Plan de relance :
comment les 25 peuvent écarter la Hongrie et la Pologne
Angela
Merkel, qui préside l'Union européenne, attend de Varsovie et Budapest la levée
de leur veto sur le paquet financier. Sinon, un plan à 25 est étudié…
A.MERKEL avait donné lundi et mardi à la Pologne et à la Hongrie
pour lever leur veto au plan de relance. La chancelière allemande, qui
préside l'UE jusqu'à la fin de l'année, doit préparer le Conseil européen
des 11 et 12 décembre, le dernier de l'année et le dernier sous
sa présidence. N'ayant obtenu aucun infléchissement notable du Hongrois Viktor
Orban et de Mateusz Morawiecki, le Premier ministre polonais, les solutions de
repli sont désormais sérieusement envisagées afin de passer outre les vetos et
de mettre en place un plan de relance à 25 puisque ces deux nations
se mettent en marge du mouvement.
La situation dans ces deux pays n'est pas la même. Le Hongrois
Orban règne sans partage et il pose à la chancelière un double problème,
politique et financier. Politique, car la CDU de Merkel a été
trop longtemps inerte face aux dérives de son parti allié, le Fidesz, au
sein du PPE. Trop de choses ont été passées au remuant Viktor Orban qui, de la
dévotion à Helmut Kohl, est passé à la propagande anti-Soros, anti-Bruxelles,
antimondialisation… Merkel a laissé faire l'ami hongrois du PPE parce que, très
longtemps, Viktor Orban était présenté à Berlin comme un faux
« autoritaire » qui en disait plus qu'il n'en faisait, un
« enfant terrible » qui, tout en occupant sur la scène politique une
position d'extrême droite nationaliste, empêchait les « vrais
nazillons » hongrois (le Jobbik) de monter au pouvoir. Au nom de l'unité
du PPE, Berlin a fermé les yeux, admettant juste une « suspension »
du Fidesz (avec le consentement ridicule d'Orban à sa propre suspension).
Orban ne s'excuse pas et demande la parité
Cette indulgence de Merkel a atteint sa limite. Les dérives des
membres du Fidesz sont telles que le chef de la délégation hongroise au
Parlement européen, Tamas Deutsch, a comparé les discours sur l'État de droit
de l'Allemand Manfred Weber, le chef du groupe PPE, au slogan de la
« Gestapo ». « Il me semble que notre seule chance est qu'il n'y
a pas de prisons dans le sous-sol du siège du PPE à Bruxelles, car sinon nous
aurions pu nous y retrouver il y a longtemps, » a-t-il poursuivi sur le
même ton d'ironie.
Manfred Weber comparé à la Gestapo par un eurodéputé hongrois
L'exclusion de Tamas Deutsch a été réclamée par le député autrichien Othmar
Karas. Viktor Orban s'est fendu d'une lettre le 6 décembre à
Manfred Weber dans laquelle, loin de présenter des excuses pour les mots
infamants du député Deutsch, il propose au PPE une semi-scission comme du temps
où les Britanniques conservateurs avaient un statut d'associé (un pied
dedans, un pied dehors) qui leur assurait d'office une vice-présidence.
Entre 1999 et 2009, le PPE-DE était ainsi formé de deux unités, le Parti
populaire européen et les Démocrates européens (où siégeait aussi un parti
tchèque). Puis, les conservateurs britanniques ont fait scission pour créer le
groupe ECR (Réformistes et conservateurs européens). En somme, Orban réclame la
parit
Europe : « Le
mécanisme lié à l'État de droit est une absurdité juridique »
Angela Merkel, avant de quitter la vie politique, ne peut pas
laisser le PPE dans cet état. Et encore moins laisser Viktor Orban mettre en
cause le plan de relance européen et le futur budget européen de long terme,
soit la bagatelle de 1 800 milliards d'euros en l'air. Les grands moyens
sont donc étudiés depuis quelques semaines tant par la présidence allemande que
par les services de la Commission.
