Briançon au bord du chaos migratoire
REPORTAGE. Confrontée à des vagues de
migrants arrivant d’Italie, la préfecture des Hautes-Alpes improvise alors
que les associations se déchirent entre bénévoles et radicaux.
Publié le
16/03/2024 à 09h35
En août 2023, à Briançon (Hautes-Alpes),
l’association Les Terrasses solidaires doit fermer et évacuer provisoirement
son bâtiment, qui ne peut accueillir tous les nouveaux arrivants. © Eric Camoin/PhotoPQR/La Provence/MaxPPP
Une préfecture qui affrète des bus pour permettre à des
étrangers en situation irrégulière de s'enfoncer plus avant dans le territoire
français, des associatifs qui conspuent les forces de l'ordre tout en les
appelant régulièrement au secours, des équipements de montagne qui passent
plusieurs fois la frontière sur le dos de différents migrants, des bénévoles
qui se déchirent… Briançon (Hautes-Alpes) était depuis longtemps la
sous-préfecture la plus haute de France (1 300 mètres). C'est
désormais également la ville où le bricolage institutionnel dans la gestion de
la crise migratoire atteint des sommets inédits.
Jusque-là, quelques individus seulement tentaient
leur chance par le Briançonnais chaque année. En 2017, ils ont été 1 300.
C'est cette même année qu'a
ouvert le refuge des Terrasses solidaires. L'année suivante, ils
étaient 5 800. Désormais, le décompte se fait à la semaine, avec des
pointes de 250 à 300 arrivées hebdomadaires pendant l'été
2023 aux Terrasses, prévues pour 85 personnes.
Contrôles policiers
très stricts
Le chemin qui y mène est, à sa manière, balisé.
Les migrants arrivent par le train à la gare d'Oulx, côté italien. À peine
descendus, ils se dirigent sans hésitation vers le refuge Fraternità Massi, à
400 mètres, géré par une ONG catholique. « L'adresse était déjà en
mémoire dans le téléphone d'un migrant à Lampedusa ! » raconte une
source policière.
Là, les bénévoles fournissent à ceux qui en ont
besoin des équipements de montagne. S'ils arrivent à franchir la frontière, les
migrants les restitueront aux Terrasses solidaires, et des bénévoles les
rapporteront à Fraternità Massi. Si les chaussures de randonnée parlaient,
certaines, à Briançon, pourraient raconter de nombreux passages.
Les sentiers de randonnée, en France, sont classés
de T1 (facile) à T6 (très difficile). Sur l'échelle officieuse des
sentiers de migration, la route Oulx-Briançon serait une sorte de niveau T4,
exigeant mais réalisable. Prendre un TGV à destination de Paris en gare d'Oulx
semble plus facile, mais mieux vaut ne pas y penser. En ce moment, cette voie,
qui passe par Modane, est coupée à la suite d'un effondrement dans la vallée de
la Maurienne. Un service de cars de substitution a été mis en place. Les contrôles
policiers pour monter à bord sont très stricts, côté français comme côté
italien.
Refuges pour migrants : Oulx et Briançon, les
faux jumeauxPragmatisme
toujours : les sans-papiers arrêtés sur le chemin de Modane par les carabinieri sont en général
réorientés vers la route du Montgenèvre. Les fourgons de police poussent
parfois la courtoisie jusqu'à les déposer à Oulx ! Tout est fait, en
résumé, pour couper une route trop facile (le TGV direct Milan-Paris) et rendre
l'autre exigeante, mais pas au point de créer un embouteillage côté italien.
Policiers, gendarmes et douaniers patrouillent sur
la route Oulx-Briançon, mais les chemins de montagne, de part et d'autre,
restent ouverts. Le col de l'Échelle (Hautes-Alpes) et le col de Larche
(Alpes-de-Haute-Provence) constituent des alternatives risquées, car le terrain
est difficile. Subtil dosage.
Le goutte-à-goutte
pour éviter la saturation locale
Une fois à Briançon, embarquer à bord du train de
nuit pour Paris ou d'un car pour Marseille (Bouches-du-Rhône) ne pose plus
de problème. Au contraire. Le but de la préfecture des Hautes-Alpes comme de la
mairie de Briançon est d'organiser le goutte-à-goutte pour éviter la saturation
locale. « Pour une commune comme la nôtre, 300 migrants, c'est
beaucoup, expose Arnaud Murgia, maire (divers droite) de Briançon. Rapporté à
la population de Paris, cela représenterait 60 000 personnes. »
Cette France qui ne sait plus que faire
d'« eux » C'est
la raison pour laquelle la préfecture, dans les moments de saturation connus
en 2021 et 2023, a affrété des cars pour clandestins à destination de
Grenoble (Isère), de Lyon (Rhône) ou de Marseille. Le tout après avoir
poursuivi en justice pour « aide à la circulation d'un étranger sur le
territoire français » l'association Les Terrasses solidaires, qui avait
fait la même chose en 2021…
Seuls les étrangers interpellés tout près de la
frontière sont reconduits en Italie – du moins s'ils ne sont pas mineurs ou
malades. Ceux qui sont descendus jusqu'à la ville y circulent librement. Ils se
montrent peu dans les rues de Briançon. Ce n'est pas par peur de la police –
elle saurait où les trouver si elle voulait les arrêter. « Nous
n'intervenons aux Terrasses solidaires que lorsque les bénévoles nous appellent
pour du maintien de l'ordre », explique le commissaire Jérémie Bosse-Platière,
directeur interdépartemental de la police nationale des Hautes-Alpes.
« On y casse du
flic par principe »
Les Terrasses solidaires font figure de structure
modèle dans le registre de la prise en charge des migrants. Cette bâtisse avec
une vue sur la vallée est la propriété d'une association soutenue par le fonds
Riace, du nom de ce village de Calabre qui a accueilli des migrants. Le fonds a
été créé par Olivier Legrain, un entrepreneur devenu millionnaire par le biais
d'une opération de rachat avec effet de levier sur Materis, une filiale de
Lafarge.
Européennes : qui est Fabrice Leggeri, l'ancien
patron de Frontex, nouvelle prise de guerre du RN ? Retiré des affaires, il s'est fait philanthrope, sans
oublier les vertus d'un bon management. « Nous faisons partie d'une chaîne
de solidarité qui prend en charge les exilés, détaille Frédéric Meunier,
responsable de Riace, mais nous sommes aussi dans un écosystème qui se
structure et a dépassé le stade de la gestion de squats. » Avec neuf
salariés et plusieurs centaines de bénévoles à l'année, Les Terrasses assument
de facto une mission de service public. Pour Frédéric Meunier, il ne fait aucun
doute que le refuge va se pérenniser. L'associatif s'offre le luxe d'appeler
l'État à sortir de l'improvisation et à faire preuve de « davantage de
lucidité ».
Qui ? Combien ?
En 2017, 1 300 migrants ont transité par Briançon. En 2018, ils
étaient 5 800. À l'été 2023, jusqu'à 300 arrivées hebdomadaires ont
été enregistrées. Il s'agit d'hommes à 90 %, voire plus. Leur provenance
varie en fonction du contexte international. Majoritairement afghans et
iraniens en 2020, subsahariens l'année suivante, les migrants arrivaient l'an
dernier du Maghreb à près de 50 %.
La sphère caritative, du reste, n'est pas
elle-même à l'abri des tensions et des fractures. Yann (pseudonyme), étudiant
dans une université du Grand Ouest, a été bénévole aux Terrasses solidaires.
Désabusé, il ne compte pas y retourner. « On y casse du flic par principe,
mais on appelle le peloton de gendarmerie de haute montagne quand ça devient
sérieux en montagne. On déblatère sur le racisme d'État, mais on ne met pas les
noirs et les Arabes dans les mêmes dortoirs pour éviter les bagarres… »
Le jeune homme se souvient d'avoir entendu une
étudiante grenobloise sermonner une bénévole de Briançon en âge d'être sa mère
qui avait rappelé à l'ordre un migrant parce qu'il jetait ses ordures à côté de
la poubelle. L'étudiante trouvait cette injonction néocoloniale…
Poussés par la guerre
et la misère ?
En décembre 2023, le maire a fait évacuer un
squat installé dans un ancien dispensaire médical. Il était occupé par des No
Border radicaux, mis à l'écart par les autres bénévoles. « Ils ont tout
cassé à l'intérieur, les locaux étaient dans un état de saleté
repoussante », se souvient le commissaire
Bosse-Platière. Portrait-robot du squatteur : « Une sorte de
saisonnier de l'ultragauche, très jeune, qui se cherche un combat. »
« Aujourd'hui ici, demain à
Notre-Dame-des-Landes… Aucun des No Border n'est briançonnais », confirme
le maire, conscient que sa commune est devenue une étape pour divers
activistes, qui se soucient peu du sort des migrants. Le Point en a rencontré
trois, parmi ces derniers, sur la route entre Montgenèvre et Oulx. Ils étaient
tunisiens, jeunes, en bonne santé. L'un d'eux parlait correctement anglais. Un
autre tentait de rejoindre son frère à Birmingham.
Immigration : l'éternel biais français de la
culpabilitéLes
arrivées fonctionnent par vagues. En 2023, les Maghrébins étaient majoritaires.
Dans un pointage fait en 2019 aux Terrasses Solidaires, 89 % des
arrivants venaient de Guinée, de Côte d'Ivoire, du Mali et de Gambie. L'année
suivante, les Subsahariens n'étaient plus que 15 %, derrière les Afghans
(47 %) et les Iraniens (23 %).
D'année en année, quelques constantes : à une
écrasante majorité (de 90 à 98 %), ce sont des hommes, dont un quart
de mineurs. Poussés par la guerre et la misère ? Les humanitaires aiment
le penser, mais la réalité est plus complexe. Le PIB par habitant de la Côte
d'Ivoire a doublé en vingt ans (1 200 dollars en 2003,
2 400 dollars en 2023). Idem au Mali.
Briançon illustre plutôt l'analyse de Stephen
Smith dans son livre La Ruée
vers l'Europe (Grasset, 2018). Le développement économique alimente
la migration davantage que ne le font la guerre et la pauvreté absolue. Il
faut une mise de départ pour prendre la route.
« La stratégie
claire de guerre hybride » de la Russie
Certes, bénévoles – et gendarmes ! –
récupèrent souvent, dans les Alpes françaises, des migrants en hypothermie,
mais ces vies sauvées sont mises en jeu sur un échiquier qui dépasse Briançon.
En mai 2023, le ministre italien de la Défense, Guido Crosetto, a fait une
déclaration passée inaperçue en France. Il a accusé la Russie d'avoir
« une stratégie claire de guerre hybride », consistant à faciliter le
passage de dizaines de milliers d'Africains du Sahel vers l'Union européenne,
dans l'espoir de déstabiliser les pays qui soutiennent l'Ukraine.
Nicolas Bay : « Reconquête ! sera le
seul vote utile pour battre Macron, et non le RN » Le Modern War Institute, de l'académie militaire
américaine de West Point, le confirme, dans une note du 30 novembre
dernier. En 2023, « l'Italie a été confrontée à une vague de migrants
venant pour la plupart de pays tenus par des juntes pro russes comme le Niger,
le Burkina Faso, le Mali et la Centrafrique », ainsi que de pays où le
groupe Wagner et le renseignement extérieur russe (le GRU) sont actifs.
« C'est un sujet qui dépasse très largement
ma commune », martèle Arnaud Murgia. L'élu est remonté contre les No
Border qui l'ont menacé de mort, mais il ne jette la pierre ni aux Italiens qui
laissent passer les migrants – « ils n'ont aucune raison de les
retenir » – ni aux migrants eux-mêmes – « ils ne font que
passer ».
Le maire est conscient que, avec le retour des
beaux jours, le compteur des arrivées peut encore s'affoler. Ex-secrétaire
d'État chargé de la ruralité, le député Renaissance de la 2 e circonscription
des Hautes-Alpes, Joël Giraud, partage son diagnostic. « Les élus des
Hautes-Alpes ne maîtrisent pas les flux. Il faut parler avec les Italiens, la
solution n'est pas chez nous. » Mais où est-elle, en définitive ? C'est
toute la question.
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Coïncidence (peut-être) depuis 2017 et
l’élection et réélection en 2022 de notre petit président bourgeois parvenu et
de sa « macronnie » fantôme ces flux migratoires vers cette ville
venant d’Italie « EXPLOSE » !?
Mais même avec ce sujet épineux et
justement grave qui risque de ce confirmer avec l’élection Européenne ou les
Français votent peu car pas nationale ce qui peut justement changer pour le RN de
M.LE PEN « qui a le vent en poupe » logique et être élue majoritairement
par les FRANÇAIS lambda qui n’osent pas le dire mais n’en pensent pas moins « car
ce n’est pas bien ce politiquement incorrect » hypocrite pour contre
carrer la mauvaise politique de notre
président bavard et ses gouvernements de pattes cassées depuis 2017 même sur des
sujets hyper graves comme la guerre Russo Ukrainienne qui piétine et dont ces
pauvres gens souffrent car lui ne sachant plus quoi dire obligé de changer d’avis
comme il change de chemises tout comme ces flux migratoires qui deviennent un
fléau dans notre pays et grandes villes comme PARIS sa couronne ou dans des
petites villes ou moyennes de province comme Briançon voir Dijon ou autres dont
les listes s’allongent pouvant tenir sur un bottin de téléphone il n’y a pas qu’à
Marseille ou Lyon il suffit de demander
ou populations des citées de celles-ci comme dans le 93 ou 94 par exemple d’IDF
qui subissent ces problèmes de migration ou délinquances diverses avec l’insécurité
liées à celles-ci !?
Car notre président et sa clique de
politiciens qui nous gouvernent si mal oublient complètement les Français « d’en
bas ou de peu » qu’il dédaigne d’ailleurs et donc gouvernent mal et ne
nous protègent pas assez car en insécurité quotidienne dans leurs vies de tous
les jours !?
Tant pis car c’est nous qui votons et
nous l’avons mérité mais il ne faudra pas venir pleurer après si cela empire
car c’est bien parti !?
Jdeclef 16/03/2024 12h42
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