David
Cormand : « Mélenchon est à la fois le meilleur atout et le boulet de
LFI »
ENTRETIEN.
Violences faites aux femmes, hégémonie sur la Nupes… Le député européen et
ancien patron d’EELV étrille le leader de La France insoumise.
EELV ECOLOS
POLITIQUES N’ONT PAS BESOIN DE MELENCHON OU AUTRES POLITICIENS POUR ETRE NULS !
Quel avenir pour les écologistes ?
Si les effets du réchauffement climatique se font plus concrets, EELV n'a pas réussi
à traduire cette prise de conscience dans les urnes – 4,6 % à la
présidentielle ; 23 députés. L'ancien patron du parti, David
Cormand, publie Ce que nous sommes. Repères écologistes (Les petits
matins, 240 p., 18 euros), un livre dans lequel il ausculte
l'appareil, ses forces et ses faiblesses et pose la question du cap. Les Verts,
assure le député européen, doivent opérer de profondes transformations pour
passer d'une culture minoritaire à la conquête assumée du pouvoir.
C'est le sens d'un référendum soumis aux adhérents d'EELV cette semaine,
dont le résultat sera connu ce samedi 24 septembre, qui propose de
réformer les statuts et provoque l'ire d'une frange du parti qui met en
garde contre des changements précipités. La mue n'est pourtant plus une option,
assure David Cormand. Les écologistes doivent trouver leur place dans ce
paysage politique en pleine recomposition, et cela ne passe pas forcément par
la Nupes. À court terme, il va aussi falloir gérer la crise énergétique et
l'inflation, sans compter les affaires de violences faites aux femmes qui
éclaboussent la gauche. Entretien.
Affaire
Quatennens : le silence gêné des élus LFI
Le Point : Les affaires de violences conjugales s'enchaînent à
gauche, que ce soit le
cas Adrien Quatennens à LFI ou les
accusations contre Julien Bayou chez EELV. Ces problèmes doivent-ils être
réglés sur la place publique ?
David Cormand : Ces deux situations n'ont rien à voir.
Mais pour répondre à votre question, les affaires qui relèvent bien de
violences sexistes et sexuelles doivent être révélées, car c'est d'intérêt
public. Derrière ces questions dont on parle, il y a, au-delà des cas
particuliers, un phénomène systémique qu'il faut regarder en face. Nous sommes
dans un modèle de société où il y a objectivement une domination masculine dans
les relations et donc dans les rapports de force. Et mettre à jour cet état de
fait a quelque chose de révolutionnaire, avec tout ce que ça implique. C'est
quelque chose qui est nécessaire, même si c'est douloureux pour tout le monde
et que personne ne sait trop comment réagir.
Mettre
Julien Bayou en retrait de la coprésidence du groupe écologiste à
l'Assemblée alors que l'enquête interne est toujours en cours, c'était la bonne
solution ?
Je n'en ai pas parlé avec lui, mais je pense que oui, hélas. Je dis « hélas »
car il n'y a pas de procédure idéale, parce qu'on aborde des sujets qui ne
l'étaient jamais jusqu'à maintenant. On n'est pas dans le traitement
judiciaire, avec ce que ça impliquerait de règles et de respect de critères
d'État de droit ; on n'est pas non plus dans l'intime, car cela a des
impacts publics. C'est une espèce d'entre-deux qu'aujourd'hui on ne
sait pas bien définir. C'est ça qui crée le sentiment d'inconfort. Mais il me
semble que c'est préférable au silence.
Certains membres de votre parti estiment que Sandrine Rousseau –
interrogée sur l'affaire dans C à vous, une
émission de France 5 – n'aurait pas dû révéler le témoignage de
l'ex-compagne de Julien
Bayou alors que l'enquête interne est en cours…
Je suis d'accord avec eux. Mais le sujet, ce n'est pas Sandrine Rousseau. Ce
qui se joue politiquement, c'est qu'il y a un certain nombre de mouvements
d'émancipation, de luttes, qui bousculent structurellement l'organisation de
notre société et qui doivent trouver un débouché politique. Il y a une question
MeToo, qui a changé les choses, puisque, jusqu'à maintenant, le sujet
était de faire en sorte que « les femmes parlent ». Sauf qu'en
vérité, elles ont toujours parlé.
Désormais, Le sujet est qu'il faut que les hommes écoutent. C'est ça qui
rend les choses inconfortables pour les hommes et qui nous bouscule : on
est mis en demeure d'agir. Mais il y a d'autres mouvements d'émancipation :
par rapport aux discriminations raciales, à la « génération climat »,
au respect de la biodiversité, de la condition animale… Et puis il y a eu la
question à la fois écologique et sociale des Gilets jaunes. Tous ces mouvements
ont un point commun : ils tendent à imposer dans le débat public des
sujets qui, jusqu'alors, y étaient peu présents et qui y sont tournés en
dérision. Or, toutes ces questions sont fondamentalement politiques.
