Gérald
Darmanin, arrête-moi si tu peux...
Comment le
ministre de l'Intérieur compte tirer avantage de la tourmente actuelle liée aux
violences policières et la loi sécurité globale.
«Quand on est en haut de la montagne, c'est normal que le vent
souffle ! » Au beau milieu de la bourrasque,
Gérald Darmanin a reçu pour un petit déjeuner au ministère de l'Intérieur un
lointain prédécesseur : Nicolas Sarkozy. « Quand j'étais à ta place ici, lui
a glissé son mentor pour le réconforter, j'avais contre moi le président Chirac, le Premier
ministre Villepin, on était en pleine affaire Clearstream et ma femme était en train de partir, alors ton petit truc,
là… »« Ne t'en fais pas, petit », aurait pu
souffler le chenu Sarkozy à son impatient ex-coordinateur de campagne, qui, sur
la sellette, recevant Le Point,
philosophe sur le temps, plus important que le pouvoir, l'argent ou l'amour (« Le temps, c'est la seule chose que vous ne pouvez pas
maîtriser »), tout en multipliant les allusions
à son âge (38 ans). Au cours de cet entretien, Gérald Darmanin témoigne de sa
compassion… pour ses troupes. « Il faut bien que les policiers aient un avocat, clame-t-il.
L'autre jour, à la Bastille, il y a eu 98 blessés
parmi les forces de l'ordre, une commissaire a été rouée de coups et doit
porter une broche dans l'avant-bras. Je n'ai pas lu de tweets de footballeurs
vivant à Madrid ou en Italie pour s'en insurger. »
Politique madré, « très joueur,
opportuniste au sens footballistique du terme »,
selon un pilier de la macronie, le ministre fait montre d'agilité sémantique,
usant de ces formules « tontons flingueurs » qu'il affectionne. Sérénité
feinte.
« Honte ». Depuis qu'Emmanuel
Macron a découvert la vidéo virale du tabassage de Michel Zecler, trois jours
après l'évacuation indigne d'un camp de migrants en plein Paris, quelque chose
s'est brisé. Le président a eu « honte ». Le voilà qui prête l'oreille aux
élus et aux conseillers qui lui susurrent l'adage « Qui a trahi trahira ». « Amateurisme », « machiavélisme »,
les critiques pleuvent contre « Darmalin », soudain croqué en Iznogoud. « Il est remarquablement intelligent, c'est une machine de
guerre très appréciée de l'opinion, mais il se trompe d'époque. On n'est plus à
l'ère de Sarko et de la racaille. La violence est partout, et c'est une erreur
de jouer les va-t-en-guerre. Les flics se disent : "On a un ministre
génial qui est avec nous, on peut tout se permettre" »,
éreinte un cadre du parti présidentiel. Qu'on ne s'y méprenne guère, il y a
derrière ces flèches décochées bien des règlements de comptes non avoués venant
d'anciens sarkozystes et d'élus de l'aile gauche de LREM. À lui seul, Darmanin
a déséquilibré le centre de gravité de la majorité. Ce n'est pas un hasard si
les ministres issus du PS, réunis dans le groupe Territoires de progrès, sont
sortis de leur torpeur, sous le regard bienveillant du pouvoir, réclamant
opportunément une réforme de l'Inspection générale de la police nationale
(IGPN).
« Invirable ». Voilà
l'enfant adoptif de la macronie placé sous surveillance au sommet de l'État. Le
26 novembre en fin de matinée, il se retrouve dans le bureau d'Emmanuel Macron
- à sa demande, jure le trublion. Consigne lui est donnée de désavouer au
journal télévisé les brebis galeuses qui ont roué de coups le producteur de rap
et d'esquisser, si possible, un sage mea culpa. Le soir venu, Darmanin s'exécute.
