Valls :
« Il n'y a pas d'autre alternative que celle d'aider Macron »
L'ancien
Premier ministre évoque son retour politique en France et avance ses idées pour
la suite du quinquennat. Une offre de services ?
Visiblement,
il trépigne. S'il avait juré mordicus que désormais sa vie était à Barcelone,
sa ville natale, où il n'est plus que simple conseiller municipal d'opposition,
Manuel Valls fait à nouveau une offre de services à ce pays, la France, dont il
fut le Premier ministre près de trois ans. Aujourd'hui, il revient
régulièrement à Paris pour voir sa mère et ses quatre enfants, mais pas
seulement… De passage la semaine dernière, il a multiplié les rencontres avec
des journalistes, des amis politiques mais aussi des figures de la majorité.
S'il n'a pas eu rendez-vous avec Emmanuel Macron, il assure maintenir « de
bonnes relations » avec le président et s'entretient régulièrement par SMS avec
Édouard Philippe. Il avait d'ailleurs rendez-vous avec Gilles Le Gendre, le
patron du groupe des Marcheurs à l'Assemblée nationale, après notre entretien
dans un grand hôtel non loin de la rue de Solférino. Plus que jamais, Manuel
Valls affirme son « sentiment patriotique » et sa « disponibilité » pour servir
son pays. Selon certains Marcheurs, l'ancien ministre de l'Intérieur est trop
identifié à l'ancien monde et trop peu consensuel pour rééquilibrer un exécutif
jugé droitier au sein de la majorité. « Ce n'est pas la gauche autoritaire centrée
sur les questions identitaires dont on a besoin pour l'acte II du quinquennat,
mais une gauche libérale teintée de vert et mâtinée de dialogue social, au
moins en façade », balaie un poids lourd LREM à l'Assemblée nationale. Il
n'empêche : la voix de l'ancien présidentiable socialiste pourrait tout de même
porter alors que le séparatisme et les sujets régaliens sont au cœur de l'acte
II du quinquennat. On le jugera sur pièces en lisant cet entretien. Celui-ci
inaugure une série de rencontres avec les grandes voix de la gauche que
proposera Le Point dans les prochaines semaines, sur son site et dans les
numéros à venir.
Le Point : Au
sein de la majorité, y compris à l'Élysée, certains poussent pour que vous
entriez au gouvernement. Souhaiteriez-vous redevenir ministre ?
Il est très
difficile pour moi de faire des commentaires sur des extrapolations. J'ai la
politique en moi, le service public, j'aime la France. J'ai une relation
particulière avec ce pays fascinant auquel je dois tout. Nous vivons dans un
monde brutal, déstabilisé, déstabilisant, marqué par des affrontements entre
grandes puissances. Par mes prises de position, mon expérience, je peux être
utile aux Français. Les responsabilités, je les ai toutes occupées. Je ne sais
pas de quoi sera fait l'avenir et je suis très heureux dans ma vie à Barcelone.
Je n'ai aucune amertume et encore moins d'esprit de revanche.
Vous ne
cultivez aucun esprit de revanche vis-à-vis d'Emmanuel Macron après votre
opposition lors du précédent quinquennat ?
Soyons objectifs
et lucides et mettons la question des personnes de côté, même si c'est
important. Dans l'état où était la gauche, la candidature d'Emmanuel Macron a
été une chance pour la France. Nous avons évité un second tour entre François
Fillon et Marine Le Pen. Des membres de mon gouvernement se sont retrouvés dans
le sien. Il n'y a pas de rupture entre lui et moi. Après mon élection en tant
que député, j'ai été pendant plus d'un an membre de La République en marche.
J'ai présidé une mission d'information parlementaire sur l'avenir
institutionnel de la Nouvelle-Calédonie. Notre relation est apaisée. On ne peut
pas parler de fâcherie ni de réconciliation. Mon statut politique est écrit.
J'ai fait des choix personnels de vie, j'ai opté pour des changements. Je lui
souhaite très sincèrement un maximum de réussite. Il n'y a pas d'autre
alternative que celle d'aider le président.
Lorsque vous
avez utilisé l'article 49.3 de la Constitution en tant que Premier ministre, on
vous a reproché votre autoritarisme. Aujourd'hui, on fait le même procès au
gouvernement sur la réforme des retraites. À juste titre ?
Je reconnais
que le précédent de 2016 m'a marqué. Il est apparu comme un acte d'autorité et
d'autoritarisme alors que nous avons négocié et intégré les amendements des
groupes et des syndicats. Ce n'était ni de la dictature ni de l'autoritarisme.
Nous étions dans un contexte politique où il fallait l'utiliser. Que des
responsables socialistes le déplorent, que voulez vous ? Le 49.3, c'est un
article de la Constitution fait pour être employé. Il a été voulu par le
général de Gaulle contre le régime des partis. Ce genre de mécanisme existe
dans d'autres pays. Ce n'est pas une honte de l'utiliser. Il a été utilisé dans
les conditions appropriées.
Ancien
ministre d'un gouvernement socialiste, Emmanuel Macron est accusé par une
partie de la gauche d'être de droite. Son projet politique peut-il encore
parler à cette gauche qui a voté pour lui ?
Quelles que
soient les critiques qui lui sont faites, il ne faut jamais oublier qu'en 2017
c'est lui qui a incarné un projet d'espoir face à l'extrême droite. C'est
fondamental. Et puis… la suppression de la taxe d'habitation ou la baisse des
impôts pour les classes moyennes, la hausse du minimum vieillesse, le plan
pauvreté, le dédoublement des classes en primaire, la lutte contre les
violences sexistes, la PMA, la priorité à l'écologie, l'engagement européen, ça
doit parler à la gauche, non ? La baisse du chômage aussi - qui doit beaucoup
aux politiques économiques et fiscales mises en œuvre, à partir de 2014, lors
du quinquennat précédent. Et même la réforme du système de retraites, soutenue
par les syndicats réformistes, mérite mieux qu'une exigence, peu responsable,
de retrait immédiat du texte de loi ou les estrades partagées avec l'extrême
gauche. Nous étions nombreux, je crois, il n'y a pas si longtemps, à défendre
un système universel et plus juste.
Vous aussi
subissez régulièrement ce procès en trahison…
C'est vrai. Je
suis de gauche, et cette idée est insupportable pour ceux qui pensent incarner
la « vraie gauche ». C'est toute la magie de la gauche et tout son drame. Je
pourrais reprendre la formule de Camus : « Je mourrai à gauche, malgré elle,
malgré moi. » On oublie souvent que la gauche c'est une dynamique de l'action
qui vise un progrès. Alors, moi, j'essaie toujours de me demander non pas si je
suis de gauche, - c'est mon engagement depuis quarnte ans ! -, mais plus
concrètement si les décisions que je prends participent à cette dynamique du
progrès. Je me définis comme un républicain, progressiste et européen. Un
humaniste qui croit aux valeurs universelles. C'est cela, être de gauche
aujourd'hui, une gauche républicaine. Ce n'est ni une nostalgie ni un remords,
et encore moins un parti.
Le
communautarisme que vous combattez est-il de gauche ?
Non. C'est
même le contraire. La gauche, c'est la république, laïque et sociale, jusqu'au
bout, c'est la nation qui émancipe des individus libres et égaux. Mais, depuis
trente ans, faute de se réinventer et de représenter toute la société, la
gauche s'est souvent contentée de vouloir incarner une addition de minorités.
Elle n'a pas trouvé de réponse à la crise des classes moyennes et de l'État
providence.
La gauche
peut-elle être encore crédible sur la laïcité ? Ou s'agit-il désormais d'une
valeur de droite ?
