vendredi 16 janvier 2015

FAIRE CONFIANCE A NOS POLITICIENS C'EST UTOPIQUE CAR L'ORAGE PASSÉ, CHASSEZ LE NATUREL, IL REVIENDRA AU GALOP !


Unité nationale : laissons une chance aux politiques !


Mardi, l'Assemblée a fraternisé dans une scène inouïe. Les médias ne l'ont guère souligné. L'occasion était-elle trop belle pour reprendre espoir ?

Mardi après-midi, il n'aura échappé à personne que les députés ont chanté debout la Marseillaise. Que le groupe UMP a remercié et fait applaudir le gouvernement socialiste. Que le nom du ministre de l'Intérieur a été acclamé à l'unanimité.
Cela n'aura échappé à personne ? En est-on bien sûr ? Oui, évidemment, on a montré les images aux JT, on en a parlé le soir à la radio, mais le lendemain, ces radios, ces télés avaient déjà tourné la page. Elles n'y sont pas revenues, elles n'en ont pas, comme on dit dans le métier, fait un "sujet" relevé, martelé, débattu, comme l'élan des citoyens avait pu l'être deux jours auparavant. Or, le miracle était comparable.
Si les médias, hormis quelques voix isolées, dont Franz-Olivier Giesbert, n'en ont pas fait un sujet, c'est que l'on n'apprend pas à un vieux singe à faire des grimaces. On ne la leur fait pas aux médias. Sourires entendus. Regards en coin. Mais on sait que dans notre société médiatique, ce qui n'est pas ressassé, monté en épingle, n'a aucune chance de s'inscrire dans le disque dur des citoyens.

La patrie en danger

Pourtant, l'heure était historique. On n'avait pas vu ça depuis 1918 et la Première Guerre mondiale. Symboliquement, tout ce qui a eu lieu cet après-midi-là dans l'hémicycle était aussi fort, pour la classe politique, que les quatre millions de personnes dans les rues. Mais on a zappé, on est passé, on a décidé de passer à autre chose. Alors que tous les médias, et toute la société, dans le même temps, se demandent comment faire maintenant. Comment faire, oui, si pour une fois que nos politiques se montrent à la hauteur, on ne veut pas y croire ? Ou si plutôt, on fait semblant d'y croire, pour mieux éteindre le miracle, à petit feu, sans bruit ?
Mardi s'est déroulée une séquence exceptionnelle à laquelle il fallait réserver un sort exceptionnel. Une occasion en or. On l'a laissée filer. Une occasion d'être enfin fier d'une classe politique à laquelle, reconnaissons-le, plus grand monde ne croit. Faut-il dix-sept morts pour ne plus tourner le dos à des politiques dont on s'est rendu compte, depuis le 7 janvier, qu'ils savaient être aussi des hommes ? C'est une autre question qui renvoie à la nature profonde de notre pays à qui il faut aussi dix-sept morts et le couteau sous la gorge pour se rendre compte qu'il est en vie et qu'il est temps de réagir. Ce pays, c'est celui de Valmy, de la Marne, de l'appel du 18 Juin. En France, on ne se lève que si la patrie est en danger.

Un démenti aux démissionnaires

Il y avait - et il y a - dans cette séquence une lueur d'espérance. C'était un moment parfait, un moment de grâce. Vous en connaissez beaucoup, des moments de grâce dans l'Histoire politique de la France ? Ne tombons pas dans l'angélisme, la naïveté et le "tout le monde, il est beau, il est gentil". Ne permettons pas non plus à la classe politique de se refaire une virginité sur le dos des massacres. Elle a plus que sa part dans le malaise qu'ils révèlent.
Mais après le traumatisme négatif des attentats, relayé, amplifié, celui-là, par les médias, il y avait la possibilité d'un traumatisme positif qui ne demandait qu'à être lui aussi crié sur les toits. Pour que les citoyens se souviennent. Pour que les hommes politiques aussi se souviennent qu'ils en ont été capables. Si vous répétez à quelqu'un qu'il est médiocre, sectaire, rancunier, il y a des risques qu'il s'enfonce, voire se complaise, dans ces défauts. Si vous pointez le petit mieux, il est possible qu'il veuille recommencer. C'est le b.a.ba, on le sait, de toute éducation et de toute pédagogie, que le philosophe Pascal avait exprimé ainsi : "Faites les gestes de la foi et la foi peut-être viendra."
Une scène inouïe donc. Du jamais vu dans notre histoire médiatique. À tel point qu'on se demandait un peu bêtement : "Mais que leur arrive-t-il ? Ils sont devenus fous ? Ils sont allés à Lourdes ?" Avant de se rappeler, bien sûr, ce qui était arrivé. Pouvaient-ils faire autrement ? Sans doute que non. Mais cela va mieux en le faisant, et de cette manière. Plus tard, si l'expérience est sans lendemain, chacun pourra dire à ses enfants qu'il a vu, le 12 janvier 2015, des hommes politiques de bords opposés se tomber dans les bras. Un démenti à tous les démissionnaires, nombreux dans notre pays, qui pensent qu'il ne peut rien y avoir de nouveau sous le soleil, que tout se vaut, que rien ne peut être amendé. Bref, qu'il n'y a plus d'histoire, écrasée, arasée, par une actualité qui ne cesse de s'annuler.

À vous de jouer

Qu'ont-ils fait, les Américains, du 11 septembre ? Qu'avons-nous fait du 21 avril 2002 ? La réponse n'incite guère à l'optimisme. Cette fois encore, le mal est profond, très profond. Mais si les médias n'enclenchent pas eux aussi le cercle vertueux, qui le fera ? Il en va aussi de leur responsabilité. Faut-il que le discrédit des politiques soit si grand qu'on ne leur accorde pas une nouvelle chance ? Est-ce devenu impossible de leur faire confiance ? C'est parfois tellement plus simple. Si on ne le fait pas aujourd'hui, quand le fera-t-on ? Faut-il qu'ils soient tombés si bas qu'on ne puisse plus jamais les regarder non avec cynisme, mais avec le bénéfice du doute ?
Messieurs les politiques, à vous de jouer. Bonne renommée vaut mieux que ceinture dorée. À vous de nous convaincre que ce n'était pas du chiqué. L'Histoire, tragique, vous donne rendez-vous. Ne le loupez pas. Soyez à la hauteur, elle vous jugera. À l'heure où les professeurs, dans le secret de leurs classes, affrontent des explications plus que douloureuses avec des élèves qui sont loin d'afficher l'unanimisme des politiques, martelons celui-ci. Ce n'est pas la panacée. Mais c'est l'un des remèdes. Un des ciments possibles pour des lendemains qui déchantent un peu moins. 








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