Le berger
chassé par les écologistes
François
Cerbonney, reconnu comme un des meilleurs éleveurs en pré-salé de la baie du
Mont-Saint-Michel, est condamné à démonter sa bergerie. Récit.
Clac ! Criiiic ! Le vieux fourgon
cabossé de François Cerbonney fend le silence religieux qui enveloppe
Saint-Léonard. Comme tous les jours, le frêle berger de 44 ans réveille le
hameau qui borde la baie du Mont-Saint-Michel. Il se gare devant la bergerie,
laisse le moteur allumé et traverse l'allée centrale recouverte de paille. Les
350 brebis bêlent à tue-tête. Il saisit une corde, la noue à un bastaing, y
passe son cou et se pend. Son épouse, arrivée quelques minutes plus tard, lui
sauve la vie in extremis.
Ce 31 mars
2015, on ne verra pas François Cerbonney mener son troupeau dans la grand-rue,
bâton à la main, jusque dans le pré qui fait face à l'îlot rocheux. Dans le
village, le ballet strident des pompiers et gendarmes annonce le pire. Un peu
plus tôt dans la journée, l'éleveur a reçu un courrier recommandé.
L'association écologiste Manche Nature le somme, une nouvelle fois, de détruire
sa bergerie. Les militants l'accusent d'avoir implanté illégalement un bâtiment
de « dimension industrielle » à trop faible distance du rivage, sur un
site classé « espace remarquable ». Six ans plus tard, cette bataille entre un
éleveur et des écologistes n'est toujours pas finie…
Le soutien
des grands chefs. L'étendue sauvage qui fait face au Mont-Saint-Michel est un bijou
de biodiversité que la marée couvre et découvre quatre fois par jour. Moutons
et agneaux y broutent un herbu composé principalement de plantes halophiles qui
confèrent à leur chair un goût iodé unique que les plus grands cuisiniers
français se disputent. D'autant que ces ovins sont de fins gourmets. Ils
n'arrachent pas la végétation mais la rasent pour que les sédiments rapportés
par la marée ne s'y accrochent pas trop. « Les moutons
luttent contre l'ensablement de la baie et entretiennent le caractère insulaire
du Mont », explique
François Cerbonney en connaisseur de ce paysage inscrit au patrimoine mondial
de l'Unesco depuis 1979. Pour pérenniser son activité pastorale d'élevage en
pré-salé qu'il a commencé voilà vingt ans, il édifie en 2009 une bergerie dans
l'illégalité. La bâtisse de 980 m2, aux murs tantôt de bois, tantôt
de paille, contrevient au plan d'occupation des sols et à la loi Littoral. Les
élus locaux de l'époque, dont le maire de Genêts, la commune voisine, voient
une manne touristique inégalable chez ce jeune berger qui vient d'obtenir la
toute nouvelle appellation d'origine protégée (AOP) « prés-salés du
Mont-Saint-Michel ». On lui promet de régulariser sa situation au plus vite et
l'édile lui délivre postérieurement un permis de construire. Le gaucho normand,
attentif au bien-être de son troupeau, se justifie : « J'ai besoin de
ce bâtiment pour que les agneaux aient un temps minimum et nécessaire auprès
des brebis pour se sociabiliser. On ne peut pas les lâcher comme ça en liberté
dans les prés-salés. »
La petite
bergerie n'a rien d'une ferme des mille vaches. Cachée entre deux talus, elle
se fond dans le bocage et reste difficilement visible depuis le sentier des
Douaniers, le GR 223 qui longe la baie. « C'est une
construction légère et démontable, en bois de sapin non traité », précise Christiane Horel, amie
de Cerbonney et fondatrice du collectif de soutien BAD (Bergerie à défendre).
