vendredi 20 avril 2018

Ça c'est sur car cet avocat médiatique est un jouisseur car par ces bavardages bien tournés il arrive à enfumer ces adversaires en justice !


Éric Dupond-Moretti : « Plaider, c'est bander ; convaincre, c'est jouir »

ENTRETIEN. Il a plus de 140 acquittements à son actif. Un record. L'avocat le plus célèbre de France nous dévoile ses secrets d'éloquence.


Dans son bureau figure en bonne place un échiquier hérité de Jacques Vergès avec des pièces manquantes, d'autres mal placées (« je ne sais pas jouer », se marre-t-il). Aux yeux du public, Éric Dupond-Moretti a aussi pris la place de Me Vergès comme l'avocat le plus médiatique et controversé de son époque. Omniprésent dans l'actualité judiciaire – Merah, Cahuzac, Théo, Tron et maintenant Djouhri –, l'homme aux plus de 140 acquittements l'est également en librairie avec son émouvant Dictionnaire de ma vie* , qui a détrôné (c'est une fierté pour lui) Jean-Marie Le Pen de la première place des meilleures ventes catégorie essais-documents.
Même ses adversaires – et surtout pas ceux qui, comme Christine Angot, ont tenté de ferrailler avec lui sur les plateaux télé – ne contesteront pas son titre de champion de France de l'éloquence. Pour Le Point, cet amateur de corrida a accepté de dévoiler les secrets d'une parole tranchante comme des banderilles, entrecoupée de silences qui en imposent. On ose à peine chatouiller le Minotaure : débattre avec Dupond-Moretti est une activité aussi insensée que vouloir échanger des balles avec Roger Federer.
Lire aussi : Comment l'éloquence est redevenue la clé du succès
Le Point : « J'ai rapidement compris que je n'irais pas pécho en boîte de nuit », écrivez-vous dans votre dernier livre. « La seule façon de séduire, c'étaient les mots »...
Éric Dupond-Moretti : [Il est pris d'une rafale de rires.] Ça commence fort ! Vous allez me foutre de bonne humeur pour la journée. Les enfants sont très durs à l'école. J'étais un peu enrobé, je n'étais pas bon en sport, j'avais un patronyme bizarre. La parole m'a sauvé et ouvert d'autres portes.
Votre mère ne parlait pas français en arrivant d'Italie. Votre père est décédé quand vous aviez 4 ans. Comment acquiert-on l'art de la parole quand on vient d'un milieu prolétaire ?
Ma grand-mère Louise était ouvrière, mais avait le certificat d'études et écrivait divinement bien sur le plan calligraphique, sans une seule faute d'orthographe. Elle était une cruciverbiste acharnée. On avait une petite table où, après avoir débarrassé le couvert et changé la nappe, elle mettait ses dictionnaires et ses mots croisés. Je passais des heures entières à regarder Le Petit Larousse. Avant de vouloir être un orateur, il faut posséder le volume des mots pour pouvoir exprimer la nuance des idées. Si vous ne possédez que peu de mots, vous allez forcément avoir une pensée pauvre. Comme le raconte le linguiste Alain Bentolila, les mots sont là pour pacifier. Celui qui ne possède pas les mots va tendre vers l'agression.
Et les mots avec les filles, cela fonctionnait ?
Pas trop, non. À 14 ans, j'aimais la chanson française, j'étais un ringard total. J'ai compris que ma singularité, c'était l'oral. C'est ça que j'ai développé plutôt que les muscles et les abdos.
Il faut s'adapter à ses interlocuteurs
Reçu dernier au barreau de Lille, vous gagnez le concours de la Conférence du stage...
Je n'ai pas étudié la rhétorique, je n'ai pas théorisé l'art de convaincre. Je plaide comme je parle et je parle comme je plaide. À la barre, j'essaie d'avoir un langage un peu plus châtié, mais je glisse parfois une petite familiarité pour ne pas rompre le lien avec les jurés. J'aime aussi faire court.
Vous adaptez votre ton en fonction des affaires ? Sur l'affaire Cahuzac, par exemple, vous étiez très policé...