Mollement. Pas un mot pour la victime. L'Élysée fera appeler Michel Zecler le
lendemain pour s'enquérir de sa santé et publiera sur Facebook un message du
président en appelant à des « forces de
l'ordre exemplaires ». Cinglante et rare remise au pas,
après que les recadrages répétés de Jean Castex ont tous échoué. À plusieurs
reprises, le Premier ministre a tenté de calmer le jeu, annonçant une saisine
du Conseil constitutionnel sur l'article 24 et rapatriant à Matignon plusieurs
réunions pilotées depuis Beauvau. Castex a beau répéter en petit comité qu'il
n'a « aucun problème »
avec son subordonné, la tempête déclenchée par Darmanin au Parlement l'a
emporté sur son passage. Comme si le ministre, censé servir de fusible aux deux
têtes de l'exécutif, les avait mises à découvert. En ces heures d'intense
fébrilité, tout a été envisagé : le retrait de l'article incriminé ; le
limogeage de Didier Lallement, préfet de police de Paris ; et, pourquoi pas,
celui du « premier flic de France ». « Il pèse quoi s'il n'est plus à l'Intérieur ? »
lance un macroniste. Un fantasme, tant le risque serait grand d'en faire le
directeur de campagne d'un adversaire du président. « Il est invirable »,
riposte un proche en rappelant qu'il est le troisième titulaire du job depuis
2017. « Il met son capital politique au service du
président. C'est un affectif qui fait de la politique avec ses tripes. On
mouille tous les deux le maillot de 6 heures à 23 heures, on sait prendre des
risques politiques », loue sa ministre déléguée à la
Citoyenneté, Marlène Schiappa, qui a été son assurance #MeToo quand les
féministes ont réclamé sa tête. Darmanin, lui, se targue de répondre au « besoin de l'opinion majoritaire : l'autorité »,
et de ne faire que son devoir : « Protéger des forces de l'ordre très attaquées, en prenant les coups à
leur place. » Et le premier flic de France de
ramener les «
dysfonctionnements » du ministère de l'Intérieur au « délicat exercice du maintien de l'ordre » et
à « une formation continue qui ne représente
que douze heures par an et n'est suivie que par 15 % des effectifs ».
Cuir
épais. Heureusement, les copains sont là, qui défilent Place Beauvau dans
la tourmente, du complice Thierry Solère, devenu conseiller à l'Élysée, au
ministre des Outre-Mer, Sébastien Lecornu. « Sous Castaner, je vous rappelle
que les flics posaient les menottes et casques à terre ! » défend l'un. « Aux
échecs, on dirait que Gérald est une tour. Une pièce maîtresse. Une tour, c'est
droit et raide », plaide Charles Hufnagel, ancien chef de la com' d'Édouard
Philippe. L'ex-Premier ministre aussi est à ses côtés. Il est venu le voir le
25 novembre. Un soutien discret mais clair pour le maire du Havre, qui
s'astreint au silence. « Le muet n'est pas sourd », philosophe un philippiste.
Et il y a tous ces élus qui le considèrent comme l'un des leurs. Tel Frédéric
Leturque, maire centriste d'Arras (Pas-de-Calais) : « C'est un ministre de
l'Intérieur courageux qui est revenu au terrain, qui ose, qui est devant ses
hommes, pas dans un poste de commandement protégé dans un sous-marin nucléaire.
» Ou le judoka chiraquien David Douillet, conseiller régional francilien, qui
l'a vu démarrer : « Si je dois partir à la guerre, je le prends tout de suite
dans mon équipe ! »
Avis à ceux
qui jurent sa perte : s'il a encaissé un coup, le trentenaire a le cuir épais. «
Il est un peu surfait, mais c'est un animal politique pour le meilleur et pour
le pire, observe un poids lourd de la majorité. Il est agile, il a de
l'instinct, de la culture. Il met très bien en pratique cette phrase d'Édouard
Herriot : "La politique, c'est comme l'andouillette. Pour que ce soit
bon, il faut que ça sente un peu la merde, mais pas trop." »
Lynchage. À
Paris, le 28 novembre, des manifestants s’en prennent à un policier lors
du rassemblement contre l’article 24 de la loi « sécurité
globale », qui visait initialement à pénaliser la diffusion malveillante
d’images des forces de l’ordre.
Couscous. Cela
lui a plutôt réussi depuis qu'il a conquis, à 29 ans, sa circonscription du
Nord, puis la mairie de Tourcoing, terres de gauche. « Mon ENA à moi », clame
ce produit de la méritocratie qui abhorre, comme Nicolas Sarkozy, les « bac +18
» coupés des réalités. Il y a chez lui, qui sculpte sa légende d'enfant de la
balle, quelque chose de la revanche sociale. On connaît l'histoire, maintes
fois répétée : une mère, Annie, femme de ménage, et un père, Gérard, tenancier
de bar ; un grand-père maltais, Rocco, un autre tirailleur algérien, Moussa.
Son deuxième prénom. Chez lui, « on préparait le couscous et on avait le
drapeau français ».
« Il y a une
marque Darmanin, l'élu du Nord qui parle aux gens et se préoccupe de leurs
soucis, qui n'a pas peur des mots comme "déconné" ou "ensauvagement". Mais
son truc, c'est l'action. Il veut des lois et des réformes à son nom »,
décrypte un proche. Il a été aux écoles Sarkozy et Bertrand, où on laisse son
empreinte dans les Codes civil et pénal. Après le prélèvement à la source,
brillamment exécuté lors de son passage au Budget, il entend marquer de sa
patte le projet de loi contre l'islam radical.
