dimanche 19 décembre 2021

Quand les occidentaux abandonnent des territoires stratégiques de nos ex-colonies françaises : (La FRANCE peut défendre son propre pays mais n'est plus une grande puissance mondiale !)

 

Djibouti : la mystérieuse base chinoise qui inquiète l’Occident

REPORTAGE. Dans le secret, Pékin a construit une base militaire et un quai, qui pourraient lui donner l’avantage sur l’Amérique dans la Corne de l’Afrique.

 

Le Puma fend l'air au-dessus des eaux turquoise du golfe de Tadjoura. Il double l'épave d'un chalutier, relève son nez et prend de l'altitude. L'hélicoptère français du 5e régiment interarmes d'outre-mer ralentit, pour embrasser le panorama qui va des grues immenses du port de Doraleh jusqu'à l'îlot du Héron. Et là, à l'aplomb, le voici qui se dévoile enfin. Le quai de la discorde, objet de disputes et d'encore plus de rumeurs. Une simple jetée de béton en apparence, au bout de laquelle s'élève un lampadaire coiffé de caméras. Elle a poussé ces derniers mois. À sa base, elle est reliée à un mirador puis à un mur d'enceinte enserrant un complexe d'une trentaine de bâtiments couleur ocre, comme la rocaille de la région.

Il s'agit de la base militaire de la République populaire de Chine à Djibouti. Inaugurée en 2017, elle est le principal poste avancé du pays en dehors de son territoire. On distingue une piste d'hélicoptère, des grues qui continuent de s'affairer autour des derniers terrains non bâtis et des kilomètres de murailles, empêchant quiconque de s'approcher. L'unique route qui y mène est désertique. L'emprunter c'est l'assurance de se voir dévisagé par les gardes postés sur le chemin de ronde, pris en photo par d'autres rapidement envoyés en renfort et filmé par les caméras de reconnaissance faciale de l'Armée populaire de libération (APL) chinoise. Obligé de rebrousser chemin. Dans les airs, on a plus de liberté. Et une meilleure vue, confie, l'œil rieur, le général Stéphane Dupont, chef de la base française à Djibouti.

Le général français Stéphane Dupont et le chef d’état-major djiboutien de la défense Ali Mohamed Taher.

Installé avec d'autres hauts gradés dans le Puma, il revient du Cecad, un centre d'élite situé à une quarantaine de kilomètres à l'ouest de la ville, où il a remis des diplômes à des unités djiboutiennes. Pour regagner son quartier général, l'hélicoptère le fait passer à la limite de la zone d'exclusion aérienne établie autour de la base chinoise. Le quai qui s'en détache est bien visible et semble fonctionnel. Mais il est toujours désert. Pour combien de temps ? « Pékin attend la bonne occasion pour le "baptiser" », suppose le Comfor, comme on appelle le commandant des forces françaises. Déjà affecté à Djibouti au début des années 2010, il connaît bien le terrain. Dix ans plus tard, il constate à quel point l'emprise chinoise s'est accrue sur cette ancienne colonie française. « Ils ont construit la base militaire et ce quai qui change la donne, car tous les navires et les sous-marins chinois qui grenouillent dans le golfe d'Aden pourront faire escale ici. » Selon plusieurs experts, la jetée serait assez longue pour accueillir l'un des deux porte-avions que possède déjà Pékin ou l'un des nombreux autres en construction. « Il faut creuser un peu, car la zone manque de fond. Mais pas grand-chose », précise le général français. Le couronnement final, l'accostage d'un géant des mers, est attendu dans les mois ou les années qui viennent. Ce jour-là, les experts militaires du monde entier auront les yeux rivés sur le quai. Car à 10 kilomètres de là - soit à moins d'une minute en hélicoptère ou quelques secondes aux commandes d'un chasseur - se trouve le camp Lemonnier.

