mercredi 29 novembre 2017

Pas idiot le président nationaliste corse mais :

Gilles Simeoni : « Je veux une autonomie de plein droit pour la Corse »

INTERVIEW. Candidat à sa propre succession, le président nationaliste du conseil exécutif de Corse ne revendique pas l'indépendance, mais l'autonomie.


Il est la figure montante du nationalisme corse. Depuis la prise de la mairie de Bastia aux municipales de 2014 et la conquête de la région dans la foulée en décembre 2015, l'autonomiste Gilles Simeoni s'est érigé en homme fort de l'échiquier politique insulaire. Aux commandes depuis deux ans du conseil exécutif de la collectivité territoriale Corse (CTC), le « mini-gouvernement » de l'île, il est candidat à sa propre succession et a de grandes chances de devenir le premier président de la nouvelle collectivité unique de Corse. Une sorte de mastodonte institutionnel qui doit fusionner, au 1er janvier 2018, l'actuelle CTC et les deux conseils départementaux de l'île.
Pour tenter de l'emporter lors des élections territoriales des 3 et 10 décembre, Gilles Simeoni mène de nouveau bataille aux côtés de ses alliés indépendantistes de Corsica Libera (La Corse libre, NDLR) emmenés par le président de l'Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni dans le cadre de la coalition Per a Corsica (Pour la Corse) qui leur avait permis d'arracher les rênes de la région, il y a deux ans. Pour autant, malgré la présence d'indépendantistes sur sa liste, Gilles Simeoni l'affirme : il ne réclame pas l'indépendance et se défend de tout scénario « à la catalane » en Corse. Le président du conseil exécutif de Corse met le cap sur l'autonomie qu'il compte obtenir dans trois ans. Et demande au gouvernement d'ouvrir le dialogue.

