Ils ont
nui à la liberté d'expression en 2020
Pour la
deuxième édition de ses Bâillons d'or, « Le Point » récompense les
amoureux de la censure et de l'autocensure, qui se sont surpassés cette année.
Alors
que l'année 2019 était à l'annulation de conférences, de films et de
spectacles – ou à la tentative –, la censure façon 2020 a pris sans
aucun doute une tournure plus politique. L'attaque de Conflans et le procès des
attentats de janvier 2015 à Charlie Hebdo n'y sont pas pour rien, de nombreux acteurs, y compris au sein du
gouvernement, ayant fait ressurgir le débat sur la légitimité des caricatures
de Mahomet. L'islam apparaît d'ailleurs comme le sujet tabou par excellence, ce
dont témoignent les tristes aventures de Mila, cette lycéenne à qui des
commentaires crus sur cette religion – « Le Coran, il n'y a que de la
haine là-dedans, l'islam, c'est de la merde, c'est ce que je pense (…). Votre
dieu, je lui mets un doigt dans le trou du cul, merci, au revoir. » – ont
valu en début d'année des menaces de mort et une exfiltration de son lycée de
la région lyonnaise. L'année se finit pour elle par une autre expulsion, celle
du pensionnat militaire qui avait bien voulu l'accueillir, alors qu'elle a cité
par mégarde le nom de l'établissement où elle vivait dans une
quasi-clandestinité lors d'un « live » privé sur les réseaux sociaux.
Mais
la laïcité à la française n'échappe pas non plus au sectarisme : fin
octobre, un article publié par Politico intitulé « France's dangerous religion of
secularism » (« La dangereuse religion française
du sécularisme ») était retiré du site du journal sous la
pression de l'opinion. N'oublions pas non plus les tentatives – ratées –
d'ingérence chinoise dans la programmation culturelle d'un musée, les bonnes
paroles du CSA et les conseils de l'élue écologiste Alice Coffin, autrice du Génie lesbien (Grasset),
qui, en se privant volontairement des œuvres produites par les mâles,
inaugure la censure volontaire. Parmi ces nombreux candidats, il a bien fallu
choisir… Voici nos lauréats 2020.
Ils
ont nui à la liberté d'expression en 2019
Geoffroy
de Lagasnerie, la censure juste (3 bâillons)
Voici
un bâillon d'or qu'assumera tête haute le sociologue et philosophe Geoffroy
de Lagasnerie, qui n'hésite pas à défendre la censure comme moyen légitime
d'action politique. « Il faut reproduire un certain nombre de censures
dans l'espace public pour rétablir un espace ou les opinions justes prennent le
pouvoir sur les opinions injustes »,a-t-il déclaré dans une interview de
promotion hallucinante à France Inter, le 30 septembre, à l'occasion de la
parution de son livre L'Art impossible (PUF). Pour
le compagnon de route du Comité Adama, l'infiltration des « cerveaux
malléables », la violence politique ou la censure au nom d'idées
« pures » représentent bel et bien le nouvel Eldorado du « camp
progressiste ». Quant au respect de la loi, il ne s'agit pas d'une
« catégorie pertinente ». « La question, c'est celle de la
justice et la pureté », martèle le philosophe, qui considère les élections
comme un principe « pas particulièrement sensé », à moins qu'elles ne
permettent de « s'approprier l'appareil répressif d'État ». Arrive toujours un moment où l'extrême gauche se fait dépasser
par sa gauche… (Clément Pétreault)
Thomas
Clay, la censure pour tous (2 bâillons)
« Le
fondement du mariage pour tous – je suis contre mais j'admets qu'on soit pour
–, c'est la discrimination. Un jour, quelqu'un dira : “Ma jument, je
l'adore, je ne peux pas l'épouser, c'est un scandale”. »Ces propos
éminemment discutables n'ont pas été tenus au Café du commerce mais par un
professeur en toge de Paris I Panthéon-Sorbonne. Ce 29 septembre, Aram
Mardirossian ignore que son cours d'histoire du droit est filmé. Les réseaux
sociaux s'emballent, des étudiants l'accusent de comparer l'homosexualité à la
zoophilie – ce qu'il n'a pas fait. Lynché, il est aussitôt lâché par le
président (par intérim) de l'université, Thomas Clay, qui condamne sans autre
forme de procès des idées « discriminatoires ». Des collègues
réclament son renvoi en conseil de discipline mais d'autres
s'interrogent : « Que deviendrait un enseignement s'il devait ménager
constamment la sensibilité d'un auditoire forcément divers ? La faculté
doit être reconnue à un professeur d'user de provocation pour faire réfléchir les
étudiants. Remettre en cause cette liberté, c'est succomber à la police de la
pensée. » Ce jour-là, Thomas Clay a été à son service. (Nicolas Bastuck)
Macron,
défenseur et fossoyeur de libertés (2 bâillons)
Soyons
justes. Emmanuel Macron a été courageux dans sa défense de la liberté
d'expression, et notamment du blasphème, alors que la France est isolée sur ce
sujet. Quel contraste, par exemple, avec la lâcheté du Premier ministre
canadien Justin Trudeau qui, quelques jours après la décapitation de Samuel
Paty, prônait la modération dans la critique des religions… Mais pourquoi Macron
s'entête-t-il alors à grignoter la loi de 1881 sur la liberté de la
presse ?
