Coronavirus :
petit manuel de survie à la peur
La
pandémie actuelle est une belle épreuve de vérité. Le courage s'organise,
disait Malraux. « Il faut l'entretenir comme les fusils. »
À l'épidémie est associée, par tradition, à la peur, phénomène
bien aussi contagieux. Car la peur elle aussi est un virus, qui s'attrape plus
subtilement encore que le Covid-19. Un venin insidieux, glaçant, paralysant,
qui corrompt les âmes. Et quand elle s'infiltre en vous, difficile de s'en
sortir en se lavant le visage. Souvenons-nous du maître ouvrage de Jean
Delumeau, La
Peur en Occident, qui faisait la part belle à ces fléaux, notamment
la peste, synonymes de punition, de châtiment divin et prémonitoire du Jugement
Dernier qui surplombait les Saintes Écritures. Certes, nous vivons dans des
sociétés sécularisées et depuis le tremblement de terre de Lisbonne (1755),
l'humanité a appris que les catastrophes ont des causes plus précisément
assignables. Mais la pandémie qui menace semble offrir un terrain de jeu idéal
pour une peur qui s'en donnerait à cœur joie. Le terrain n'a-t-il pas été déjà
labouré ? Principe de précaution, déclinisme, péril djihadiste, grand
remplacement, précarité sociale, menace écologiste, délire complotiste…Le principe de précaution devrait être une victime du coronavirus
Dans les sociétés occidentales, nos Rivages des Syrtes sont abondamment peuplés. Sans parler de nos Troies respectives, fors intérieurs, où sont entrés aussi quelques chevaux. L'ignorance avive la peur, rappelle Alain Corbin dans son dernier livre, Terra Incognita (Albin Michel). Mais chaque avancée de la science – intelligence artificielle, robotique, manipulation de nos génomes – engendre également ses peurs nouvelles. Disséquer le génome du Covid-19 n'y changera rien : la peur est un bon produit cognitif, souligne Gérald Bronner dans De quoi avons-nous peur ? (Folio). Ses arguments sont convaincants, aisés à produire.
« Il faut avoir l'intelligence de ses peurs »
Alors que les Bourses s'effondrent, sa cote semble devoir
s'envoler. Il n'est qu'à écouter le ressassement anxiogène de
l'information : sur fond de séries catastrophes, qui encombrent les
arrière-fonds de nos mémoires, on zoome aisément sur des supermarchés
dévalisés, des rues désertes et les images sidérantes de visages sans bouche et
d'une société désormais sans contact. Car le pire n'est-il pas toujours
sûr ? Et pour un peu, on en viendrait à convoquer les mânes de Roger
Gicquel : la France a peur ! À moins de repenser à la curiosité
fascinée et quasi métaphysique de Nietzsche parcourant les rues de Nice en
proie à un séisme « afin de voir où la peur était la plus grande ».Gérald Bronner – La peur au temps du coronavirus
Pourtant au risque de devoir décevoir les esprits en mal de sensation apocalyptique, il n'en est rien. L'inquiétude, qui chez Tocqueville désignait une sidération de la volonté démocratique, une peur vague et diffuse, n'est devenue ni angoisse ni panique. « Il faut avoir l'intelligence de ses peurs », écrivait Pierre Rosanvallon dans Hériter, et après ? (Folio). Cette intelligence, c'est celle que s'emploient à déployer des autorités qui, plus que jamais, ont peur de la peur des citoyens. Une peur impossible certes à éradiquer, elle est là, tapie anthropologiquement au fond de nous, mais avec laquelle il convient pour chacun, et non seulement pour le pouvoir, d'apprendre ces jours-ci à négocier, à transiger. « Il faut allier le pessimisme de l'intelligence avec l'optimisme de la volonté » : Élisabeth Roudinesco rappelle dans De quoi avons-nous peur ? cette phrase de Romain Rolland, qui s'applique bien aux mesures actuelles, techniques, programmées, d'un État rationnel obligé de faire avec la peur possible et mauvaise conseillère de ses citoyens. À cet égard, la pandémie actuelle est une belle épreuve de vérité, où comme aimait à le dire San Antonio, « les Athéniens s'atteignirent ».