« Vista ». L'homme a du
flair. Dans une autre vie, il eut même été cartomancien. Fin juin, il livrait à
Édouard Philippe ce présage : « Je ne vois pas comment Macron peut te remplacer après ta réélection
au Havre, mais, s'il le fait, ce sera par un maire de droite, une sorte de Jean
Castex. » Lui seul, avec son incroyable vista, a vu venir l'édile de Prades.
Gérald Darmanin a tout juste 30 ans quand on fait sa connaissance au printemps
2013, la bouille ronde, le sourire canaille et la moitié de sa vie dévouée au
RPR et à l'UMP. Nouveau député prometteur, il lit dans la carte électorale
comme d'autres sondent le marc de café. Quatre ans avant le sacre d'Emmanuel
Macron, il prédit devant nous, avec un sens truculent de la formule, une
présidentielle épique : François Hollande ne sera pas reconduit et la droite
n'en bénéficiera pas, minée par ses querelles internes. « Hollande est beaucoup trop bas pour qu'on gagne. C'est
comme France-Liechtenstein ou, si vous aimez le rugby, Nouvelle-Zélande-Fidji.
C'est trop facile ! Il est devenu président avec 3 % dans les sondages, ça a
développé les ego à l'UMP. Ça me fait penser à Robert Mitchum, qui disait :
"Si Rintintin est devenu acteur de cinéma, pourquoi pas moi ?"
» Il ne croit pas alors aux chances du « monstre sacré » Nicolas Sarkozy, ce
père de substitution, de reconquérir la France, malgré ses tentatives de
retour. La romance est terminée. « C'est comme s'il avait rencontré une très jolie fille et que l'amour
était impossible. Il sait qu'il ne doit pas être trop collant, pas trop la
draguer, mais il ne peut pas s'en empêcher, et après il s'en veut. Sarkozy, ses
cartes postales aux Français, je pense qu'il les regrette. » Quant
à François Fillon, « hors circuit
dès le premier tour d'Indianapolis ! »...
Bluffant. Une telle intuition est une invite à la prudence pour les
macronistes. Lesquels se demandent, depuis qu'a éclaté l'affaire des violences
policières, à quoi joue l'homme pressé de la majorité.
Pyromane. Au nom de
cette redoutable prescience qui lui tient lieu de boussole politique, le
ministre de l'Intérieur aurait-il enterré Emmanuel Macron à dix-sept mois de la
présidentielle ? Cet homme aux fidélités successives, qui a poussé à l'ombre de
Christian Vanneste, Jacques Toubon, David Douillet, Xavier Bertrand, avant Sarkozy
et Macron, chercherait-il le clash pour changer d'écurie, comme le suspectent
ses nombreux ennemis ? Ou flirte-t-il avec le burn-out, à force d'enchaîner les
crises - dont trois attentats et une enquête pour viol - et de trop courtes
nuits depuis sa nomination de juillet ? « Si vous voulez connaître la cote des uns et des autres,
c'est simple, observez-le ! » éreinte Daniel Fasquelle, maire
LR du Touquet, qui le dépeint en Rastignac prêt à toutes les compromissions.
Comment l'élu le plus doué de sa génération s'est-il retrouvé paré du costume
du pyromane, accusé de mettre le feu à la majorité, frappé d'une présomption de
trahison pour avoir affaibli le Premier ministre et contraint le président à
descendre de l'Olympe pour le rappeler à l'ordre ? « Le ministre qui contrôle les crises n'est pas là pour en
créer ! » tonne un premier violon de la macronie, qui dresse le
réquisitoire de ses fautes réelles ou supposées : tollé sur « l'ensauvagement »,
dérapage sur les rayons halal et casher des supermarchés, déclaration brutale
contre les catholiques qui manifestent pour la reprise des offices religieux,
propos ambigus sur le floutage obligatoire des forces de l'ordre dans les
médias, menaces sur les conditions de travail des journalistes. Sans même
évoquer cette tirade, au mieux maladroite après les morts de Cédric Chouviat et
de George Floyd des suites d'une asphyxie lors de contrôles policiers : « Quand j'entends les mots violences policières,
personnellement, je m'étouffe. » Le voilà
suspecté d'asseoir sa popularité chez les policiers et les gendarmes, quitte à
faire passer l'exécutif pour liberticide. « Le président est furieux »,
s'insurgent ses fidèles, qu'on a rarement vus si nerveux.
