Bygmalion :
mise en examen des deux experts-comptables de la campagne 2012
Pierre Godet et Marc Leblanc sont inculpés, entre autres,
pour usage de faux, escroquerie et complicité de financement illégal de
campagne électorale.
Ils avaient tiré la
sonnette d'alarme sur le coût de la présidentielle de Nicolas Sarkozy
en 2012, puis finalement validé son budget : les deux experts-comptables de la
campagne ont été mis en examen dans l'enquête sur les fausses factures de
Bygmalion. Signe que les juges d'instruction soupçonnent une longue chaîne de
responsabilités, les experts-comptables Pierre Godet et Marc Leblanc, qui n'ont
pas répondu à l'AFP,
portent à treize le nombre de mis en examen dans ce dossier. Des cadres de la société
Bygmalion - chargée des meetings, de l'UMP
et de l'équipe de campagne -, dont son directeur qui était chef de cabinet à
l'Élysée, Guillaume Lambert, et son trésorier, le député Philippe Briand, les
ont précédés depuis un an.À ce stade, le patron du parti à l'époque, Jean-François Copé, et Nicolas Sarkozy, qui disent avoir tout ignoré de cette vaste fraude présumée, n'ont pas été entendus. L'affaire avait éclaté fin mai 2014 avec les révélations de l'avocat de Bygmalion, puis du bras droit de M. Copé, Jérôme Lavrilleux, sur un recours à un système de fausses factures pour truquer le compte de campagne afin qu'il reste dans les clous (22,5 millions d'euros) et ne soit pas rejeté. Ce qui avait quand même été le cas. Un an après, après avoir saisi la comptabilité de Bygmalion et du parti, les enquêteurs estiment à 18,5 millions d'euros les fausses factures, imputées à l'UMP au titre d'événements fictifs, alors qu'il s'agissait de dépenses de meetings.
40 meetings, et non 15
Grâce aux
témoignages, les juges ont aussi retracé le scénario d'une course électorale où
le nombre de meetings semble avoir flambé, alors même que le risque de dépasser
le plafond était posé. D'où les questions sur le rôle des experts-comptables,
qui ont été mis en examen jeudi et vendredi pour usage de faux, recel d'abus de
confiance, escroquerie et complicité de financement illégal de campagne
électorale, selon une source judiciaire. Le 7 mars 2012, soit environ six
semaines avant le premier tour, Pierre Godet adresse à l'équipe de campagne une
première alerte : à ses yeux, le montant des dépenses "budgétées"
dépasse de plus de 500 000 euros le plafond légal, raconte à l'AFP une source
proche du dossier.L'expert-comptable se base alors sur une prévision de 15 meetings. Pour éviter un dépassement du plafond et sa conséquence catastrophique, le non-remboursement des dépenses par l'État, il prône des renégociations de contrats et une "interdiction absolue" d'engager de nouveaux frais. Le 26 avril, nouvelle alerte, alors que le premier tour a eu lieu. Puis, fin juin 2012, l'expert fait état de 22,5 millions d'euros. Les dépenses seraient alors rentrées dans les clous, ce qui étonne les enquêteurs, car, au bout du compte, plus de quarante meetings, et non quinze, ont eu lieu durant la campagne.
Doutes autour du rôle de
Nicolas Sarkozy
Selon les
protagonistes, des renégociations avaient eu lieu auprès d'Event and Cie, la
filiale de Bygmalion chargée des meetings, ce qui a permis davantage de
réunions publiques. Reste à savoir si des renégociations dans de telles
proportions sont possibles sans passer par une fraude. Nicolas Sarkozy n'a été
mis en cause par aucun protagoniste, mais des questions devraient certainement
se poser sur son rôle. Ainsi, son directeur de campagne Guillaume Lambert a
déclaré en garde à vue que le candidat avait été informé des "contraintes
budgétaires" posées par la première alerte de l'expert-comptable.Toujours selon Guillaume Lambert, le président de la République, qui voulait relancer sa campagne après l'affaire Merah, à la mi-mars, lui avait répondu de n'ajouter que "de petites réunions publiques rassemblant aux alentours de 1 000 personnes, à coûts bas et maîtrisés", a expliqué une source proche du dossier à l'AFP. Selon la même source, les enquêteurs disposent aussi d'un courriel adressé à la même période par le directeur général de l'UMP de l'époque, Éric Cesari, à Guillaume Lambert, où le premier prend note du souhait du candidat de tenir une réunion publique par jour.
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