Cambadélis
à Mélenchon : « La gauche unique, c’est sans moi ! »
ENTRETIEN.
De la décomposition de la gauche à sa reconstruction, l’ancien patron du PS
entend jouer un rôle. Mais pas aux conditions de Mélenchon !
La
candidate socialiste, Anne Hidalgo, a été inexistante lors de la campagne
présidentielle (1,74 %). Est-ce la fin du PS ? Jean-Christophe
Cambadélis, l'ancien premier secrétaire, tire les leçons de ce naufrage et
propose l'autodissolution du parti de François Mitterrand qui passe aussi par
la démission d'Olivier Faure. La refondation doit, selon lui, remettre la
gauche responsable dans les pas de la social-démocratie européenne et s'adapter
aux problèmes des Français d'aujourd'hui. Pas question pour lui de cautionner
une quelconque alliance avec le radicalisme de Mélenchon. Des initiatives se
préparent en coulisses et Cambadélis y œuvre. Entretien au long cours sur cette
France éclatée en plusieurs blocs.
Le Point : Selon vous, le clivage entre
les nationalistes lepénistes et les europhiles libéraux de Macron illustré par
ce second tour de la présidentielle a-t-il vocation
à structurer aussi les législatives de juin ?
Le débat national n'a jamais pu s'imposer. Pour autant, la
perception de la présidentielle, c'est Macron – Le Pen – Mélenchon. Le fait
majoritaire, produit de la présidentielle, et le scrutin uninominal à deux
tours vont tordre aux législatives le résultat de la présidentielle. Ce
n'est pas sain et surtout source de frustration visible dans l'abstention.
Cette distorsion va accroître le malaise démocratique extrêmement préoccupant.
Il est urgent d'introduire la proportionnelle. La France devrait s'inspirer
du système allemand qui est très bon : le scrutin est proportionnel,
mais aucun gouvernement ne peut être renversé si une équipe gouvernementale alternative
ne recueille de majorité. Les Allemands combinent ainsi l'avantage
d'une représentativité large de la société au Bundestag sans les
inconvénients de l'instabilité gouvernementale qui a caractérisé chez nous la
IVe République.
Dans le meilleur des cas, cela prendra cinq
ans… En attendant, beaucoup redoutent – et certains espèrent – un
troisième tour dans la rue avec son cortège de violences. Que peut faire le
président pour éviter ce retour des manifestations violentes ?
Je ne suis pas dans la majorité, mais l'opposition frontale, c'est
non ! Et j'observe avec intérêt l'opposition à l'OPA d'Édouard Philippe
sur la majorité…
Rompre ou ne pas rompre avec Macron : dans la tête
d'Édouard Philippe
La carte de France des votes montre bien deux
France : celle des grandes métropoles et de l'Ouest, qui va bien et vote
Macron, et l'autre, celle de la ruralité et de l'Est, qui vote Le Pen et se
plaint d'un déclassement. Cela fait des décennies que ce clivage se creuse.
Comment renouer ces deux France ?
Dans une période de révolution de l'immatériel, le précariat de
masse et les déficits publics se combinent, réduisant les marges de manœuvre.
C'est le legs du libéralisme aux sociétés occidentales. Cet état des peuples
mine les démocraties et nourrit la vague nationaliste. Dans cette situation,
tout est possible. Il faut, si on veut éviter l'explosion, s'attaquer à trois
chantiers majeurs : rétablir l'égalité, restaurer une république
impartiale, reconstruire un équilibre institutionnel entre l'exécutif, le
législatif et les collectivités locales. L'urgence n'est pas l'accentuation de
la remise en cause de l'État social, mais sa rénovation pour qu'il retrouve de
l'efficacité. Et ceci, d'autant que les conséquences de la guerre en Ukraine
vont se faire sentir avec l'inflation, le pouvoir d'achat et une relative chute
de la croissance. C'est à cela que doit répondre le président de la République
Emmanuel Macron.