Pour Cahuzac, on était en correctionnelle et pas aux assises. Je voulais quelque chose de sobre. Il faut s'adapter à ses interlocuteurs. Ce qui fait d'ailleurs qu'on se trompe parfois en tant qu'avocat. On essaie tel registre, mais cela ne fonctionne pas. Et puis d'autres fois, ça passe à merveille et on entend les mouches voler.
La dernière fois que vous avez mal plaidé ?
Aux assises à Bourg-en-Bresse. Je suis sorti de là démoli. J'ai eu l'impression d'être face à un mur, qu'aucun argument ne passait. C'est exactement pareil que quand vous racontez un truc à un copain et que vous tombez à plat. Je vous garantis qu'aucun compliment de stagiaire ne peut vous rassurer dans ce cas. Vous savez au fond de vous-même que vous n'avez pas été bon.
Comment commencez-vous vos plaidoiries ?
Mon maître, Alain Furbury, m'a appris à commencer par une introduction assez libre. Un jour, il a plaidé pour un Gitan accusé d'avoir saucissonné une vieille dame. Le dossier était difficile. Il se lève, et avec son bel accent du Sud-Ouest, dit : « Cette affaire me rappelle mon enfance. J'étais petit, c'était l'exode. De ma fenêtre, je voyais défiler des hordes de Gitans faméliques comme leurs chevaux. » Là, t'es à la fenêtre à côté de lui. « Et ma mère, me prenant par ma main, me dit : Tu vois, petit, ils volent nos poules, ils volent nos lapins, mais il faut les aimer, ce sont les derniers hommes libres. » Dans la salle, les mecs ont tous les poils hérissés, et des vieux Gitanos enlèvent leur chapeau. Inouï ! Un autre jour, Alain plaidait pour des anarchistes espagnols et nous a carrément emmenés en Andalousie, décrivant une ville plombée par le soleil. Il a eu cette formule : « Il faisait tellement chaud que les mouches avaient peine à voler. » C'est du Pagnol ! La poésie, ça ne nuit pas, surtout dans ce monde de brutes épaisses qu'est la justice.
Il y a la voix, mais aussi les silences. Imposer ses silences, c'est s'imposer
Et après ?
Vous ne pouvez pas lire cinq poèmes d'affilée et vous asseoir. Un moment, il faut rentrer dans le dur et revenir aux faits, en les racontant bien. Une bonne plaidoirie, c'est prendre les gens par la main et leur donner envie de vous suivre au fil de l'argumentaire. Et, pour conclure, ça doit tomber comme un clap de fin. Ce qui serait beau comme exercice, ce serait d'entendre trois avocats différents avec le même dossier.
La voix aussi est essentielle. Faut-il fumer et boire du whisky comme vous pour la façonner ?
Laissez-moi la voix ! On ne peut quand même pas cumuler tous les défauts physiques [rires]. Il y a la voix, mais aussi les silences. Imposer ses silences, c'est s'imposer. Quand je prends la parole, c'est moi le patron. C'est mon rythme. Le silence, cela donne de la contenance à l'orateur, cela permet de souligner le dernier mot, mais cela laisse aussi le temps de la réflexion.
« Convaincre, c'est jouir », a dit Robert Badinter. Vous confirmez ?
Totalement. Plaider, c'est bander. Convaincre, c'est jouir. Au sens figuré, hein, je précise que je n'ai pas de véritable érection au tribunal. Mais il y a quelque chose de cet ordre-là, bien sûr. L'échange, la séduction, c'est très charnel. Et il y a une autre chose en laquelle je crois beaucoup : une plaidoirie réussie est une plaidoirie habitée, sincère. Ce n'est pas un truc débité.
Quand vous n'êtes pas sincère, ça se sent immédiatement
Sincère ? Ça va amuser ceux qui vous accusent d'être un mercenaire ou un cabot...
[Il s'énerve.] Mais oui, je suis un cabot, bien sûr que je suis un cabot ! J'ai la certitude absolue que quand vous n'êtes pas sincère, ça se sent immédiatement. On ne peut pas opposer la théâtralité dont on a besoin dans notre métier, pour dire les choses, comme un artiste qui se présente sur scène, à l'authenticité. Les deux se complètent.
Est-ce que convaincre, dans votre métier, c'est faire que l'on s'identifie à son client ?
