Coronavirus :
Didier Raoult, professeur rebelle
PORTRAIT. Citées
par Donald Trump et Elon Musk, les recherches de l'éminent infectiologue
suscitent désormais plus d'espoir que d'agacement.
Coronavirus :
Macron va rencontrer le professeur Didier Raoult à Marseille (dernière
information)
Lors d'une
visite dans la cité phocéenne, ce jeudi après-midi, le chef de l'Etat doit
s'entretenir avec le directeur de l'IHU-Méditerranée, qui publie une étude sur
l'usage de l'hydroxychloroquine.
En
ce mois de février, alors que la Chine est en guerre contre un nouveau virus
qui ne semble pas encore faire trembler l'Europe, l'un des meilleurs infectiologues
de la planète se penche sur la littérature scientifique chinoise. Didier Raoult,
qu'aucun virus n'a jamais fait trembler, remarque une donnée majeure en
explorant les travaux d'un spécialiste chinois des coronavirus, l'éminent Zhong
Nanshan, pneumologue, épidémiologiste et surtout l'un des découvreurs du virus
du Sras en 2003. Selon ce dernier, la chloroquine a permis de contrer le
SARS-CoV-2 (le coronavirus actuel) chez 100 patients en réduisant le portage
viral, soit la période pendant laquelle le virus est détectable dans
l'organisme. De son propre aveu, Raoult n'a rien inventé sur ce coup-là, tout
chef du grand institut hospitalier universitaire (IHU) Méditerranée-Infection
de Marseille qu'il soit. L'homme voue une grande admiration aux scientifiques
chinois : «
Ce sont les premiers producteurs de science au monde. Ils sont passés devant
les Américains. Le monde a basculé. On n'a pas fini d'avoir des surprises avec
la Chine, ils sont les seuls à investir massivement dans le domaine de la
virologie. »
EXCLUSIF - Les extraits du prochain livre du professeur Raoult
Pour lui, l'évidence est là, la chloroquine est la
piste à explorer au plus vite. D'autant que cette chloroquine, il la connaît
bien. Cette molécule antipaludéenne date de Mathusalem. « Elle a été
avalée des milliards de fois, je l'ai moi-même prescrite à des milliers de
patients », assure-t-il. En effet, voilà trente ans qu'il s'en sert
pour la fièvre Q et la maladie de Whipple, causées par des bactéries qui
s'introduisent dans les cellules à la manière des virus. Ni une ni deux, il
alerte le monde pas assez curieux pour « s'intéresser suffisamment à la littérature scientifique
chinoise, peut-être parce qu'elle est chinoise, je ne sais pas ».
Repères
13 mars 1952
Naissance à Dakar.
1984
Crée le laboratoire des rickettsies, qui a isolé 20 % des bactéries connues
chez l'homme.
1991
Dirige le laboratoire de bactériologie-virologie de l'hôpital de la Timone, à
Marseille.
2003
Découverte du premier virus géant.
2007
Nommé directeur de l'IHU Méditerranée infection, à Marseille.
2010
Grand Prix Inserm.
2016
Découverte chez des virus géants d'un système de défense inédit.
Savant fou. Évidemment, il
le fait à la façon Raoult. Tonitruante. Une vidéo est mise en ligne le 25
février sur le site de son institut avec un titre choc : « Fin de partie ! »,
devenu depuis : « Coronavirus : vers une sortie de crise ? » Sur l'écran, il
apparaît force tranquille, avec son allure de savant fou, barbe indisciplinée
et cheveux longs, mi-druide mi-chanteur de ZZ Top, pour annoncer « une
nouvelle très importante, un scoop de dernière minute » : la
chloroquine fonctionne sur le nouveau coronavirus, « il y a une amélioration
spectaculaire sur tous les cas cliniquement positifs (…), c'est une
excellente nouvelle, c'est probablement l'infection respiratoire la plus facile
à traiter de toutes ». Et de conclure, sous les rires de ses
étudiants : «
Faites attention, il n'y aura bientôt plus de chloroquine dans les pharmacies.
» Le ton est donné. Sa prestation devient virale (un comble !).
