Comment les
islamistes tentent de justifier l'assassinat de prêtres
Alors que
l'islam reconnaît le christianisme comme religion révélée, pour les
djihadistes, les prêtres "à la tête de la mécréance" doivent être
tués.
L'assassinat fin
juillet de Jacques Hamel, prêtre auxiliaire de la paroisse de Saint-Étienne-du-Rouvray,
âgé de 85 ans, a horrifié la grande majorité des musulmans. Certains
ont même tenu à se rendre à la messe le dimanche suivant pour manifester leur
solidarité avec les chrétiens. La protection des chrétiens et des juifs est un
principe de la loi islamique depuis les origines. La tradition musulmane
recommande de respecter le clergé chrétien. Le Coran ne dit-il pas que Jésus
est un « messager divin » comme le prophète Muhammad ?* Alors,
pour justifier leur crime, les adeptes de l'organisation islamique exhibent sur
Internet des écrits, souvent vieux de plusieurs siècles, émanant de théologiens
particulièrement extrémistes.Spécialisée dans l'analyse stratégique, la société suisse JMF Recherches et Analyses a ainsi retrouvé sur les réseaux sociaux des textes qui tentent de faire la différence entre les moines et les prêtres. « Le moine dans son monastère ne doit pas être tué ni les gens des églises qui ne côtoient pas les gens extérieurs à l'église », écrit le juriste Muhammad Amin Ibn Abidin, décédé en 1836. « Mais s'ils les côtoient, alors ils sont tués comme le prêtre », ajoute-t-il. Certains islamistes, durant la guerre civile algérienne, avaient ainsi pu justifier l'assassinat des moines de Tibhirine. Même s'ils ne faisaient pas de prosélytisme, les religieux côtoyaient les villageois, allant même jusqu'à les soigner…
Viser
particulièrement les religieux
Si les moines restent
cloîtrés dans leur monastère, ils ne représentent pas un danger pour l'islam.
En revanche, un prêtre comme Jacques Hamel, « qui se mêle aux
fidèles », est considéré comme « se trouvant à la tête de la
mécréance », prétendent les djihadistes. Taqî ad-Dîn Ahmad Ibn Taymiyya
(1263-1328) va plus loin encore en considérant que les prêtres doivent être
spécialement visés en cas de guerre. Or, Daech se considère comme étant en
guerre contre les « croisés » et les juifs. Le théologien Ibn
Taymiyya, particulièrement radical, a longtemps été oublié, avant qu'il ne
serve de référence théologique d'abord au courant wahhabite, en Arabie saoudite,
puis aux militants islamistes, afin de légitimer leurs actions violentes.Quitte d'ailleurs à déformer les écrits de ce salafiste, mort en prison à Damas au XIVe siècle. Il faut dire qu'Ibn Taymiyya avait été emprisonné en raison d'une de ses fatwas qui interdisait de se rendre à La Mecque sur la tombe du prophète... Il fallait, selon lui, visiter la mosquée à côté de la tombe, mais pas la tombe elle-même. Pour JMF Recherches et Analyses, qui édite le site web terrorisme.net, il est clair que les partisans de l'organisation État islamique tentent « de justifier cet assassinat de prêtre auprès d'un public musulman aussi large que possible, et de préparer ce public à d'autres actes du même genre qui pourraient suivre »**.
Daech
décrypté
Le site
terrorisme.net décrypte également le numéro de juillet 2016 de Dabiq, le magazine de Daech, intitulé
« Break the cross » (Briser la croix). Pour cette publication, il ne
s'agit pas seulement de combattre les chrétiens et les juifs, notamment en
frappant « derrière les lignes ennemies », il faut carrément les haïr !
Un article est ainsi intitulé : « Pourquoi nous vous haïssons et
pourquoi nous vous combattons ». La première raison de cette haine ne
tiendrait pas à la politique étrangère des pays occidentaux (qui sont
intervenus militairement en Afghanistan,
en Irak, en Libye), mais
au simple fait qu'en n'étant pas musulman, les chrétiens et les juifs brisent
l'unité d'Allah… crime impardonnable.Les djihadistes semblent faire bien peu de cas de la sourate du Coran sur les infidèles :
O infidèles,
Je n'adorerai point ce que vous adorez.
Vous n'adorerez pas ce que j'adore.
Je n'adore pas ce que vous adorez.
Vous n'adorez pas ce que j'adore.
Vous avez votre religion, et moi j'ai la mienne.
* Dictionnaire encyclopédique de l'islam, Cyril Glassé, Bordas, 1991.
** « Des sympathisants de l'organisation État islamique font circuler en ligne des textes pour justifier religieusement l'assassinat des prêtres », www.terrorisme.net.
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