Présidentielle : 12 cartes et graphiques pour
comprendre le second tour
Vous ne pouvez pas dire que l'État social est
remis en cause : la France est le pays européen qui consacre
35,4 % de son PIB aux prestations sociales. Les dépenses de protection
sociale étaient en hausse de 7,8 % en 2020 pour compenser
les effets de la pandémie. La France est le champion de la subvention et
de l'aide sociale. On a l'impression d'un cercle vicieux : plus on
aide, moins ça marche…
C'est ce que je viens de vous dire : il nous faut retrouver
de l'efficacité dans notre filet social. Aujourd'hui, certains y échappent
alors qu'ils devraient être aidés, et d'autres, au contraire, en vivent. Notre
État social doit sortir du « prêt-à-porter » pour faire du sur-mesure
en fonction des situations individuelles. Le chantier de l'efficacité de l'État
social reste à ouvrir.
À la fin, cela va mal finir.
Vous avez soutenu sans état d'âme Emmanuel
Macron contre Le Pen aussi bien en 2017 qu'en 2022. N'est-il pas
temps de le rejoindre pour former un grand mouvement du centre gauche et du
centre droit ?
Tant qu'il n'y aura pas de proportionnelle, les coalitions de
projet sont difficiles. On nous somme de se rallier ou d'être radié de l'espace
public. Il n'est pas bon pour l'avenir de la France qu'il y ait un bloc
central qui se maintient par le rejet des populismes. À la fin, cela va mal
finir. La question politique posée est simple : comment réduire les
populistes qui ont été libérés par la fin du bipartisme ?
Vous avez appelé, durant l'entre-deux-tours, à
une autodissolution du PS pour sa refondation. Vous appeliez également Olivier
Faure, son premier secrétaire, à démissionner. Pourquoi vous
écouterait-il ? Il ne l'a pas fait pendant cinq ans…
Je crois à la nécessité de créer un mouvement populaire
social-démocrate qui se fixe l'objectif de la transformation responsable de la
société, d'une justice sociale et écologique praticable et d'un volontarisme
européen. Un mouvement qui prendra la suite du Parti socialiste comme ce
dernier a pris la suite de la SFIO.
Bref, que les socialistes changent radicalement en reprenant à
leur compte la pratique de leurs dirigeants dans les collectivités locales et
rejoignent la social-démocratie européenne qui a un rapport décomplexé avec la
radicalité.
Je me suis abstenu de toute critique publique depuis cinq ans. Je
n'aime pas les attaques ad hominem.
Chacun conduit son action comme il l'entend. Je suis respectueux des idées pour
peu qu'elles soient énoncées. J'ai démissionné le
18 juin 2017 alors que je ne connaissais pas le résultat dans ma
circonscription mais le résultat du PS aux législatives. Comme Lionel Jospin
avait pu le faire le soir de sa défaite en 2002 ou Harlem Désir en
2014. C'est pour moi une forme d'éthique en politique. Cela ne veut pas dire
arrêter la politique, mais s'estimer comptable du résultat, même si vous n'êtes
pas le principal responsable. Je l'ai fait aussi parce que vous ne pouvez
crédibiliser une vraie refondation en affichant une continuité malgré la
déroute.
Lionel Jospin, qui était l'incarnation d'une
gauche de gouvernement responsable, appelle lui-même le PS à un accord avec la
radicalité de Jean-Luc Mélenchon… Que se passe-t-il ?
Pour moi, l'interview de Lionel Jospin est un modèle de ce qu'il
aurait été nécessaire de faire. D'abord, il fixe les questions à résoudre pour
la France et les Français. Il dresse donc une identité politique de gauche tout
en s'adressant au président de la République. Puis, il se déclare favorable à
des négociations avec tous, et, bien sûr, Jean-Luc Mélenchon. Il prend soin de
louer le talent de ce dernier, mais il démontre ses limites dans son échec à la
présidentielle et dans la manière de se comporter. Il estime même qu'il ne
croit pas que cela puisse être durable pour la gauche. Enfin, il termine en
disant que le PS ne doit pas être écrasé dans ce possible accord. Vous avouerez
que c'est très loin du « Mélenchon quoi qu'il en coûte » chanté par
la direction du PS. Moi, je n'ai jamais dit que Mélenchon n'était pas de
gauche ni déclaré, comme Olivier Faure, qu'« il avait franchi la
ligne rouge », simplement, je ne souscris pas à ce qu'il propose à la
gauche et à la France, en respectant ses électeurs.