Voilà enfin le monde alerté sur son intuition. Que n'avait-il fait ? Une partie
de la communauté scientifique s'arc-boute, crie au scandale… Les spécialistes
dans la presse, les chercheurs sur les réseaux sociaux se retrouvent tout à
coup plus occupés à démolir l'homme et ses méthodes qu'à parler du fond de son
propos. Il a secoué « les Parisiens qui sont tous en train de parler du vaccin et d'on
ne sait quelle autre multitude d'antiviraux à l'essai et hors de prix sur les
plateaux télé. Ceux qui s'autoproclament experts et que les journalistes
admettent comme tels… Mais regardez leurs publications ! » nous
martèle-t-il.
Pourquoi la chloroquine du professeur Raoult les rend-elle tous
fous ?
Fake news ! C'est ainsi que sa piste de la chloroquine sera
estampillée partout, y compris sur le site du ministère de la Santé, avant que
la mention ne disparaisse très vite. « Souvent, on me prend pour un fou, j'ai l'habitude, je les laisse
parler. » N'empêche qu'il n'a plus vraiment le choix, il doit
prouver ce qu'il avance. Cela tombe plutôt bien, car il n'est pas du genre à
lâcher
son os - les défis, c'est son dada. Malgré ses frasques, et sans
doute grâce à son CV hallucinant, il retrouve l'oreille du ministère de la
Santé avec le départ d'Agnès Buzyn. Personne n'a encore parlé de la chloroquine
au nouveau ministre. Une ignorance vite réparée par Raoult, lui-même, qui
échange régulièrement avec Olivier Véran au téléphone. En dépit de l'agitation
de ses confrères autour de ses méthodes, le Marseillais est invité à rejoindre
le comité d'experts scientifiques du ministre, ces 11 apôtres chargés
d'éclairer la décision publique face à la propagation de la maladie Covid-19.
Et force est d'admettre que, au milieu de cette brochette de scientifiques bien
sages et de belle tenue, Raoult fait quand même figure d'ovni.
Franc-tireur. Si
la chloroquine n'avait pas encore obtenu les faveurs de l'OMS - ni celles de
l'Europe, ni celles de la France - pour figurer parmi les molécules à tester en
priorité, elle était depuis des semaines recommandée dans les protocoles
chinois, iraniens, coréens… Début mars, Raoult obtient le feu vert du ministère
pour réaliser un premier essai clinique. S'il veut être suivi, il doit produire
des résultats, des vrais, des solides. La France exige de la bonne science et
ne se contentera pas de ses élucubrations en vidéo, si enthousiasmantes
soient-elles. «
Raoult, c'est le Gérard Depardieu de la science, on l'adore, c'est un génie
dans son domaine, mais il peut aussi faire hurler avec des prises de position
sans nuances, parfois sans arguments, qui, toujours, le mettent en avant »,
nous confie un chercheur. « Il est capable du meilleur comme du pire », relève
un autre. Une chose est sûre, l'homme semble avoir beaucoup d'influence. Il
peut vite rendre la vie difficile à ceux qui le critiquent. Voilà qui explique
sans doute pourquoi les chercheurs et les médecins que nous avons contactés
n'ont pour la plupart accepté de témoigner qu'à condition de rester anonymes.
Depuis des années, ses prises de position tapageuses hérissent le
petit monde confiné de la science - et pas que. Au Point, on en sait
quelque chose. Nous avons publié dans nos colonnes pendant plusieurs années des
dizaines de tribunes du Pr Raoult, et les courriers enflammés de lecteurs
mécontents nous l'ont appris. Jouer les francs-tireurs, y compris en dehors de
son périmètre, c'est aussi sa spécialité. Comme lorsqu'il monte au créneau sur
le réchauffement climatique, en 2013, dans une chronique du Point,
déclarant que «
la planète ne se réchauffe plus depuis 1998. Jusqu'à cette date, le réchauffement
brutal était lié à un phénomène météorologique : El Niño ». Une
vision en totale opposition avec les données du Giec, le groupement de
chercheurs internationaux qui élabore en toute transparence et avec le plus
grand sérieux un consensus scientifique sur le climat. Giec ou pas Giec, lui,
il s'en fiche !