La
droite face au cas Darmanin
Lors d'une conférence de presse de LFI initialement
consacrée à la rentrée parlementaire, ce sont pourtant, une fois de plus, les
femmes qui se sont retrouvées à être interrogées sur les travers des hommes de
leur camp… Même à gauche, on a du mal à progresser sur le sujet ?
Vous avez raison, encore une fois, c'est aux femmes de devoir gérer les
manquements des hommes, que ce soit Quatennens qui a reconnu les violences et
même – politiquement plus choquant – la réaction de Jean-Luc Mélenchon. On
semblait les mettre en cause, elles, alors qu'elles se retrouvent à gérer ce
que les garçons auraient dû régler depuis la nuit des temps.
Mais ce n'est pas une question de gauche ou de droite. Au moins, à gauche,
les choses bougent. Au gouvernement, vous avez un ministre qui a admis avoir
obtenu des relations sexuelles en échange de promesses de services. Et il a été
promu ministre de l'Intérieur. Il y a eu les tergiversations autour de Damien
Abad. Certes il y a des maladresses de notre côté, mais au moins les choses
sont dites.
Quand vous vivez en France, vous êtes
quasiment obligé d’avoir un mode de consommation destructeur pour la planète.
Le dérèglement du climat devient de plus en plus concret, les
épisodes météorologiques extrêmes se multiplient et s'intensifient… A-t-on
enfin compris cet été les alertes que vous émettez depuis cinquante ans ?
Il y a aujourd'hui un large consensus sur le changement climatique et sur le
fait qu'il est lié à l'activité humaine. C'est un peu ce que dit Emmanuel
Macron quand il pointe la « fin de l'abondance ». Maintenant, on a
l'impression qu'aucune conséquence sérieuse n'est tirée de ce constat. Que,
malgré la violence des symptômes, malgré la contrainte de la prise de
conscience, il y a un déni complet de l'intensité des décisions à prendre.
Climat :
après un été en enfer, ce que prévoient les scientifiques
Le gouvernement est dans le déni ?
Les forces au pouvoir font reposer la solution sur l'initiative
individuelle. C'est complètement apolitique de raisonner comme ça. Aujourd'hui,
quand vous vivez en France, vous êtes quasiment obligé d'avoir un mode de
consommation destructeur pour la planète, parce que les infrastructures en
place, le mode de vie encouragé, l'organisation de la production et de la
consommation sont complètement incompatibles avec le maintien du caractère
hospitalier de la Terre.
Le clivage politique, c'est de savoir si l'on continue comme avant en misant
uniquement sur la technologie pour s'en sortir ou si l'on change de modèle. Un
exemple parlant des choix faits jusqu'à maintenant : cinquante ans après
le choc pétrolier, la solution que propose la France en Europe, c'est le gaz et
le nucléaire. Comme si, en un demi-siècle, on n'avait rien compris de ce qu'il
fallait faire évoluer.
Sans le nucléaire et la crise énergétique qui nous guette, ne
serions-nous pas dans une impasse aujourd'hui ?
Je ne crois pas. La France est l'étalon d'or de ce qu'est un pays
surnucléarisé. Aucun autre pays au monde n'en dépend autant pour sa production
d'électricité et n'y a autant investi. Résultat, aujourd'hui, on est obligé
d'importer de l'électricité. Le parc a été construit avec des réacteurs conçus
pour durer quarante ans. On a beaucoup de mal à les prolonger à cause de
problèmes de corrosion, mais on va peut-être devoir le faire quand même…
Et ensuite ? Les EPR sont une catastrophe industrielle, on n'a jamais
réussi à en terminer un. Iter, la fusion nucléaire, ça ne marche pas non plus.
Quand le choix du nucléaire a été fait dans les années 1970, nous, écologistes,
prônions la sobriété et le renouvelable. Or, aujourd'hui, c'est le couple qui
fonctionne le mieux pour la protection de l'environnement et en matière sociale
car on gagne du pouvoir de vivre en baissant la consommation. En plus, le prix
du renouvelable est inférieur au prix du nucléaire, et les énergies
renouvelables ont encore des marges de progression. Le nucléaire, quant à lui,
est dans l'impasse.
Électricité,
la grande arnaque
L'ensemble de la classe politique semble s'être converti à
l'écologie. À quoi peut donc encore servir EELV ?