Il y a longtemps, j'ai défendu le rugbyman Marc Cécillon [qui, en 2004, ivre, avait tué sa compagne, NDLR]. Il s'était fait fracasser en première instance parce que sa défense avait choisi de le présenter comme un grand sportif. Il avait fait défiler tout le XV de France. Naturellement, les jurés ne pouvaient pas s'identifier à ce type et l'ont condamné à vingt ans. En appel, j'ai plaidé pour lui. Il était hors de question de revendiquer un privilège au motif qu'il a été un champion. J'ai fait le ménage : plus de Jo Maso, plus personne... Et puis, un soir, je vais dîner [il mime avec son pouce le geste de descendre une bouteille] avec Gilles Debernardi, un de vos confrères. Je lui demande ce qu'il pense de cette histoire, et il a cette formule : « Il faut que tu plaides ça à hauteur d'homme. » Ça a été le thème de ma plaidoirie. Marc Cécillon n'était plus un dieu du stade, on l'a fait descendre de l'Olympe. J'ai raconté au jury comment ce mec a dérapé, comment il était tout en haut de l'affiche et n'a pas accepté la chute, de jouer dans un club de division mineure alors qu'il avait connu les honneurs.
Et il a été condamné à combien d'années de prison en appel ?
Quatorze ans. L'exercice, c'est de rappeler à ceux qui sont nos juges que, certes, il y a le crime s'il est avéré, mais il y a aussi tout le reste : on est tous le fruit de notre histoire, on a des emmerdes, des névroses, des problèmes avec nos conjoints et nos enfants. Il faut qu'il y ait ce truc d'identification.
Vous dites qu'il ne restera rien de vos plaidoiries. Pourquoi ?
C'est une œuvre éphémère. Aucune plaidoirie retranscrite ne témoignera de l'intensité du moment. D'une certaine façon, c'est assez beau. Que restera-t-il du geste bien plus important encore du chirurgien qui opère ? Rien, rien. Et pourtant, c'est une intelligence de la main, un aboutissement extraordinaire.
On sent que les politiques ne sont pas libres, car un mot peut faire basculer l'opinion publique
Comment jugez-vous la parole politique ?
Infiniment cadenassée par les communicants de tous ordres. On sent que les politiques ne sont pas libres, car un mot peut faire basculer l'opinion publique. Notre époque est tellement sujette aux polémiques stériles. Il faut tout contrôler. Allez lire les débats de la IIIe et de la IVe République. Étudiez les formules ! L'art oratoire a beaucoup évolué. Il y a des enregistrements d'Isorni [Jacques, avocat, NDLR] défendant Pétain, c'est une langue sublime. Il n'y a pas un mot de trop.
Y a-t-il encore des tribuns ?
Mélenchon est un tribun. Jean-Marie Le Pen aussi. Ça me gêne de lui reconnaître une qualité, mais celle-là, on ne peut pas la lui enlever. Sarkozy aussi, même s'il écorche parfois la langue française et qu'il a eu quelques dérapages verbaux qu'on lui a beaucoup reprochés.
On dit qu'il l'a fait exprès, qu'il ne fait plus les liaisons pour avoir un style plus tranchant...
[Il interrompt.] Les liaisons, c'est quelque chose qui, hélas, est tombé en totale désuétude. Quand je me trompe et que je commets une liaison fatale, ça m'obsède. La fois dernière, devant les caméras, j'ai dit : « Encore z'une fois. » Ça m'a rongé toute la journée [rires].
Pour finir, un conseil à donner à quelqu'un qui aimerait devenir aussi éloquent que vous ?
Je ne crois pas au talent. Vous savez ce qu'a dit Brel sur le talent ? 10 % de don et 90 % de travail. C'est vrai.
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Et montre le mauvais côté de cette justice, car ces plaidoiries aboutissent à acquitter des personnages plus que douteux qui méritaient pour certains d’être condamnés !

Mais suite à des arguties de droit dont cet avocat se sert avec un talent peu commun, il obtient multiples acquittements pas forcement moraux ni justes !

Mais surtout il s'enrichit grandement avec sa spécialité lucrative, il n'y a pas de quoi l'admirer!

(Du moment qu'il arrive à bien dormir suite à certains jugements rendus grâce à lui..?)

Jdeclef 20/04/2018 09h38

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