« C'est
quoi ce délire ? Venez en urgence ! Y a un putain de
détonateur ! »
EXCLUSIF.
Le parquet antiterroriste réclame un procès contre trois hommes,
soupçonnés d'avoir tenté de faire exploser un immeuble dans le 16e
arrondissement de Paris.
La bombe aurait dû exploser dans la nuit du 29 au
30 septembre 2017, dans un immeuble de la rue Chanez, dans le 16e
arrondissement de Paris. Il est près de 4 heures du matin quand Yann, un
habitant, découvre dans le hall du bâtiment un dispositif de mise à feu à
distance, constitué d'un téléphone portable couplé à un module générateur haute
tension, connecté à quatre bouteilles de gaz, quatre seaux remplis d'essence et
quatre sacs de gravats. Un système « simple, peu onéreux, et facile
d'accès », résumeront les démineurs. Inédit en France et à l'étranger.
À l'issue de leur enquête, qui a duré trois ans, les policiers
sont aujourd'hui formels : si l'engin avait explosé, l'immeuble, avec les
familles qu'il abrite, aurait été intégralement détruit par la puissance de la
déflagration. Un attentat à la bombe en plein Paris. Une nuit d'horreur de plus
dans la capitale. Tous ne doivent leur salut qu'aux réflexes désespérés de Yann
qui, cette nuit-là, a eu un incroyable courage. Revenu de son travail de nuit
vers 1 h 15, Yann se laisse tenter par la bouteille de whisky qui
l'attend dans son salon, et s'installe confortablement dans son canapé devant
la télévision.
Vers 3 heures ou 3 h 30, l'homme entend des bruits
suspects dans le hall de l'immeuble, qu'il attribue d'abord à des fêtards. Mais
une odeur persistante d'essence et un « pschitt continu comme quand on
laisse une gazinière ouverte », explique-t-il, le pousse à aller voir,
après s'être assuré que sa propre gazinière était fermée. Par l'œilleton de sa
porte d'entrée, il aperçoit alors une bouteille de gaz. Yann prend peur, s'arme
d'un katana, et sort de son appartement, avant d'y rentrer aussitôt pour
prévenir la police : il y a là, devant ses yeux, une véritable bombe
artisanale.
L'« acte de bravoure » de Yann
Yann appelle le 17, affolé. La conversation est décousue, presque
irréelle. Il explique ce qu'il voit : « Il y a un
détonateur. » Suivant les consignes hésitantes de son interlocuteur,
il ferme à la main les bouteilles de gaz, en déplace deux dans la rue, une
troisième un peu plus loin dans l'allée, bute par inadvertance avec son pied
dans un petit boîtier gros « avec un écran, comme un taser, deux mèches et
un fil rouge ou quelque chose comme ça », confiera-t-il bientôt aux
enquêteurs. Sur le coup, au téléphone, cela donne : « Il y a une
télécommande, il y a un téléphone avec un fil jaune et un fil rouge qui était
posé sur le sol (…) Putain il y a un détonateur, c'est quoi ce délire ?
Venez, venez, venez, venez en urgence ! Y a un putain de
détonateur. »
Yann finit par fuir dans la rue, aperçoit plusieurs hommes qui
montent dans un véhicule, tente de relever la plaque d'immatriculation.
Quelques minutes plus tard, le quartier grouille de flics. L'homme ne l'a pas
encore compris mais, selon le parquet, son acte de « bravoure » a
peut-être sauvé la vie de ses voisins. Selon les démineurs, trois hypothèses
peuvent en effet expliquer pourquoi l'engin n'a pas explosé : soit la
colle utilisée n'a pas pu garantir un maintien suffisamment rigide de la bombe,
soit les extrémités des deux conducteurs ont été accidentellement déplacées (le
coup de pied de Yann ?), soit les extrémités des deux conducteurs ont été
en contact avec l'essence, ce qui a généré un dysfonctionnement.
Me Garbarini, son avocat, n'en revient toujours
pas : « Mon client a fait preuve d'un courage extraordinaire !
Il a désamorcé la bombe et empêché une tragédie dans un immeuble où vivent des
familles, en plein Paris. Il sera présent à la cour d'assises et veut
comprendre les gestes fanatiques des auteurs. Pourquoi cette folie
meurtrière ? Yann n'est pas sorti indemne malgré son acte de bravoure.
