vendredi 10 avril 2020

Ces ARS ne sont que l'exemple d'un état kafkaïen qui se noie dans des règlements...


Coronavirus : les agences régionales de santé, boulets bureaucratiques ?

Créées en 2010 pour moderniser l'offre de soin, certaines ARS ont du mal à gérer l'épidémie. La consternante « guerre des masques » en est l'exemple.

Lundi 6 avril, à la télévision, le ministre de la Santé annonce solennellement un tournant majeur : « Tous les résidents et tous les personnels des Ehpad », promet Olivier Véran, seront testés « dès l'apparition du premier cas confirmé de malade du coronavirus au sein de l'établissement ». Enfin ! réagissent les professionnels. Après des semaines de débats sur l'opportunité d'élargir, ou non, la détection des malades afin de les isoler efficacement, la « campagne de tests » est lancée ! Le ministre a parlé. À charge pour ses représentants sur le terrain d'appliquer la nouvelle doctrine.
Jeudi 9 avril, pourtant, ça coince toujours. « Des tests dans les Ehpad ? Ça n'existe pas chez nous, et rien n'est mis en place. De toute façon, on n'a pas de kits », s'étonne le président du conseil départemental de Saône-et-Loire André Accary, à la tête d'un département pourtant lourdement touché : 53 Ehpad y ont signalé au moins un cas présentant des symptômes de type Covid-19 depuis le début de la crise. « L'ARS fait toujours le recensement sur déclaration de diagnostic… » La veille, le représentant de l'ARS de la région Bourgogne-Franche-Comté l'a confié à ses interlocuteurs lors d'une conférence téléphonique : « Ce n'est pas très opérationnel comme annonce, il faut qu'on réfléchisse à comment mettre en place cette mesure… » La réflexion, dans plusieurs régions de France sous-dotées en personnel médical et en matériel, est encore au point mort.

« Flou total »

« C'est une caricature de bureaucratie, d'inertie », s'emporte le directeur général des services d'un département du centre, qui s'arrache littéralement les cheveux depuis le début de la crise. « Faire des tests ? Mais la nouvelle plateforme informatique pour recenser les malades des Ehpad n'est opérationnelle que depuis deux jours, et elle a bugué hier », s'étrangle-t-il. « Les chiffres ne sont toujours pas fiables. » Jusqu'à aujourd'hui, la doctrine retenue par les ARS pour recenser les résidents contaminés des Ehpad était particulièrement fragile : « Si deux résidents présentant des symptômes sont testés positifs, tous les autres malades de l'établissement, non testés, sont considérés comme des cas Covid-19. » Et elle risque de le rester tant que les tests systématiques ne seront pas mis en place, ce qui, selon les territoires, pourrait prendre plusieurs semaines. « On travaille dans le flou le plus total », poursuit ce directeur des services. « L'ARS récolte les données mais anonymise les établissements, et ni les élus ni le préfet n'ont la moindre information sur les Ehpad touchés. Or nous en avons besoin, pour leur livrer des masques ou des surblouses, organiser la logistique des obsèques, soutenir les directeurs d'établissement… » Depuis des semaines, les services de plusieurs départements appellent donc un à un leurs Ehpad pour faire eux-mêmes le recensement. « C'est invraisemblable ! »