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Le nom français est hérité de l'époque où le camp appartenait à la Légion étrangère. Mais, depuis 2002, Lemonnier abrite une base américaine, seule présence militaire permanente des États-Unis sur le continent africain. Quelque 5 000 soldats y vivent cloîtrés, font de la musculation et s'entraînent, prêts à intervenir à tout moment dans la région. Le camp n'a pas de port ni de quai. Quand un navire de l'US Navy fait escale à Djibouti, il utilise ceux qui jouxtent la base navale française. En revanche, la base américaine déborde d'aéronefs, qui décollent nuit et jour depuis que les rebelles tigréens menacent de s'emparer d'Addis-Abeba, capitale de l'Éthiopie, le pays voisin. Un officier minimise l'agitation sur le camp. « C'est l'Afrique de l'Est, il se passe toujours quelque chose. » Mais les alignements d'hélicoptères et d'avions de transport de troupes laissent deviner que Washington prépare l'évacuation de ses ressortissants en Éthiopie. La situation sécuritaire est inquiétante et Djibouti pourrait être débordé par l'afflux de réfugiés si Addis-Abeba tombait. « On se prépare à tous les scénarios », indique sobrement le gradé en déambulant dans la base en pleine effervescence.

On en oublierait presque la rivalité avec la Chine, officiellement en sommeil depuis l'« affaire des lasers » : en 2018, des pilotes américains s'étaient plaints d'avoir été aveuglés par des rayons émanant de la base chinoise. Ces accusations avaient obligé Djibouti à intervenir pour tenter de calmer le jeu entre ses deux grands « invités ».

Le Premier ministre du pays, Abdoulkader Kamil Mohamed, n'a pas oublié l'incident. « C'est vrai qu'il y a eu quelques petits problèmes au début, quand les Chinois se sont installés », reconnaît-il. Dans son bureau de la primature, en plein centre-ville, soit à mi-chemin entre les deux bases rivales, il se rappelle ce qu'il a dit aux Américains qui tentaient de le convaincre de ne pas ouvrir son territoire aux Chinois. « Mais pourquoi ? Vous avez des objectifs communs : la lutte internationale contre le terrorisme et la volonté que vos navires marchands empruntent sans problème le Bab-el-Mandeb. » Abdoulkader Kamil Mohamed est un fin stratège, il sait que ce détroit qui sépare son pays du Yémen - et qui donne accès à la mer Rouge puis au canal de Suez - est un point névralgique de la planète.

Le Premier ministre djiboutien, Abdoulkader Kamil Mohamed.

Passage obligé entre l'Europe et l'océan Indien, il y transite environ 30 % des marchandises mondiales. Sur les fonds marins reposent des câbles indispensables au trafic Internet international. Concernant les lasers, il rejette les accusations américaines. « Un colonel qui était à l'ambassade de France m'a dit qu'avec [un faisceau d'un rayon de] ce diamètre, l'avion aurait été pulvérisé. Donc ce que les Américains racontent n'est pas vrai. Ils en sont parlé et, depuis ce jour-là, c'est fini. Le statu quo règne, nous sommes tous en paix », veut-il croire.

Une concorde de façade qui arrange tout le monde dans une région plus instable que jamais. Au sud, la Somalie est en proie aux terroristes islamistes shebab ; au nord, l'Érythrée est une sorte de Corée du Nord africaine ; à l'ouest, le géant éthiopien menace de s'effondrer, tandis qu'une junte militaire et un mouvement prodémocratie se disputent le Soudan ; à l'est, de l'autre côté du Bab-el-Mandeb, le Yémen est le théâtre d'une guerre civile depuis sept ans. Au milieu, Djibouti est un îlot de stabilité. Voilà pourquoi autant de puissances y ont placé des pions, faisant de ce petit pays, peuplé de moins d'un million d'habitants, un centre de gravité de la planète.

Dans les chancelleries occidentales, on y voit un « laboratoire du monde de demain » ou un « conseil de sécurité des Nations unies à ciel ouvert ». Trois des cinq membres permanents y possèdent une base militaire. La France, ex-puissance coloniale, a gardé des troupes depuis l'indépendance du territoire en 1977 ; les États-Unis et la Chine ont convaincu les Djiboutiens de les laisser s'installer dans le pays - Washington, afin de lutter contre le terrorisme après le 11 septembre 2001, et Pékin, pour mettre en œuvre ses nouvelles routes de la soie. Ne manquent que les Russes et les Britanniques pour être au complet. « C'est pas faute d'avoir essayé, persifle un diplomate en poste dans le pays. Les Britanniques ont manqué de tact, ils ont sollicité les Américains avant même d'en parler aux Djiboutiens. Quant aux Russes, ils ont essuyé un refus net en 2014, les Américains n'en voulaient pas. Depuis, ils se sont rabattus sur le Soudan. » À Djibouti se trouvent aussi une base japonaise, une italienne et des troupes espagnoles dans le cadre de la mission européenne de lutte contre la piraterie, l'opération Atalante.

