mercredi 8 juillet 2020

De toute façon nommer cet avocat comme ministre de la justice c'était sûr que cela déclencherait des réactions véhémentes de toutes parts :


Éric Dupond-Moretti, présumé innocent

VIDÉO. Pour nombre de juges, nommer l'avocat garde des Sceaux envoie un mauvais signal à la justice. Craintes fondées ou procès d'intention ?

Tout ce cirque n'est certainement pas pour lui déplaire : la réaction de l'Union syndicale des magistrats (USM) à l'annonce de sa nomination – « une déclaration de guerre à la magistrature » – comme les critiques tançant, là, sa « grande gueule » ; là, son incapacité supposée à jouer collectif et solidaire au sein d'une équipe gouvernementale ; là encore, sa liberté de ton incompatible avec l'exercice du pouvoir ; là enfin, son impuissance à s'imposer face à Bercy dans des arbitrages financiers dont on suppute qu'il ne pourra les gagner – ses détracteurs oubliant un peu vite, sur ce dernier point, que les prédécesseurs de Dupond-Moretti au poste de garde des Sceaux n'ont jamais rien obtenu, ou si peu, en la matière…
L'avocat a dû savourer, d'abord ; se marrer un peu en lisant les messages de ses proches, ensuite ; et puis commencer franchement à vociférer contre ceux, nombreux, à lui faire des procès d'intention. Éric Dupond-Moretti serait l'homme qui s'apprête à semer la zizanie dans un ministère réputé incontrôlable, à supprimer l'École nationale de la magistrature (ENM), à militer pour que les juges endossent leurs responsabilités – saluons au passage le Parquet national financier (PNF), contre qui Dupond-Moretti a déposé plainte (retirée depuis) juste avant d'être nommé garde des Sceaux, après que ce dernier avait épluché ses factures téléphoniques détaillées (fadettes) pendant quinze jours (lire ici les révélations du Point).

À contre-courant

Bref, Éric Dupond-Moretti pourrait être le premier ministre de la Justice à exprimer en actes ce qu'il a l'habitude de dire à longueur d'interviews : il n'aime pas la transparence ni « les balances qu'on appelle des lanceurs d'alerte  » ; il déteste les « journalistes qui se prennent pour des flics » et les « juges, pour des justiciers » ; et il abhorre « l'hygiénisme » et « l'hyper-réglementation », grosso modo, toutes les normes qui visent à « emmerder les Français » (c'est une citation de Pompidou, reprise depuis par Emmanuel Macron, mais il la cite volontiers). Que reste-t-il après tout cela ? Une certaine idée des droits de la défense et de l'état de droit, une volonté de séparer statutairement juges du siège et magistrats du parquet, préserver à tout prix la cour d'assises, seul lieu où, au pénal, l'on prend encore vraiment le temps de rendre la justice, se plaît-il à répéter.
Coignard – Gouvernement : l'avocat qui cache la forêt
Pour le reste, personne ne sait vraiment ce que Dupond-Moretti pense de la numérisation des procédures, de la justice civile et commerciale, des lois de bioéthique et de tous les chantiers qu'il va être amené à connaître. Dans les choix qu'il fera Place Vendôme, l'avocat est susceptible de plaire à gauche, et d'être entendu par la droite. Ou l'inverse, on ne sait plus trop. On l'a vu pester contre le tout-carcéral et les violences policières, tout comme il a déjà fustigé la place trop importante prise par les victimes dans le procès pénal et taclé l'« hystérisation » des débats et la vague « moralisatrice » qui s'était emparée de la France au moment du mouvement #MeToo. Pas très moderne. Mais Dupond-Moretti n'est-il pas cette espèce de réac de gauche, prompt à aller, dès qu'il en a l'occasion, contre le sens du vent ? « Je suis un anarchiste épicurien », nous avait-il répondu.

Intimidant

Dupond-Moretti peut être violent, obtus, déplacé, intimidant. L'avocat s'est bâti dans le rapport de force. On lui reproche de maltraiter les magistrats ? C'est vrai, mais pas seulement. Il rudoie aussi bien les juges que les policiers, les témoins et ses propres confrères. Parlez-en à ceux qui l'ont eu en face d'eux. Chacun en pense ce qu'il veut, mais tout le monde s'en souvient. Dupond-Moretti met les droits de la défense au-dessus de tout, des lois comme des usages, et se permet même, dans l'affaire Georges Tron, afin de provoquer un report du procès, de répéter publiquement des propos que le magistrat qui présidait l'audience lui avait tenus en off.
Son style est aujourd'hui imité par de jeunes confrères qui n'ont pas tous sa prestance. Nombreux sont les magistrats à le tenir pour responsable de la dégradation des relations entre juges et avocats. Il rétorque alors que les magistrats se croient intouchables, et que c'est cette sorte d'impunité qui entretient la défiance vis-à-vis de la justice.