L'invraisemblable affaire des masques

Comme leur paraît « invraisemblable » la confondante « guerre des masques » à laquelle se livrent, sur le terrain, les représentants de l'État, de l'administration et des collectivités locales, qui a connu une apothéose le week-end dernier, quand l'armée a accueilli sur le tarmac de l'aéroport de Bâle-Mulhouse une cargaison de masques achetés en Chine par les régions Grand Est et Bourgogne-Franche-Comté, pour se l'approprier. La voix de l'importateur français, chamboulé de s'être senti traité comme un bandit de grand chemin, tremble encore quand il confie au Point : « J'ai avancé l'argent aux régions, pris des risques pour aider mes compatriotes, et je continuerai à le faire. Mais ce jour-là, j'ai vécu les pires instants de ma vie… » L'histoire, que le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner a tenté d'étouffer en niant tout acte de réquisition (alors qu'un arrêté a bel et bien été pris), a ulcéré les services de la région la plus durement frappée par le coronavirus, et mérite d'être racontée.
Coronavirus : les laboratoires vétérinaires commencent enfin les tests
Depuis des semaines cette mi-mars, alors que les hôpitaux ploient sous le choc de la vague, les élus de la région Grand Est réclament auprès de l'État des masques pour équiper leurs services médico-sociaux, leurs Ehpad, les médecins et infirmiers libéraux, les pharmacies, leurs personnels en contact avec le public… dont le travail est indispensable. Mais il n'y a pas de masques. L'existant est donc réservé au personnel soignant, que les ARS se chargent d'attribuer. Lorsque, le 20 mars, le gouvernement autorise à nouveau les collectivités à passer leurs propres commandes, beaucoup saisissent l'occasion. « Nous avons passé 72 heures à sélectionner un importateur avec de bons réseaux en Chine. Nous l'avons trouvé, avons vérifié ses antécédents auprès de la DGSI, et le 23 mars le bon de commande était signé pour cinq millions de masques. En l'apprenant, l'ARS a contacté notre importateur pour passer sa propre commande. »
Une première cargaison arrive, incomplète, que l'ARS s'approprie en quasi-totalité. Puis une seconde, réceptionnée par l'armée sur le tarmac de l'aéroport, sans que les élus aient été informés. « C'est dingue ! La collectivité a fait tout le travail. Puis l'ARS est arrivée, a piqué notre boulot et la cargaison. Comment expliquer que ce qu'on a réussi à faire, personne ne l'ait fait avant ? Ça faisait trois semaines ici que les médecins libéraux demandaient des masques, et rien ne s'est passé ! » Devant les journalistes, pour « préserver l'unité nationale », les élus se retiennent. Mais dans les services, plusieurs craquent. « Quand l'hôpital de Mulhouse a été saturé, l'ARS aurait pu transférer des gens à Strasbourg : elle n'a rien fait. Il a fallu que notre président de région [Jean Rottner, NDLR] téléphone au ministre-président des Länder allemands pour qu'ils nous prennent des malades ! » La prochaine cargaison de masques, attendue ce samedi, « arrivera à Liège ou au Luxembourg. Pas question qu'on nous les pique ! »

« Si je ne donne pas de masques aux éboueurs, en trois jours ma ville ressemble à Marseille en pleine peste noire »

Dans toute la France, les élus rapportent de tels dysfonctionnements. À Limoges, à Bordeaux, en Loire-Atlantique… Les commandes passées par les collectivités, avec l'aide d'entreprises locales, arrivent au compte-gouttes, mais elles arrivent. Celles passées par Santé Publique France, qui chapeaute les commandes du ministère de la Santé, non. « Je n'ai rien contre le fait que l'ARS réquisitionne nos livraisons, mais ils auraient dû fixer la règle du jeu avant », s'agace un élu du Sud-Ouest. « Ces gens ne comprennent pas que si je ne donne pas de masque aux types qui montent à trois dans une cabine de camion poubelle, ils ne voudront plus y aller, et en trois jours ma ville ressemble à Marseille en 1348 en pleine peste noire ! L'ARS n'a aucune vision du terrain, et la nécessité absolue de donner des masques aux agents des ordures ménagères lui échappe totalement. » Une absence de vision quasiment structurelle qu'un cadre du département résume par ces mots : « Quand une catastrophe survient, on fait appel à la sécurité civile, aux forces armées, à la Croix-Rouge… mais pas à l'ARS. Toutes les autres crises ont été gérées par les préfets. »
Sébastien Le Fol – Coronavirus : la fièvre bureaucratique
C'est le nœud du problème. Bijou d'architecture administrative extraordinairement complexe, les puissantes agences régionales de santé sont sur le terrain les tentacules du ministère. Créées en 2010 de la fusion de plusieurs services pour rationaliser l'offre de soin et veiller à une meilleure gestion des dépenses hospitalières et médicales, les ARS ont profondément bouleversé l'organisation des soins sur le territoire. La direction des hôpitaux, retirée aux médecins, a été confiée à des gestionnaires. Leur vaste administration a avalé les caisses régionales d'assurance maladie, et les politiques de veille, de sécurité, de police environnementale, de gestion des crises sanitaires qui, auparavant, étaient sous la houlette des préfets. « On les a créées pour de bonnes raisons, explique l'ancienne préfète de Loire-Atlantique Nicole Klein, qui fut également directrice de l'ARS d'Aquitaine au moment de sa création. On avait besoin d'un grand service public, qui soit indépendant du pouvoir politique. Mais ce sont deux mondes, deux cultures différents. » En temps normal, souligne l'ancien préfet Gilles Clavreul, « le rôle des ARS est de produire des normes et de la réglementation budgétaire. Mais on ne peut pas gérer une crise comme celle-là, à caractère universel et multidimensionnel, sans connecter le sanitaire à l'ordre public et à l'économie. Cela s'articule avec les peurs, la communication… Ce qui échappe totalement aux directions d'ARS. »

