Mali :
le président Ibrahim Boubacar Keïta a démissionné
Dans une
déclaration à la télévision nationale, IBK a annoncé ce
19 août sa démission, celle du gouvernement et la dissolution de
l'Assemblée nationale depuis le camp militaire de Kati.
« Je ne souhaite qu'aucun sang ne soit versé »
Et le moins que l'on puisse dire c'est que « IBK », vêtu
d'un boubou blanc avec son traditionnel bonnet, et un masque facial, a pesé
chacun de ses mots, sachant combien les enjeux sont immenses, alors que le pays
replonge dans une nouvelle période d'incertitudes. « Si aujourd'hui il a
plu à certains éléments de nos forces armées de conclure que cela devait se
terminer par leur intervention, ai-je réellement le choix ? M'y soumettre,
car je ne souhaite qu'aucun sang ne soit versé pour mon maintien aux
affaires », a-t-il dit d'une voix grave aux citoyens maliens et aux
militaires de tout rang.Le président malien toujours aux mains de mutins était contesté dans la rue depuis de longs mois, voire des années, certains observateurs font remonter les premiers signes de mécontentements au moment de sa réélection contestée en août 2018. Entre-temps, IBK était devenu le symbole de l'impuissance de l'État dans un pays déchiré par les attaques djihadistes et les violences communautaires. La mutinerie, commencée mardi matin, a précipité sa chute.
« Pendant sept ans, j'ai eu le bonheur et la joie d'essayer de redresser ce pays du mieux de mes efforts », a dit le président Keïta, ajoutant avoir œuvré depuis son élection en 2013 à redresser le pays et à « donner corps et vie » à l'armée malienne, confrontée depuis des années aux violences djihadistes.
« C'est pourquoi je voudrais en ce moment précis, tout en remerciant le peuple malien de son accompagnement au long de ces longues années et la chaleur de son affection, vous dire ma décision de quitter mes fonctions, toutes mes fonctions, à partir de ce moment », a dit le président Keïta. « Et avec toutes les conséquences de droit : la dissolution de l'Assemblée nationale et celle du gouvernement », a-t-il ajouté dans cette allocution qui aura duré en tout quatre minutes. Avant de conclure : « Je n'éprouve aucune haine ».
Mali : le président Ibrahim Boubacar Keïta annonce sa démission à la télévision nationale
De la mutinerie au coup d'État
Tôt la veille, des informations issues initialement de sources
diplomatiques ont fait état d'une mutinerie en cours sur la base militaire de
Kati, dans la banlieue de Bamako. Au fil de la journée, il est apparu
clairement que des éléments de l'armée malienne prenaient le pouvoir. Enfin,
dans l'après-midi, un porte-parole du groupe a annoncé que le président Keïta
et le Premier ministre Boubou Cissé avaient été « arrêtés ». Des
médias locaux ont isolé deux personnalités parmi les militaires
putschistes : le colonel Malick Diaw – chef adjoint du camp de Kati – et
un autre commandant, le général Sadio Camara.Ensuite tout est allé très vite, l'organisation régionale de l'Afrique de l'Ouest, la Cedeao, a condamné l'action de « militaires putschistes » et a pris une série de mesures d'effet immédiat pour isoler le Mali. L'action des mutins a aussi suscité des protestations de l'Union africaine, de l'ONU, de l'Union européenne et de la France, dont 5 100 militaires sont déployés au Sahel, en particulier au Mali, dans le cadre de l'opération antijdihadiste Barkhane.
Les raisons de la colère
Cet épilogue est l'aboutissement d'une crise
déclenchée en juin avec l'éclosion d'une contestation lancée par une coalition
hétéroclite de chefs religieux, d'hommes politiques et de membres de la société
civile. Le Mouvement du 5 juin (M5-RFP), en réclamant le départ du
président Keïta, exprimait l'exaspération nourrie par les milliers de victimes
ces dernières années des attaques djihadistes et des violences
intercommunautaires, par le spectacle de l'impuissance de l'État, la crise des
services publics et de l'école et la perception d'une corruption répandue. Mais
aussi par une crise économique aggravée par l'impact de la pandémie de
Covid-19. Le week-end du 10 juillet, une manifestation avait dégénéré en
trois jours de troubles meurtriers, les plus graves à Bamako depuis le coup
d'État de 2012.
Le chef de l'État essuyait jusqu'ici sans trop de dommages les
critiques d'une opposition divisée, fort du soutien de la communauté
internationale, et notamment de la France, ex-puissance coloniale, qui s'appuie
sur lui dans la lutte contre les djihadistes.Face à la contestation, « IBK » avait assuré que sa main était « toujours tendue » et, sous la médiation de la Cedeao (Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest), avait accepté l'idée de former un gouvernement d'union nationale.
Un virage délicat pour ce natif de Koutiala (Sud), qui a gardé de sa fréquentation de prestigieux établissements français dans sa jeunesse, non seulement un phrasé châtié, mais aussi une conception centralisatrice du pouvoir. « Il est pour un pouvoir fort, centralisé, c'est sûr », affirme un ancien compagnon de route qui s'est confié à l'Agence France-Presse.
Mais les dirigeants de la contestation ont décliné les gestes d'ouverture du chef de l'État et les appels de la Cedeao, en réitérant leur « demande de démission du président Ibrahim Boubacar Keïta et (de) son régime ».