L'écologie politique en tant que telle a une singularité. Notre
appréhension du monde ne se fait pas uniquement à travers l'humain, mais à
travers l'ensemble du vivant, dont nous ne pouvons pas être découplés.
Aujourd'hui, s'il y a une prise de conscience écologique, elle ne remet pas en
cause un certain nombre de dogmes comme celui de la croissance. Admettre qu'il
y a une question écologique, c'était une première étape. Maintenant, le débat,
c'est de savoir comment on « fait de l'écologie ». Quand Bruno Retailleau
dit être « l'écologie de droite », il défend une certaine forme
d'écologie, comme l'extrême droite défend la sienne, et nous une autre.
Mais quelle différence y a-t-il entre l'écologie EELV et l'écologie
LFI ?
Nous ne faisons pas d'écologie dans un seul pays. Historiquement, les Verts
pensent cette question à l'échelle de la planète, ce qui est logique puisque
les impacts de nos modes de vie sont planétaires. Avec LFI, il y a évidemment
une divergence sur la question européenne. Il y a aussi une différence sur
l'organisation de la République, avec, pour nous, un État plutôt fédéraliste,
régionaliste. Même sur l'écologie, nous avons nos différences. L'invasion de
l'Ukraine par la Russie est un révélateur intéressant sur les options de
Jean-Luc Mélenchon. Il ne veut pas que Total quitte la Russie, ni des
sanctions, car si l'on arrête d'importer du gaz, les pauvres vont avoir froid
cet hiver. On a le droit de penser cela, mais ça veut dire qu'on n'est pas
déterminé à faire une bascule en la matière.
Pendant la présidentielle, le sous-titre de
notre discours c’était : « On n’est pas prêts à gouverner. »
Lors de la présidentielle, beaucoup d'électeurs potentiels de Jadot lui
ont pourtant préféré Mélenchon…
Pendant cette campagne, nous avons échoué à convaincre non seulement la
totalité du peuple de l'écologie, mais surtout à aller au-delà. Pour un certain
nombre de Françaises et de Français, le vote utile, y compris pour essayer de
faire gagner à ce moment-là une proposition politique qui était
écolocompatible, c'était plutôt de voter Jean-Luc Mélenchon. Pour autant, cet
échec n'invalide pas la spécificité du projet écologiste que nous incarnons.
Présidentielle
2022 : l'occasion manquée de Yannick Jadot
Dans votre livre, vous écrivez : « Nous ne devons pas […]
nous excuser de ce que nous sommes », et appelez à assumer la radicalité
du changement de société que vous portez. Au fond, à la présidentielle, il vous
aurait plutôt fallu une Sandrine Rousseau qu'un Yannick Jadot ?
Nous avons donné à voir deux visages pendant la campagne. Une sorte de duo
qui n'était pas vraiment harmonieux ni très organisé, mais qui, de fait, s'est
imposé dans le débat pour l'écologie. Selon moi, ce sont deux façons d'incarner
une écologie minoritaire, qui ne se voit pas comme majoritaire. Yannick donnait
l'impression d'essayer de rassurer les gens sur l'écologie. Je comprends ce
qu'il a voulu faire, mais ça donne l'image que nous ne sommes pas sûrs de nous.
Quand on est sûr d'être écolo, on ne s'excuse pas de l'être. On assume.
Sandrine, elle, revendique de poser des mots dans le débat public, comme si
l'objet social de l'écologie, c'était uniquement d'imposer des débats. Ces deux
formes de récit ont leur intérêt, mais là, le sous-titre c'était :
« On n'est pas prêts à gouverner. »
Finalement, il y aurait surtout un problème structurel des
écologistes, avec un parti construit pour être minoritaire plutôt que pour
exercer le pouvoir…
Les Verts ont été créés pour être un contre-pouvoir, des lanceurs d'alerte,
pour mettre la question écologique – à l'époque complètement absente – dans le
débat public. Personne n'envisageait qu'on arriverait au pouvoir, même pas
nous… Ensuite s'est ajoutée la culture de la coalition, avec la volonté de
s'allier à gauche pour participer à l'exercice du pouvoir, mais de façon
minoritaire. Désormais, il faut passer à la culture majoritaire, celle qui
assume de s'organiser pour conquérir le pouvoir et se prépare à l'exercer.
Mélenchon est à la fois le meilleur atout et
le boulet de LFI.
Est-ce le sens du référendum interne en cours, pour modifier les
statuts du parti ?
Ça ne fera pas tout, mais c'est une étape nécessaire. Quel que soit le
résultat de ce référendum – avec 66 % de oui requis, il y a peu de chance
qu'il passe –, quelque chose a été initié. Sur le reste, nous devons repenser
nos pratiques politiques, la façon dont on s'organise, dont on forme nos
cadres, dont on s'implante dans les territoires, dont on s'adresse à la
société… Les gens ont compris qu'il y avait une urgence écologique, ils ont
compris qu'on faisait de bons adjoints ou vice-présidents. Maintenant, il faut
les convaincre qu'on peut être un bon gouvernement.