Une administration obèse, aux antennes départementales squelettiques

Et les critiques s'accumulent : ici, l'ARS a tardé à mobiliser les cliniques privées et leurs lits de réanimation, enfermée dans sa culture du « tout public. » Là, les pompiers relevant du préfet n'ont pas le droit de parler à l'ARS, qui ne savait donc pas qu'ils disposaient de gel hydroalcoolique. Ailleurs, les agences ont refusé pendant des semaines de fournir des masques au personnel médico-social, pourtant au contact permanent de personnes vulnérables. Comme elles ont refusé, en Indre-et-Loire notamment, de permettre aux laboratoires publics vétérinaires de réaliser les tests, une norme française contestée ne le permettant pas (le ministre, sous la pression des élus, l'a finalement adaptée.) La démission forcée, mercredi, de Christophe Lannelongue, le directeur de l'agence régionale de santé du Grand Est qui avait déclaré, alors que les hôpitaux débordaient, que les suppressions de lits et d'emplois prévues à l'hôpital de Nancy seraient maintenues après la crise, illustre le fossé qui sépare ces hauts fonctionnaires, sortant de l'ENA ou de l'Inspection générale des affaires sociales, des élus de terrain. « On fait des conférences téléphoniques à longueur de journée qui ne sont pas du tout opérationnelles », rapporte un élu de Rhône-Alpes, qui plaide, comme le député Philippe Vigier (UDI) dans un rapport récent, pour la suppression pure et simple des ARS.
EXCLUSIF. Comment la France se prive de 150 000 à 300 000 tests par semaine
« C'est un sujet, admet un ministre. Les critiques contre les ARS avaient été nombreuses au moment du grand débat : les gens ne comprennent pas quand l'agence ferme une maternité qui a peu d'activité… » La solution, pour Nicole Klein, serait pourtant ailleurs. « L'administration est obèse au niveau national et régional, mais les ARS ont souvent négligé leurs antennes départementales. Les équipes y sont réduites, sans moyens, on n'y met pas les meilleurs agents… Or on voit que le département, c'est le bon échelon pour une crise comme celle-ci. » Et les compétences individuelles restent la clé de la réussite : « Des bras de fer avec l'ARS, j'en ai quasiment tous les jours, rapporte André Accary depuis la Saône-et-Loire. Mais le directeur se bat souvent avec nous pour que les dossiers avancent. Il fait monter l'information à Paris… Mais les autorisations ne redescendent pas. On aimerait tous, bien sûr, que ça aille plus vite. Mais cette crise est totalement inédite. On n'a pas de manuels, pas de précédents, on apprend tous les jours. Et chaque jour, on est plus efficaces. » Vaincre l'épidémie, d'abord. Le temps des mises au point, des rééquilibrages de terrain, et sans doute des réformes viendra ensuite.
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Et tas de circulaires ou formulaires qui doivent être revêtus de cachets de ministère mis par des fonctionnaires bornés d'administrations qui ne peuvent fonctionner normalement en faisant preuves de bons sens !

Ou les simples décisions sont quelque fois bloquées par des grouillots à esprits étriqués ou le règlement c'est le règlement rigide et rien d’autre et que cela même est si stupide, car c’est écrit sur un formulaire !

Le ministère de la justice peut avoir la palme, avec ses gros codes pénaux ou quand il manque une virgule ou le document non reçu à cause de panne de fax on relâche un prévenu pour vice de forme grand bonheur des avocats !

Ou qu’on libère 130 détenus radicalisés pour raisons sanitaires !?

Mais il n’y a pas que ce ministère, celui de la santé pourtant sur la brèche en ce moment où la vie de tant de français est en jeu, car il commet les mêmes erreurs, comme faire revenir un avion avec ses malades par ce qu’il manque une autorisation donnée par un de ces nombreux fonctionnaires ?!

Il faut dire que ceux-ci sont trop nombreux dans notre pays de ronds de cuirs style IXX eme siècle, entre ceux d’états et les territoriaux et il faut ce type de crise pour voire cela et s’en rendre compte ?...

Le président dépassé dit que l’on reconnaîtra les fautes commises par certains (et lui alors ?!)

Car pour l’instant, les pauvres décisions qu’il a pris avec son gouvernement et son 1er ministre sont si impuissantes et quelque fois en plus mal gérées donne peu de résultat sans compter l’imprévoyance et les mensonges distillés par ces ministres depuis le début de celle-ci !

Il faut en effet que les français en prennent conscience et sanctionnent en 2022 par leurs votes, le résultat plus que médiocre de leurs politiciens élus, car pour l’instant au quotidien, on en est à attendre un miracle et subir une restriction drastique de nos libertés !

Jdeclef 10/04/2020 14h21

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