Une crise qui a pris un tour d'autant plus personnel pour IBK que les contestataires ont continuellement désigné à la vindicte son fils Karim, présenté comme un noceur, qui a démissionné mi-juillet de l'importante présidence la commission parlementaire de la Défense. Dans Bamako, les mutins ont été acclamés par des manifestants rassemblés pour réclamer le départ du président aux abords de la place de l'Indépendance, épicentre de la contestation qui ébranle le Mali depuis plusieurs mois.
« Ce qu'a abandonné l'homme politique malien, c'est véritablement la morale et l'éthique »
IBK, un vieux briscard de la politique malienne aux multiples
facettes
Ibrahim Boubacar Keïta, plus connu de ses compatriotes sous le
surnom d'IBK est un vieux routard de la politique malienne, né en 1945 à
Koutiala, située dans la région de Sikasso, dans le sud-est du Mali, près de la
frontière avec le Burkina. Issu d'une famille nombreuse qu'il présente comme
descendante de la dynastie Keïta, il a commencé sa scolarité dans cette région
natale avant de s'envoler pour Paris en 1958 lorsqu'il remporte
le concours général organisé par les Français dans chacune de leurs colonies.
Les établissements les plus prestigieux de Paris lui ouvrent leurs
portes. Janson-de-Sailly pour le lycée, puis retour au lycée Askia-Mohamed
de Bamako, comme l'a souhaité sa mère. Le bac en poche, il s'inscrit à la
faculté des lettres de l'université de Dakar, puis à la Sorbonne, à Paris, où
il effectue une maîtrise d'histoire. Également diplômé en relations
internationales, il est, après ses études, chargé de recherches au Centre
national de la recherche scientifique (CNRS). C'est en 1992 qu'IBK
découvre la politique après un début de carrière dans l'aide au développement.
Il devient alors le protégé d'un certain Alpha Oumar Konaré, ancien
président malien qui en fait tour à tour son conseiller diplomatique, son
porte-parole, son ministre des Affaires étrangères et enfin son Premier ministre
entre 1994 et 2000.Durant ses études à Paris, IBK a été responsable de l'Association des étudiants et stagiaires maliens en France (AESMF), qui était une des sections de la Fédération des étudiants africains de France (FEANF). Il y rencontre notamment Alpha Condé, actuel président guinéen. L'engagement militant d'IBK contre le régime militaire alors en place à Bamako lui vaudra par ailleurs une suspension de sa bourse d'études octroyée par l'État malien. Mais rien n'arrête la motivation du jeune étudiant qui se décrit alors comme socialiste, il enchaîne les petits boulots en tant que manutentionnaire ou ouvrier chez Citroën. Ex-karatéka, IBK a obtenu un 2e dan. Un palmarès qui tranche avec sa vie de fêtard dans les boîtes de nuit parisiennes, amateur de cigares qu'il fut.
Marié à Aminata Maïga Keïta, avec laquelle il a eu quatre enfants, IBK est un musulman pratiquant qui se rend chaque vendredi à la mosquée, fait le pèlerinage à La Mecque. Ce qui le rapproche dans un premier temps de l'imam Mahmoud Dicko, alors président du Haut Conseil islamique du Mali (HCIM), sorte de relais entre les associations musulmanes, les mosquées et les autorités. Un atout de taille qui place IBK naturellement sous les bons auspices de nombreux chefs religieux du pays. Après ses échecs aux présidentielles de 2002 et 2007, où il avait été battu coup sur coup par Amadou Toumani Touré, c'est en 2013 qu'il a enfin accès au palais de Koulouba après une large victoire saluée par les Maliens. Il sera réélu en 2018 face à Soumaïla Cissé, leader de l'opposition détenu par de présumés djihadistes depuis mars dernier.
Un deuxième mandat qui ne sera pas allé à son terme…
Entre-temps, la donne du djihadisme a tout changé. La communauté
internationale attend du vainqueur, qui entrera en fonction
le 4 septembre, qu'il relance l'accord de paix conclu en
2015 avec l'ex-rébellion à dominante touareg, dont la mise en œuvre
accumule les contretemps et qui n'a pas empêché les violences de se propager du
nord vers le centre du pays et vers le Burkina Faso et le Niger voisins. L'ONU
mène également dans le pays sa plus importante mission actuelle, tandis que la
force du G5 Sahel s'y déploie progressivement. Des problématiques
visiblement pas à l'ordre du jour des militaires putschistes, dont on ne connaît
toujours ni les motivations ni le plan d'action. Une chose est sûre,
euphorique, les Maliens vont se coucher puis se réveiller sans chef de l'État.
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Ou on perd de l'argent et du temps et qui subit
des coups d'états qui ne sont pas nouveaux pour destituer comme par hasard les
présidents soutenus par La France qui leur fournit assistance financière,
militaire avec le matériel qui va avec !
Sans compter que l'immigration importante et
notamment des ressortissants maliens dont c'est une tradition vers la France ne
va pas cesser !
On se demande si un jour on pourra se libérer
de ce boulet qu'on traine depuis l'indépendance de ces pays d'Afrique francophone
depuis 60 ans !
Car en plus les populations n’apprécient pas
beaucoup la présence française, ancien colonisateur (même si leurs
gouvernements souvent corrompus appellent au secours la France pour lutter
contre le djihadisme sahélien !)
Jdeclef 19/02/2020 10h30
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