Ses ouvrages aux titres évocateurs
La Vérité sur les vaccins, avec
Olivia Recasens (Michel Lafon, 2018).
Mieux vaut guérir que prédire
(Michel Lafon, 2017).
Arrêtons d'avoir peur ! (Michel
Lafon, 2016), aussi au format poche (J'ai lu, 2019).
Votre santé. Tous les mensonges qu'on vous raconte (Michel
Lafon, 2015).
Dépasser Darwin (Plon, 2010).
Épidémies. Vrais dangers et fausses alertes (Michel
Lafon, parution le 25 mars 2020).
Indomptable. Naviguer
à contre-courant, il le fait depuis toujours. À l'école, c'était un cancre, ses
bulletins étaient pitoyables. Le petit génie né à Dakar, au Sénégal, est rentré
en France à 10 ans. Pendant cette première décennie, il a avalé, comme bon
nombre de Français des colonies, justement, de la chloroquine à gogo, histoire
de se protéger du paludisme. Rentré pour s'installer à Marseille, ce fils d'un
médecin militaire et d'une infirmière n'était-il pas destiné à devenir médecin
? Pensez-vous. À l'heure où l'on jette des pavés dans le Paris de 1968,
l'indomptable s'en va voguer sur un navire de la marine marchande. De retour à
terre, voilà qu'il se met enfin en tête de passer son bac, en candidat libre,
évidemment, mais surtout il ne choisit pas un bac scientifique… mais littéraire.
Après avoir bourlingué pour étancher sa soif de connaissances, il se décide
enfin à faire médecine sous la pression de son père. Ses études réussies, un
post-doc aux États-Unis, brillant, remarqué, lui vaut une proposition de poste
au CDC, le prestigieux centre de contrôle des maladies américain. Un poste
absolument impossible à refuser ! Alors, bien entendu, il décline. C'est
Raoult.
Nous sommes au début des années 1980. Il veut travailler en
France, au pays de Pasteur, lui, le grand « pasteurien de la première heure », tel qu'il aime à
se décrire. Le rouleau compresseur Raoult est en marche. Il use les paillasses
de Marseille et écrase tout sur son passage. Il s'intéresse aux rickettsies,
une famille de bactéries dont certaines peuvent déclencher le typhus, et
devient en moins de temps qu'il ne faut pour le dire le grand spécialiste
mondial du sujet. Des bébêtes pour lesquelles il crée son premier labo - il a
32 ans. Ses équipes grossissent. Aujourd'hui, l'IHU Méditerranée-Infection,
qu'il dirige, rassemble 700 collaborateurs. Chaque année, plus d'une centaine
d'étudiants étrangers venus de partout - surtout d'Afrique, continent qu'il
affectionne - arrivent pour compléter ses bancs. Il s'entoure de jeunes équipes
qu'il envoie inlassablement à la conquête des mondes engloutis des microbes. « C'est
l'époque de Christophe Colomb, on est en train de découvrir l'Amérique », fanfaronne-t-il.
S'amuser. La méthode
paie. Le Guinness
Book marseillais se remplit. La découverte du premier virus géant,
c'est lui. Le premier virus virophage, c'est lui. La plus grosse bactérie,
c'est lui. La plus grosse archée, c'est encore lui. Le premier à cultiver la
bactérie à l'origine de la maladie de Whipple, ce que personne n'était parvenu
à faire en un siècle, c'est encore et toujours lui. Enfin, pas seulement lui :
les quelques autres brillants esprits avec qui il collabore y sont pour quelque
chose…. Et, son palmarès flamboyant, il le doit aussi aux machines. Car Didier
Raoult, c'est un fou de technologie. Constamment, il fait la course à
l'armement. Les meilleurs instruments, il remue ciel et terre pour les obtenir.
« J'ai eu le
premier séquenceur automatique du monde dans un laboratoire clinique en 1992.