Les routes de la Soie - Djibouti joue avec le feu

Le pays se rêve en « hub économique » sur le modèle de Dubai ou sur celui de Singapour, il est en réalité un nid d'espions où chacun épie l'autre. La capitale du pays se coupe chaque jour un peu plus en deux : les Chinois au nord-ouest, les Occidentaux et les Japonais au sud-est. La ville devient une sorte de Berlin, époque guerre froide, dans la Corne de l'Afrique. D'autres projets chinois au sud de la ville pourraient permettre à Pékin d'encercler l'Occident, comme autrefois la RDA avec Berlin-Ouest.

Au jeu de qui grappillera le plus de terrain, les Chinois ont pris l'ascendant, et pas simplement grâce à leur quai. Ils sont à l'origine d'impressionnants projets économiques lancés ces dernières années à Djibouti. Les trois principaux sont le port mixte de Doraleh, la zone franche de la ville et le chemin de fer qui la relie désormais à l'Éthiopie. Pour construire ces infrastructures, le petit État a emprunté sans compter, faisant grimper sa dette. Aujourd'hui, il se retrouve pieds et poings liés à son principal créancier : la Chine. Des accords de renégociation sont lancés et les retombées économiques de cet effort seront bientôt tangibles, tempèrent les autorités. Mais en ouvrant des pans entiers de son économie à Pékin, Djibouti est accusé d'avoir fait entrer le loup dans la bergerie. En ville, les caméras de surveillance sont chinoises, le réseau de télécommunications aussi. La Chine est soupçonnée d'avoir placé ses appareils d'espionnage aux quatre coins du pays.

Inauguré en 2014, l'Institut des études diplomatiques (IED) a été édifié « avec l'aide de Dieu et par sa grâce », annonce la plaque commémorative à l'entrée mais surtout « sur financement et expertise de la Chine ». Laoshi Tu (professeur Tu) y donne des cours de mandarin à des jeunes Djiboutiens désireux de faire du commerce avec ce nouveau partenaire. Pas un mot de français ni d'anglais ne sera prononcé pendant la classe, les élèves sont studieux. Le bâtiment est moderne et aéré, une oasis de tranquillité au milieu de l'agitation qui règne dans le centre-ville. L'endroit parfait pour étudier la géopolitique… ou pour espionner les autorités djiboutiennes, comme le soupçonne un diplomate occidental. De la terrasse de l'IED, on se trouve en effet à quelques mètres de la présidence de la République, du ministère des Affaires étrangères et de la Banque centrale.

Les accusations d'espionnage et d'entrisme poussent Pékin à la discrétion. Fin novembre 2021, une grande cérémonie a salué l'entrée de quatre nouveaux navires dans la flotte djiboutienne. Une parade navale et aérienne a défilé devant l'estrade du président Ismaïl Omar Guelleh, où figuraient de nombreux ministres et représentants des cinq bases militaires présentes dans le pays. Mais les temps ont changé, les étrangers - relégués au fond ou sur les côtés - n'apparaîtront pas sur les photos dans la presse officielle du lendemain. Deux des quatre navires livrés ce jour-là sont de fabrication chinoise. Au moment de passer devant le président, les marins djiboutiens sont sortis sur le pont, au garde-à-vous dans leur uniforme blanc immaculé avec bonnet à pompon rouge.

En cabine, des soldats plus discrets manœuvrent les embarcations. Ils portent un uniforme bleu camouflage, celui de la marine nationale chinoise. Pékin s'était pourtant engagé à former la marine djiboutienne, comme le font les Français. Manque de temps, rétorque un officiel chinois. Pourtant, les navires sont à quai et immobiles depuis plus de sept mois, témoignent plusieurs diplomates dont les bureaux donnent sur le port. « Un bateau qui ne bouge pas pendant des mois, c'est mauvais, ça rouille. Tous les marins vous le diront », grince l'un d'eux. Il voit dans cet épisode la volonté de Pékin d'être seul aux commandes, malgré les discours vantant la collaboration avec le pouvoir djiboutien. Une fois la cérémonie terminée, un officiel a d'ailleurs pu assister à une scène passée inaperçue. En s'attardant à la tribune, il a vu l'ambassadeur de Chine à Djibouti descendre sur le quai et s'approcher des navires. Rejoint par un photographe chinois puis par l'équipage resté à bord, il a inspecté les troupes et a tenu un discours rien que pour eux.

