Mais où
sont passés les millions de Macron pour la Syrie ?
La
distribution des nombreux fonds débloqués il y a un an par le chef de l'État
pour l'aide humanitaire relève du casse-tête. Enquête.
Cinquante
millions d'euros pour la Syrie.
Jamais un tel montant n'avait été dégagé pour un pays en guerre depuis la
création, il y a onze ans, du Centre de crise et de soutien, le bras
humanitaire du ministère des Affaires étrangères. Ce financement exceptionnel a
été annoncé à l'Élysée par Emmanuel
Macron en avril 2018 à une vingtaine d'ONG françaises. Avec un objectif :
apporter un soutien humanitaire aux régions du nord-est de la Syrie libérées de
Daech par les Forces démocratiques syriennes (FDS) - alliées de la France -, mais aussi, en théorie,
aux populations vivant dans les zones contrôlées par le régime de Bachar el-Assad. À cette
époque, deux jours après les frappes simultanées de la France, des États-Unis et de la
Grande-Bretagne sur plusieurs sites militaires syriens en riposte aux attaques
chimiques menées par le régime syrien dans la ville de Douma, Emmanuel Macron
voulait prouver qu'il ne s'en prenait pas aux civils mais seulement au régime. « Le président a laissé entendre que ce financement
répondait à une volonté politique d'ouverture, une manière pour la France de
revenir dans le jeu avec les Russes et les Américains », affirme
Jean-Pierre Vial, président du groupe interparlementaire d'amitié France-Syrie
du Sénat, visiteur régulier des autorités de Damas. La France propose
d'ailleurs au même moment une résolution à l'ONU pour relancer une diplomatie
totalement à l'arrêt.
Au cours des six mois suivant l'annonce présidentielle, au moins
quatre ONG françaises et étrangères importantes travaillant dans la zone
gouvernementale soumettent des propositions de projets, mais sans succès. Seule
la petite ONG lyonnaise Triangle génération humanitaire, spécialisée dans des
zones sulfureuses (Corée du Nord, Darfour, Sahara occidental, Donbass…) obtient
un financement du Centre de crise et de soutien en mai 2018 pour des projets de
distribution de matériel médical et d'eau par camions-citernes dans la Ghouta
orientale, région contrôlée par le régime, dont le coût est de 500 000 euros.
Les 50 millions d'euros sont alloués en particulier à des actions dans le
nord-est de la Syrie (60 %), contrôlé par les FDS, et 30 % dans la région
d'Idlib, à l'époque partagée entre le Front de libération nationale (FLN),
coalition de groupes issus de l'Armée syrienne libre et le groupe djihadiste
Hayat Tahrir al-Cham, issu du Front al-Nosra, l'ex-branche syrienne d'Al-Qaeda.
Mais l'utilisation de ces fonds fait débat au sein même de l'État français. « Il n'y a pas eu de rééquilibrage de l'aide humanitaire en
Syrie », déplore Jean-Pierre Vial.
« Stratégie illisible ». « Le Quai d'Orsay est beaucoup plus méfiant que la
présidence sur l'aide à apporter dans la zone du régime syrien. Il est
globalement resté fidèle à la position de Fabius : couper les fonds qui
pourraient bénéficier, même de manière indirecte, à Bachar el-Assad », assure
une source politique. L'initiative d'Emmanuel Macron à la suite des discussions
qu'il a eues avec Vladimir Poutine est particulièrement critiquée par de
nombreux diplomates. La France décide de livrer en juillet dernier 45 tonnes
d'aide médicale dans la Ghouta orientale en partenariat direct avec les Russes,
qui mènent par ailleurs une campagne de bombardements intensifs en Syrie depuis
2015. Un avion-cargo de l'armée russe est venu charger la cargaison sur la base
aérienne française de Châteauroux (Indre), et l'a transportée sur la base
aérienne russe de Hmeimim en Syrie. L'opération passe mal. « Livrer de l'aide humanitaire par l'intermédiaire d'un
acteur militaire du conflit et être réticent à financer les projets des ONG qui
interviennent dans la zone gouvernementale avec qui le Quai d'Orsay est habitué
à travailler sur d'autres terrains, est une stratégie illisible. On ne comprend
pas la politique française », avoue la responsable d'une ONG
basée à Damas et sollicitée pour distribuer la cargaison qui a refusé de le
faire.
