Loi travail -
49.3 : Valls convoque un conseil des ministres extraordinaire
Le recours au
49.3 semble désormais la solution privilégiée par le gouvernement pour adopter
la loi. L'opposition menace de déposer une motion de censure.
Pour Manuel Valls, "il ne faut
jamais renoncer à un moyen constitutionnel" pour faire passer la loi
travail. Quitte à se passer du vote des députés en sortant la carte 49.3. ©
Nikon Inc. & Nikon Corporation 2009/ ERIC FEFERBERG
Manuel Valls avait prévenu
: le recours au 49.3 pour faire passer la loi travail n'était pas à
exclure. C'est désormais la solution privilégiée. Le Premier ministre a
convoqué à 14 h 30 ce mardi un conseil des ministres extraordinaire à
Matignon, en vue d'aborder la question du 49.3, ont appris à l'Agence France-Presse plusieurs
ministres. Il « n'a visiblement pas l'envie d'aller vers un
compromis » sur le projet de loi travail en « refusant » de
modifier son article le plus polémique, a dénoncé le chef de file des députés PS frondeurs, Christian Paul, à
l'issue d'une réunion à Matignon avec le Premier ministre.Manuel Valls lui a répondu, agacé. « J'ai endossé la responsabilité des erreurs du début et on nous a demandé d'aller trouver un accord avec la CFDT. Oui ou non, y a-t-il eu un accord ? Oui ! », a lancé le Premier ministre devant une grosse centaine de députés PS. « Il faut être honnête intellectuellement ! On ne peut pas dire que le gouvernement n'a pas cherché le compromis », a-t-il poursuivi d'après les participants à la réunion.
L'opposition
a rédigé une motion de censure
Selon ces mêmes
sources, Manuel Valls n'a pas annoncé à ce stade qu'il allait recourir sur ce
projet de loi au 49.3 (adoption d'un texte sans vote avec engagement de la
responsabilité du gouvernement). Mais les députés Les Républicains et l'UDI à
l'Assemblée ont d'ores et déjà préparé une motion de censure contre le
gouvernement, ont affirmé mardi à la presse les présidents des deux groupes
parlementaires. « Nous sommes cosignataires d'une motion avec les Républicains.
Les signatures ont été recueillies » à l'UDI, a déclaré Philippe Vigier. Pour
le groupe LR, Christian Jacob a précisé qu'il souhaitait un débat sur cette
motion de droite mardi prochain, jour initialement programmé pour le vote
solennel sur l'ensemble du projet de loi.Le président du groupe PS Bruno Le Roux espérait encore mardi matin « éviter » l'engagement de la responsabilité gouvernementale sur ce texte, susceptible d'« évoluer un peu ». Les députés sont rentrés lundi dans le vif de la loi travail, mais les débats ont pris une tournure étrange, le gouvernement ayant repoussé les votes sur les amendements « jusqu'à nouvel ordre », illustrant les doutes sur la majorité. Depuis l'arrivée dans l'hémicycle mardi du texte de loi travail, « de progrès » pour François Hollande, « juste et nécessaire », selon Myriam El Khomri, mais contesté depuis plus de deux mois dans la rue, les travaux piétinent et les tractations en coulisses continuent. Selon une source gouvernementale, « les choses sont réglées » sur le 49.3. « On ne peut pas ne pas utiliser » cet outil vu les blocages sur l'article 2 sur les accords d'entreprise, et « les choses seront dites » dès mardi si ça « ne se dénoue pas », ajoute cette source, selon laquelle « beaucoup de députés en ont marre et veulent qu'on arrête tout ça ».
« Simulacre »
de vote
Alors que les élus
venaient lundi de commencer à examiner les amendements sur l'article 1, créant
une commission chargée de proposer une refondation de la partie législative du
Code du travail, la ministre du Travail a demandé « la réserve des
votes ». Après cette procédure, qui n'a pas été levée jusqu'à la fin des
discussions tard dans la soirée, plusieurs élus sont montés au créneau,
dénonçant, comme Francis Vercamer (UDI), un signe de « fébrilité »,
ou une « image déplorable » donnée au peuple avec ces débats sans
votes, selon le chef de file des députés du Front de gauche André Chassaigne.C'est « surréaliste », « ça ressemble à un simulacre », a aussi lancé la socialiste « frondeuse » et ex-ministre Aurélie Filippetti, le terme de « simulacre » étant repris notamment par la droite et des écologistes. Dès l'ouverture des discussions, et alors que les députés n'ont en théorie que jusqu'à jeudi soir pour débattre des quelque 5 000 amendements, avant le vote solennel prévu le 17 mai, la menace de 49.3 était omniprésente.