Coignard – Mélenchon : l'union populaire, mais à lui
tout seul
Rappelons que Mélenchon veut sortir des
traités budgétaires européens ou en finir avec les accords de libre-échange de
l'UE. Ce qui revient à quitter d'une manière ou d'une autre l'union
douanière et, à terme, l'Union européenne…
D'abord, pourquoi avoir ouvert des négociations exclusives avec
Mélenchon alors que, il y a peu, le PS vantait l'alliance avec les
écologistes ? On nous dit « les gauches ne sont pas
irréconciliables ». Certes ! Encore faut-il qu'elles soient
plurielles et n'abdiquent pas sur leurs valeurs, leur identité ou
leurs principes. Car, dans ce cas, il n'y a qu'une seule gauche. La gauche
unique, c'est sans moi ! Les gauches ne sont pas irréconciliables, mais
elles ne sont pas pour autant fongibles. Ce fut mon credo lorsque j'avais
conduit les accords de la gauche plurielle en 1997 qui ont permis à
Mélenchon d'être ministre du gouvernement Jospin. Dans le moment présent, on ne
nous propose pas une coalition mais une reddition.
Nous devons non seulement abdiquer toute identité, mais faire acte
de contrition pour notre passé. De fait, il s'agit d'une intégration à l'union
populaire de Jean-Luc Mélenchon, puisqu'il faut mettre sa tête sur les
affiches, son sigle au bas des tracts et son programme dans la profession de
foi !
Mais on a encore le droit à gauche de contester ce programme,
comme près de 3,5 millions de Français de gauche l'ont fait au premier
tour de la présidentielle, malgré le vote utile. Comment accepter que l'on
sorte des traités européens ? Comment accepter de ne plus livrer
d'armements aux Ukrainiens, et pourquoi faudrait-il le faire ?
Comment accepter une VIe République où les députés
seraient élus et révocables ? Je ne suis pas d'accord, mais puisqu'on nous
dit qu'il s'agit de Mélenchon Premier ministre auquel il faut souscrire, je
prends la question au sérieux. Comment faire croire cela, alors qu'un Premier
ministre n'a aucun moyen institutionnel pour l'imposer ? N'est-ce pas
se moquer des Français ? Comment accepter une réforme des retraites dont
Olivier Faure lui-même s'émeut en déclarant qu'elle coûtera 47 milliards
d'euros ? Et je vous passe l'augmentation simultanée des minima sociaux,
du smic, etc., tout en disant « la BCE payera en annulant la
dette ».
Mais je ne reproche pas à Jean-Luc Mélenchon d'avoir un programme.
Je reproche au PS de ne pas en avoir. Ce qui permet à Éric Bompard, le
négociateur en chef de Mélenchon, de rigoler sous cape en déclarant :
« c'est un autre PS qui est venu nous voir », la délégation est donc
d'accord sur tout.
Au fond, je suis d'accord avec Mélenchon qui déclarait le
21 avril 2021 : « Les beaux merles qui chantent du matin au soir
les cantiques de l'union […], une comédie pour satisfaire ceux qui vont sauter
en rond pendant des jours en criant union, union. »
En outre-mer, les électeurs de Mélenchon ont
voté Marine Le Pen au second tour. Comment analysez-vous cette bascule de
l'ultragauche pour la droite nationale ? Ce qui ne s'est pas produit en
métropole…
J'avoue avoir été inquiet lorsque le matin de l'élection du second
tour, on m'a envoyé les résultats des Ultramarins. Il y a deux raisons à ce
vote. D'abord, un puissant mouvement antivaccination et anti-pass sanitaire qui
a été réprimé durement, réactivant l'image de la « puissance
coloniale ». C'est aussi une réponse à la formule « j'ai envie
d'emmerder les antivax » du président Macron. Ensuite, il s'agit d'une
protestation vis-à-vis d'un niveau de vie qui est loin de se rapprocher de la
métropole, avec des problèmes criants d'adduction d'eau ou de logements.
Antilles : pourquoi Marine Le
Pen y a cartonné
Anne Hidalgo n’était pas au départ
prête. Le PS ne l’était pas du tout.
Quel rôle peuvent jouer Carole Delga, Stéphane
Le Foll, François Hollande, Bernard Cazeneuve, François Rebsamen et vous-même
dans la renaissance d'une gauche sociale-démocrate ?
Je n'ai pas partagé le soutien de François Rebsamen au président
Macron au premier tour. Cela n'était ni utile pour le candidat ni efficace pour
une refondation sociale-démocrate qu'il appelle de ses vœux. Pour le reste, ils
ont un très grand rôle à jouer s'ils descendent de leur Olympe. Il faut que
nous nous coordonnions pour résister à l'intégration à l'union populaire. Comme
vient de le demander l'ancien président démissionnaire de la commission des
conflits du PS Laurent Azoulai. Ce week-end, je prendrai une initiative en ce
sens.