C'est bien après qu'il a pris conscience que lui, comme ses voisins,
aurait pu être tué. »
Bientôt jugés pour tentative d'assassinat terroriste
Aymen B., Sami B. et Amine A. devraient en effet comparaître
prochainement aux assises. Dans un réquisitoire définitif rendu lundi
9 novembre 2020, le Parquet national antiterroriste (PNAT) réclame un
procès pour association de malfaiteurs, tentative d'assassinat et de
destruction du bien d'autrui, le tout en relation avec une entreprise
terroriste. Les trois hommes nient ou minimisent leur rôle. Une enquête
minutieuse a été menée, mais n'a pas permis de savoir pourquoi cet immeuble
avait été visé, et pas un autre. Les suspects ont gardé le silence sur ce
point.
Les enquêteurs ont pu déterminer que, le soir des faits, un
téléphone avait tenté d'appeler la puce téléphonique fixée sur la bombe à neuf
reprises, entre 4 h 11 et 4 h 24, afin de déclencher le
mécanisme de mise à feu. Une enquête téléphonique et de vidéosurveillance,
notamment grâce aux caméras d'un magasin G20 à proximité de la scène de crime,
a permis de remonter jusqu'à une Mini Cooper volée longtemps auparavant,
faussement plaquée, passée à trois reprises devant la rue le soir des faits.
Elle sera retrouvée incendiée en région parisienne quelques jours plus
tard.
Le manqué des services de renseignements
Hamza, le voleur du véhicule, et Sami et Aymen, les acheteurs,
sont rapidement identifiés. Aymen, chauffeur de taxi fiché S pour prosélytisme,
est si radicalisé que sa famille le surnomme « Daech ». Ses amis,
bientôt entendus, noteront eux-mêmes qu'il avait arrêté de travailler, ne
voulant plus conduire des femmes ou des personnes ivres, refusant de
transporter de l'alcool, et n'écoutant plus que des anasheeds ou la
« radio sponsorisée par l'État islamique ».
Leur projet ne fait aucun doute : Aymen était, au moment des
faits, sous surveillance de la Direction générale de la sécurité intérieure
(DGSI), laquelle avait ordonné des écoutes administratives. Déclassifiées et
versées au dossier d'instruction, ces écoutes retracent, jour après jour
jusqu'à la commission des faits, la préparation de l'attentat. Aymen évoquant
ses intentions de manière cryptique, la DGSI ne s'était pas alarmée. Les
services de renseignements n'étaient donc pas intervenus avant ce qui aurait pu
être un nouveau drame mortel.
Le 27 septembre, on entend ainsi Aymen et son cousin Sami
rechercher de l'essence. Le lendemain, ils discutent du mode opératoire :
« C'est mieux si tu t'éloignes et si tu téléphones. » Ils
évoquent un mobile « dormant », précisent avoir appris sur des vidéos
à fabriquer des « médicaments » (un mot pour bombes, NDLR), évoquent
une visseuse et un tournevis. Le 29 septembre, cette menace :
« Il faut que tout soit prêt. » « Il faut qu'on prépare
dans la journée, ça ne se prépare pas comme ça, la nuit. » Puis cette
inquiétude de se faire attraper par la police : « C'est cramé
les bonbonnes (de gaz, NDLR), qu'elles soient vides, ça se voit, ou qu'elles
soient pleines, ça se voit. » Les deux hommes décident alors de les
mettre à l'arrière de la voiture, et s'entendent pour activer les puces le jour
J, à la mosquée de Corbeil-Essonnes.
« Pour moi, Charlie Hebdo
l'a cherché »
Aymen et son cousin sont interpellés et le résultat des
perquisitions est sans appel. Chez Sami, de la colle, des sacs à gravats,
de l'essence, du butane sont retrouvés. Son ordinateur garde des traces de ses
recherches : « Comment faire une explosion », vidéo consultée
dès novembre 2015, le mois des attentats du Bataclan. À l'été 2017, il se
renseigne aussi et tape dans Google : « calcul résistance »,
« mesurer condensateur », « moteur pilotable à
distance », etc.
Quant à Aymen, les enquêteurs découvrent à son domicile des vidéos
où on le voit parfois filmer son petit-neveu, pistolet plastique à la main, qui
dit face caméra : « Dodo ou tuer. » Aymen lui ordonne alors
de tirer « sur les kouffars, sur les kouffars, pas sur les muslims ».