L'association Manche Nature, elle, ne l'entend pas de cette oreille. Elle
accuse le berger d'ouvrir une boîte de Pandore. « Quelle que
soit la construction, cela reste de l'artificialisation d'un milieu naturel
classé remarquable et qui bénéficie dès lors de la plus forte protection […]. Si la
construction de M. Cerbonney devient légale, plus aucun argument ne pourra
empêcher des promoteurs immobiliers de faire des habitations de loisir face à
la baie du Mont-Saint-Michel », expliquent Alain Millien et Delphine
Chevret, le trésorier et la juriste de l'association écologiste.
Depuis 2011,
Manche Nature mène un combat acharné contre la bergerie. Et gagne ses batailles
: le tribunal administratif de Caen, la cour d'appel de Nantes puis le Conseil
d'État en 2015 réclament le démantèlement du bâtiment de bois. Mais Cerbonney
résiste, soutenu par les locaux, les élus normands de tous bords politiques,
mais aussi de grands noms de la cuisine française, dont les célèbres Alain
Passard et Olivier Roellinger.
« En dehors
des clous ». François Cerbonney n'est pas un éleveur comme les autres. On le
dit « libertarien », « paysan bourgeois bohème ». Celui qui vous reçoit clope au
bec et tee-shirt troué expérimente des choses avec les produits de son pays,
étonne avec son « bœuf des prés-salés ». Du jamais-vu, ici. Nous aurons
droit au « rhum arrangé au homard bleu normand ». « Je ne veux
pas être un agriculteur classique. Je m'interroge sur ce que je vends, sur
comment je vais le vendre. Ça me met en dehors des clous. » Avant d'être berger, il a été
guide et cuisinier, et passe en 2017 un BEP boucher. « J'élève, je
découpe et vends ma viande. Je veux maîtriser mon produit du début à la fin », explique celui qui fournit
exclusivement les tables prestigieuses et quelques bouchers du coin triés sur
le volet. Olivier Roellinger, aujourd'hui retiré des fourneaux, ne s'est jamais
fourni en agneau de prés-salés ailleurs que « chez François
». Il ne
tarit pas d'éloges sur un homme « qui a le rythme du temps
». « Il est en
parfaite harmonie avec l'écosystème de la baie du Mont-Saint-Michel. Des
bergers comme lui, ça n'existe quasiment plus. »
- Hors
norme. La
bergerie de François Cerbonney se fond dans le bocage. Bâtie illégalement
en 2009, elle a bénéficié a posteriori d’un permis de construire.
L’association Manche Nature craint que ce précédent n’attire
les promoteurs.
En 2010,
l'éleveur-boucher décide pourtant de quitter l'AOP, pas assez contraignante,
dit-il. « Je suis le seul à faire plus que l'AOP », s'enorgueillit, un brin
provocateur, Cerbonney. Lui veut faire paître ses ovins sur les prés-salés bien
plus longtemps que les soixante-dix jours minimum exigés par l'AOP. Lui
n'engraisse pas ses agneaux à l'aliment concentré plus d'une vingtaine de jours
en bergerie, là où les éleveurs de l'appellation, dont les cheptels peuvent
dépasser les mille têtes, sont autorisés à le faire pendant plus d'un mois.
Alors,
forcément, Cerbonney agace. L'AOP le trouve un peu trop fantaisiste à son goût
et refuse de le défendre. Son président, Yannick Frain, ne l'estime guère : « C'est un
grand menteur, il n'est pas issu du monde paysan. Quand on veut rentrer dans
quelque chose d'aussi prestigieux, il faut être clean. » Coupant court à la conversation,
l'homme nous menace : « Je ne veux pas que l'AOP soit citée dans cette
histoire, sinon je vous retrouve et je vous mets mon poing dans la gueule. »«
Il y a beaucoup de jalousies. Il a su convaincre les grands chefs de travailler
avec lui, ce que beaucoup de l'AOP n'ont pas su faire », observe l'ancien sénateur
normand Jean Bizet, lui aussi soutien de la première heure de François
Cerbonney.