Sarko-boy. L'origine du
mal ? Une disposition, introduite par Beauvau dans une proposition de loi
parlementaire, pour pénaliser la diffusion malveillante d'images pouvant porter
atteinte aux forces de l'ordre. Le maudit article 24, qui a mué l'un des
meilleurs espoirs de LREM en problème à régler d'urgence. Qu'il est loin le temps
où Emmanuel Macron vantait leurs conversations viriles « d'homme à homme »
et le conviait à dîner avec sa compagne, Rose-Marie, fraîchement épousée… Le
président avait fait fi des alertes des François Bayrou et consorts sur le
danger de confier un poste si stratégique à un Sarko-boy. Le jeune homme s'est
battu, tenant tête au président, quand il a découvert que l'Intérieur allait
échoir à Jean-Michel Blanquer et qu'il n'aurait pas le grand ministère des
Affaires sociales. Jean Castex a plaidé en sa faveur. Ils ont un point commun
méconnu, Michel Bettan, éternel spin doctor de Xavier Bertrand. Il les a tous
deux recrutés dans les années 2000, l'un comme directeur de cabinet à la Santé,
l'autre pour piloter les affaires juridiques de l'UMP. Pour le président,
l'occasion était trop belle d'affaiblir le patron de la région Hauts-de-France
en bombardant son ancien lieutenant au sixième rang protocolaire du
gouvernement. Prudent, il avait tout de même conservé un double des clés en
imposant un proche, Pierre de Bousquet de Florian, ancien de la DST, à la tête
du cabinet ministériel.
Très vite, Darmanin a obtenu son ticket d'entrée dans les dîners
politiques de l'Élysée, le saint des saints. Il pouvait se targuer d'avoir
contribué au virage régalien sur le séparatisme. Le secrétaire général de
l'Élysée, Alexis Kohler, parfois Emmanuel Macron, l'appelait pour humer l'air
du terrain. « Qu'entends-tu
à Tourcoing ? » Longtemps cantonné à un rôle de
doublure, il était devenu un affranchi, une République autonome, que la
macronie regardait comme une utile digue pour bétonner l'électorat de droite et
s'adresser aux catégories populaires. Et le jeune homme est tellement drôle,
féroce à souhait. Macron adore, qu'on considère à tort comme un gendre idéal.
En 2013, Darmanin brossait ce tableau désopilant de la guerre de succession à
droite : « Tout le monde est sur la ligne de départ du
100-mètres-haies. Il y a Bruno Le Maire, qui décide d'écrire un livre pour
savoir s'il doit y aller. Xavier Bertrand, qui veut perdre 30 kilos avant de se
lancer. Laurent Wauquiez, qui dévisse les boulons des autres. François Baroin,
qui fume sa clope avant le jogging. Et il y a Usain Bolt dans les vestiaires :
Sarkozy… » Avant le remaniement, Édouard
Philippe pleurait de rire en regardant ses ministres et amis Gérald Darmanin et
Sébastien Lecornu singer Yves Montand agitant des écus pour éveiller Louis de
Funès dans La Folie des
grandeurs : « Il est l'or ! L'or de se réveiller ! Monsignor ! Il est huit or !
» Le réveil a sonné. Fini de rire§
Jean-Pierre
Chevènement : « Gérald Darmanin est pris à contre-pied »
Car différents faits divers
de tous ordres sont trop nombreux par des individus de tous poils délinquants
criminels issus de cette voyoucratie que l'on voit partout sans compter les spécialistes
de fauteurs de troubles qui se glissent dans chaque manifestation que l’on
appelle black blocs, casseurs vandales cagoulés et qui deviennent une habitude !
Alors qu’il démissionne, il
ne sert à rien comme ces prédécesseurs politiciens serviles à la botte du
monarque président bobo qui fait le bien-pensant donneur de leçon, mais qui ne
sait pas faire respecter les lois de la république dont il à la charge avec vigueur
ce qui lui demande la majorité silencieuse dont il devrait tenir compte !?
Car l’ordre se désagrège
depuis le début du quinquennat et ce troisième ministre de l’intérieur en est la
preuve qu’il faille le soutenir, car la France et les français ont besoin d’avoir
des libertés mieux encadrées, car beaucoup n’en font qu’à leur aise pour fouler
au pied les lois de la république dont certains même veulent les remplacer par
leurs propres lois, le plus sur chemin vers une anarchie rampante !
Les français sont laxistes,
voire indisciplinés et versatiles, il faut qu’ils choisissent enfin, entre
ordre ou désordre, car cela devient invivable, ce que l’on subit au quotidien
et ce n’est pas de la faute de la police qui fait ce qu’elle peut car corsetée par
une déontologie rigide et une hiérarchie aux ordres des bien-pensants qui nous
gouvernent !
Jdeclef 02/12/2020 15h58
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