Peut-il faire consensus ?

Une chose est certaine, Dupond-Moretti en impose. Et on imagine mal les Républicains et l'opposition le taxer de « laxisme » comme ils le font à longueur de temps avec les ministres de la Justice. On se bidonne aussi un peu, il faut le dire, en imaginant le silence qui entourera irrémédiablement ses interventions en conseil des ministres. Depuis des années, Dupond-Moretti exaspère. Il est partout, au théâtre et au cinéma, à la télévision et à la radio, de tous les prétoires, au service de tous les hommes, qu'ils soient politiques (Guaino, Cahuzac, Balkany, etc.), d'affaires (Tapie), sportifs (Benzema, Karabatic), roi du Maroc (Mohamed VI), terroriste (Abdelkader Merah), criminels célèbres – ou présumés innocents, devrait-on dire, car il lui arrive régulièrement d'obtenir des acquittements spectaculaires.
Il lui arrive encore, bien que ce soit de plus en plus rare, de prêter sa voix et sa robe à tous les autres, ceux dont les médias ne parlent pas, sa clientèle historique, celle de Lille et des quatre coins de France, où, jeune avocat, il se rendait comme un assoiffé de barre. Dans tous les cas, ces procès, le pénaliste ne les passe plus seul : du fait de sa notoriété, « EDM » ne plaide plus incognito au fond de la salle d'audience d'un tribunal de province. On va désormais voir Dupond-Moretti comme on assiste à un spectacle.
Me Antoine Vey, l'antithèse de Dupond-Moretti

La personnalisation de la vie politique ?

Le pénaliste a des amis et des ennemis partout. Mais plusieurs magistrats sont prêts à relever le défi : quelques-uns ont rapidement fait savoir qu'ils n'avaient pas peur de faire partie de son cabinet ministériel. Dupond-Moretti peut être vu comme la personnalisation à l'extrême de la vie politique. Ou, au choix, comme un des rares à pouvoir faire entendre la voix de n'importe quel justiciable ; de servir de caisse de résonance à n'importe quelle situation injuste ou dramatique, si tant est qu'il accepte de s'en saisir. L'affaire Outreau l'a, à ce titre, profondément marqué.
On lui reprochera forcément ses potentiels conflits d'intérêts, au vu de la taille de sa clientèle. Dupond-Moretti est en effet susceptible d'être « conflicté » sur tous les sujets ou presque. Il voudra sanctuariser le secret professionnel des avocats ? On lui rétorquera qu'il cherche à protéger son pote Thierry Herzog, l'avocat de Nicolas Sarkozy, pris dans le scandale des écoutes. Il souhaitera réformer le statut des magistrats ? Vieilles rancœurs contre les juges, avec qui les relations sont notoirement difficiles, lui répondra-t-on.
Accusé de faire « planer la terreur », Éric Dupond-Moretti réplique

« Une nomination surprenante »

La nomination d'Éric Dupond-Moretti au poste de ministre de la Justice a provoqué un véritable cataclysme dans le monde judiciaire. Si des juges ont tempêté, ses pairs, dont le bâtonnier de Paris Olivier Cousi ou la présidente du CNB (Conseil national des barreaux) Christiane Féral-Schuhl, se sont réjouis. Mais c'est encore la sidération qui dominait lundi soir chez les hauts magistrats interrogés par Le Point, lesquels ne nous ont souvent répondu que d'un simple : « Pas de commentaire. » Béatrice Brugère, à la tête du syndicat Unité Magistrats, tempère : « C'est une nomination surprenante, voire déconcertante. Mais nous jugerons le ministre sur ses actes. Nous verrons bien si c'est l'homme ou l'avocat qui siégera Place Vendôme. »
Dupond-Moretti a souvent raconté que, pendant ses dix premières années de barre, le stress le rendait malade avant de défendre dans le prétoire des gens qui pourraient être déclarés coupables. La plaidoirie qui s'annonce est certainement une des plus difficiles de sa carrière. « Pas de procès d'intention », répète Béatrice Brugère, Éric Dupond-Moretti reste présumé innocent.
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Des français lambda, des avocats ou juristes et de la magistrature en général, une caste orgueilleuse au point de se croire un état dans l'état !

Car en plus cet avocat est une vedette médiatique grandiloquente qui exagère souvent ses propos avec excès !

Et comme la justice est très critiquée en France ou les français croient qu'elle protège, les nantis ou politiciens élus de tous bord et en plus ne semble pas indépendante du pouvoir !

Et laxiste en matière de peines (quand elles sont effectuées) trop légères et inadaptées en fonction des faits jugés et des prévenus condamnés !

Sans compter sa lenteur sur tout si les faits à juger et enquêtes traînent en longueur quand cela concerne des politiciens élus de tous bords politique !

Et ne parlons pas de son impartialité de la part de certains de ses magistrats !?

Jdeclef 08/07/2020 13h10 LP

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire