Philippe
Bouvard, le déboulonné… reboulonné
ÉPISODE 9.
Dans cet ultime rendez-vous, le patron des « Grosses Têtes » est
écarté de RTL pour rajeunir l'antenne. Six mois après, son retour est
triomphal.
Ce
17 mai 2000, le paysage radiophonique est sous le choc : Philippe
Bouvard, créateur et animateur des Grosses Têtes durant vingt-trois ans (25 %
de parts d'écoute par jour !), est écarté de RTL. Dans un communiqué de
presse, la station de la rue Bayard annonce que l'émission continuera sans lui.
Comment expliquer cette décision alors que RTL trône largement en tête des
audiences et que les Grosses Têtes, désignée un peu plus tôt dans
un sondage du Parisien comme l'émission du siècle,
rassemble près de trois millions d'auditeurs ? Deux mois avant, la station
avait été secouée par un changement de direction non prévue : Philippe
Labro, amené à prendre les rênes de RTL, tombe en dépression ; Stéphane
Duhamel le remplace.La spirale négative s'enclenche dès que le nouveau patron souhaite mettre sa patte sur la grille et surtout, guidé par des études marketing alambiquées, enclenche la vitesse « jeunesse ». En moins de trois semaines, Georges Lang (The Last DJ), Fabrice (l'homme de La Valise) et donc Philippe Bouvard sont écartés. Le début de la fin… « En radio, les audiences descendent par l'ascenseur et remontent par l'escalier », dit un dicton que l'on se répète dans les couloirs.
S'ouvre une décennie de succès, d'éclats de rire, de questions de Mme Bellepaire de Loches ou de Mme Envie de Béziers. Philippe Bouvard sait mettre en valeur ses sociétaires, dont la liste grandit. Lui qui a si souvent maltraité ses invités dans Samedi soir (l'émission référence du talk-show à la française) ou Passez donc me voir est pris à partie par ses camarades qui se moquent de sa taille, de ses questions, de ses activités nocturnes. De ce savant mélange de culture, d'humour et de sexe se produit un petit miracle radiophonique. Un rire à la française alternant sans cesse entre le léger, le graveleux et le haut de gamme. Les sociétaires passent, l'émission reste. Et les vagues d'audience sont à chaque fois un triomphe.
« On
dit aux auditeurs : vous êtes trop vieux, cassez-vous »
La suite est
terrible : les stars vieillissantes de la radio sont poussées vers la
sortie. Invitées sur les plateaux télé, elles se répandent et taclent la
direction. Bouvard n'est pas le moins tendre : ses réseaux
médiatiques (télé, radio, presse écrite) lui permettent d'être invité matin,
midi et soir. Le 20 mai 2000, il est l'invité de Thierry Ardisson.
Derrière le visage rond et le sourire bonhomme, papi Bouvard flingue :
« C'est la première fois que les Grosses Têtes me rendent
triste » ; « On dit que je suis viré, je préfère dire que je
suis lourdé, comme ça ne s'est pas fait légèrement » (rires et saut sur
lui-même si caractéristique de la joie bouvardienne après un bon mot) ;
Duhamel ? « C'est un homme sans cœur et sans éducation, un
gougnafier » ; « On dit aux auditeurs : vous êtes trop
vieux, cassez-vous ! […] Bref, c'est la valise pour tout le monde. »Les auditeurs sont furieux. Les lettres déferlent rue Bayard. Dechavanne a fait fondre l'audience de l'émission : 800 000 paires d'oreilles envolées ! Duhamel commence à sortir les rames : « Le style de RTL n'est pas de s'inscrire dans des durées courtes » ; Philippe Bouvard « a rendu la vie future des Grosses Têtes impossible » ; « Je ne suis pas un gougnafier, et Philippe Bouvard n'a pas été viré comme un malpropre. » Cependant la décision est prise : Les Grosses Têtes sont supprimées. Quoi qu'il en dise, Bouvard jubile : après lui, le déluge. Ses six mois d'absence ont fait vaciller un édifice que l'on croyait solide. « On voit ce que cela donne quand un responsable des programmes, Stéphane Duhamel, fait passer sa vindicte personnelle avant l'attente des auditeurs. » À la fin du premier trimestre 2001, la victoire de Bouvard est totale : Duhamel est écarté, Les Grosses Têtes ressuscitées, le déboulonné reboulonné.
Lire aussi « Un jour, un destin » : Bouvard intérieur
En 2014, RTL s'aventure une nouvelle fois dans la délicate opération succession. L'animateur a son idée : Stéphane Bern, ex-sociétaire et présent sur l'antenne de RTL ; la station souhaite miser sur Laurent Ruquier. La décision est prise, presque sans heurts, cette fois. Philippe Bouvard tire sa révérence, sans oublier d'égratigner Ruquier. Le challenge est énorme pour l'animateur d'On n'est pas couché : va-t-il amener ses auditeurs d'Europe 1 ? Va-t-il, surtout, retenir ceux de Bouvard ? Ruquier gagne sur les deux tableaux : les premiers résultats sont époustouflants et résultent d'une stratégie infaillible, à savoir réunir les meilleurs ex-pensionnaires de Bouvard (Mailhot, Peroni, Mabille) et la garde d'Europe 1 (Bénichou, Bravo, Steevy).
Lire aussi Bouvard aux « Grosses Têtes » : la der des ders
Six ans après cette passation de pouvoirs, Philippe Bouvard s'accroche sur RTL et Laurent Ruquier est toujours installé dans le fauteuil de maître de cérémonie de l'émission la plus écoutée de l'après-midi. S'il rumine toujours à 90 ans, Bouvard aura réussi à revenir dans la cour des grands et à se réinstaller sur son trône : la restauration aura duré quatorze ans. Un espoir pour tant de stars télé déboulonnées…
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L'audimat compte avant tout et comme on n'a pas
de vrais remplaçants pour ce genre de vedettes du petit écran ou de radio on
les reprend, mêmes si de grand âge !
C'est un peu comme les chanteurs français qui
ne veulent jamais quitter la scène et le public !
On les appelait péjorativement des cabotins,
mais c'est surtout ceux qui les engagent qui y voient leurs avantages, car la
publicité se greffe sur les audiences quand elles augmentent donc ça rapporte !
Jdeclef 30/08/2020 13h18
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