J'aime les nouveaux outils. À chaque fois que je les utilise, je vois une
partie du monde qu'on ne voyait pas avant. » Et c'est ainsi qu'il
est aujourd'hui à la tête du laboratoire le mieux équipé de France. « 40 % des
bactéries chez l'homme ont été découvertes chez nous. On était tout seuls, mais
maintenant les gens ont compris », s'amuse-t-il.
Car c'est aussi cela, la méthode Raoult : s'amuser. « Dans la
recherche, il faut s'amuser. Il faut de la créativité, de l'inventivité,
découvrir ce que personne n'a jamais découvert, c'est ce qui est jouissif. Si
on n'invente pas, si on ne s'amuse pas, si on commence à faire des choses
répétitives, à regarder ce que font les autres, on finit avec une cravate dans
les commissions en tout genre », prévient celui qui a reçu le Grand
Prix de l'Inserm en 2010.Mais il existe un revers bien moins reluisant à la
médaille. Si lui semble s'amuser, certains membres de son équipe en ont plein
les bottes. «
Son laboratoire est une caricature de mandarinat, avec des pressions et des
brimades terribles », confie un scientifique qui l'a beaucoup côtoyé.
En 2017, une lettre rédigée par 12 ingénieurs de recherche - qui resteront
anonymes - dénonce une situation « insupportable et dégradante » qui « provoque un
mal-être au travail ». « Nous sommes cantonnés à un rôle d'exécutants devant
réaliser des expériences commandées par la hiérarchie, même quand nous les
savons vouées à l'échec ou inadaptées à la problématique scientifique posée
(…). Aucun
droit ne nous est reconnu quant à la paternité du travail réalisé »,
écrivent-ils encore. En effet, Raoult signe avec ses équipes des centaines de
publications chaque année, et nombre de ses collègues se demandent comment il
est possible qu'elles soient toutes réalisées dans les règles de l'art ou
comment il a le temps de toutes les lire. En 2006, son laboratoire a même été
rattrapé par le col pour des erreurs grossières dans certaines publications.
Fraude scientifique ou manque de rigueur ? Malgré ses justifications et celles
de ses cosignataires, Didier Raoult se retrouve interdit de publication pendant
un an par l'American Society for Microbiology, une société de recherche qui
contrôle les journaux scientifiques les plus prestigieux du domaine. Chez
Raoult, visiblement, on ne fait pas de recherche sans casser des éprouvettes.
Mécréant. Revenons à
son tout dernier coup d'éclat. Peut-être le plus retentissant de sa carrière.
Retentissant en France, évidemment. Mais pas seulement. Le 16 mars, une
nouvelle vidéo est mise en ligne sur le site de son institut. Le « Depardieu
de la science » continue son cinéma. Silence, on tourne : il
annonce les résultats de son étude sur 24 patients. Bonne nouvelle : la
chloroquine, ça marche ! Coupez. Le jour même, un tweet de l'homme aux
32,5 millions d'abonnés, le milliardaire patron de Tesla et de Space X, Elon
Musk, apparaît : «
Il va peut-être falloir prendre la peine d'envisager la chloroquine pour
traiter le Covid-19. » Et les labos pharmaceutiques de commencer à
s'agiter. Sanofi annonce qu'il offre aux autorités françaises du Plaquenil
(médicament à base d'hydroxychloroquine, une molécule cousine de la
chloroquine) pour soigner 300 000 malades, le géant du générique israélien Teva
suit le mouvement et enchérit en proposant 10 millions de doses aux hôpitaux
américains. Qui dit mieux ? Le ministre de la Santé, Olivier Véran, indique
qu'on accélère le rythme en France : « J'ai pris connaissance des résultats et j'ai donné l'autorisation
pour qu'un essai plus vaste par d'autres équipes puisse être initié dans les
plus brefs délais sur un plus grand nombre de patients. »
Le 19 mars, invité dans une des émissions phares de la chaîne
américaine controversée Fox News, Gregory Rigano, chercheur à Stanford, enjoint
au président Trump d'autoriser illico l'utilisation de l'hydroxychloroquine
contre le nouveau coronavirus. Citant les résultats de l'essai d'un professeur
du sud de la France, un certain Didier Raoult. Ce n'est pas tombé dans
l'oreille d'un sourd. Trump s'empresse d'annoncer lors d'une conférence de
presse : «
Nous allons pouvoir rendre ce médicament disponible quasi immédiatement ».