On commence du reste à percevoir que dans cette épreuve révélatrice, la France va se confronter à elle-même, à ses singularités, au regard des autres nations.
Marcel Gauchet formule l'enjeu évidemment en d'autres termes : « Les démocraties sont des régimes liquides. Elles ont cependant des capacités de consolidation, de ressaisie, de réveil considérable. Notre société a fait reculer la cohésion collective au second plan, privilégiant l'autonomie, l'émiettement et la liberté des individus. La question est : Portée par la menace, la cohésion peut-elle revenir au premier plan ? » On commence du reste à percevoir que dans cette épreuve révélatrice, la France va se confronter à elle-même, à ses singularités, au regard des autres nations. Chaque pays est seul et doit face à l'ennemi invisible aller puiser au fond de lui-même. La pandémie sera un miroir. Une œuvre au noir. Un exercice de minuit qui fait écho à ces exercices administratifs, répartis parmi les divers ministères, dont nous apprenons qu'ils s'organisent régulièrement en prévision des différents risques. Naguère, les sociétés ignoraient la culture du risque. Aujourd'hui, celle-ci est quasi-obsessionnelle. Appuyons-nous sur cette prédominance. Gauchet évoque aussi sous la couche désordonnée et libertaire des Français la permanence d'un substrat plus solide, qui dans l'adversité ne demande qu'à être réactivé. Une phrase qui n'est pas sans évoquer ce que Freud expliquait à l'un de ses patients déboussolés dans lequel nous pourrions nous reconnaître : l'inconscient demeure inaltérable, car enfoui, quand le conscient est sujet à l'usure, car exposé. S'agit-il, face à une peur irrationnelle, de faire appel à d'autres ressources inconscientes inentamées ?
« Co-vide 19 »
Pour répondre à cette question, nous sommes allés voir l'un de nos
grands psychanalystes, Charles Melman, qui dans ses livres, notamment L'Homme sans
gravité (Folio), a toujours fermement pointé du doigt les dérives
et les mutations de nos sociétés occidentales. Nous nous attendions à le voir
évoquer le péril d'une psychose collective ; or, ce terme, il l'a aussitôt
écarté : « Je suis bien plus sensible à la manière raisonnable de nos
citoyens de réagir. Même si les conséquences de cette contagion ne sont pas
prévisibles, j'y verrai même une certaine sagesse. À l'anxiété paranoïaque que
pourrait susciter le virus, se crée plutôt un sentiment de solidarité
collective devant la menace. » Alors que nous évoquions le danger nouveau
que chacun désormais constitue pour autrui, le psychanalyste préfère parler
« de l'égalité inattendue » que provoque cette maladie qui touche
tant de monde, et cela, quelles que soient leurs conditions sociales.
« Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés. » Et
Charles Melman de faire soudain résonner autrement ce terme à présent sur
toutes les lèvres des Français : Covid-19. « J'y entends le vide, la
mort que nous partageons désormais, que nous avons en partage, alors que nous
avons perdu collectivement, grâce ou en raison de la technologie, l'idée et le
respect de la mort. Nous n'en connaissons plus les limites, comme si elle
figurait au rayon des accidents et non comme un réel inéluctable que cette
contagion fait ressurgir, certes, de manière malheureuse. »Dans une société qui « vit assez facilement avec le fantasme d'immortalité, où nous vivons dans les distractions du rêve, où nous vivons notre vie comme un rêve », l'épidémie marque à ses yeux un retour salutaire du réel. Un retour également d'une solidarité dans un pays dont il rappelle les fractures : « La France est si divisée que l'apparition de cette menace permet de reconnaître une solidarité en nous. L'autre pourrait être un danger, mais nous voyons en lui un semblable, également menacé, au même titre que chacun d'entre nous. » Les scènes de stocks dévalisés ? « Une appétence pour la vie et non une rivalité entre gens apeurés. » Le psychanalyste s'avoue également frappé par l'enchaînement des séquences : « Après les grandes manifestations où certains se rassemblaient autour de revendications disparates, au caractère démultiplié, il semble qu'aujourd'hui nous portons tous le même gilet. »
Espoir, violence et désillusion : un an de Gilets jaunes
Aucune peur relevée donc chez ses patients, à l'exemple de cette femme dont il livre l'histoire à notre sagacité : « Elle est âgée et elle est venue me voir de Marseille. Elle a donc bravé les conseils de prudence, mais son wagon était vide, le signe que la population reste disciplinée. Ce wagon vide fut toutefois sa récompense inattendue pour son courage, un lieu possible d'infection, devenu un lieu de préservation… »
Salut
« Le courage. Cette chose qui s'organise, qui vit et qui
meurt, qu'il faut entretenir comme les fusils », écrivait Malraux dans L'Espoir.
