JAPON Yoshitoshi
Fukahori, aujourd'hui âgé de 86 ans, se trouvait à quelques kilomètres du
centre de l'explosion de la bombe atomique, le 9 août 1945...
Bombardement
de Nagasaki: «Je pensais être dans un autre monde», témoigne un survivant
70 ans après, le Japon paie encore le prix de Hiroshima et Nagasaki
Au moment de l’explosion, il se trouve à environ 3,5 kilomètres de là, mobilisé comme tous les écoliers pour travailler, de l’autre côté d’une colline. Il se réfugie alors sous une table. « Le soir venu, alors que je gravissais les marches qui menaient au sommet pour revenir vers la ville, j’ai croisé beaucoup de gens blessés qui venaient en sens inverse, fuyant la zone de l’explosion. Ils me disaient : "Il n’y a plus rien là-bas, tout a brûlé, fais demi-tour !" »
« J’ai vu la peau se décoller de leurs mains »
Yoshitoshi Fukahori, aujourd’hui âgé de 86 ans, poursuit, la voix claire, un
récit maintes fois répété. « Les gens me suppliaient : "De
l’eau, de l’eau !". Certains s’accrochaient à ma jambe. J’ai tenté de
me dégager, et c’est là que j’ai vu la peau se décoller de leurs mains. »
Effrayé, il fait demi-tour. Le lendemain matin, il reprend le chemin de la
ville et découvre finalement l’inimaginable, le champ de ruines fumantes laissé
par la bombe. Il avait bien entendu l’explosion mais ne pouvait imaginer qu’une
seule bombe ait pu provoquer un tel carnage. Les maisons construites en bois,
l'hôpital, la gare, jusqu’à la cathédrale sont détruits : « Je
pensais être dans un autre monde », dit-il. Yoshitoshi Fukahori se met
alors à la recherche de sa famille. De sa fratrie de neuf, seule sa sœur aînée,
âgée de 18 ans, a trouvé la mort dans le bombardement. « Incinérer son
corps a été la chose la plus douloureuse de ma vie. »Bombe atomique : Le Japon entre commémoration de la paix et renforcement de son armée
Après la guerre, la bombe est un sujet tabou jusqu’en 1952, date du départ de l’occupant américain. Par la suite, Yoshitoshi Fukahori tente de partager son expérience, mais peu à peu réalise que le récit seul ne suffira pas. Il se met alors en quête d’un support visuel. « Les survivants vont disparaître, mais les photos restent. Alors, j’ai mis toute mon énergie dans la collection de photos. »
Plus de 6.000 photographies pour témoigner du bombardement
En 1979, il crée un groupe pour partager les photos du bombardement,
l’Association de recherche de photos de la bombe atomique. Il se rend à
plusieurs reprises aux Etats-Unis pour rassembler ce matériau. Aujourd’hui,
plus de 6.000 clichés ont été rassemblés, pris pour la plupart par des
photographes américains. « A l’époque, il était très difficile de prendre
des photos. Même si l’on possédait un appareil photo, les pellicules étaient
introuvables. Et l’armée impériale surveillait de très près les photos pour ne
pas dévoiler des informations stratégiques. » Il faut attendre l’arrivée
des alliés, en septembre 1945. Des journalistes qui accompagnent l’armée
américaine photographient alors la ville en ruines.Yoshitoshi Fukahori, qui s’est marié en 1954 et a eu deux filles, continue aujourd’hui à rassembler des photos et à témoigner de son expérience. Aux écoliers qui lui demandent pourquoi une bombe atomique a été lancée sur Nagasaki, il répond : « A cause de la guerre. Ne faites jamais la guerre. »
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