Et paf ! Promesse un peu rapide que la Food and Drug Administration (FDA),
l'agence qui supervise la commercialisation des médicaments outre-Atlantique,
s'empresse de tempérer. Stephen Hahn, le dirigeant de la FDA, appelle à ne pas
donner de «
faux espoirs » aux patients avant que le médicament ne soit
complètement testé et validé, et confirme la mise en place d'un essai clinique
étendu. Mais la vague Raoult a déjà noyé les États-Unis. Le twittos le plus
frénétique de l'Amérique surenchérit le 21 mars dans deux messages
présidentiels : «
HYDROXYCHLOROQUINE & AZITHROMYCINE, prises ensemble, ont une réelle chance
de changer le cours de l'histoire de la médecine. La FDA a déplacé des
montagnes. Merci ! J'espère qu'elles seront toutes les deux (…) mises à disposition
IMMÉDIATEMENT. LES GENS MEURENT, IL FAUT FAIRE VITE ET QUE DIEU VOUS BÉNISSE
TOUS ! » Notre chercheur, qui ne croit en rien, ne sera pas
particulièrement touché par les derniers mots. « Je suis sans doute l'homme le
plus mécréant que vous connaissiez », nous confiait-il.
Tsunami. Dans le
détail, qu'est-ce que cette fameuse chloroquine, qui a créé un tsunami ? Bon
marché, cette molécule utilisée depuis la Seconde Guerre mondiale est dérivée
de l'écorce d'un arbre, Cinchora officinalis, comme la quinine, un
antipaludéen vieux de plusieurs siècles. Officiellement, la chloroquine et son
dérivé (l'hydroxychloroquine) ne sont autorisés que pour le traitement curatif
et préventif du paludisme, mais aussi dans certaines maladies auto-immunes
(polyarthrite rhumatoïde, lupus…). Par quel truchement biologique ce vieux
remède pourrait-il donc être efficace sur le tout neuf coronavirus ? En
agissant sur l'acidité du milieu dans lequel le virus prospère. « Quand le
virus va rentrer dans la cellule, il va utiliser un processus qu'on appelle la
fusion. Cette fusion a lieu si le milieu est acide. Or la chloroquine empêche
cette acidification et donc la fusion. Cela a été montré, en labo, sur des
cellules mises au contact du virus Sars-CoV-2. En présence de chloroquine, pas
de fusion donc pas d'infection », détaille Bruno Canard, directeur
de recherche au laboratoire Architecture et fonction des macromolécules
biologiques (CNRS, université d'Aix-Marseille).
Voilà pour la théorie. Cela n'empêche pas de faire bondir nombre
d'infectiologues qui voient resurgir cette chloroquine à chaque épidémie. On
leur a fait le coup avec la dengue, le zika, le chikungunya. « En
laboratoire, cela fonctionne, mais, quand on a essayé sur des modèles animaux
ou sur des malades, le traitement n'a pas montré d'efficacité phénoménale »,
continue Bruno Canard. « Ce qui ne veut pas dire qu'elle ne marchera pas sur ce nouveau
virus », reconnaît-il.
Précisément, quelles sont les données disponibles sur le
Sars-CoV-2 à la sauce chloroquine ? Il faut admettre que les données chinoises
sont très parcellaires. Publiée le 19 février par le département de
pharmacologie de l'université de Qingdao, elle affirme que 500 milligrammes
d'hydroxychloroquine deux fois par jour pendant dix jours suffisent pour lutter
contre la pneumonie provoquée par le Sars-CoV-2. Rien en revanche sur la
toxicité et les effets secondaires potentiels (troubles ophtalmologiques,
cardiaques, neuropsychiatriques, gastro-intestinaux, hépatobiliaires,
hématologiques et dermatologiques). C'est ennuyeux, d'autant que l'étude ne
comporte pas de données cliniques précises, ne mentionnant que la taille de la
cohorte, «
plus de 100 patients ». Impossible sur cette base de conclure !
