« Le
lepénisme façon Marine est durablement installé »
Pour le
politologue Jérôme Sainte-Marie, la candidate du RN peut désormais
s’appuyer sur un solide bloc électoral qui n’a plus rien du vote
protestataire?!
Il a été le premier à voir en
arrière-plan de l'affrontement Macron-Le Pen le choc de deux blocs, l'un
élitaire, l'autre populaire. Dès 2017 dans un article de presse, puis
en 2019 dans un essai, « Bloc contre bloc » (Éditions du
Cerf), distingué par le prix des Députés. Sa théorie, Jérôme Sainte-Marie, sondeur
et analyste politique, l'a forgée à l'origine pour expliquer « la
dynamique du macronisme », mais elle a fortement inspiré la stratégie du
Rassemblement national, Marine Le Pen la reprenant à son compte pour s'ériger
en porte-voix du bloc populaire. Pour Le Point, le politologue
décrypte la performance de la candidate.
Le Point : Cette campagne
présidentielle 2022 marque-t-elle l'entrée de Marine Le Pen dans une
autre dimension politique ?
Jérôme Sainte-Marie : Indéniablement, oui.
Malgré tout, Marine Le Pen a réussi à désenclaver son image personnelle. Elle a
rejoint le petit groupe des personnalités les plus appréciées des Français dans
les baromètres d'opinion. Elle bénéficie d'une image d'écoute, de proximité, de
sincérité et surtout de courage, qui sont des qualités très appréciées,
notamment chez les plus modestes. Plus que jamais, elle s'est affirmée comme la
représentante de ces catégories populaires qui se sont mobilisées durant la crise
des Gilets jaunes.
Présidentielle :
Marine Le Pen, la résiliente
Comme Jean-Luc Mélenchon…
Beaucoup plus que lui. Le vote Mélenchon est fait d'un alliage hétérogène de
plusieurs groupes. La strate dominante de cet électorat est cette petite
bourgeoisie diplômée des centres-villes : c'est la fraction sociale
motrice pour lui, celle où se recrutent ses dirigeants et la plupart de ses
militants. Autour de cette population s'agrègent ou plutôt cohabitent deux
autres groupes. D'une part, il y a un électorat issu de l'immigration
extra-européenne : selon l'Ifop, les musulmans ont voté jusqu'à 69 %
pour Jean-Luc Mélenchon. D'autre part, le candidat de La France insoumise a
attiré des ouvriers et des employés, certes, mais appartenant surtout à la
sphère publique ou bénéficiant d'un statut particulier, tel le personnel de la SNCF.
Cet ensemble composite et instable est réuni par une promesse commune : la
dépense publique comme solution à tous les maux. Marine Le Pen, elle, incarne
plutôt la France des travailleurs modestes du secteur privé d'origine
européenne, ce qui lui donne une endurance extraordinaire et lui a permis de
résister à l'offensive Zemmour à l'automne 2021. Il reste que cette division
des catégories populaires selon une ligne de partage culturelle constitue une
aubaine pour le bloc élitaire au pouvoir, mais peut-être est-ce inévitable.
Cette base électorale de travailleurs modestes lui
confère-t-elle, désormais, une stature autre ?
Elle l'amplifie. Pendant cette campagne, Marine Le Pen a acquis
une dimension politique manifeste : elle est devenue une candidate
crédible de second tour. En 2017, les personnes raisonnables et de bonne foi
n'imaginaient aucunement sa victoire ; ce qui ne fut pas le cas en 2022.
Aujourd'hui, le Rassemblement national s'installe dans un rapport de force avec
La République en marche équivalent à celui que l'on connaissait dans les
seconds tours opposant la gauche et la droite. À partir du moment où plus de
40 % des électeurs l'ont choisie au second tour, la stigmatisation de
l'extrême droite devient très difficile. Marine Le Pen n'apparaît plus comme
une candidate enclavée, mono-message, elle se projette dans la peau d'une
responsable politique pouvant assumer des fonctions dirigeantes. Sous une forme
ou sous une autre, le lepénisme façon Marine est durablement installé au cœur
de la vie politique française.
À partir du moment où plus de 40 % des
électeurs l’ont choisi au second tour, la stigmatisation de l’extrême droite
devient très difficile.
Le vote Le Pen ne reste-t-il pas un vote protestataire ?