Dans
la lignée de la législation dite « anti-fake news » (2018), fut votée
au mois de juin dernier la loi Avia sur la haine en ligne, qui aboutit à
reléguer la justice derrière une censure privée (celle des plateformes
numériques), sous la tutelle d'une administration, le CSA. La loi Avia a été
heureusement retoquée par le Conseil constitutionnel, mais pourrait revenir
sous une autre forme. Cette année fut aussi conçu l'article 24 de la
loi de sécurité globale prohibant la diffusion « malveillante »
d'images de policiers ou de gendarmes. Inutile – il existe d'autres moyens de
réprimer le harcèlement – et liberticide. On ne sait ce qu'il en restera, mais
une fois de plus, on s'en est pris à la loi de 1881…
On
a eu aussi droit à l'incroyable proposition de Barbara Pompili, ministre de la
Transition écologique (inspirée par la Convention citoyenne sur le climat)
d'interdire de publicité certains produits jugés polluants. Une idée kafkaïenne
(quels critères adopter ?), infantilisante et à l'effet douteux.
Finalement, seules les énergies fossiles seraient visées. Paradoxe
tragi-comique : ces dernières seront par ailleurs aidées par l'État qui,
en réduisant le poids du nucléaire, favorisera le gaz et le charbon, et donc
les émissions de CO2 ! Le bilan 2020 du gouvernement ?
Courage indéniable à l'extérieur, éteignoir et tartuferie à
l'intérieur. (Étienne Gernelle)
Le
CSA ou l'idiotie au pouvoir (3 bâillons)
La
guignolade de l'année : le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) va
très sérieusement se pencher sur les blagues des Grosses Têtes, l'émission de RTL qui fait rire la France depuis 1977… Le
motif ? Une association l'accuse de dérapages homophobes, sexistes,
racistes et même grossophobes… Libre à elle de dire ce qu'elle pense. Là où
l'on tombe de notre chaise, c'est lorsque le président du CSA (doté de pouvoirs
de sanction), Roch-Olivier Maistre, annonce qu'il va « regarder de près
cette étude qu'il s'est procurée sans avoir été saisi ». Quand
l'administration se fait juge de l'humour, le pire est à craindre. Il faut
aussi avoir de l'eau dans la tête pour imaginer les Grosses Têtes en coterie
fascistoïde avide de discrimination. Au sujet des clichés homophobes, en particulier,
le CSA pourrait en apprendre plus en lisant la pièce de théâtre écrite par
Laurent Ruquier (l'animateur des Grosses Têtes), intitulée Pourvu qu'il soit
heureux. C'est juste, intelligent… et drôle. Autant de qualités qui manquent
visiblement au CSA. On pourrait rire de cela, mais non. Car nos apprentis
censeurs élargissent leurs prétentions à dire le bien à la sphère
numérique : le CSA va fusionner avec l'Hadopi (le régulateur d'Internet),
pour former l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et
numérique (Arcom). Un monstre est né. La pire nouvelle pour la liberté
d'expression en France depuis longtemps. (Étienne Gernelle)
Le
bâillon d'or étranger : le New York Times
En
juin, au plus fort des manifestations provoquées par la mort de George Floyd
aux États-Unis, le sénateur républicain de
l'Arkansas Tom Cotton a publié une tribune dans le New York Times appelant
au déploiement des troupes fédérales dans les grandes villes américaines. Plus
de 1 000 salariés du journal se sont élevés contre l'article. Penaud,
le Times a
répondu que le processus de publication avait été hâtif, poussant le rédacteur
en chef des pages « Opinion », James Bennet, à la démission. Un mois