Gérard Araud - Face à Pékin, restons réalistes

« C'était une belle cérémonie et tout le monde a participé », objecte Shen Sha, Premier conseiller auprès de l'ambassadeur de Chine à Djibouti. Dans un salon de son ambassade, décoré d'arbres miniatures et de vases, il ne manque pas d'arguments pour convaincre ses interlocuteurs que Djibouti « n'est pas un pré carré chinois ». Il a préparé un document recensant les bienfaits du partenariat gagnant-gagnant qu'ont noué les deux pays. On y lit la rhétorique officielle chinoise, la même dans toutes les langues. Dans un français parfait, le diplomate chinois n'a eu aucun mal à traduire le concept de ou win-win en anglais (gagnant-gagnant, pour exprimer l'idée que les deux partenaires tirent bénéfice de leur association).

La zone spéciale économique de Djibouti est construite par la Chine.

Selon ce diplomate, l'isolement actuel de son pays est dû à la pandémie. Avec sa stratégie zéro Covid, la Chine a coupé sa population du reste du monde, ainsi que ses ambassades et ses bases militaires. Lui-même assure n'être pas sorti du bâtiment depuis le début de la pandémie, alors que sa femme et sa fille, tout sourire sur la photo qui trône à ses côtés, lui manquent beaucoup. L'épidémie passée, la Chine va-t-elle reprendre ses - rares - collaborations avec les Occidentaux ? Il arrivait avant 2020 que des parachutistes chinois sautent depuis des avions français et arborent ensuite fièrement sur leur uniforme le brevet des paras de France. Avec les Américains, des officiels étaient parfois invités sur la base chinoise. « Je l'espère, mais il est trop tôt pour le dire », répond-il. Nous souhaitons une meilleure coopération avec les Occidentaux, mais nous n'avons pas encore trouvé la bonne occasion. »

À l'automne 2022 se tiendra le XXe congrès du Parti communiste chinois, qui doit consacrer la toute-puissance du président Xi Jinping. Le moment idéal pour basculer dans une nouvelle ère. Une période de détente ou, au contraire, de confrontation entre Washington et Pékin ? Autour de la mer de Chine, chaque camp détient des bases militaires prêtes au combat. Dans la Corne de l'Afrique, l'Amérique a l'avantage d'avoir un aéroport. Mais la Chine possède désormais un quai.

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Ou ex-empires coloniaux et autres dont l’Afrique, la Chine s'y installe subrepticement sans faire de bruit car elle veut installer sa puissance dans le monde car n’avait pas de possessions coloniales depuis son indépendance des occidentaux après-guerre en 1947!

Et on le constate après avec des infrastructures importantes à l’initiative de la CHINE dans cette région du monde (peut être militaire!?)

Le golfe d'ADEN est un endroit éminemment dangereux car une porte ouverte sur la mer ROUGE et des pays instables en éternels conflits sous-jacent ERYTHREE, ETIOPIE, YEMEN, SOUDAN, SOMALIE et deux autres grands pays EGYPTE et ARABIE SAOUDITE …Avec la route vers le CANAL de SUEZ qui doit être protégé, car quand il est bloqué pour des raisons diverses cela produit sur des problèmes économiques importants d’approvisionnements  divers surtout énergétiques par le flux importants de navires cargos tankers !

La France avait une base militaire relativement importante à DJIBOUTI maintenant il ne reste plus qu’une poignée de soldats depuis que cet état est devenu république !

Cela fait penser d’ailleurs à la Nouvelle CALEDONIE française qui n’a pas obtenue son indépendance (heureusement) car la Chine si se serait engouffrée pour être avoir une tête de pont dans cette zone indopacifique près de l’AUSTRALIE pays continent ex-colonie pénitentiaire britannique (comme notre ile calédonienne encore française !)

Quand la Chine s’éveillera le monde tremblera et bien c’est le cas maintenant alors que nos bienpensants qui nous gouvernent si mal y pensent, çà les changeraient au lieu de s’invectiver lors de notre campagne présidentielle insipide et médiocre !

Jdeclef 19/12/2021 12h49LP

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