INFO LE
POINT.FR Patrick Buisson publie un livre sur Nicolas Sarkozy
En pleine
campagne des primaires, celui qui fut le conseiller le plus influent de
l'ancien président publie le 29 septembre l'histoire de leur relation.
C'est un livre écrit
avec rage et orgueil. Avec l'orgueil blessé d'un homme qu'on ne répudie pas
impunément. Après plus de quatre ans de quasi-silence, Patrick Buisson
s'apprête à révéler publiquement ce qu'il pense de Nicolas Sarkozy,
dont il fut le plus influent des conseillers durant le précédent quinquennat,
lui distillant ses analyses de l'opinion et ses prophéties électorales avec
l'aplomb de celui qui sait mieux que quiconque « ce que veut le
peuple ».Par son récit et le portrait féroce qu'il dresse de l'ex-chef de l'État, le « diable » Buisson entend dévoiler celui avec lequel il a pactisé un jour de 2004 avant la rupture spectaculaire de 2014, à la suite de l'affaire des enregistrements clandestins. « Pat », comme le surnommait l'ancien président, avait « trahi ». Il n'avait pas seulement trahi son client, il avait aussi, et surtout, trahi Carla Bruni-Sarkozy, qui apparaît dans au moins un enregistrement. Le directeur de la chaîne Histoire a justifié ces agissements par la nécessité pour lui de travailler sur les orientations et les discours présidentiels à partir d'une archive fiable. Puisque banni, sans que Sarkozy l'entende sur ses motivations, Buisson s'est senti libre, à son tour, de raconter ses années à l'Élysée et de livrer sa définition du sarkozysme. La parution de cet ouvrage ne fut un secret pour personne, tant son auteur se plaisait à ne pas démentir les rumeurs. Nous y voilà.
Sous la plume buissonienne, Sarkozy
apparaît tel un homme sans convictions, inconstant, petit garçon, sans cesse
sous l'influence de ses femmes.
Le livre paraîtra
chez Perrin le 29 septembre, soit quelques jours avant le premier débat de la
primaire des Républicains. Un livre de 500 pages ! On les commentera. On les
décortiquera. Bref, on en parlera. Buisson l'a voulu ainsi, entendant donner à
son retour un éclat tonitruant.Rares sont ceux qui ont lu cet essai d'un genre étrange. L'un d'eux nous affirme qu'il ne contient rien d'explosif, rien ne relevant du scandale, en dépit de quelques révélations sur la nature et les méthodes de l'ancien président. Une partie est consacrée à leurs relations depuis leur rencontre, le reste n'étant que réflexion politique et analyse des variations du corps électoral.
Jeu
de massacre
Le lecteur se
délectera, en revanche, des verbatim, nombreux, de l'ex-chef de l'État. Sous la
plume buissonienne, Sarkozy, qui l'avait décoré de la Légion d'honneur,
apparaît tel un homme sans convictions, inconstant idéologiquement, petit
garçon, toujours dans « le selfie », entouré de courtisans, sans
cesse sous l'influence de ses femmes et craignant les réactions que susciterait
une mesure trop audacieuse – comprendre, trop droitière. Un jeu de massacre
contre celui que Buisson juge être, comme il le disait en 2015 à la revue Éléments, « un bon candidat,
mais un mauvais président ».De l'avis de nombreux sarkozystes, il manquerait un « Buisson », aujourd'hui, dans l'entourage du candidat à la primaire des Républicains. Un conseiller capable de fournir un souffle historique et une inscription dans le roman national. « Avec lui, Sarkozy n'aurait jamais comparé les migrants à une fuite d'eau », soupire l'un d'eux, louant la force des analyses de l'ancien journaliste de Minute et son maniement des mythologies politiques. Mais rien à faire : Sarkozy ne veut plus entendre parler de Buisson. Certains journalistes et politiques, proches des deux hommes, ont tenté en vain de les réconcilier. L'ancien locataire de l'Élysée se contente de répéter combien il fut trahi par un homme en qui il avait toute confiance, au point de le considérer comme un intime. L'ancien conseiller, lui, ne cesse de critiquer celui qui se montre incapable de définir sa propre identité politique, tout comme il est « incapable de penser le retour du religieux ». Après plainte du couple Sarkozy-Bruni, Buisson a été condamné à lui verser 10 000 euros de dommages et intérêts.
Un
à-valoir modique
Ce dernier, que l'on
dit prêt à en découdre, s'imaginait publier son livre chez son éditeur – depuis
1995 – Albin
Michel, auquel il avait soumis un synopsis. Or, en juin, une fronde
interne initiée par des salariés, les mêmes qui se plaignent régulièrement de
la publication des livres d'Éric
Zemmour et de Philippe de Villiers, l'a contraint à aller voir
ailleurs. Chez « Albin », certains, dont Jean Mouttapa, responsable
du département spiritualités, refusent de voir leur maison éditer, malgré ses
succès, ce trio « maléfique », qui a coutume de se retrouver
régulièrement à la brasserie parisienne La Rotonde afin de disséquer
l'actualité politique. Buisson s'est donc adressé à des éditeurs jugés par lui
courageux et discrets. Il s'est souvenu avoir rencontré un jour, dans les
années 1980, Bernard de Fallois, éditeur indépendant du jeune écrivain suisse
Joël Dicker, qui n'est pas du genre à céder aux pressions. C'est Jean Bourdier,
ancien rédacteur en chef à Minute
et compagnon de route de Jean-Marie Le Pen à la fondation du Front national,
qui lui avait présenté Bernard de Fallois.Ce dernier s'est tout de suite montré intéressé par le manuscrit, mais il ne pouvait garantir à l'auteur la puissance de frappe d'un grand groupe d'édition. Dès lors, le politologue s'est tourné vers Benoît Yvert, patron des éditions Perrin, avec lequel il entretient de bonnes relations – sans pour autant partager les mêmes opinions politiques. Perrin, au même titre que Plon, l'éditeur de Nicolas Sarkozy, appartient au groupe Éditis. Après lecture du manuscrit, Benoît Yvert a donné son accord à l'ex-conseiller de Nicolas Sarkozy, qui voulait garder secrète la publication du livre répertorié « x, y ». Buisson ne fera que de rares apparitions médiatiques – il a toutefois prévu un passage télé. Il entendra marteler sa « vérité » et jurer ne pas être animé par un sentiment de vengeance. Pour ce livre, il n'aurait d'ailleurs réclamé qu'un modique à-valoir. En l'occurrence, ce n'est pas une affaire d'argent...
Pour rappel :
Le
président et le conseiller
2004. Nicolas Sarkozy, ministre de l'Intérieur,
fait appel à Patrick Buisson après l'avoir vu sur LCI pronostiquer la victoire
du non au référendum sur le traité européen.2007. Durant la campagne présidentielle, Buisson souffle à Sarkozy l'idée d'un ministère de l'Identité nationale.
2007. Président, Sarkozy le décore de la Légion d'honneur. « C'est à Patrick que je dois d'avoir été élu », déclare-t-il.
2012. Sarkozy est battu en dépit des efforts de Buisson pour le faire réélire sur le thème de l'identité et des racines chrétiennes de la France.
2014. Le Point révèle que Buisson a enregistré clandestinement le président durant une partie du quinquennat. Il est condamné à verser 10 000 euros de dommages et intérêts au couple Sarkozy.
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