Nouvelle-Calédonie : une jeunesse aux abois
REPORTAGE. Depuis trente ans, les nouvelles générations sont tenues à l'écart par les anciens. Que feront-ils, le 5 novembre ?
Depuis La Foa, sur la côte Ouest, la route escarpée qui conduit de l'autre côté du Caillou, pourtant moderne et bien entretenue, est rendue périlleuse par la conduite téméraire des chauffeurs de gros camions de transport de la garniérite, le minerai de nickel. Le décor est d'un vert luxuriant, de petits étals proposent des ignames, tubercules nourriciers et quasi sacrés, à la vente, sans personne pour encaisser leur prix. Le client dépose l'argent, puis s'en va. Au bout d'une piste cabossée, c'est l'arrivée à la mine de nickel de Kouaoua, sur la côte Est. S'il est un lieu où se bousculent les contradictions calédoniennes, c'est bien là. Le nickel, c'est l'or de la Nouvelle-Calédonie. Objet de notre visite, un groupe de « jeunes » militants bloque l'accès de la mine de Kouaoua depuis le 6 août, provoquant la fermeture de l'installation et des pertes considérables pour l'exploitant SLN, dont le capital est en partie détenu par le gouvernement local. Sur place, dans le campement occupé nuit et jour, la situation est restée longtemps figée, jusqu'à ce qu'elle se dénoue opportunément, mais sans doute provisoirement, le 26 octobre, à dix jours du référendum.
Droits
ancestraux
En métropole, on n'arrive pas chez ses hôtes
les mains vides. En Nouvelle-Calédonie non plus. Nous commençons donc par les
rituelles paroles d'accueil, assorties de la remise par le visiteur de
« manous », ces coupons de coton aujourd'hui imprimés en Chine, d'un paquet de tabac et de
papier à cigarette. Cette rituelle « coutume » achevée, la discussion
commence. Un doux parfum d'herbes grillées, qui n'émane pas de la cuisine
collective, embaume l'atmosphère. « Ici, c'est Kanaky ! » lance
une occupante, Linda Létoile, dévoilant sans agressivité ses sympathies
indépendantistes. Mais sans lâcher son smartphone. Son univers, et celui des
autres bloqueurs, est centré sur l'archipel. Leurs adversaires ne sont ni la France, ni les colons, ni même
les exploitants de la mine. On se trouve plutôt dans une opposition de
générations, les jeunes militants luttant – non sans similitude avec les
zadistes de Notre-Dame-des-Landes – dans une démarche de défense de
l'environnement, contre la logique d'exploitation à outrance du nickel local.Il ne faut jamais oublier que le droit foncier calédonien obéit à des critères spécifiques. La terre dispose d'un propriétaire en titre, ici la province Nord dirigée par les indépendantistes. Ce propriétaire attribue des droits d'exploitation à une société minière, avec des permis. Ici, la SLN. Ailleurs, ces deux acteurs suffiraient à maîtriser le jeu. Pas en Nouvelle-Calédonie. Car à Kouaoua, les « coutumiers », à savoir les chefs des tribus locales, sont titulaires des droits ancestraux du peuple autochtone, désormais reconnus par la République. C'est même l'une des principales différences avec l'ancien Code colonial de l'indigénat, en vigueur en Nouvelle-Calédonie entre 1887 et 1946. Sans leur accord, l'exploitation de la mine n'aurait pas été envisageable.
Chauve-souris
frugivore
Le conflit est né, expliquent les occupants,
d'un accord financier secret entre l'exploitant, les autorités provinciales et
des chefs coutumiers dont l'identité n'a pas été dévoilée. Signé
en 2011 et entré en vigueur en mars 2018, ce contrat débouche sur des
autorisations d'exploitation de nouvelles terres à nickel, sur les zones de
Mont-Calm, Chêne-Gomme et Byrsa. Trois espaces naturels intacts. Or,
l'extraction du nickel à ciel ouvert est terriblement pénalisante pour
l'environnement. Les sols sont raclés sur plusieurs mètres, les boues rouges
toxiques s'amoncellent notamment dans les cours d'eau et dans la mer. Amori
Nimoou prend la parole : « Notre tribu de Mea n'a pas été respectée.
Aucune promesse n'a été tenue, nous n'avons toujours pas de terrain de foot, de
temple, de logements sociaux. Des gens d'ailleurs ont été embauchés. Les
anciens ont mélangé la coutume et le business. On ne demande pas d'argent, on
ne demande pas de travail. On veut juste qu'ils arrêtent de toucher à nos
montagnes ! » Les zones concernées par les permis seraient des
viviers biologiques, refuges d'espèces rares et protégées : la roussette,
grosse chauve-souris frugivore, en fait partie, avec le cagou, emblème de la
Nouvelle-Calédonie, et le pigeon notou : « On les chasse pour les
manger avec la première igname, en mars-avril. On n'en peut plus ! Quand
il pleut, la mer devient rouge, tous les coraux sont morts. » Un
connaisseur lucide de la situation le reconnaît : « En
Nouvelle-Calédonie, le foncier est un problème constant, aggravé par la
malédiction du nickel ! La richesse qu'il produit, mais qui ne durera pas,
nourrit la connivence de fond entre les coutumiers et les tenants de
l'économie. »
Rien
à perdre
Le conflit de Kouaoua s'est vite
envenimé : le long tapis roulant, la « serpentine », qui descend
le minerai à la mer a été incendié à plusieurs reprises, des dégradations
diverses ont été commises dans la commune voisine. Issu d'une tribu kanak, l'un
des rares dans ce cas, un fonctionnaire estime que « la maîtrise du
développement minier par les indépendantistes a conduit à une aggravation des
inégalités, en faveur des chefs coutumiers. Les militants de Kouaoua sont sans
doute agressifs et violents. Mais ils n'ont rien à perdre, n'ont pas de travail
ni d'insertion en vue ».C'est l'une des questions qui se poseraient si le scrutin d'indépendance donnait la majorité au « non ». Que feraient ces jeunes qui croient à l'indépendance, dont les aînés leur ont dit qu'elle serait la solution à tous leurs maux ? Toutes les autorités, à Paris, à Nouméa et ailleurs en Nouvelle-Calédonie, craignent dans ce cas un rejet éruptif. En croisant les doigts.
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Que l'on a importé indirectement après
la décolonisation depuis plus de 50 ans de l'indépendance de nos possessions de
cet empire hors de France dont l'immigration est issue en grande partie !
Alors que les calédoniens votent comme
ils veulent, ça ne changera pas grand-chose s'ils veulent leur indépendance, à
par leur nationalité, mais la France restera encore là, car ils en auront
toujours besoin et nous français nous paierons comme d'habitude pour les aider
!
Jdeclef 04/11/2018 09h22LP
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