Une
« arme constitutionnelle »
« Ave Caesar, morituri te salutant »,
s'est exclamé Bernard Debré (LR), accusant le gouvernement de vouloir
« déposséder » les députés de leurs prérogatives en recourant à cette
arme constitutionnelle. Dans la soirée, plusieurs élus ont tenté en vain d'en
savoir plus sur les intentions du gouvernement, comme Dominique Tian (LR)
plaidant pour que le président du groupe socialiste Bruno Le Roux dise
« s'il y a oui ou non une majorité ». Semblant souffler le chaud et
le froid, Manuel Valls avait glissé vendredi qu'« il ne faut jamais
renoncer à un moyen constitutionnel » comme cet outil qui permet de faire
adopter un texte sans vote (à condition d'échapper à une motion de censure),
tout en réaffirmant sa « volonté de convaincre ».La réunion des députés socialistes, en présence du Premier ministre, permettra mardi au gouvernement de reprendre la température, alors que Bruno Le Roux recensait encore lundi « 30 à 40 » voix manquantes pour une majorité. Juste avant cette réunion, une quinzaine de députés PS, dont des « frondeurs », doivent être reçus à Matignon. Déjà avant le pont de l'Ascension, certains au gouvernement jugeaient « certain » un recours au 49.3, car « l'article 2, le plus gros problème, arrive d'entrée ».
Cet article, qui n'a pas été abordé lundi, et sur lequel le rapporteur a proposé un nouveau « compromis », vise à donner la primauté à l'accord d'entreprise en matière de temps de travail. Il concentre plus d'un tiers des amendements et beaucoup de critiques à gauche, au-delà des « frondeurs », mais est au « coeur » du texte, selon Manuel Valls.
«
Une insulte au peuple » selon Nuit debout
Entre socialistes, la
tension est forte, avec des pressions, y compris sur les investitures aux
législatives. La porte-parole du parti Corinne Narassiguin a dénoncé lundi soir
la volonté des « frondeurs » de créer une « minorité de
blocage » en s'alliant avec la droite, le sénateur Luc Carvounas prévenant
que forcer au 49.3, utilisé trois fois pour la loi Macron en 2015, serait
« un message dévastateur dans notre électorat ». Pour le chef de file
des « frondeurs », Christian Paul, c'est l'exécutif qui prend
« la responsabilité d'une fracture durable » s'il ne bouge pas.Dans la rue, le prochain temps fort sera jeudi, avec une cinquième journée de mobilisation (CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, Fidl, UNL). S'y ajoutent Nuit debout et une grève reconductible des routiers appelée par la CGT et FO, à partir du 16 mai. Dans Le Parisien de mardi, le numéro un de FO, Jean-Claude Mailly, demande l'organisation d'un référendum sur le projet gouvernemental. Utiliser le 49-3 pour faire adopter le projet de loi travail, « c'est dramatique ». « C'est vraiment un gouvernement autoritaire, socialement, économiquement, droit dans ses bottes », a réagi le secrétaire général de FO.
Le mouvement Nuit debout a qualifié dans un communiqué l'éventuel passage en force de la loi comme une « insulte au peuple ». « Ce déni de démocratie après un mouvement social qui a regroupé des centaines de milliers de personnes dans la rue, dans les entreprises, les universités, les lycées et sur les places de France est une insulte au peuple de ce pays », estime le mouvement citoyen qui occupe la place de la République à Paris depuis plus d'un mois. Les militants appellent à la mobilisation devant l'Assemblée nationale ce mardi « contre cette dernière attaque contre nos droits sociaux et notre démocratie ».
Le 49/3 a été autorisé donc Mr le 1er
ministre quoi qu'il en dise subit un échec puisqu'il utilise cet artifice pour
faire passer cette loi bien qu'il ait dit le contraire auparavant sur sa non
utilisation !
Jdeclef 11/05/2016 15h15
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