Juifs
de France : chronique d’une haine ordinaire
Dans la rue,
les commerces, à l’école, à la fac… Ils sont victimes d’agressions et
d’insultes antisémites. Face à ce harcèlement quotidien, ils s’adaptent.
Témoignages.
D'une voix blanche, la présidente de l'Assemblée nationale raconte son
étrange découverte : en même temps que la notoriété sont arrivés les
premiers courriers antisémites, tous anonymes, évidemment. Des injures, des
croix gammées, des étoiles de David, des petits cercueils dessinés portant le
nom de ses enfants et, sur Internet, des avalanches de tweets,
innombrables et enragés. Yaël Braun-Pivet montre la dernière missive reçue à sa
permanence, rédigée d'une écriture compulsive et tremblotante. Des insultes,
vulgaires et violentes.
Un choc pour cette ancienne avocate qui a grandi dans un milieu juif très
libéral, une famille dans laquelle l'antisémitisme n'était plus qu'un sujet de
livre d'histoire. « Personne ne m'avait mise en garde. Je pensais que
la République laïque qui avait accueilli mes grands-parents avait fait son
œuvre. » À chaque courrier, elle repense à ses
grands-parents justement. « Cette résurgence leur aurait fait
terriblement mal. C'est triste à dire, mais je préfère qu'ils ne soient plus là
pour voir ça. » Elle a été tentée de faire comme si rien de
tout cela n'existait, comme si cela ne l'atteignait pas. « Ce serait
mentir, parce que cela m'affecte. » Parfois, elle publie sur
les réseaux sociaux des photos des lettres qu'elle reçoit, qu'importe si cela
fait jubiler leurs auteurs. « Je ne veux pas baisser la tête. Rien ne
sert de nier ce phénomène, il ne faut pas le minorer, il faut systématiquement
le dénoncer. » Attaquée parce que femme, parce que
puissante, parce que juive… « C'est le monde extérieur qui vous
assigne, qui vous réduit à une identité que vous n'avez pas choisie. C'est
assez étrange, car la religion n'est pas franchement un élément saillant de mon
existence. Si je devais me définir, je crois que le mot juif viendrait
peut-être en 30e ou en 40e position. »
Ces attaques épistolaires ne l'empêchent pas de dormir, mais l'idée qu'elles
puissent se traduire en actes alimente une « angoisse latente ».
Une angoisse accentuée par l'attaque terroriste d'Israël par le Hamas le week-end dernier. La
violente résurgence du conflit israélo-palestinien pourrait bien raviver
sur le sol français un antisémitisme persistant.
Discrétion. Cet antisémitisme arrive toujours avec la
notoriété. La boîte aux lettres de Rachel Khan, autre personnalité médiatique
exposée, déborde elle aussi de courriers malveillants. La vague a déferlé après
que le rappeur Médine a qualifié cette fille de déportée de « resKHANpée ».
« Comme la classe politique n'a pas unanimement condamné l'injure,
cela a ouvert la porte à un torrent d'antisémitisme, déplore Rachel Khan,
qui avait déjà été attaquée par Dieudonné. C'est comme lorsque Le Pen
disait “Durafour crématoire”. Il y a toujours un ricanement autour de la Shoah. »
Certaines composantes de la Nupes ou du NPA
sortent de l’arc du bon sens républicain et versent dans ce qu’on peut appeler
l’apologie du terrorisme. Honte à eux !Haïm Korsia, le 10 octobre au
« Point »
L'antisémitisme le plus violent
se manifeste à chaque épouvantable meurtre sur fond de haine des Juifs :
Ilan Halimi en 2006, l'attentat à l'école Ozar Hatorah de Toulouse en
2012 ou Sarah Halimi en 2017… Depuis le week-end dernier, les autorités
françaises sont sur le qui-vive. Un télégramme du ministère de l'Intérieur a
demandé aux préfets la plus grande vigilance autour des synagogues.
L'état-major policier a également demandé à ses commissariats de faire remonter
les signaux faibles. Ainsi, à Paris, deux hommes ont été interpellés :
l'un criait « Allahu akbar » devant une école-synagogue du
19e arrondissement, quand l'autre insultait, devant une
synagogue du 16e, des fidèles en les traitant de « sales
juifs ». Plus de 700 signalements pour des propos antisémites en
ligne ont été réalisés sur la plateforme Pharos. Et 10 personnes ont été
interpellées pour des faits antisémites. Il a été demandé aux policiers de
relever le moindre comportement suspect aux abords des lieux de culte. Des
voitures qui tournent ou restent garées devant les synagogues, des regards
insistants ou encore des hommes qui miment des tirs de pistolet face aux
fidèles…
Cette petite musique nauséabonde provoque chez bien des Juifs
l'angoisse « latente » décrite par Yaël Braun-Pivet et
incite souvent à la discrétion, à l'adaptation, quand ce n'est pas au repli sur
soi et sur les siens.
Les témoins que nous avons contactés ont pour la plupart requis l'anonymat.