L'organisation comme morale de l'action. Partout, à tous les échelons, on
s'organise. On entretient les fusils, puisqu'il s'agit d'une guerre déclarée à
l'épidémie. Et puisqu'il s'agit d'une guerre, rappelons les lignes d'un général
qui n'admit jamais qu'elle fut perdue en 1940 : « Il y aurait la
puissance de l'ennemi que seule pourrait briser une longue usure… Il y aurait
les difficultés morales et matérielles qu'une lutte longue et acharnée
comporterait forcément pour ceux qui auraient à la faire. Il y aurait la montagne
des objections, calomnies, opposés aux combattants par les sceptiques et les
peureux pour couvrir leur passivité. Il y aurait les entreprises dites
parallèles mais en fait rivales et opposées, que ne manquerait pas de susciter,
parmi les Français, leur passion de la dispute. » Mais à la fin, il y
aurait le salut.À Sienne, où l'on vit confiné comme dans le reste de l'Italie, des habitants isolés, pour montrer qu'ils n'étaient pas seuls, se sont mis, de leurs maisons, à entonner l'hymne de leur ville, Il canto della Verbena, qui a gagné les rues désertes. Voix multiples dans la nuit, qui donnèrent corps soudain à un peuple séparé et pourtant réuni. Le confinement n'est pas l'enfermement. « Force, responsabilité et espoir », a demandé le pape François aux Italiens. Des mots qui résonnent étrangement avec l'invocation célèbre de l'un de ses prédécesseurs : n'ayez pas peur !
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Dans ma ville 26000 habitants et il y a d'autres super marché comme
Monoprix par exemple mais :
Le « super marquet » Carrefour de proximité de mon quartier
est au 3/4 vide, il fournit une citée au j'habite dessert 16 immeubles
d'habitations de 7 étages sans compter les pavillons nombreux autour !
Car le magasin a fait ses commandes pour cette semaine et ils n'ont pas
été livrés !?
Il n'y a déjà plus d'eau, ni de pommes de terre par exemple etc. et les
rayons sont vides pour la majorité d'autres produits alimentaires comme quoi ce
virus fait du mal pas seulement en termes de santé !
Alors que nos dirigeants ne disent pas qu'il n'y a pas de rupture dans
les approvisionnements, c'est encore une mauvaise évaluation ou information,
car on ne peut empêcher toute forme de panique surtout avec les discours qu'ils
font !
Quant au gel hydroalcoolique on n'en trouve à nouveau en pharmacie, mais
cela ne se mange pas...
Pauvre pays si mal dirigé, car dans des problèmes sérieux on voit bien
que l'état n'est pas à la hauteur, car il réagit souvent avec retard, car nos
dirigeants ne savent faire que de la politique qui elle pourrait être mise en
sommeil !
Et notre président ce soir va encore nous gratifier de mesures plus
drastiques peut être en nous enfermant obligatoirement à domicile, car quoi
d'autres pendant qu'il y est, pourquoi pas redéclarer l'état d'urgence ou la
loi martiale !?
Car nos dirigeants ont beaucoup plus peur comme le nouveau ministre de
la santé désemparé, que les français eux-mêmes qui n’ayant plus confiance en le
président et ses équipes font du stock par réflexe peut être irraisonnable,
mais compréhensif !
Jdeclef 16/03/2020 16h02LP
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