Coronavirus : ce conseil scientifique qui gouverne la France
Pionnier. Et l'étude
marseillaise sur 24 patients, qu'est-ce que ça donne ? Au bout de six jours de
traitement par Plaquenil, à raison de 600 milligrammes par jour (deux fois
moins que la dose employée en Chine), seulement 25 % des patients sont encore
porteurs du virus, la proportion étant de 90 % pour ceux qui n'ont pas reçu de
traitement. Des données encourageantes a priori. Mais si on entre dans le
détail, ça coince. Tout d'abord, et avant tout, il s'agit d'un essai sur un
tout petit groupe. Ensuite, les patients ont été traités avec de la chloroquine
seule ou avec de la chloroquine associée à un antibiotique, l'azithromycine,
qui semble améliorer l'effet, mais face à un groupe témoin non traité et non
face à un groupe ayant reçu un placebo. Ce n'est donc pas un essai dit « en
double aveugle », le graal d'une bonne évaluation clinique.
Le Pr Jean-Paul Stahl, chef du service de médecine infectieuse au
CHU de Grenoble, pointe d'autres biais méthodologiques. « On ne sait
pas si la charge virale baisse grâce au traitement ou si elle aurait de toute
façon baissé naturellement chez ces patients. » Surtout, Didier
Raoult observe certes une baisse de la charge virale, mais semble-t-il à partir
de prélèvements dans le nez. « Mais pour les malades les plus graves, il est de plus en plus
clair que le prélèvement nasal n'est plus approprié pour chercher le virus. Il
faut le chercher dans les poumons. Ce qui n'a visiblement pas été pratiqué dans
l'étude. »
Qu'en pense Jean-Michel Claverie, du laboratoire information génomique
et structurale (CNRS et université d'Aix-Marseille), mondialement reconnu pour
son travail de recherche fondamentale sur les virus ? Il est peut-être l'un de
ceux qui connaissent le mieux Raoult, à la fois l'homme et le scientifique.
Deux fortes têtes ayant passé une grande partie de leur enfance en Afrique et
réputées pour leur caractère bien trempé. Ils ont été collaborateurs, amis,
concurrents, puis ils se sont « terriblement » fâchés pour d'obscures raisons
de pratiques scientifiques. Comme des frères ennemis, ils gardent cependant un
œil sur leurs travaux réciproques, s'envoyant de courts mails à l'occasion de
leurs publications, comme pour compter les points. Lorsque Jean-Michel Claverie
entend les attaques proférées à l'encontre son vieux rival, il ne peut
s'empêcher de prendre la parole : « Sa réputation sulfureuse est bien connue, mais il a démontré à
plusieurs reprises une grande intuition scientifique. On ne peut pas balayer d'un
revers de main les propos d'un des meilleurs microbiologistes de France. »
Et d'ajouter : «
On oublie comment le virus de la rage a été découvert. On a perdu le sens du
risque et l'esprit pionnier. Didier Raoult, lui, non. Il ose. Si les données
qu'il a présentées sont bonnes, on le saura très vite. Les patients ne manquent
pas, la chloroquine ne manque pas, donc il faut se lancer »,
insiste l'ami-ennemi.
Contrebandier. Et
il n'est pas le seul de cet avis. Le Pr Christian Perronne, chef du
service des maladies infectieuses à l'hôpital Raymond-Poincaré de Garches (92),
qui pourtant s'est pris quelques baffes affectueuses façon Obélix de la part du
Marseillais au sujet de la maladie de Lyme, soutient lui aussi son confrère. « Oui, il
faut vérifier l'efficacité de l'hydrochloroquine dans des études bien menées,
oui, elle peut avoir des effets secondaires. Mais c'est la plupart du temps
très bien toléré. J'ai l'habitude de l'utiliser, les accidents graves sont
rarissimes, même avec une prise à long terme. Je n'en ai jamais vu ! Nous
sommes en pleine épidémie, si cette molécule peut aider dès maintenant à
réduire le nombre de morts, soulager les cas graves, ce serait criminel de ne
pas s'en servir ! On est en temps de guerre, on ne va pas attendre une étude randomisée
contre un placebo », tonne-t-il.