Je ne le crois pas. D'une part, par sa constance : il répond
à une tradition électorale très large désormais : des familles, des
quartiers, des régions votent de manière récurrente pour le Rassemblement
national. Un vote protestataire est forcément contingent d'une situation.
Qualifier ainsi le vote Le Pen est foncièrement dévalorisant et ne correspond
plus à la réalité électorale. Il y aurait, d'un côté, un vote de proposition,
d'adhésion, positif, et, de l'autre, un vote protestataire, de colère, négatif…
Voyons, ce n'est pas sérieux ! On l'a oublié, mais celui qui a recueilli
le moins de votes d'adhésion en 2017, c'est Emmanuel Macron. L'électorat
lepéniste est porteur d'une véritable identité sociale, c'est pour cela qu'on
peut parler d'un vote de classe exactement comme c'est le cas pour le vote
Macron. Ce sont deux votes de classe qui s'affrontent. Certes, ceux qui votent
pour Marine Le Pen sont beaucoup plus pessimistes mais ils ont d'excellentes
raisons de l'être, quand ceux qui forment le noyau dur des électeurs d'Emmanuel
Macron auraient bien tort de ne pas être optimistes.
Présidentielle
2022 : comment Marine Le Pen veut fédérer les anti-Macron
Marine Le Pen continue quand même de surfer sur la colère sociale…
Oui, ainsi que sur l'angoisse existentielle des Français, sur laquelle a
essayé de s'appuyer la candidature d'Éric Zemmour. Mais le problème
de Zemmour, et la raison de son échec, c'est qu'il soutenait une proposition
hémiplégique : les catégories populaires y retrouvaient leurs inquiétudes
culturelles, mais n'y percevaient guère la défense de leurs intérêts matériels.
À l'inverse, cette combinaison a permis le succès de Marine Le Pen.
Au cours de cette présidentielle 2022, peut-on dire, comme on l'entend
beaucoup, que Marine Le Pen a crevé le plafond de verre ?
Le supposé plafond de verre constitue une facilité de langage qui n'est
utilisée que pour définir le score des candidats du Front national. Il y a bien
longtemps que Marine Le Pen a crevé ce soi-disant plafond de verre : au
second tour de l'élection présidentielle de 2017, elle attirait déjà 34 %
des votes. Les injonctions morales contre elle comptent désormais beaucoup
moins que l'intimidation sociale produite par les élites. Lors de cette campagne
de second tour, toutes les autorités, politique, économique, morale,
intellectuelle et spirituelle, se sont mobilisées contre Marine Le Pen.
C'était déjà le cas contre Jean-Marie Le Pen en 2002. Mais, vingt ans plus
tard, il y a une différence majeure : la présence de Marine Le Pen au
second tour n'a pas suscité de mobilisation dans les rues, ou si peu. La
diabolisation est surjouée dans l'espace public par le sommet, mais ne trouve
guère de résonance à la base.
Vingt ans après 2002, la présence de Marine
Le Pen au second tour n’a pas suscité de mobilisation dans les rues, ou si peu.
La diabolisation est surjouée dans l’espace public par le sommet, mais ne
trouve guère de résonance à la base
Cette présidentielle marque-t-elle le coup d'envoi d'un chambardement
politique ?
À mon avis, non, car il a déjà eu lieu. 2022 serait plutôt la
conclusion d'une phase de réalignement électoral amorcé en 2017. Ce qui avait
alors été rendu visible n'était pas un accident, la présente élection le
confirme. Certes, aujourd'hui, il y a une nuance qui apparaît dans ce
constat : c'est le résultat de Jean-Luc Mélenchon. Mais il faut faire
attention à ne pas surestimer cette performance : cet électorat va-t-il
survivre de façon homogène dans les prochains scrutins ? Question ouverte.
C'est un électorat fragile dans sa construction idéologique, puisqu'il se
fragmente immédiatement dès le second tour de la présidentielle. C'est pour
cela que je préfère ne pas parler de bloc électoral mélenchoniste, comme il en
existe un pour le macronisme et un autre pour le lepénisme.
Redoutez-vous un troisième tour social après les deux tours de la
présidentielle ?