Une déclaration interprétative serait la solution la plus simple
La première porte de sortie, la plus aisée, serait que la Hongrie
et la Pologne acceptent une déclaration solennelle du Conseil européen qui
accompagnerait le paquet financier et le dispositif sur l'État de droit. Selon
ce texte (auquel Merkel travaille), les États membres s'engageraient à ne
pas faire un mésusage de la conditionnalité sur l'État de droit, qui
serait mise en œuvre de manière objective en vue de préserver les intérêts
financiers de l'Union. Bref, un texte rassurant qui éloigne la perspective d'un
« procès politique » contre Budapest ou Varsovie si le dispositif sur
l'État de droit devait être enclenché. Une déclaration interprétative qui
n'ôterait rien au dispositif puisque les 25 comme le Parlement
européen ont jugé hors de question de rouvrir la négociation de ce dispositif
articulé en 8 articles.
La Hongrie de Viktor Orban semble plus fermée à cette idée que la
Pologne, qui a, financièrement, beaucoup plus à perdre à persister sur la voie
du veto…
Orban a de quoi tenir jusqu'à ses prochaines élections
Si Orban campe sur ses positions, le Conseil européen donnera alors
des instructions pour se passer de la Hongrie et de la Pologne et concevoir un
plan de relance à 25. « Au moins pour montrer que les solutions
alternatives sont crédibles, confie un diplomate. Parce que, pour le moment,
Orban dit “moi, je n'ai pas peur, vous n'arriverez jamais à me sucrer mon
argent”. » Il est vrai que la Commission a fait parvenir de grosses sommes
à Budapest au titre des fonds de cohésion du budget 2014-2020. Avec les
paiements du cadre financier finissant, « la Hongrie peut tenir jusqu'aux
élections d'avril 2022 », fait-on savoir à Budapest.
Le plan de relance et le budget de long terme 2021-2027 sont pour
le moment couplés. Les fonds du plan de relance viennent en partie
irriguer des programmes européens. La solution examinée par la Commission
consiste à découpler le plan de relance du budget de long terme 2021-2027. Les
deux instruments seront donc indépendants l'un de l'autre.
Le projet des 25 : un redécoupage du plan de relance
Deuxième étape : la décision « ressources propres »
qui permet à la Commission de lever l'emprunt de 750 milliards d'euros est
bloquée par Varsovie et Budapest. « Dans ce cas, on reconstitue une
capacité d'emprunt avec des garanties nationales », confie un diplomate.
Donc, plus besoin de passer par la décision « ressources propres »
communautaires qui exige l'unanimité des 27. Puis, cet emprunt souscrit à
l'unanimité des 25 est « replugué » au dispositif de
répartitions des fonds, qui lui n'a pas besoin d'être voté à l'unanimité
mais seulement à la majorité qualifiée. Tous les textes d'application sont pris
à la majorité qualifiée. Donc la Pologne et la Hongrie seraient
évincées du plan de relance et ne pourraient plus le bloquer.
État de droit et relance de l'UE : la Hongrie et la Pologne
jouent au plus malin
Évidemment, si le Conseil devait en venir à se passer des deux
pays, cela prendrait plus que deux semaines. « Il faut compter quelques
mois de retard », estime-t-on du côté de la Commission. Le plus difficile
techniquement est de séparer le plan de relance et le budget européen de long
terme, qui sont intriqués. C'est l'opération qui prendrait le plus de temps,
car il faudrait procéder à nouveau à des arbitrages douloureux : qu'est-ce
qu'on renationalise ? En plus, cela ouvre de nouveau la question épineuse
des rabais (augmentés) arrachés par les frugaux (Pays-Bas, Suède,
Autriche, Danemark…). Une plaie encore vive…
Le dispositif « État de droit » peut être voté sans
Varsovie ni Budapest
S'agissant du cadre financier pluriannuel (le budget de l'UE
2021-2027), le traité prévoit qu'en cas de blocage, on applique la règle du
douzième provisoire jusqu'à ce qu'un accord soit trouvé. Chaque mois, on
reproduit les recettes et dépenses de l'année précédente. Mais là aussi, la
Commission dispose d'un puissant instrument à l'encontre des deux
récalcitrants. « Le cadre financier en douzième provisoire ne maintient
que certaines politiques, dont les paiements directs de la PAC,
l'administration, Galileo, etc. Tout ce qui est permanent. En revanche,
les fonds structurels disparaissent en engagement. Il reste les paiements
actuels issus du cadre financier précédent, c'est beaucoup d'argent, mais la
Commission peut lisser les paiements, donc la Pologne et la Hongrie peuvent
perdre immédiatement… », prévient un diplomate.