C'est
malheureusement bien pire, la laïcité semble être récupérée désormais par
l'extrême droite. L'Histoire, là encore, se répète. Dans les années 1970 et
1980, la république, la nation, le drapeau tricolore, La Marseillaise, abandonnés
par une partie de la gauche, avaient été récupérés par une extrême droite
opportuniste. N'avons-nous rien appris de cette spoliation de nos valeurs ?
Heureusement, avec d'autres, Élisabeth Badinter, Philippe Val ou Caroline
Fourest ont tenu bon. La laïcité, c'est ce principe, cette valeur qui permet à
chacun de croire ou de ne pas croire et de pouvoir faire un choix libéré des
déterminismes et de toutes les pressions. C'est une des clés de l'émancipation
à laquelle nous renonçons. La laïcité appartient à tous et elle doit unir tous
les Français. Je n'étais pas d'accord avec Emmanuel Macron quand il affirmait :
« L'État est laïque mais la société ne l'est pas » ou quand il évoquait « la
radicalisation de la laïcité ». La laïcité est une garantie pour apaiser les
passions identitaires. Mais je salue le discours et la clarté du président de
la République contre le séparatisme islamiste.
Que
pensez-vous du mot « séparatisme » choisi par Emmanuel Macron pour débattre de
cette question ?
Pour désigner
un ennemi, l'islam politique, il faut trouver les bons mots. Le séparatisme
définit assez bien l'objectif de groupes islamistes de se séparer du territoire
de la République. J'avais parlé d'apartheid, mais le mot est suffisamment fort.
On ne peut pas dissocier le séparatisme, la radicalisation, de la laïcité et
des politiques migratoires.
Portez-vous
une partie de la responsabilité du marasme de la gauche ?
Nous sommes
tous responsables. Moi, je ne peux parler que de la responsabilité qui est la
mienne. En juin 2014, après le double désastre électoral aux élections
municipales et européennes, j'avais affirmé que la gauche n'avait jamais été
aussi faible et qu'elle pouvait ainsi disparaître. J'ai vu le Parti socialiste
se défaire : dans l'opposition, par paresse intellectuelle, en surfant sur
l'antisarkozysme, qui permettait les victoires aux élections locales ; dans
l'exercice du pouvoir surtout, faute d'assumer ses responsabilités. C'est un
fait, je n'ai pas réussi à convaincre ma famille politique et j'ai sans doute
manqué d'audace - cette audace qui a été ensuite celle d'Emmanuel Macron. Mais
j'étais soucieux de préserver les institutions de la Ve République
et obsédé par la menace terroriste.
Le PS
serait-il dans cet état si vous aviez gagné la primaire ?
Dire oui, ce
serait de l'orgueil. Et se contenter d'un « si » serait trop paresseux.
Honnêtement, je pense que la primaire ne pouvait plus rien changer au désastre
annoncé.
La crise
est-elle idéologique ou partisane ?
Elle est avant
tout idéologique. Soyons lucides. La gauche européenne vit une crise de fond et
de sens. Faute d'affronter les conséquences de la mondialisation de l'économie
et de l'individualisation de la société, la gauche s'est enfermée dans une
conception pessimiste et passéiste du monde. L'éclatement du cadre national
dans lequel s'élaborait le compromis social entre le travail et le capital,
l'atomisation croissante du monde des salariés et l'apparition de nouvelles
demandes sociales ont bouleversé ses références et ses repères. Le socialisme est
devenu une formule morte.
Sur quelles
idées fortes la gauche devrait-elle ou pourrait-elle revenir ? Faut-il encore
s'inspirer du néotravaillisme ? Faut-il « ressusciter Rocard » ?
L'époque est
marquée par une liquéfaction sans précédent du collectif. L'individu est isolé
et soumis aux troubles du monde avec pour seul point d'attache - pour les mieux
lotis - sa sphère familiale, son cercle amical, parfois son territoire et… son
téléphone portable. Il faut recréer du collectif face à la pression individualiste
et identitaire. Et Rocard m'inspire toujours. Mais nous devons aller plus loin.