Laquelle ?
Vous verrez bien dimanche…
Anne Hidalgo n'a jamais pu se faire entendre. Même
son fils n'a pas voté pour elle… Une simple erreur de casting ?
Anne Hidalgo n'était pas, au départ, prête. Le PS ne l'était pas
du tout. On l'a pressée de se déclarer, puis on ne l'a pas accompagnée et on a
même laissé entendre que l'on pouvait la « débrancher » pour Taubira.
L'Europe reprend sa marche avec l'élection du
président Macron. Croyez-vous en son concept de souveraineté européenne, en
l'émergence d'une Europe de défense ou dans le fait que l'Union européenne sera
le premier continent à atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050 ?
Je suis en ce domaine d'accord avec Yannick Jadot. Si ce ne sont
pas des mots, j'y souscris. La défense européenne avec la question
écolo-numérique et l'Euro Méditerranée, au-delà du soutien aux économies
confrontées à l'inflation et au ralentissement économique, doit être un des
points durs de la politique européenne de la France. Il n'y a pas de raisons
d'être a priori contre les initiatives du chef de l'État en ce domaine. Même si
nous avons des désaccords sur les retraites, la conditionnalité du RSA, voire
le salaire au mérite des profs.
Cette même Europe se veut aussi une union
politique fondée sur l'État de droit, la démocratie, les droits fondamentaux.
Elle s'est dotée d'instruments pour infliger des pénalités aux régimes
européens qui s'éloignent de ce corpus. On pense à la Hongrie d'Orban ou à la
Pologne du PiS. Mais ce régime punitif est-il vraiment vivable dans une Europe
composée d'États toujours souverains ? Faut-il proposer autre chose aux
États qui ne se sentent plus à l'aise dans les valeurs de l'Europe
occidentale ?
Je comprends les inconvénients, mais il faut des règles et se
donner les moyens pour qu'elles soient respectées. D'autant plus que nous
sommes dans une guerre épouvantable et inacceptable sur notre continent avec
des conséquences géopolitiques économiques et migratoires dont nous ne mesurons
pas les conséquences.
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Vieux
politiciens élus inutiles usés de cette classe politique française sclérosée :
Qui n'a pas été capable de s'imposer car
avec des idées bornées dogmatiques de partis politiques ringards de tous bords sans
nouveauté bien que les Français eussent déjà rejetés leurs leaders de tous
bords en 2017 qui s’accrochent comme des poux sur la tête des pauvres électeurs
français incurables qui continuent à se faire avoir !
Alors quand on voit ce CAMBADELIS dire « la
gauche se sera sans moi » tant mieux mais pour MELENCHON cela devrait être
aussi sans lui et d’autres de même acabit !
Un grand coup de balai s’impose chez nos
politiciens trop connus de tous bords !
Car un petit opportuniste malin E.MACRON
vient de leur mettre 2 quinquennats jusqu’en 2027 dans la vue en leur faisant
croire qu’il n’était ni de gauche ni de droite avec un parti fantôme de godillots
novices triés sur le volet inféodés à sa botte avec trop de pouvoir donné par
eux Français sans s’en apercevoir par cette V eme république monarchique en
espérant qu’elle ne devienne pas pire que dans d’autres pays connus revanchards !
Les Français après ce 1er tour
calamiteux n’ont toujours pas compris en votant au 2eme tour qu’élire cette extrémiste
de droite M.LE PEN récidiviste logiquement n’aurait pas été élue car les extrémistes
de tous bords effraie les français lambda qui ont peur du lendemain mais n’ont
mais pas été capable d’élire la droite classique pourtant une femme LR plus capable
que la candidate RN sans vouloir la vexer !
Si les Français en bavent dans les 5 ans
à venir c’est qu’ils se seront donnés des bâtons pour se faire battre ,
car il ont ouvert facilement une grande porte à E.MACRON et son choix de 1er
ministre n’a aucune importance sera à la botte du pseudo monarque !
Pour les législatives ils voteront
encore mal car en plus là ils n’y comprennent rien et beaucoup s’abstiendront !?
Jdeclef 30/04/2022 14h00
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