L'opération donne l'impression d'être totalement improvisée. Les
Nations unies qui s'occupent généralement de ce type de matériel, n'ont pas été
prévenues, et c'est le Croissant-Rouge arabe syrien (SARC) qui twitte des
photos du matériel arrivé dans ses entrepôts. Après plusieurs jours de
flottement, les Nations unies finissent par prendre en charge la supervision de
la distribution. Mais le mal est fait. Car la grosse machine du Croissant rouge
syrien n'est pas un acteur neutre en Syrie. Khaled Hboubati, à la tête de
l'organisation, et Abdelrahman el-Attar, son prédécesseur (qui a dû
démissionner en 2016 à la suite d'un scandale de corruption), sont de puissants
hommes d'affaires qui ont acquis une partie de leurs fortunes grâce à leurs
liens avec le régime. « Si au niveau
central le SARC est très connecté au régime, ses branches régionales sont plus
autonomes - tout dépend du chef de délégation local »,
nuance cependant le responsable d'une ONG française. La question de la
traçabilité de l'aide humanitaire reste entière. « Le gros problème avec le SARC, c'est qu'il est souvent
impossible de savoir où celle-ci est distribuée. C'est un casse-tête pour les
bailleurs de fonds », explique un travailleur
humanitaire français.
Veto du Quai d'Orsay. Quelques
jours après cette opération controversée, un nouveau directeur du Centre de
crise et de soutien, Éric Chevallier, est nommé et la politique humanitaire
dans la zone gouvernementale syrienne devient plus stricte. La Croix-Rouge
française est la première à en faire les frais. En juillet, elle a présenté au
Centre de crise et de soutien, une demande de financement pour un projet
d'adduction d'eau et d'assainissement en appui du Croissant-Rouge arabe syrien
d'une valeur d'environ 1,5 million d'euros dans la Ghouta orientale. « Le projet était en voie d'être accepté avant que le Quai
d'Orsay ne mette son veto », affirme une source qui a suivi de
près le dossier. « Notre projet
n'a pas été retenu, et c'est le lot commun des appels à subventions. Je ne veux
pas me livrer à des interprétations »,
assure pour sa part Frédéric Boyer, directeur des relations et des opérations
internationales de la Croix-Rouge française. Deux mois, plus tard, l a deuxième
phase du projet de l'ONG lyonnaise Triangle génération humanitaire n'est plus
financée. Elle devait être réalisée dans une vingtaine de localités de la
Ghouta. L'ONG doit rembourser une importante somme décaissée par le Centre de
crise et de soutien. Une nouvelle fois, il semble que l'implication du
Croissant-Rouge arabe syrien ait joué un rôle néfaste. Triangle génération
humanitaire disposant de peu de personnel sur place - un expatrié et quatre
employés locaux -, ce sont les volontaires du Croissant-Rouge arabe syrien qui
sont largement intervenus sur le terrain. « Le Centre de crise et de soutien exige que les équipes
humanitaires des ONG qu'il finance distribuent elles-mêmes l'aide, le SARC ne
fait qu'autoriser l'accès à une zone et ses volontaires peuvent participer à la
distribution, uniquement sous notre supervision », note
Clémence Moreaux, chargée de programmes en Syrie au sein du Secours islamique
France. Le Quai d'Orsay, contacté à de multiples reprises par Le Point qui souhaitait l'interroger sur
l'ONG Triangle génération humanitaire, n'a pas souhaité s'exprimer.
Patrick Verbruggen, le codirecteur de Triangle génération
humanitaire émet toutefois une autre hypothèse : « La fourniture d'eau dans des camps de déplacés contrôlés
par le gouvernement syrien a posé problème au Quai d'Orsay, mais nous avions
pourtant indiqué dès le départ notre zone d'intervention. »
La première phase de distribution du matériel s'est faite dans deux camps de
déplacés de la Ghouta orientale étroitement contrôlés par le régime. Dans ces «
centres collectifs », les services de sécurité syriens ont confiné des dizaines
de milliers de personnes après la reprise de la Ghouta au printemps 2018, les
privant de liberté de mouvement en attendant que leur dossier soit examiné ou
qu'elles obtiennent le « sponsorship » d'un membre de leur famille. Quelques
ONG opéraient dans ces camps, mais l'ONU y avait un accès limité.
Interventions d'urgence. Ce
n'est qu'en décembre 2018 qu'une autre ONG française est parvenue à obtenir un
financement dans la zone gérée par le régime syrien : le Secours islamique
France. L'ONG a reçu 500 000 euros pour fournir vêtements d'hiver et
couvertures dans le camp de déplacés d'Afrine et d'Idlib à Tal Rifaat, au nord
d'Alep. « Dans la zone gouvernementale, le Centre de
crise et de soutien ne finance que des interventions d'urgence, mais pas par
exemple la réhabilitation d'écoles ou des forages de puits »,
note Clémence Moreaux, du SIF.
