Gilles Guillotin, ancien n°2 de la PJ de Grenoble, est jugé
dans le cadre de «l'affaire Neyret», à partir du 2 mai 2016.
Société
Affaire
Neyret: «Ma sanction, je l'ai déjà eue, je ne suis plus policier»
INTERVIEW Gilles Guillotin, ancien n°2 de la PJ de
Grenoble, sera jugé dès lundi en compagnie de son ancien chef, Michel Neyret, pour
trafic de drogue et association de malfaiteurs...
Ce lundi, Gilles
Guillotin comparaît devant la 11e chambre du tribunal correctionnel de Paris.
Avec lui, huit
autres prévenus seront jugés, dont l’emblématique Michel
Neyret, ex-star de la PJ lyonnaise, son ancien chef.
L’ex-numéro 2 de la Police judiciaire de Grenoble, à la retraite
anticipée, est renvoyé devant le tribunal pour trafic de stupéfiant et
association de malfaiteurs. La justice lui reproche d'avoir prélevé de la
drogue saisie afin de rémunérer un indic en nature sur les ordres de Michel
Neyret. Gilles Guillotin vient de publier un livre, 33 ans flic pour rien ?
(Ed. Temporis) dans lequel il raconte un métier qu’il a quitté à regret et
où il règle ses comptes avec une institution sur laquelle il ne se fait plus
aucune illusion.
Pourquoi avoir écrit ce
livre ?
Pour plein de
raisons, mais surtout parce qu’après l’affaire Neyret, j’ai entendu plein de
choses, des donneurs de leçons. On a qualifié les méthodes de Neyret
d’archaïques. Je ne me reconnaissais pas dans tout ça. J’ai donc décidé de
faire un travail de mémoire pour voir ce qu’il en était exactement.
Vous êtes à la retraite
aujourd’hui, qu’est-ce qui vous manque le plus dans votre métier ?
Le sentiment
d’utilité, surtout. Et puis il y a l’adrénaline qui n’est plus là. Avant, quand
je me levais le matin, je me disais que j’allais intervenir sur un go fast,
alors que là c’est l’encéphalogramme plat. Depuis cinq ans, je suis également
privé de mes amis. Quand vous faites ce métier, tous vos amis sont policiers,
parce qu’il y a des choses que vous ne pouvez raconter qu’à des collègues. Mon
contrôle judiciaire m’empêche d’avoir le moindre rapport avec eux. J’ai rendu
mon insigne et mon arme sur le coin d’un bar, parce que je n’avais pas le droit
de retourner dans mon bureau. Après 33 ans, ça cause pas mal de secousses dans
la tête.
Dans votre livre, vous
semblez regretter une époque où la police scientifique était moins
présente ?
Oui, avant c’était
l’humain qui se trouvait au cœur de tout. Il y avait peu d’écoutes
téléphoniques puisqu’il n’y avait pas de portable. Tout se faisait à
l’ancienne, avec des renseignements humains, à la tchatche, à la connaissance
du dossier. On y reviendra forcément : quand on voit l’enquête sur
les attentats
de Paris et de Bruxelles, on se rend compte que ce sont des renseignements
humains qui ont permis de loger Abaaoud, ou bien un taxi qui a permis de
trouver l’appartement des kamikazes à Schaerbeek.
Vous êtes également très
critique sur l’institution ?
En 2004, le
gouvernement a permis un système de rémunération des indic'
qui ne correspond pas à la réalité du terrain niveau timing et montant.
Après l’affaire Neyret, on a essayé de laver plus blanc que blanc. Aujourd’hui,
le moindre geste dans la police est couvert par la justice. L’incinération des
produits stupéfiants se fait en présence d’un magistrat par exemple.
L’omniprésence des médias entre autres, n’est sûrement pas étrangère à tout
cela. Les fuites dans la presse sont organisées et viennent forcément de
l’institution. Dans mon dossier, j’ai tout appris d’abord par les
journalistes : ma mise en examen, puis ma réintégration. Le
système policier a prouvé ses limites avec cette affaire.
Quelles limites ?
Me David Metaxas, qui
est jugé en même temps que moi, n’a pas été suspendu par son Conseil de
l’ordre. Moi j’ai tout de suite été suspendu, alors qu’aucune perquisition n’a
été menée chez moi et dans mon bureau, aucune mise sur écoute n’a été ordonnée.
On a amputé un quart de mon salaire. Et cinq mois plus tard, l’IGPN (Inspection
générale de la police nationale) est venue me voir pour me dire que j’étais réintégré
alors que j’étais toujours mis en examen pour trafic de drogue et association
de malfaiteurs. On m’a rendu mon badge et mon arme alors que rien n’avait
changé. Ça n’a aucun sens.
Dans quel état d’esprit vous
trouvez-vous aujourd’hui ?
Je suis impatient que
le procès commence, pour écouter, comprendre si j’ai été floué ou pas,
m’expliquer et j’espère regagner ma liberté d’aller et venir. J’ai eu des
passages à vide au cours des dernières années, je me suis jeté dans le sport
pour ne pas craquer. Aujourd’hui j’attends avec impatience que ça commence. Et
j’espère que tout s’arrêtera avec ce procès. Mais ma sanction, je l’ai déjà
eue, je ne suis plus policier et on m’a jeté en pâture aux médias.
Que pensez-vous de Michel
Neyret aujourd’hui ?
C’est un flic
extraordinaire, un grand monsieur de la police qui connaissait tous les
dossiers de tous les groupes de son service sur le bout des doigts. Ça n’a
jamais été un ami, c’était mon directeur, avec qui j’entretenais des rapports
de respect je crois. Pour le reste, je ne sais pas. J’émets un bémol
technique pour le moment, puisque je suis dans la merde à cause de lui depuis
cinq ans. J’attends le procès pour voir si ce qui lui est reproché est
vrai. On dit que pour qu’une infraction soit constatée, il faut que trois
éléments soient réunis : légal, moral et matériel. J’apporte une
grande importance à l’élément moral.
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Au bal des "ripoux" comme on appelle ces
flics qui ont franchi la ligne jaune, il n'est pas le seul !
Mais quand on voit le monde politique et
l’état dont il était un des serviteurs, notre république n'est pas claire dans
ses institutions exemple :
Un ex ministre patron de flics en
passant C.Gueant, qu’en penser, pour
ne citer que celui-là !?
Et bien d'autres politiciens mis en
examen ou nommés dans des affaires douteuses faut-il citer d'autres noms?!
Ce fonctionnaire n'est pas un saint et peut être coupable (surement) de ce qu'il a fait, mais l’exemple vient quelque fois de
haut et bien d'autres passent encore entre les gouttes de notre justice qu'on
dit « indépendante » de
notre république faite sur mesure pour certaines « élites » de nantis bien-pensant !
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