L'avenir d'EELV passe-t-il par la Nupes ?
Il ne faut pas se tromper de diagnostic. La Nupes n'a pas été une réussite
électorale. C'était une bonne stratégie défensive qui a permis à la gauche et
aux écologistes de gagner les 150 circonscriptions les plus à gauche
et écologistes de France. Mais pour gouverner ce pays, il en faut le double.
Soyons lucides, Il n'y a pas de martingale. Le récit de l'union tel qu'il est
aujourd'hui n'a pas de perspective majoritaire. C'est un point de départ
potentiel, ni plus ni moins.
Jean-Luc Mélenchon esquisse une mise en retrait. La Nupes peut-elle
tenir sans lui, ou est-il au contraire le dernier obstacle à une véritable
union de la gauche ?
Il est à la fois le meilleur atout et le boulet de LFI. Il ne faut donc ni
l'accabler ni le déifier. Jean-Luc Mélenchon a fait trois campagnes
présidentielles. Il a perdu trois fois, mais il a fait des scores que peu à
gauche seraient capables de faire. Au fond, ce n'est pas Mélenchon, le sujet.
La Nupes, c'est avant tout une affaire de socialistes. C'est une reconstitution
après l'externalisation de l'aile gauche du PS au moment du départ de
Mélenchon. Olivier Faure a accepté une sorte de synthèse, comme ils faisaient à
leurs congrès, avec l'aile gauche majoritaire, qui lui convient car il garde
son appareil. Et là-dedans il y a aussi les communistes, avec un programme
assez vintage, qui sonne comme un retour en arrière. Nous, écolos, participons
à cette coalition parce que le score à la présidentielle nous l'imposait, et
que notre électorat nous le demandait. Mais ce n'est pas notre guerre. Nous
sommes écologistes avant d'être de gauche.
Donc pas de candidature commune de gauche en 2027 : il y aura
toujours un écologiste ?
Je n'ai aucune idée de ce qui va se passer en 2027. Je ne crois pas qu'on
puisse gagner à nouveau une élection nationale en France avec le remake d'un
récit de gauche traditionnel. Il faut un nouvel imaginaire et affirmer de
manière ouverte quelle est cette nouvelle identité et notre proposition
politique. C'est une charge de travail que, jusqu'à présent, nous n'avons
jamais assumée. Les écologistes doivent se donner les moyens d'être utiles pour
qu'il y ait une majorité alternative aux droites en 2027, même si on ne sait
pas encore par quel chemin cela passera. Sans écologie forte, solide,
combattante et convaincante, il n'y a pas de perspective de victoire.
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Perce pas dans les partis politiques classiques c'est essentiellement à cause de ses écologistes politiciens qui n'arrivent déjà pas à s'entendre entre eux qui sont des empêcheurs de tourner en rond extrémistes et qui collectionne leurs leaders interchangeables depuis de décennies et ne font que de la politique politicienne d'illuminés et quand ils sont élus comme ces maires de grandes villes ou moyennes font regretter à leurs administrés de les avoir élus car leur décisions de maire pour celle-ci sont plutôt extrêmes d'illuminés sectaires !
Les Français
ne sont pas contre l'écologie quand elle est raisonnable mais cette écologie
politique ne l'est pas on n'a vu avec les ministres qui se sont succédés sous
tous les gouvernements de tous bords !?
Mais il
ne faut pas confondre avec LFI parti d'extrême gauche et son leader MELENCHON
politicien chevronné grand tribun aboyeur de foire champion pour haranguer les
foules qui ne roule que pour lui et qui a réussi a récolter une partie de
Français déçus et mécontents quelque fois trublions dont il a attisé les
protestations et manifestations en réussissant à regrouper le reste de cette
gauche classique moribonde agrégat de partis classique PC/PS et ECOLO EELV dans
cette NUPES (déjà divisée !)
Les
Français lambda sont bon public mais se font toujours avoir ou leurrer par ceux
qui parlent plus fort que les autres comme ce vieux politicien ex-ministre PS
ne l'oublions pas ou par celui qui fait de beaux discours alambiqués comme
notre président actuel!
Le résultat
avec tous ces bienpensants politiciens donneurs de leçons hypocrites c'est
l'état de la France qui ne cesse de se dégrader avec une situation
internationale tendue et une économique inflationniste c'est cela la réalité !
Jdeclef 24/09/2022
09h57LP
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