« Pas
de vagues » : quand les parents s’incrustent à l’école
Nombreux
sont les professeurs à devoir composer avec les parents d’élèves, qui n’hésitent
pas à contester leur autorité. Une ingérence amplifiée par l’épidémie.
(Car on fait trop de politique politicienne à l’éducation
nationale, pas de l’enseignement et cela ne date pas d’hier, mais de 40 ans au
moins...)
« En
un instant, on a ruiné mon autorité. » Paul* garde le souvenir,
encore amer, de ce cours d'histoire-géographie au cours duquel son chef
d'établissement a reconduit en classe l'élève qu'il venait d'exclure. Il est
alors enseignant à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) et c'est sa première année
dans l'Éducation nationale. Cinq ans après, il se souvient de l'élève et du
principal de l'établissement, postés sur le pas de la porte. « Je n'ai
rien opposé, mais j'ai su que contester le bien-fondé de ma sanction, et devant
toute la classe, était la pire initiative. »
Cet épisode est loin d'être un cas isolé. Nombreux sont les
professeurs à faire la douloureuse expérience de la remise en cause de leur
autorité par des chefs d'établissement soucieux de ne pas « faire de
vagues » – soit minimiser ou taire des faits pour éviter tout rapport de
force et différend avec les élèves. Mais aussi avec leurs parents, toujours
plus enclins à s'inviter dans l'enceinte de l'école pour s'interposer entre les
professeurs et leur enfant.
Une ingérence en rien nouvelle. Sous le Second Empire déjà, elle
hérissait les professeurs et était reconnue, par l'institution elle-même, comme
un problème. Ainsi une enquête ministérielle
de 1861 qualifiait-elle les parents de « fléau des écoles
[…] convaincus du tort des maîtres ». « On pense que, dans le temps,
les parents doublaient la punition infligée à leur enfant par ses professeurs.
Ce n'était pas plus le cas il y a 150 ans qu'aujourd'hui », rappelle
à ce titre l'historien de l'éducation Claude Lelièvre. Quant à l'école
républicaine, elle n'a guère plus sollicité les familles – dont certaines
étaient hostiles à la République –, préférant même « les tenir à
distance ».
Et, si cette position est aujourd'hui « largement
intégrée » par le corps enseignant, elle n'en demeure pas
moins régulièrement mise à mal. Par l'épidémie, notamment, et les
longs mois d'« école à distance » auxquels elle a donné lieu.
« Avec le confinement, l'école a demandé aux parents de s'impliquer
davantage dans l'enseignement et a reconnu implicitement, et à ses dépens,
qu'ils étaient légitimes à être co-éducateurs », relève Claude Lelièvre.
Et, après l'immixtion des professeurs à la maison, les parents s'autorisent
d'autant plus à intervenir à l'école. « C'est l'effet boomerang.
Mais cela perdure et c'est très pénible » abonde la principale
d'un collège public de Dijon, qui a reçu il y a peu la mère d'une élève
contredisant « à même la copie » les appréciations de la professeure
de français de cette dernière.
Jean*, professeur de français, depuis vingt ans, dans un
collège de Besançon, dresse le même constat. « J'ai toujours vu des
parents se manifester auprès des professeurs ou du chef d'établissement. Mais
cet interventionnisme est plus prégnant et plus vindicatif depuis quelques
années. On ne demande plus d'explications, mais la rectification d'une note ou
l'annulation pure d'une sanction. Et les rapports se sont encore tendus depuis
le confinement » relate l'enseignant, déjà sommé, à deux reprises, de
« s'expliquer » sur sa notation depuis le début de l'année
scolaire.
Un « marché scolaire »
« Les parents, dans une vision consumériste de l'école, ont
le sentiment qu'on est au service de leur enfant et que ces premiers, à l'image
de consommateurs, peuvent nous invectiver sur le mode “Passez-moi le
responsable” », observe Paul, qui a désormais quitté la banlieue
parisienne pour un « petit collège en milieu rural ». « On doit
se justifier sur tout, les propos de l'enfant sont pris pour argent
comptant », grince-t-il. En cause, une confusion : « Celle du
service public, autrement dit de l'intérêt général et du service du public, comprendre de l'intérêt de
chacun, couplée à une éducation dictée par la demande, qui mine l'institution
Éducation nationale », déplore Claude Lelièvre – qui impute la bascule à
l'assouplissement de la « sectorisation », transformant
symboliquement l'école en « marché scolaire », et à l'image du
professeur, qui n'est plus, comme ce fut le cas dans le passé, plus
diplômé que les parents de ses élèves.