Le Point : Qu'est-ce qui a vraiment changé en Corse depuis deux ans ?
Gilles Simeoni : Les élections de décembre 2015 ont été un moment charnière de l'histoire contemporaine de l'île. À la fois un point d'aboutissement, car cela a été, à travers nous, la victoire de générations passées qui se sont battues durant des décennies pour faire reconnaître l'existence d'un peuple corse. Mais c'est également un point de départ, puisque cet événement politique reflète une volonté largement majoritaire de construire une Corse qui rompe avec des méthodes et des pratiques archaïques pour aller vers une Corse ouverte et émancipée. L'île a commencé à changer puisque le système ancien est en train de disparaître. Nous allons vers un nouveau système adossé aux valeurs de démocratie, de transparence et d'équité. Deux années, cela reste très court à l'échelle de l'action publique. Mais nous avons avancé dans des domaines clés comme les transports maritimes, la revitalisation des zones de montagne ou le soutien aux entreprises. Le travail est immense. Il faudra plus de temps pour le mener à son terme.
Vous rappelez souvent que les compétences de la CTC sont limitées et réclamez un statut d'autonomie « de plein exercice » dans trois ans. En quoi cela consiste-t-il ?
Cela s'inscrit dans une vue d'ensemble. Sur le court terme, les Corses attendent que l'on commence à changer leur vie au quotidien dans des domaines très concrets. Par exemple concernant la lutte contre la pauvreté, le chômage, le coût des transports, fondamental dans une île, le soutien à l'agriculture… Ils font donc des politiques volontaristes et effectives à court terme. Il y a également, à moyen terme, des enjeux en matière de transition énergétique, de gestion de l'eau, de développement numérique… Le dernier niveau est institutionnel. Dans l'immédiat, il faut réussir le challenge de la construction de la nouvelle collectivité unique en janvier 2018. Parallèlement, nous nous engageons à obtenir d'ici trois ans un statut d'autonomie de plein droit et de plein exercice, applicable dans la décennie à venir. C'est-à-dire un statut qui ne soit pas octroyé depuis Paris, mais conçu depuis la Corse. Il doit impliquer un pouvoir législatif et la reconnaissance juridique du peuple corse.
L'État sacrifie les intérêts de la Corse
La collectivité unique sera à peine mise en place le 2 janvier et vous demandez déjà un nouveau statut. Vous mettez la charrue avant les bœufs...
Non. Ce sont deux chantiers à mener de concert. Il faut démontrer de façon empirique que de nouvelles compétences, de nouveaux moyens et de nouvelles ressources sont nécessaires. Cela se construit par l'obtention d'un statut d'autonomie de plein exercice et de plein droit. Ce sujet fait partie du débat politique insulaire depuis des décennies. Le reporter une nouvelle fois en disant que ce n'est pas une priorité au regard du chantier de la nouvelle collectivité, ce serait un argument dilatoire.
Justement, la nouvelle collectivité n'apportera pas de compétences supplémentaires et apparaît comme un statut arraché de guerre lasse pour satisfaire l'une de vos revendications, la suppression des départements. N'est-ce pas un rendez-vous manqué ?
En effet, on aurait dû aller plus vite et plus loin. Notamment en matière de transfert de compétences. Cependant, aujourd'hui le principe d'une nouvelle collectivité a été enfin acquis, à la fois pour permettre la suppression des départements, parangons du clientélisme, et rationaliser l'action publique. Par exemple, concernant la cohésion de la société insulaire, car il y a des attentes en matière de représentation et d'équité territoriale. Il faut inventer un nouveau cadre et une territorialisation efficace. En tout cas, cette nouvelle configuration va mettre fin à une kyrielle d'intérêts locaux et particuliers au profit de l'intérêt général, et ouvrir la voie à l'émergence d'une vision politique globale à l'échelle de la Corse. Il fallait donc saisir cette occasion même si l'on considère que la solution aurait pu être meilleure. À nous désormais de valoriser ce statut et de l'élargir.
Reste que cette collectivité va naître dans l'inquiétude, notamment concernant les faibles ressources financières dont elle va disposer et dont vous imputez la faute à l'État. Êtes-vous vraiment prêt ?
L'État n'a pas joué le jeu. S'agissant de la structure de nos recettes, nous restons largement dépendants – à environ 70 % – des subventions étatiques et européennes. Ensuite, nos ressources sont trop faibles, y compris par rapport aux compétences qui nous ont d'ores et déjà été transférées. Nous voulons sortir de cette logique de dépendance pour maîtriser nos ressources notamment au niveau fiscal. La logique de compensation historique, via le plan exceptionnel d'investissements dont nous avons bénéficié en 2002, n'a pas été portée à son terme. Il faut donc obtenir des financements complémentaires de l'État pour la remise à niveau de nos infrastructures, et bénéficier d'un transfert de ressources fiscales. Notamment la TVA et une partie des grands impôts collectés en Corse. Seule cette autonomie fiscale permettra une autonomie politique réelle.
À chaque fois qu'une revendication est essentielle pour la prise en compte des spécificités de la Corse, elle se heurte à l'obstacle de l'anticonstitutionnalité. Je pense notamment à la reconnaissance officielle du peuple corse, à notre demande d'une co-officialité pour notre langue, d'un statut de résident pour accéder à la propriété ou au transfert de compétences fiscales. L'État doit faire évoluer son modèle et sa Constitution pour répondre à des aspirations qui ne peuvent pas être traitées par le mépris et l'indifférence. Le droit doit s'adapter aux besoins et aux attentes de la société.
Vous évoquez des « blocages » dans la relation avec le gouvernement, très crispée ces derniers mois et « inopérante » selon vos adversaires. À qui la faute ?
Tout le monde connaît la litanie des statistiques sociales et économiques déplorables en Corse. Nous avons l'un des taux de chômage, notamment chez les jeunes, parmi les plus élevés de France, une production inexistante, le taux de pauvreté le plus fort… Le tableau est sombre. Ce sont tous les indicateurs d'un pays sous-développé alors que la Corse est une terre riche avec des atouts incomparables. Les responsables de ce marasme sont ceux qui, durant des décennies, ont exercé le pouvoir en Corse. C'est-à-dire l'État et les partis traditionnels, gauche et droite confondues. Malgré cela, le nouveau pouvoir en place à Paris depuis quelques mois dit systématiquement « non » à toutes les demandes qui émanent de la Corse. On ne peut y voir que des raisons de calcul politicien et électoraliste. L'État estime que faire droit à ces demandes serait une manière de renforcer notre majorité nationaliste. Il préfère donc sacrifier les intérêts de l'île… Les urnes donneront l'occasion aux Corses de dire ce qu'ils pensent de ces pratiques.
Le ministre de l'Intérieur a tout de même déclaré le 31 octobre à l'Assemblée nationale que le gouvernement était favorable à « une autonomie de la Corse dans la République ». Cela devrait vous satisfaire…
Sur le principe, cela ne peut que nous laisser espérer qu'il y aura enfin un véritable dialogue. Reste à savoir quel contenu le gouvernement donne à l'autonomie. À côté de cette annonce qui laisse entrevoir une lueur d'espoir, j'ai vu l'intervention de M. Collomb lors d'un colloque en septembre dernier. Il expliquait que si les facultés d'adaptations législatives devaient être reconnues aux régions, elles seraient exercées par les préfets. Nous ne sommes pas vraiment sur les mêmes bases…
Toujours dans votre tribune au Monde, vous expliquez que, par son positionnement, l'État mettrait en péril la paix en Corse, alors que le FLNC a déposé les armes il y a trois ans. Cela signifie-t-il qu'un retour de la violence n'est pas à exclure ?
Une situation de blocage ne peut conduire qu'à une impasse. Il ne s'agit absolument pas d'exercer un quelconque chantage à la violence. Il ne peut pas y avoir de retour en arrière. Le temps de l'action clandestine est définitivement révolu. Le FLNC l'a annoncé en juin 2014 et nous l'affirmons solennellement avec nos partenaires de Corsica Libera dans le cadre de l'accord de Per a Corsica. Cependant, un conflit politique ne peut se solder que par une solution politique que nous appelons de nos vœux en choisissant la paix. Si l'État la refuse, cela veut dire qu'il veut entretenir la logique de conflit. J'espère que cela ne sera pas le cas.