Cela me paraît fantasmatique, pour plusieurs raisons. Premièrement, Emmanuel
Macron réélu bénéficie d'une forte légitimité. L'élection
de 2017 avait installé dans l'opinion qu'il était un président par
surprise, par défaut, ce n'est plus le cas en 2022. Il est un président sortant
que les Français ont appris à connaître, et Emmanuel Macron a réalisé une forme
d'exploit électoral puisque jusqu'à présent dans la période récente le
président sortant était battu. Il est difficile d'aller manifester en
criant « Macron démission » contre un chef d'État qui a été réélu à
la loyale, quand bien même aurait-il bénéficié d'un soutien massif des élites
sociales. Deuxièmement, on ne mobilise pas une foule sur une impression vague
de mal-être mais sur un mot d'ordre précis, comme la levée d'une taxe sur les
carburants. Pour une mobilisation sociale d'envergure, il faudrait un élément
déclencheur que je ne perçois pas pour l'instant et qui ne peut pas se résumer
aux difficultés matérielles que ressent la majorité des Français.
Troisièmement, il y a une division politique importante au sein des catégories
populaires. Le fait que la CGT appelle à voter Emmanuel Macron au second tour
constitue un facteur de division profond et durable. Comment voulez-vous
soutenir quelqu'un et expliquer après qu'il est un ennemi de la classe
ouvrière ? De son côté, La France insoumise est devenue un élément très
puissant de fracturation du mouvement social. Quatrième point, le pouvoir est
bien plus réactif aujourd'hui qu'il ne l'était au moment de la crise des Gilets
jaunes. Il y a une banalisation des formes policière et judiciaire de la
répression populaire qui rend le coût de la mobilisation plus important. Il n'y
a pas d'arrière-monde social annulant la victoire électorale et le contrôle de
l'État.
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Ce qui
encore plus flagrant depuis que M.LE PEN a pris la suite de son père !
Ce résultat
à ce 2eme tour du 24/04/2022 prouve une fois de plus que cette élection
présidentielle à deux tours de cette Veme republique ne favorise que le sortant
s'il y en a un et quand c’est le président élu c’est acquit d’office (Avec MITTERAND
qui avait raté ces deux septennats cela a été pareil !)
S'il y avait
deux tours, les Français voteraient mieux et se laisseraient moins prendre à ce
piège qui est là pour effrayer les plus pleutres ayant peur du lendemain,
préférant une sécurité pas garantie par notre Président réélu récidiviste qui
n'a même pas un parti structuré mais fantôme pire que des godillots mais
inféodés et serviles à ce faux monarque qui va encore plus muscler son trop de
pouvoir solitaire qu’il a déjà que les Français lui ont donné grâce à cette V
eme république devenue monarchique de fait !
Ces partis
extrémistes ne servent qu'aux français à protester contre les pouvoirs en place
depuis + de 40 ans mais dont leurs leaders ne sont jamais élus car déjantés ou faisant
peur par leur extrémisme droite/gauche :
MELENCHON et
sa LFI extrême gauche mais trop vieux qui ne pense exclusivement qu’à lui mais pas
aux français voulant reconstituer un groupe hétéroclite de ces gauches en
perdition peut être pire que M.LE PEN et son RN qui elle a pâtie d’avoir au
début cet écueil sur sa route ZIMMER l’opportuniste médiatique d’une droite
encore plus extrémiste qui a heureusement capoté à cause de ses diatribes inconcevables
et qui veut constituer son parti « reconquête » !
Reste LR
droite classique les grands perdants à cause de leur primaire qui leur avait joué
pourtant un mauvais tour en 2017 et récidivistes par un mauvais choix d’une
candidate avec un programme correct mais n’ayant pas la forme ni les épaules requises
pour le présenter ou le défendre et pas soutenue par ses propres collègues de
son parti !?
Pour les lanternes rouges plutôt vertes
pas mures d’écolos illuminés extrémistes EELV verts les électeurs ont été
échaudés aux municipales ils ne restaient rien pour eux logiquement !
Réélection d’E.MACRON logique pas besoin
de sondages orientés quand on connait les français leur versatilité et le
chacun pour soi, la peur du lendemain qui demandent sans cesse du changement mais
en fait ne veulent rien changer car trop gâtés ( quand on vote comme moi ou les
anciens depuis plus de 50 ans on ne peut se tromper !)
C’était plié dès le départ de cette
campagne électorale insipide et déplorable de ses politiciens élus de tous
bords !
Jdeclef 25/04/2022 10h40
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