Au
commissariat. À Avranches, la grande ville voisine, le berger est connu comme le
loup blanc. On le voit venir pieds nus dans les troquets du centre. On se
souvient d'un enfant intelligent, sympathique, drôle mais turbulent. Fils d'une
famille de notables, un père et un frère chirurgiens-dentistes, François
profite de l'aisance familiale, montre ses fesses aux voisines, fait la fête -
beaucoup - et se retrouve parfois au commissariat. « Il n'est pas
marginal, juste atypique. Il s'est raccroché aux branches. François est un
produit emblématique de la baie », retrace Jean Bizet, qui a aujourd'hui
rejoint un cabinet de conseil américain. L'élu normand EELV François Dufour,
compagnon de route de José Bové et cofondateur d'Attac, renchérit : « À une époque
où les bergeries s'éloignent du rivage et disparaissent, M. Cerbonney a montré
au fil du temps, même s'il était dans l'illégalité, la nécessité de son
activité pastorale pour la biodiversité de la baie. » Lobbyistes, élus de droite ou
écolos… Le berger ne laisse personne indifférent.
Quand il tente
de se suicider en 2015, Bizet se rend à son chevet dès le lendemain. « Occupe
l'infirmière, je dois m'échapper ! » lui intime Cerbonney, les yeux
encore gonflés de sang et le verbe lent tant la corde a abîmé son cou et fait
gonfler sa langue. Le berger voulait retourner à ses bêtes mais devra rester un
mois en hôpital psychiatrique. Bizet appelle les sachems de Manche Nature. « Ça suffit !
Il faut arrêter, maintenant, la vie d'un homme est en jeu. »
Astreinte. Mais l'association ne veut rien
savoir. Face à l'opiniâtreté du pastoureau qui refuse de démonter sa bergerie
malgré une énième décision de justice en 2017, Manche Nature saisit en 2020 le
juge de l'exécution pour condamner Cerbonney à une astreinte provisoire de 150
euros par jour de retard à la démolition ordonnée par la justice, et ce pour
une période de quatre mois, soit 18 000 euros au total à payer à Manche Nature.
Un tiers du budget annuel de l'association.
Dans sa
petite maison à la vue incomparable sur le Mont-Saint-Michel, factures et courriers
de soutien s'amoncellent sur la table parmi les boîtes de Prégabaline, un
puissant anxiolytique. François Cerbonney fume cigarette sur cigarette et
chevrote : « Ça fait des années que je bouffe du fric et de
l'énergie dans cette histoire. Ils veulent ma mort, je ne sais pas pourquoi
mais je ne me coucherai jamais devant eux. Si je dois détruire ma bergerie, ce
sera avec une allumette et moi dedans. »
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Si
l'écologie, c'est le sectarisme borné ou l'extrémisme totalitaire, il faut s'en
débarrasser très vite avant de voir nos libertés laminées par ses politiciens
EELV les verts entre autres qui ne veulent qu'un pouvoir arbitraire !
On
a vu avec ce scandale de l’ex aéroport de Notre dame des Landes et ce qu’est
devenue cette région infestée de « sadistes » fauteur de trouble qui
ont par ailleurs développé une délinquance rampante à Nantes ou il faisant bon
vivre avant et ce qui n’est plus le cas subissant de plus en plus des
manifestations diverses voire dangereuses qui se terminent en heurts et
dégradations diverses !
Notre
état et gouvernements et dirigeants bien-pensants donneurs de leçons laissent
tout aller à vau l’eau dans notre pays pas seulement dans des zones de non droits
connues déjà nombreuses qui perdurent, mais aussi dans toutes les provinces
françaises !?
Alors
les citoyens lambda demandent que l’on lutte contre l’insécurité grandissante voire
l’anarchie rampante mais rien ne se passe car nos élus sont bien trop occupés à
conserver leurs postes lucratifs avec leurs avantages !?
Il
faudrait (enfin) que les français apprennent à voter en étant moins versatiles
sans privilégier le chacun pour soi qui ne profite qu’a cette classe politique
de tous bords de nos élus médiocres qui ne pensent qu’à eux !
Mais
faire réfléchir les français, c’est mission impossible comme changer de V eme
république usée et obsolète !?
Jdeclef
26/06/2021 12h13LP
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