« Les parents ont, avant tout, peur que leur enfant ne
réussisse pas, justifie la principale de collège dijonnaise, en fonction depuis
1993. Ils craignent que les sanctions figurent au dossier. Et, d'une façon
générale, tout ce qui peut altérer la scolarité de leur enfant les fait monter
au créneau. » « Leur interventionnisme peut partir d'un bon
sentiment », tente, lui aussi, de relativiser Paul. Reste à « savoir
poser des frontières », en l'absence desquelles leurs récriminations
prennent des formes démesurées. Au point de conduire, de guerre lasse, les
professeurs et particulièrement leur hiérarchie – généralement première
sollicitée – à la résignation.
Courage, fuyons ?
« Il n'est pas rare que des parents appellent la direction
pour dire que leur enfant ne fera pas la punition ou n'ira pas en retenue. Et
que cela finisse par passer à la trappe ! déplore Jean. Quelle
crédibilité vis-à-vis de nos classes ensuite ? » Paul
d'abonder : « On a des chefs d'établissement un peu couards, qui ne
veulent pas entrer dans le conflit avec les familles et enterrent les
problèmes. » « Mon rôle est de faire barrage », expose, à
ce titre, la principale de collège. Mais elle l'admet : « On n'est
pas très courageux. Quand des parents hurlent, une fois, deux fois, on fait un
peu attention, les sanctions tombent moins vite. Ils le savent. Une forme
d'autocensure se met en place. »
L'injonction tacite et si délétère du « pas de vagues »,
en somme. Qui règne en maître dans nombre d'établissements, mais n'a pas
dissuadé Jean de « résister » à une hiérarchie qui le pressait de
modifier la note d'un élève, aux parents « particulièrement
procéduriers ». « Le chef d'établissement craignait que cela ne lui
retombe dessus, commente le professeur. Lui cherchait la paix
sociale. » Une indolence qui n'a rien d'un hasard, les
chiffres (sanctions, conseils de discipline, plaintes) n'étant pas sans
effet sur la réputation des établissements comme sur la carrière de leurs
principaux et proviseurs – le renouvellement des contrats comme les mutations
dépendant de statistiques largement consultées par les inspecteurs d'académie.
« Quand les élèves peuvent passer
de 0 à 10 ou s'exonérer d'une punition en appelant
papa et maman, pourquoi se priver d'entregent ? Est-ce vraiment
ce que l'on veut apprendre à nos élèves et les parents à leurs
enfants ? enrage Jean. Il y aura un retour de bâton à cette
fausse bienveillance, à tous niveaux. »
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Les
établissements sanctuaires n’existent plus (sauf peut-être les internats !?)
Les
enseignants qui étaient (encore) respectés par les élèves ne le sont plus par
certains trublions mal élevés qui peuvent tout se permettre car les professeurs
n’ont à peu près aucun pouvoir de sanctions efficaces et risquent en plus des problèmes
avec les directives de l’éducation nationale !
Donc
de fait, l'enseignement proprement dit a baissé en qualité, de l’école primaire
au secondaire, car les professeurs qui ne sont plus soutenus laissent tomber,
plutôt qu’être empêché de faire correctement leur travail dans leurs classes ou
certains petits mignons quelquefois graine de délinquants les insultes et les
menace, voire en leurs disant, « je vais le dire à mon père »
quand ce n’est pas pire !
Alors
comme que ce sont des fonctionnaires que l’on dénigre souvent et dans l’école
publique, même pas assez défendus par leur hiérarchie qui veut elle aussi ne
pas avoir d'ennuis !
C’est
simplement une réalité de notre société française actuelle avec nos libertés
mal encadrées par nos bien-pensant donneurs de leçons et une population qui a changé !
Difficile
à comprendre pour des personnes comme moi, grand-père âgé de 73ans qui respections
nos maitres, instituteurs, professeurs, d’ailleurs ont n’aurait pas osé de déroger
aux règles, mais chez les parents actuels il y a en de plus en plus des mal
élevés et irrespectueux alors... !
Il
reste pour les parents qui en ont les moyens de mettre leurs enfants dans le
privé, mais alors, ou est l’égalité française dans un pays qui va mal, car
laissé aller à vau l'eau ?!
jdeclef 12/03/2021 17h12
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