Je crois au républicanisme de gauche, mais à la française, dans sa version
moderne capable de transcender les frontières politiques. Le républicanisme,
c'est l'idée fondamentale que la société est d'abord un collectif de citoyens,
libres et égaux. Il offre la plus belle des protections contre les inégalités
et les dérives identitaires. L'école, la laïcité, des services publics rénovés,
l'autorité, la primauté de l'intérêt général en sont les instruments.
La gauche
a-t-elle été remplacée par l'écologie ?
Je verrais les
choses autrement. Je pense que l'écologie éclaire de manière plus intense les
défis contemporains. La logique individualiste n'est plus pertinente face au
réchauffement climatique, à l'extinction du vivant et à l'épuisement des
ressources. Tous ces défis imposent des réponses collectives et solidaires,
taillées pour une gauche large, pragmatique et généreuse. La jeunesse y est
particulièrement sensible. J'insiste, il faut un projet porteur qui allie la
République, l'écologie et les défis numériques, qui sont pour moi les trois
enjeux prioritaires.
Avec la
contestation sociale contre la réforme des retraites, la gauche a un boulevard
devant elle. Pourquoi personne n'en profite-t-il, pas même Jean-Luc Mélenchon ?
Même si nous
n'avons pas tout réussi dans le quinquennat précédent, le Parti socialiste a
fait le choix de ne pas assumer la politique qui a été menée. Pourtant, nous
avons effectué des réformes de structure (soutien aux entreprises, CICE, loi
travail, crédit d'impôt recherche…) qui, si elles ont bousculé le catéchisme
idéologique de certains, sont à l'origine des bons résultats économiques
actuels. Sur le volet sécuritaire et républicain, la gauche, longtemps jugée
angélique et irresponsable, a retrouvé une crédibilité auprès des Français.
C'est une révolution que l'on ne souligne jamais assez. Et nous avons tenu bon
face au terrorisme. Cependant, nous avons renié totalement ce bilan. Ce n'est
pas rendre justice à ce qui a été fait, mais c'est surtout une faute
stratégique majeure car, au jeu de la critique, le Parti socialiste sera
toujours à la traîne de la gauche radicale ! Enfin, les Français, c'est vrai,
ont fait une place à la gauche radicale. Mais c'est une place par défaut. La
violence politique de Jean-Luc Mélenchon, si elle l'installe dans la place de
l'opposant, a toutefois un prix : celui de l'apparenter au populisme, qu'il
revendique, et de l'éloigner du républicanisme
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Et donc VALLS ne manque pas à la liste des prétendants en bon opportuniste
en toute logique avec les autres : Ségolène ROYAL, François HOLLANDE,
CAZENEUVE etc.
Et la liste n’est pas exhaustive !
Pitoyables politiciens ex élus qui ont été jeté par les français ou sont
partis, voire ont lâché l’éponge avant la fin !
Quel monde politique français déplorable et s’ils restent des français
pour les remettre en selle, qu’ils ne demandent plus de changements car là, ils
seront incurables et mériteront ce qu’ils subiront après !
Là, si cela se produisait, cela montrerait et prouverait pourquoi le
pays végète et continue à descendre vers le fond, comme un pauvre pays sans envergure
qui n’arrive pas à se débarrasser de son passé conservateur qui n’arrive pas à
se relever à cause de français frileux, versatiles, et individualistes encore
trop heureux malgré qu’ils râlent pour la forme, mais qui votent si mal et qui
ne voit pas l’avenir de celui-ci dans le monde et qui sera encore plus à la
traine en Europe et aussi ailleurs !
Je suis vieux, je ne sais pas, si je verrais la suite après 2022, et si
MACRON arrive à être réélu pas si étonnant que cela, mais en tout cas, je désespère,
car j’aime mon pays !
Jdeclef 03/03/2020 13h49
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