Société
RELIGION
La principale Eglise protestante de France a voté en
faveur de la bénédiction des couples homosexuels...
Pourquoi les protestants sont-ils plus gay friendly que les catholiques?
Un vote quasi historique et quasi unanime. Dimanche, les délégués de l'Eglise protestante unie de France (EPUdF) ont décidé d’accorder la bénédiction aux couples homosexuels. Autrement dit, ses pasteurs pourront désormais bénir les couples homosexuels mariés civilement. Hasard du calendrier, cette décision est tombée le 17 mai, Journée internationale de lutte contre l’homophobie.«C’est une très bonne nouvelle et une avancée pour les protestants, mais aussi pour les religions et pour la société dans son ensemble», réagit Elisabeth Saint-Guily, co-présidente du mouvement homosexuel chrétien David et Jonathan. Elle parle même de «décision prophétique», ajoutant: «Il y a dix ans, cette communauté était encore majoritairement hostile aux couples homosexuels. Les choses ont donc bougé».
La décision n’est pourtant pas surprenante: «L’EPUdF est, comme les autres églises réformées et contrairement à l’Eglise catholique, très démocratique. Or, ces dernières années, de plus en plus de pasteurs sont devenus favorables à la reconnaissance des unions homosexuelles. D’ailleurs, certains pratiquaient déjà des bénédictions plus ou moins sauvages», explique Odon Vallet, historien des religions.
Les protestants ont toujours été très proches de la République et de ses lois
Sans compter que les bénédictions sont déjà courantes aux Etats-Unis, au Canada et dans plusieurs pays d’Europe du Nord, comme en Suède, où une femme pasteur est même mariée avec une femme… «L’acceptation de l’union homosexuelle s’étend dans le monde», analyse Odon Vallet. En tout cas chez les protestants. Mais pourquoi? «Parce qu’ils ont une lecture plus symbolique de la Bible», répond Odon Vallet. «Ce n’est toutefois pas le cas des évangéliques qui ont une lecture des textes encore plus littérale que les catholiques».Autre explication, plus historique: les protestants français ont toujours été très proches de la République et de ses lois. «Quand celle-ci reconnaît l’union homosexuelle, d’abord avec le Pacs puis avec le mariage pour tous, les protestants s’interrogent. Plus généralement, il est tout de même difficile pour des églises d’ignorer l’évolution de la société», estime Odon Vallet.
D’ailleurs, si la reconnaissance du mariage homosexuel n’est pas d’actualité chez les catholiques, «tous ne sont pas opposés au mariage pour tous. J’estime qu’environ 40% des catholiques français y sont favorables. Certains évêques le sont aussi, et des prêtres pratiquent même des bénédictions sauvages», assure Odon Vallet.
Pour Elisabeth Saint-Guily, la décision de l’EPUdF est en tout cas «hautement symbolique» et «dépasse largement la question du couple». «Elle va aider certains homosexuels à s’accepter et à s’affirmer. C’est un signe fort d’inclusion». Qui pourrait pousser des fidèles à changer de confession? «L’EPUdF n’a pas pris cette décision pour racoler des catholiques. S’ils sont confrontés à ce type de demande, ses responsables veilleront à ce que la bénédiction ne soit pas l’unique motivation du changement d’église», affirme Odon Vallet.
Le mariage n’est pas un sacrement pour les protestants
Mais Elisabeth Saint-Guily s’attend effectivement à ce que davantage de couples homosexuels se tournent vers l’église protestante. «Ce phénomène existe déjà et il ne s’agit pas d’une conversion: nous avons le même baptême, nous sommes tous chrétiens».Si elle est historique, la décision de l’EPUdF doit toutefois être relativisée. D’abord parce qu’elle ne s’imposera pas aux pasteurs, qui seront libres de décider s’ils souhaitent ou non bénir les unions homosexuelles. Et tous n’y sont pas favorables, loin de là. Ensuite, parce que le mariage n’est pas un sacrement pour les protestants. La reconnaissance de cette union est donc nettement moins symbolique que pour l’Eglise catholique.
Qui s’interroge quant à elle sur la manière dont elle pourrait accueillir les personnes homosexuelles au sein de ses paroisses. C’est en tout cas l’un des thèmes du synode sur la famille, lancé en octobre par le pape François. «Nous n’en sommes certes pas à la question du mariage homosexuel, nous avançons lentement… Mais nous avançons», estime Elisabeth Saint-Guily.
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