Ils s'accordent sur ce constat : en 2023, on ne crie pas sa judéité sur
tous les toits. « Quand je porte ma kippa, je sens les regards
désagréables, alors elle reste dans ma poche pendant shabbat, surtout quand je
me balade avec mon fils », justifie David*, 49 ans,
habitant historique du 19e arrondissement de Paris, un quartier
populaire où vit une importante communauté juive. Parce qu'elle porte
l'uniforme d'une école juive, sa fille de 13 ans s'est déjà fait
insulter deux fois dans la rue cette année. « On ne se sent pas
toujours en sécurité, déroule David, qui ne tarit pas d'anecdotes.
L'une de mes amies a mis sa mezouza [objet de culte placé à l'entrée
des maisons, NDLR] devant sa porte, elle s'est fait cambrioler. C'est la
seule dans son immeuble. Et, à la sortie des synagogues, des types croient nous
provoquer en agitant des drapeaux algériens… »
Quid du délit d'apologie
Le code pénal ne définit pas l'apologie, punie de 5 ans de prison quand
il s'agit de terrorisme. La jurisprudence s'en est chargée, l'assimilant à « un
discours incitant à porter sur le crime un jugement favorable ». La
Cour de cassation a considéré que l'apologie est constituée quand une personne
manifeste « une égale considération » pour les victimes et
les auteurs de l'acte. Ainsi, Dieudonné fut condamné pour avoir déclaré « Je
me sens Charlie Coulibaly ».« La volonté de justification est
l'élément central » de l'infraction, décrypte Christophe Bigot dans
son Pratique du droit de la presse (Dalloz). N. B.
« Obsession identitaire ». Avant même les
récentes mesures de protection, les Juifs de France se sont résolus à exercer
leur culte escortés par des policiers. « Il y a quelque chose dans
l'air ambiant, ressent Simon*, un consultant de 31 ans.
On l'a intériorisé. Dans les manifestations, pour n'importe quelle cause, on
s'habitue à tomber sur des pancartes ou des discours antisémites. Comme lorsque
Finkielkraut avait été exfiltré d'une manifestation des Gilets jaunes en
2019 [où il avait été interpellé au cri de « sioniste »
et de « sale race », NDLR]. On a appris à se
désensibiliser. »
Pour faire passer leurs idées, les marchands de haine contournent la loi.
Ainsi, ils utilisent le terme de « dragons célestes », issu du manga One
Piece, pour désigner les Juifs. Sous couvert de critique de la
finance internationale, ils égrènent les noms de banquiers juifs dans des
textes de rap à succès, à l'image de Freeze Corleone. Les préjugés ont
toujours la vie dure : le Juif est forcément riche, avare, escroc. « On
entend les mêmes blagues douteuses : “Ah, les Juifs, vous aimez
l'oseille, vous êtes dans les magouilles” », soupire David.
Ce mépris, certains le ressentent dès la cour de l'école. Le fils d'Anna*,
âgé de 8 ans, joue dans un club de football à Paris. Un samedi, il ne
se présente pas à son match car il fête Yom Kippour. De retour à
l'entraînement le mercredi suivant, ses petits coéquipiers le questionnent sur
son absence. Il se justifie. « Ici, on n'aime pas les Juifs »,
lui lâche un enfant.
Dans une école publique du nord de Paris, Salomé*, 9 ans,
subit aussi les questions incessantes de ses camarades : « D'où
tu viens ? C'est quoi ta religion ? »« Je ne sais
pas », balaie-t-elle. Mais les enfants insistent. Pour la mère, non
pratiquante et laïque avant tout, même les petits sont dans une « obsession
identitaire ». « Ma fille a compris qu'il valait mieux ne
pas dire qu'elle était juive d'origine pour avoir la paix. »
L'antisémitisme sévit aussi sur les bancs de la fac. En questionnant
les étudiants juifs sur le sujet, l'Union des étudiants juifs de France (UEJF)
a constaté qu'il avait souvent pour déclencheur la question brûlante d'Israël. « Parce qu'on
est Juif, on doit rendre des comptes, faire le service après-vente du
gouvernement israélien et se désolidariser tout de suite, confirme Lila*,
26 ans. Alors qu'on n'a absolument pas à s'en justifier… »
« Solitude violente ». « Derrière cette
injonction à se justifier des actes d'Israël, il y a ce sous-entendu de la
double allégeance : un Juif n'est jamais complètement français, il est à
la solde de l'étranger », analyse Samuel Lejoyeux, président de
l'UEJF. Les locaux de son association ont été tagués en mai, à l'université
Paris-8, d'un : « Vive la Palestine. 39-45 le retour soyez
preparer (sic). »
Pour la plupart des Juifs que nous avons interrogés, les paroles et crimes
antisémites seraient trop pris à la légère. « En tant que juive
de gauche, je constate que les politiques ne s'indignent pas toujours s'il
s'agit d'actes antisémites », regrette Lila. « Ce qui choque
les Juifs, c'est la négation des actes antisémites, reprend Samuel
Lejoyeux. On se retrouve parfois seuls. Cette solitude est violente, on a
l'impression de faire un caprice de privilégié. »
Le président de l'UEJF cite le meurtre de Mireille Knoll, dont le caractère
antisémite a été contesté, ou encore cette phrase, répétée dans les médias
après la mort de Samuel Paty, en 2020 : « C'est la première fois
que ça touche une école. » Oubliant, au passage, l'attentat
perpétré par Mohammed Merah dans l'école juive Ozar Hatorah, à Toulouse,
en 2012. Comme d'autres organisations juives, la boîte aux lettres virtuelle de
l'UEJF déborde d'injures et de menaces. Le dernier e-mail hostile date
d'il y a seulement quelques semaines. Un anonyme y dénonce la « vermine
juive » et « l'holofraude ». « On n'y
prête presque pas attention », souffle, désabusé, Samuel
Lejoyeux.