Cerise sur le gâteau : ces fonds européens seront dès lors
soumis au mécanisme sur l'État de droit. En effet, le dispositif qui est sur la
table du Conseil n'a pas été voté jusqu'ici pour ménager à la Hongrie et à la
Pologne le temps de revenir à de meilleurs sentiments. Mais ce dispositif
n'exige que la majorité qualifiée. Il sera dès lors voté et applicable.
Une situation plus compliquée à Varsovie
Donc, si on résume la manœuvre, la Hongrie et la Pologne ont tout
à perdre en persistant dans leur veto : le plan de relance se fera sans
eux, le budget européen sera raboté des fonds de cohésion et ils se verront
appliquer éventuellement les pénalités financières prévues par le mécanisme
État de droit qu'ils pensaient éviter… C'est la triple peine !
Consternation à l'UE après les veto hongrois et polonais
Orban peut tenir le bras de fer. En Pologne, la situation est plus
compliquée. D'abord, le pouvoir du PiS y est plus contesté par une opposition
solide qui s'est requinquée à la faveur de plusieurs maladresses du pouvoir. La
loi pour le bien-être animal, voulue par l'homme fort du régime, Jaroslaw
Kaczynski, visant à limiter le commerce de fourrures, a divisé son parti et
déclenché la colère des agriculteurs. Des manifestations de grande ampleur
secouent le pays depuis que le Tribunal constitutionnel (noyauté par le PiS) a
réduit encore les conditions d'accès à l'avortement, provoquant là aussi
des divisions au PiS et la chute du pouvoir dans les sondages. Enfin, le
gouvernement polonais est miné de l'intérieur par les rivalités entre le
Premier ministre, Mateusz Morawiecki, et son détracteur interne,
le ministre de la Justice, Zbigniew Ziobro (lequel dispose de son
propre parti), qui campe sur une position encore plus anti-bruxelloise.
Beaune : « Des clarifications, oui, jeter l'État de
droit à la poubelle, certainement pas »
Varsovie traverse donc une passe difficile et dangereuse. D'un
côté, il faudrait tempérer Orban mais ne pas le froisser car la Pologne a
besoin que la Hongrie la couvre dans la procédure de sanction de
l'article 7 (et réciproquement). Si Orban peut tenir jusqu'en avril 2022
avec sa cagnotte européenne, la Pologne, elle, a beaucoup plus à perdre en
termes de fonds européens, dont elle est la première bénéficiaire. S'isoler de
l'Europe est aussi un problème existentiel pour Varsovie qui craint par-dessus
tout l'isolement face au grand voisin russe… Alors si, en plus, la Pologne
devait subir la triple peine (exclusion du plan de relance, minoration des
budgets européens et sanctions financières sur l'État de droit), il y a de quoi
se poser la question : le jeu en vaut-il la chandelle ? Jaroslaw
Kaczynski et sa famille ont bien des choses à méditer ces jours-ci… À
Berlin, Angela Merkel attend sa réponse.
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Même le couple franco-allemand
n’est plus ce qu’il était, surtout que la chancelière Merkel qui en fait
décidait de tout, ne nous le cachons pas n’en déplaisent à nos présidents qui l’ont
côtoyé d’une France plus faible économiquement qui cédait aux vétos de l’Allemagne
à peu près à chaque désaccord, le plus bel exemple étant l’accueil des milliers
de migrants qu’elle a laisse entrer dans son pays sous prétexte de main d’œuvre
qui lui manquait !
Donc, s’il faut se séparer
des pays frondeurs pour essayer de sauver une Europe de la zone Euro, il faudra
le faire, car on voit de plus en plus des désaccords des pays de l’est à qui il reste des réminiscences
totalitaires de par leurs histoires communes avec l’ex URSS redevenue fédération
de Russie mais encore puissante, d’ailleurs heureusement que l’Allemagne a été réunifiée
après la chute du mur et la disparition du rideau de fer pas si ancien, ce qui
lui a fait recouvrer une puissance économique remarquable, quand on connait le pays
et l’état qu’il était devenu après-guerre mondiale, mais soutenue comme la France
par les USA toujours partenaire présent en RFA !
Jdeclef 09/12/2020 12h39
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