. Elle a récemment glorifié les attentats du Hamas
et sa prise de pouvoir rappelle un peu celle des talibans en Afghanistan en
2021.
Lui s'est voulu rassurant et pragmatique, multipliant les bains de foule
et les mains tendues. Dans une interview sur la chaîne américaine CNN,
al-Joulani a rejeté toute idée de vengeance, s'est dit attaché à la démocratie
en Syrie, soucieux de protéger les minorités chrétiennes et de coopérer avec
les Kurdes dans un projet national de réconciliation.
Faut-il
croire aux promesses de modération et de pluralisme d'Al-Joulani ? Le responsable d'une communauté chrétienne d'Alep, qui préfère garder
l'anonymat, se montre prudent. « Pour le moment, tout est calme, les gens
sortent peu, quelques commerces ont rouvert. Nous les jugerons sur leurs
actes », répond-il. À Damas, Milad, un commerçant de la vieille ville,
juge que « le changement était nécessaire ». « Cela arrive
finalement ! Depuis ma naissance, je n'ai connu qu'Assad et j'ai
60 ans. J'espère que les nouveaux leaders seront bons avec nous, les
chrétiens. Cela semble être le cas, espère-t-il. Bien sûr, nous avons peur,
mais quel choix avons-nous ? Demain, j'irai prier pour notre pays. »
Le Kangourou du jour Répondre Certains caciques du régime tentent de fuir à l'étranger ou espèrent se
retrancher dans le réduit alaouite, le long de la côte méditerranéenne. Les
autres soutiens d'Assad ont rapidement tourné casaque, à l'image de ce guide
officiel, joint à Damas, ancien collaborateur du ministère de l'information et
qui s'enthousiasme désormais pour « les nouveaux héros syriens ».
Dans le quartier de Medan, Mohammed, 35 ans, un ancien membre des
« shabiha », les milices pro-Assad envoyées réprimer les
manifestations en 2011, s'inquiète à midi de la présence des combattants de
HTS, espérant une amnistie. Mais la nuit suivante, il a rejoint les
manifestants. « Nous sommes enfin libérés », hurle-t-il au téléphone.
Il faut arrêter en France de faire de l’auto satisfaction de mauvaise politique
internationale voire nationale Française !?
Car nous avons les plus mauvais politiciens qui nous dirigent si mal depuis des décennies notamment comme pour se bon ASSAD dictateur syrien tyran hyper meurtrier que N.SARKOZY avait accueilli à bras ouvert !?
Spécialité bien française de nos dirigeants bienpensants hypocrites
donneurs de leçons que personne n’écoute plus tout comme d’ailleurs notre Union
Européenne tout aussi lamentable c’est comme pour Poutine qu’on aurait pu arrêter
depuis le début sauf que maintenant c’est plus difficile voire impossible !?
De toute façon les mêmes erreurs de mauvaises gouvernances de notre France
depuis nos guerres mondiales et coloniales n’ont pas servi de leçons à nos
dirigeants de tous bords on ne les compte plus car les Français lambda ne
savent plus voter ni choisir leurs dirigeants depuis des lustres !?
Et comme on refait les mêmes erreurs depuis 1940 cela va bien nous
revenir un jour comme un boomerang dans la face !?
Inutile d’en rajouter c’est la suite lente de la déliquescence des pays
encore libres et démocratiques qui ne sont devenus que dirigés par des bavards
s’écoutant parler comme notre président mais il n’y a pas que lui depuis + de
66 ans mais ils ne nous protègent pas assez ces Messieurs !?)
Jdeclef 09/12/2024 15h51
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