Fatalisme. Même au supermarché, sur la route ou en
vacances, de nombreux Juifs ne sont pas à l'abri. Beaucoup d'entre
eux s'adaptent, marchent sur des œufs et rasent les murs. « Quand
on me demande ce que je fais dans la vie, si je ne le sens pas, je dis :
documentaliste », confie Noémie*, qui travaille dans une
association juive. « Il y a un côté “pas de vagues” »,
remarque Valérie Maupas, responsable de l'American Jewish Committee (AJC) en
France.
Concrètement, c'est ce rabbin qui vit en HLM tout près de Paris et s'efforce
de raccompagner systématiquement ses enfants à la maison ; ce sont ces
pères de famille qui ont adopté la casquette à la place de la kippa ; ce
sont ces femmes qui ne portent plus leur magen David (étoile de David)
autour du cou dans l'autobus. « Si je pars en vacances en Israël, je
préfère dire que je vais dans le Sud », admet une étudiante. Le
vendredi soir, quand les fêtards sont de sortie, les juifs fêtent shabbat. Ils
trouvent souvent une autre raison que la religion pour justifier leur absence.
« J'ai vécu à New York et c'est bien plus simple d'y dire qu'on est
Juif », estime Sarah*, 30 ans. Simon, dont la femme
est américaine, se trouve toujours « mal à l'aise »
lorsqu'elle parle d'Israël dans un taxi ou lâche des mots en hébreu dans
le métro. « Par précaution, je n'évoque jamais ces sujets dans des
taxis, dit-il. J'ai déjà eu affaire à des chauffeurs Uber qui me
disaient ne pas utiliser Waze parce que “c'est fait par des
Israéliens”… »
Depuis plusieurs années se produit une
« migration intérieure » de la Seine-Saint-Denis vers le 19e arrondissement
de Paris, et désormais du 19e au 17e arrondissement,
où se trouve la plus grande communauté juive d'Europe selon l'AJC !?
Puisqu’on on se dit dans un
pays libre démocratique avec notre laïcité à la française et notre bien-pensante
hypocrite donneuse de leçons et moraliste que personne n’écoute plus même dans
le monde entier devenu instable qui coure à sa perte bien que trainant un passé
pas si ancien de 80 ans dont ils n’ont pas été capables de tirer les leçons de leurs guerres européennes devenues mondiales et maintenant avec des horreurs qui se répète car représentant le
temps de la vie moyenne de tous les humains hommes femmes et leurs enfants !?
Justement puisque cela
touche de plus en plus des lieux d’enseignements écoles lycées collèges
universités pour nos jeunes (et aussi quelque fois des adultes qui l’ont quitté
trop tôt et en aurait bien besoin) Il faut impérativement enseigner notre
histoire de France et celle du monde ou nous vivons en protégeant efficacement
ses établissements avec rigueur et en interdisant l’accès à tous ceux hors
enseignants d’y pénétrer ou de ne pas y être hormis les personnels de services
attachés au services de fonctionnements ou entretiens divers à leur marche y
compris la sécurité donc sanctuarisés ceux -ci !?
Parallèlement cet enseignement
doit être totalement neutre en matière politique car souvent mauvaise mal enseignée
ou mal interprétée par des dirigeants et politiciens médiocres qui croient
savoir tout élus par nous citoyens et qui ne se réfère pas à nos histoires
ancestrales qui nous apprennent aussi nos erreurs à ne pas recommettre pour éviter
de verser dans des extrémismes religieux barbares remontant à l’âge des ténèbres !?
Pour l’instant dans cette Veme
république devenue monarchique obsolète usée on n’a pas été capable d’en
trouver (mais il y en a) mais il faut savoir les choisir et arrêter de
pratiquer le chacun pour soi sans quoi ce sera pire et en n’on n’est pas loin ?!
On vient de franchir un
échelon de plus dans notre incapacité à nous protéger ainsi que par nos
dirigeants et politiciens élus c’est cela la réalité de tous bords !
Jdeclef 14/102023 11h07
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C'est surtout la censure débile qui est abusive et incurable du POINT par ses modérateurs et leur rédaction inféodée au pouvoir en place dans notre pays dit libre ou certains médias ne respectent pas la liberté d'expression inscrite dans notre constitution !?
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