La Corse n'est pas la Catalogne
Vous avez appelé, de façon inédite pour un nationaliste, à voter pour Emmanuel Macron au second tour de la présidentielle. Au regard de la situation de « blocage » actuelle, regrettez-vous ce choix ?
Non. Ma décision était guidée par la volonté de faire en sorte que la Corse nouvelle issue des urnes en 2015 ne place pas Marine Le Pen en tête d'un deuxième tour de scrutin observé à l'échelle internationale. Pour le reste, j'ai considéré qu'il appartiendrait à Emmanuel Macron, s'il était élu, de dire s'il souhaitait être l'homme d'État sous la présidence duquel ce conflit politique qui dure depuis un demi-siècle se réglera. Ou pas.
Le 2 septembre dans un entretien à Corse-Matin un membre influent de votre exécutif a mis sur la table la notion « d'autodétermination ». Envisagez-vous pour la Corse un scénario à la catalane ?
Les situations corses et catalanes présentent des similitudes, eu égard notamment aux revendications de deux peuples à être reconnus. Mais il y a aussi des différences politiques importantes, au plan économique par exemple. La Corse n'est pas la Catalogne.
Dans ce cas, l'indépendance est-elle une ligne rouge ?
La question de l'indépendance ne se pose pas aujourd'hui et ne figure à aucun moment dans l'accord de Per a Corsica. Encore une fois, nous nous battons pour un statut d'autonomie de plein droit et de plein exercice pour répondre aux enjeux dans tous les domaines. Cette revendication est partagée par une très grande majorité de Corses. Y compris ceux qui ne sont pas nationalistes.
Jean-Guy Talamoni et les indépendantistes qui figurent sur votre liste fixent tout de même l'indépendance de la Corse à dix ans…
Les indépendantistes se battent de façon démocratique pour défendre cette notion. Personne ne pourrait prétendre le leur interdire. Eux-mêmes reconnaissent toutefois que si les Corses ne veulent pas d'une indépendance, il n'y en aura pas. Dès lors, le problème ne se pose pas. Il est créé artificiellement par ceux qui, comme tous les conservateurs de gauche et de droite, essaient d'agiter cet épouvantail pour susciter la crainte.
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Pas l’indépendance totale, car l’autonomie, c’est le beurre et l’argent du beurre :

Car un pouvoir régional élargit, sans les inconvénients de l’état français souverain !

Mais ne pas finir comme la Catalogne par exemple, car la CORSE sans la France aurait du mal à vivre, c’est une île qui a forcément besoin de la métropole bien que proche de la France !

La Corse ce n’est que 324000 habitants corse mais français n’en déplaisent à certains pas plus qu’une grande ville française gonflée d’orgueil nationaliste teintée d’indépendance, c’est très à la mode, même si c’est utopique !


(D’ailleurs à titre d’exemple nous verront ce que décidera la NOUVELLE CALEDONIE 267000 habitants pour accéder à l’indépendance ou rester française, mais là c’est une colonie du bout du monde !)

jdeclef 29/11/2017 13h55

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