plus tard, sa subordonnée, Bari Weiss, partait elle aussi. « Comment
ensuite pouvoir prendre des risques en tant que journaliste ? » s'interrogeait
Weiss dans nos pages. (Laetitia Strauch-Bonart)
Lire aussi Bari Weiss : « Pourquoi j'ai quitté le
“New York Times” »
Il a arraché son bâillon
Il s'appelle Bertrand Guillet. Il a dit non… à la Chine ! Des
années que le directeur du musée d'Histoire de Nantes travaillait à une
exposition consacrée à Gengis Khan et à l'empire mongol en partenariat avec
le musée de Mongolie-Intérieure d'Hohhot. Superbe coopération, vive le dialogue
des cultures. Mais, voilà, une condition est bientôt apparue : que le
Bureau national du patrimoine de Pékin puisse réécrire les textes de
l'exposition, histoire de bien minimiser le rôle des Mongols dans l'Histoire au
bénéfice du récit officiel. Qu'il puisse, aussi, changer le titre de
l'exposition et supprimer la mention du nom de Gengis Khan. Devant cette
façon de lui imposer, comme il le dit, « des éléments de réécriture
tendancieux visant à faire disparaître totalement l'histoire et la culture
mongole au bénéfice d'un nouveau récit national », autant dire un
chantage, voire une nouvelle forme de censure, le directeur a dit adieu
aux 255 pièces promises et a décidé de reporter l'exposition à
202. Elle sera organisée, cette fois, avec des partenaires européens et
américains. Gengis Khan est ravi… (Christophe Ono-dit-Biot)
------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Mais il faut savoir balayer
devant sa porte car je suis abonné au Point depuis très longtemps je le lis et
commente chaque jour ses articles :
Et justement Messieurs les modérateurs
du Point comme sur tous médias classiques censurent arbitrairement les commentaires
qui ne leur plaisent pas n’entrant pas dans le moule de leurs idées politiques
ou de bien-pensant hypocrites dont on souffre déjà assez comme cela, surtout
que cette censure d’un autre âge dans un pays libre et démocratique est inutile
car ces commentaires sont lisibles sur des blogs ou réseaux sociaux divers qui
les diffusent quand mêmes !
Donc excuser moi, je suis un
ardent défenseur de la liberté d’expression inscrite dans notre constitution qui
est une des dernières libertés qui nous restent et donc un bien précieux
inaliénable, alors je ne peux me taire !
Car il y a déjà eu un ministère
de l’information en France :
Il apparaît pour la première fois sous la IIIe République, en , sous le nom de ministère de la
Propagande dans le second cabinet
Léon Blum. En 1958, Charles de Gaulle revient aux affaires et institue
la Cinquième République, prescrivant au ministère de l’Information une
mission : réformer et organiser la radiotélévision
d’État. Tantôt érigé en ministère, tantôt en secrétariat
d'État, ce département de
l’Information joue le rôle principal – dans les années 1960 – du contrôle des
chaînes de télévision. Supprimé en 1968 en tant que ministère puis en 1969 en
tant que secrétariat d'État, ce ministère ne sera pas reconduit sous le premier
gouvernement de la présidence de Georges Pompidou mais rétabli en avril 1973 lors
des trois gouvernements de Pierre Messmer, puis disparaît définitivement en .
Merci Messieurs du Point de m’avoir lu, donc joyeux Noel et une bonne année 2021 en vous souhaitant que l’on ne vous interdise pas de diffuser écrits articles ou informations diverses !
Jdeclef 25/12/2020 09h56
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire