Covid :
vaccine-moi si tu peux
Jusqu’ici
prioritaires, les personnes de 75 ans et plus se trouvent confrontées à un
appareil administratif et sanitaire qu’elles ne comprennent plus.
C'est
un numéro vert comme tant d'autres. Au téléphone, une voix nasillarde exige un
code postal avant de diriger l'appelant vers le centre de vaccination le plus
proche. À l'autre bout du fil, la réponse est convenue, maintes fois
répétée : « Nous n'avons pas la main sur la prise de rendez-vous. Adressez-vous
à votre mairie au 39 75. » Une sonnerie plus tard, une voix
d'hôtesse préenregistrée nous informe qu'il n'y a « plus de rendez-vous
disponibles et que la mise en relation avec un téléconseiller peut être
longue ». Un doux euphémisme pour tous les candidats âgés de
75 ans et plus, impatients d'accéder à la vaccination.
« Je n'ai pas l'éternité », regrette Serge, 98 ans,
veuf, résidant à Saint-Malo. En dépit d'un courrier de son médecin le
recommandant à la vaccination, ce vaillant nonagénaire n'a, pour l'heure, pas
été vacciné malgré la douloureuse impression que son temps est compté.
« Je trouve ça injuste, enfin, il n'y a pas que moi, mais, à mon âge, ce
serait normal. » Faute d'un brevet en informatique – « je ne suis pas
un fortiche de l'ordinateur » –, Serge, bon pied bon œil, s'en remet
alors à la dextérité d'un voisin parti défier l'administration française.
« Je désespère de décrocher un rendez-vous de vaccination pour lui. À
chacun de mes appels journaliers, une dizaine, c'est toujours le même message
laissé sur un répondeur : “Tous nos conseillers sont actuellement en
appel, veuillez réitérer votre appel” », relate ce charmant voisin, une
main sur le cœur, l'autre sur le téléphone.
Covid-19 :
« Les Français m'épatent ! »
Premier arrivé, premier vacciné
Depuis l'ouverture de la vaccination aux individus de 75 ans
et plus, les témoignages affluent, souvent les mêmes, pour décrire un système à
la peine, une gabegie de moyens. Numéro vert saturé, sites en rupture et
centres laissés pour compte faute d'arrivages réguliers, la campagne
vaccinatoire semble, pour le moment, coincée dans la seringue. Une prise en
charge jusqu'ici anecdotique dans un pays où la pyramide des âges laisse
deviner la place des séniors. Ils étaient plus de 6 millions au premier
janvier 2021, selon l'Insee, soit 9 % de la population. Au
2 février, le nombre de vaccins administrés s'élevait à environ
1 823 000 – personnel soignant compris –, selon les chiffres du
ministère des Solidarités et de la Santé. Si peu, si tard, alors que les
variants du virus circulent déjà sur tout le territoire.
« Je mesure parfaitement l'angoisse de toutes ces personnes
âgées de plus de 75 ans qui n'ont pas encore obtenu un rendez-vous, de
leur famille qui les aide dans leurs démarches, ou qui attendent
impatiemment et parfois avec anxiété qu'on les appelle et qu'on leur donne des
réponses », a néanmoins précisé le Premier ministre Jean Castex, jeudi
4 février au soir. Seule échappatoire, tout miser sur la montée en
puissance d'une campagne de vaccination jugée poussive, voire défaillante,
quand, outre-Manche, on vaccine à tour de bras. Sur les 1,7 million de
rendez-vous supplémentaires annoncés, 500 000 seront ouverts à partir de
vendredi pour être réalisés fin février, puis 1,2 million « dès le
milieu de la semaine prochaine » pour le mois de mars, a ainsi annoncé
l'exécutif.
« On a quand même l'impression que c'est premier arrivé,
premier servi », constate Daniel, 82 ans, d'abord réticent à se faire
vacciner – « j'attendais de voir » –, avant d'être pris de court par
l'afflux de réservations. « Pour un pays qu'on disait antivaccins, je
veux », peste cet ancien ingénieur en téléphonie, installé à Perros-Guirec,
7 065 âmes, dans les Côtes-d'Armor (22). Adepte du papier, le Breton avait
choisi de faire confiance à un article paru dans les pages
locales invitant à contacter un numéro d'aide à la vaccination. Pas tout à
fait les petites annonces, mais presque.
« Si c'est dans le journal, c'est que c'est vrai, non ?
Eh bien, c'était faux, le téléphone n'a jamais été branché ! » Sur
les conseils d'un beau-frère rompu aux nouvelles technologies, il entreprend
alors un voyage initiatique sur Doctolib, une application de prise de
rendez-vous médicaux. Un sacerdoce, de l'avis d'aînés, souvent dépassés.
Daniel, après quelques heures de réflexion, parvient enfin « à appuyer sur
le petit carré », confirmant le créneau horaire. Un miracle n'arrivant
jamais seul, il prend, dans la foulée, rendez-vous pour sa femme, elle aussi
éligible au vaccin.
Royaume-Uni :
« Je suis vacciné, je suis aux anges ! »
À tout problème, une explication
De tracas en tracas jusqu'à l'incompréhension,
la pression se fait plus forte sur les autorités sanitaires, ministère en
tête : « Nous sommes bien conscients des inquiétudes que cette
situation peut susciter chez les personnes âgées », avance la Direction
générale de la santé, contactée par Le Point. Prévisible certes, mais difficilement
compréhensible pour un public déclaré très tôt prioritaire. « Le
gouvernement en a fait tout un cirque », pointe Daniel, en
surchauffe : « Quand il faut déjà gérer les impôts, la mutuelle, on a
l'impression de devenir des esclaves de l'ordinateur. Le vaccin, c'est l'étape
de trop », et de fustiger « tous ces programmateurs à la noix ».
Sommé de se justifier avenue de Ségur, on préfère faire assaut de
pédagogie, quitte à perdre quelques aïeux au passage, peu frottés à la
logistique. « La France est confrontée, comme ses partenaires européens, à
une baisse d'approvisionnement en vaccins. La baisse de ces approvisionnements
a donc naturellement un impact sur le nombre des injections
programmées. » Jusqu'ici tout va bien. « Aussi, environ 5 %
des rendez-vous pour une première injection devront être décalés de quelques
jours », concède la DGS, avant de rappeler être en capacité de fournir
« 2,4 millions d'injections au mois de février hors
AstraZeneca », un vaccin, a priori, distribué à un public plus jeune.
L'administration d'une deuxième dose, 28 jours après, étant de facto
garantie par les autorités de santé.
« Faux », récrimine Thierry, primovacciné hors
d'Île-de-France et bien en peine de faire valoir sa deuxième injection auprès
du centre de son choix. « L'agence régionale de santé d'Île-de-France
vient de donner consigne à ses centres de vaccination d'annuler les rendez-vous
pour la deuxième injection quand la première a été réalisée dans un autre
centre. À moins de parcourir 1 200 kilomètres, je dois renoncer à ma
seconde vaccination qui ne m'est proposée qu'en région
parisienne. » La même agence certifiant à son tour que « l'intégralité
des deuxièmes injections sera assurée, soit au total 330 000
injections » sur le mois de février, personnel soignant compris.
Vaccins
anti-Covid de l'UE : la négociatrice des contrats s'explique
« J'ai dix fois le temps de mourir »
L'automaticité des rappels n'étant pas dans toutes les têtes, de
nombreuses personnes âgées, trop contentes de pouvoir réserver, en auront
profité pour prévoir d'elles-mêmes une seconde injection. « Ce n'était pas
clair sur Doctolib, alors j'ai pris un nouveau rendez-vous », raconte
Daniel, chez qui mieux vaut prévenir que guérir. Problème, faute
d'interlocuteurs, beaucoup de ces apprentis patients omettent de respecter le
délai de 28 jours prescrit entre chaque dose. Autant dire un
casse-tête pour les autorités ayant calibré leurs projections sur la
complémentarité entre primo-injection et rappel – « Nous
réalisons des projections sur les doses allouées avec comme principe la
préservation de la seconde dose » – et la promesse de futurs
embouteillages.
IVaccinations anti-Covid en France : le
système se grippe
Comme pour les masques, la tentation du public
– et des médias – est à la vitupération contre l'incurie de nos gouvernants,
incapables d'organiser autre chose qu'un confinement. « J'ai dix fois le
temps de mourir du Covid d'ici là. Tu comprends, c'est trop long, c'est trop
long », se rappelle s'être entendu dire Valérie. Sa mère,
Denise, 90 printemps, espérait elle aussi se faire vacciner.
Prévoyante pour deux, sa fille, a, dès la première annonce, tenté sa
chance : « Ma mère a téléphoné immédiatement à son médecin
généraliste, qui l'a d'office placée sur une liste d'attente. Le vendredi
8 janvier, il m'a contactée pour m'indiquer qu'il fallait prendre
rendez-vous à tel numéro pour administrer le vaccin dans un gymnase affecté
pour l'occasion. » Denise décroche elle-même son combiné le
lundi 11 janvier. « Ils ne lui ont pas trouvé une place avant le
25 mars ! » s'étonne sa fille, qui compte désormais parmi
les 66 millions de procureurs recensés en France.
Covid-19 :
« Afrique attend vaccins désespérément ! »
Téléphonie immobile
« Il y a une semaine, on a eu un coup de fil du préfet pour
nous dire qu'il n'y aurait pas assez de doses et que ce n'était pas la peine
d'ouvrir », raconte Jean-Michel Genestier, maire de Raincy, une commune de
Seine-Saint-Denis, dans un de nos articles en date du 28 janvier. Son
centre de vaccination devait ouvrir comme prévu, le 1er février.
L'édile avait pourtant tout prévu, de la signalétique aux chaises pour soutenir
les personnes âgées. Finalement, la vaccination n'aura pas lieu. « On a
l'impression qu'il faut beaucoup de temps au gouvernement pour s'apercevoir des
difficultés réelles de la crise, et ça à chaque étape. » Les prédictions
les plus optimistes, faisant douter des objectifs de l'exécutif : avoir vacciné
tous les Français qui le souhaitent d'ici à l'été 2021. Et ce, malgré une
commande record de près de 70 millions de doses de vaccin, tous
fournisseurs confondus.
« Tous nos conseillers sont actuellement occupés. » À
nouveau, la même sonnerie, la même voix métallique. Trois essais quotidiens
pour trois tentatives infructueuses. « Concernant l'accessibilité de la
prise de rendez-vous : nous nous sommes assurés qu'un numéro de téléphone
permet également de prendre rendez-vous pour les personnes qui ne sont pas à
l'aise avec les outils en ligne », assure pourtant la DGS, bien en peine
de savoir quand, où et comment tous les séniors de France pourront se
faire vacciner. Daniel, philosophe et résigné, résume ainsi la situation :
« Passé 75 ans, tout devient plus compliqué. »
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Si on
comprend bien nos dirigeants :
MACRON
et CASTEX ?!
Mais
qu'ils ne s'inquiètent pas, ces Messieurs, ont dit que tout le monde serait
vacciné!
(Mais ils ne savent pas vraiment quand ces menteurs "comme des
arracheurs de dents" !)
Et il
faudrait continuer à leur faire confiance après 2022 ?!
Il ne
faut pas exagérer ?!
Jdeclef
05/02/2021 13h37
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