Sur les 22 millions d'euros alloués aux ONG - 14 françaises et 8
internationales -, moins de 1 million d'euros a donc été consacré aux zones
tenues par le régime syrien. Le reste de la cagnotte - 28 millions d'euros - a
été alloué à des organismes multilatéraux qui interviennent partout en Syrie :
la Commission européenne et surtout différentes agences de l'ONU comme le
Programme alimentaire mondial, l'Agence des Nations unies pour les réfugiés
palestiniens), le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés… « Le gouvernement français privilégie pour le moment un
soutien aux agences de l'ONU basées à Damas dans les zones gouvernementales
alors que les ONG internationales ont souvent un meilleur accès aux communautés
les plus vulnérables », constate Matthew Hemsley,
responsable du plaidoyer et de la communication au sein de l'ONG Oxfam à Damas.
Panique au ministère. Dans
le nord de la Syrie, où s'est concentré l'effort français, l'avenir des projets
humanitaires reste incertain en raison des changements militaires sur le
terrain. Début janvier, les djihadistes du groupe Hayat Tahrir al-Cham ont
ainsi conquis en deux semaines toute la région d'Idlib, semant la panique au
ministère des Affaires étrangères. « Le Centre de crise et de soutien a dû stopper en
vingt-quatre heures le financement d'une dizaine d'ONG dans la région d'Idlib,
car les fonds auraient pu alimenter ce groupe djihadiste,
explique un acteur humanitaire. Après une semaine de vérifications, les transferts de fonds ont été
estimés conformes et ont de nouveau repris. »
La situation n'est néanmoins pas simple à gérer. « Il existe un rapport de forces avec les groupes armés qui
veulent se servir au passage. Mais ils savent qu'ils n'ont pas intérêt à le
faire s'ils veulent que l'aide continue à arriver pour les 3 millions de civils
vulnérables sur place », raconte un membre d'une ONG
française qui intervient à Idlib. Depuis la fin du mois d'avril, l'armée
syrienne, avec le soutien des Russes, a lancé une vaste offensive dans la
région, causant la mort de 400 civils et le déplacement de près de 300 000
personnes selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme. « Les bailleurs de fonds européens, notamment la France sont
de plus en plus frileux à financer des projets à Idlib en raison de la
situation précaire sur le terrain. Les projets humanitaires sont renouvelés
pour de petites périodes, de trois à six mois »,
explique le Dr Ziad Alissa, président de l'ONG UOSSM France. Depuis la fin du
mois de mai, l'aviation syrienne a pilonné huit centres médicaux, dont le
centre de santé primaire de Khaled al Madih, financé en partie par Expertise
France, une agence française de coopération technique internationale placée
sous la tutelle du ministère des Affaires étrangères et du ministère de
l'Économie et de Finances, selon Ziad Alissa. Un signe que les millions de la
France ne sont pas forcément les bienvenus !
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Et quand
nos concitoyens demandent des comptes on ne leur répond pas ou on leur ment,
c'est bien plus simple !
Il y a
bien certains médias qui posent des questions ou découvrent quelque fois des
affaires douteuses, mais qu'elles ne peuvent souvent étayer de faits réels !
Et bien sûr
il y a cette fameuse cour des comptes (sans pouvoir) peut-on croire à ses
rapports, mais rien que l'argent gaspillé qu'elle dénonce est déjà un scandale
!?
Déjà les
multiples associations loi 1901 sont un gouffre sans fond difficilement
contrôlable et nos gouvernants pour toutes ces causes humanitaires
hypothétiques savent très bien faire vibrer la corde sensible des français
quand il faut mettre la main à leurs poches !
Sauf que
chez nous on a besoin d'argent, pour notre vie courante, le scandale des
urgences hospitalières ou autres nombreuses que l'on pourrait citer de simple
service au public lambda français ou on n'est pas capables ou on ne veut pas le
régler car il s'agit de moyens financiers par exemple !
Et ces
hommes femmes et enfants qui dorment dans les rues dont on ne sait quoi faire ?!
Mais arrêtons
notre litanie de faits déplorables, car la liste est longue, car de toute façon
E.MACRON à qui on pourrait poser la question sur ces fonds ne serait peut-être
pas capable de répondre sur leur destination et ce qu’ils sont devenus !?
A sa
décharge, il n’y a pas que lui, ces prédécesseurs monarques sans couronne
pratiquaient la même politique depuis plus de trente ans en pure perte (sauf
pour eux qui continuent à vivre dans l’opulence...)
Rien de
nouveau en fait depuis l’ancien régime...
« Bon appétit Messieurs
! O ministres intègres Conseillers vertueux
! Voilà votre façon - De servir, serviteurs qui pillez la maison » (VICTOR HUGO)
Jdeclef 06/07/2019
10h19LP