De l'aveu d'un autre médecin, il soigne un membre de sa famille
ayant une pneumonie due au Sars-CoV-2 à la maison et lui donne de
l'hydroxychloroquine et de l'azithromicine depuis des jours. Il peut sortir de
l'ombre, il n'est plus considéré comme un contrebandier. Les hôpitaux eux-mêmes
la prescrivent désormais en traitement compassionnel. Alexandre Bleibtreu,
infectiologue à la Pitié-Salpêtrière (Paris), s'en est fait l'écho dans un
tweet le 12 mars : « Chers tous, pour être transparent, j'ai dit il y a deux semaines
que les données disponibles sur chloroquine étaient "bullshit". À
l'époque c'était vrai. De nouvelles données venant de Marseille contredisent ce
que j'ai dit et ce que je pensais. » Et d'ajouter, dans un second
tweet : «
Nous allons débuter le traitement par Plaquenil chez nos Covid + à la Pitié.
(…) Je
pense avoir eu suffisamment tort pour devenir chloroquiniste ascendant
raoultien. »
Le nouveau Pasteur. En
plus des nombreux essais cliniques en cours en Chine, un essai baptisé
Discovery et coordonné par l'Inserm dans le cadre du consortium européen
Reacting, visant à tester quatre molécules antivirales, dont, à présent,
l'hydroxychloroquine, vient de démarrer. Il inclut plus de 3 200 patients en
l'Europe (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, Royaume-Uni, Allemagne et Espagne),
dont au moins 800 en France (Paris, Lille, Nantes, Strasbourg, Lyon). Mais
Raoult n'a pas juré au ministère d'attendre des résultats cliniques plus
fiables. Le seul serment auquel il se conforme, c'est le «
serment d'Hippocrate », précise le communiqué dans lequel lui
et quatre autres médecins de Marseille (les Pr Philippe
Brouqui, Jean-Christophe Lagier, Matthieu Million, Philippe Parola et le Dr
Marie Hocquart) annoncent ce 22 mars faire « bénéficier à nos patients de la meilleure prise en charge pour
le diagnostic et le traitement d'une maladie ». Ils ont donc décidé
de pratiquer des tests diagnostiques sur tous les malades fébriles et de proposer
à ceux qui sont positifs (dont un grand nombre, peu symptomatiques, ont des
lésions pulmonaires au scanner), un traitement associant hydroxychloroquine et
azithromycine.
Au vu de ces annonces en cascade, les stocks de Plaquenil
(hydroxychloroquine) de la pharmacie centrale des hôpitaux de Paris sont déjà
très sollicités. Gageons que les traitements pour les malades chroniques
nécessitant cette molécule toute l'année ont été anticipés… La machine est
lancée et devrait fournir rapidement la réponse à la question qui est sur
toutes les lèvres : la chloroquine est-elle une arme de destruction massive du
Covid-19 ? Si les résultats font un flop complet, Raoult ira sucrer les fraises
avec le Nobel Luc Montagnier et sa mémoire de l'eau. Mais, si ça marche, on
pourra le considérer comme le nouveau Pasteur - et il ne l'aura vraiment pas
volé
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Car en matière de choix divers, il s'est tellement trompé notre
président monarque notamment dans le choix de ces collaborateurs ?
Enfin comme on dit, « ne jetons pas l'eau du bain avec le
bébé » quand déjà on voit les inepties de nos administrations
gouvernementales et essayer un remède s'il peut sauver des vies, cela vaut
mieux que de ne rien faire ou de jeter des masques périmés à la poubelle !
Car pour l'instant l'organisation de l'état pour lutter contre cette
pandémie est médiocre pour pas dire nulle, car manque de prévoyance alors que
ces corona virus n'étaient pas les 1ers et çà ce n'est pas pardonnable est un des
principaux défauts de la France et de ses dirigeants de tous bords politique est
de ne pas anticiper, ni prévoir, car on ne gère pas un pays au jour le jour (car
gouverner c'est prévoir...)
Jdeclef 09/04/2020 18h22
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