De la propagande de l'EI est retrouvée, notamment sur l'élection présidentielle
de 2017 : « N'oublie pas d'accomplir ton devoir de musulman, choisis
ton candidat pour le tuer, et ton bureau de vote pour le brûler. »
Interrogé en garde à vue, Aymen nie mais se montre ambigu sur sa
personnalité, se permettant cet aveu sur l'attentat de janvier 2015 contre
Charlie Hebdo :
« Pour moi, Charlie
Hebdo l'a cherché. Ils le savaient parce qu'il y avait eu des
menaces (…) mais je n'ai pas fait la fête quand ils sont morts. Dans une
guerre, il y a toujours des gens qui meurent. »
Des vidéos de propagande islamiste
Il apparaît aussi qu'Aymen et un ami, Amine A., dont le visage est
dissimulé par un masque en silicone, réalisent des vidéos de propagande
islamiste sous le pseudonyme Sylverdine, visant à « distinguer le musulman
véridique du musulman hypocrite ». À compter du
16 août 2017 jusqu'au jour du crime, les deux hommes se
rencontrent à plus de 200 reprises et utilisent des moyens de
communication chiffrés (Telegram, WhatsApp, etc.) pour échanger.
« Méfiant à l'extrême », selon les enquêteurs, Amine est soupçonné
d'avoir pris part aux préparatifs de l'attentat en déclenchant notamment un
relais à proximité de la rue Chanez, le 17 septembre, et en achetant de
l'essence transportée à bord de son scooter.
Il sera également vu le jour des faits vers 3 heures du matin
en compagnie d'Aymen. Pour sa défense, Amine a toujours affirmé avoir été un
indic de la gendarmerie, puis de la DGSI, ce que n'ont confirmé ni les uns ni
les autres. Si Amine a bien été en contact au début des
années 2010 avec Mohamed Achamlane, le chef du réseau Forsane Alizza
condamné à neuf ans de prison pour avoir fomenté des actes terroristes sur le
sol français, et s'il a bien approché les gendarmes à ce sujet, ces derniers
ont expliqué qu'il ne leur avait apporté aucune information qu'ils ne savaient
déjà.
Amine A., approché pour être recruté par la DGSI
Quant à la DGSI, deux agents, entendus par les juges
d'instruction, ont confirmé avoir mené des entretiens administratifs dans leurs
locaux, puis dans un centre commercial, avec Amine A., en vue d'un éventuel
recrutement, notamment pour des missions de surveillance de la mosquée d'Évry.
Ce recrutement avait cependant tourné court après un ultime entretien avec
un psychologue de la DGSI mené le 19 avril 2017, lors duquel Amine aurait
tenté d'enregistrer les échanges avec un téléphone portable.
Les deux agents ont de surcroît juré ne jamais avoir évoqué les
vidéos tournées sous le pseudonyme Sylverdine avec Amine A, et l'avoir informé
qu'ils mettaient fin au processus de collaboration. Ce dernier, au contraire,
assure avoir commencé à tourner ces vidéos, dans le but d'attirer des
fanatiques et des djihadistes, et de communiquer leurs noms aux services de renseignements.
Amine A. n'a cependant jamais été capable de prouver ses allégations.
Si Aymen avait évoqué, en garde à
vue, l'ordre venu d'un commanditaire de mener une action violente contre
une mosquée homosexuelle de Paris, rien n'est venu conforter ce mobile. Le
choix de la rue Chanez, pour y commettre un attentat, demeure ainsi à ce jour
un mystère complet. Alors que l'ADN d'Aymen et de Sami ont été retrouvés sur
des composantes de l'engin explosif, tous deux nient, au moins en partie.
« Mon client se dit innocent des faits qu'on lui reproche », assure
ainsi au Point Me
Daphné Pugliesi, avocate de Sami B. Les avocats d'Aymen B. et d'Amine A,
n'avaient pas répondu à nos sollicitations à l'heure de publication de cet
article.
Il faut lire cet article on
pourrait en faire un film ou une série policière !?
En ce qui concerne cette
histoire rocambolesque de ce garçon qui a découvert cette bombe à retardement
dans le hall de son immeuble par hasard car noctambule ne dormant pas et ayant
entendu du bruit qui lui semblait anormal est allé voir et vu le dispositif
explosif !?
Un coup de chance et en plus
avoir eu le courage d’appeler la police qui lui a donné des instructions ?
qu’il a suivi, peut être en ne prenant pas conscience du danger et en prenant
le risque que l’engin explose ?!
Cet extraordinaire digne d’une
série télé policière il faut lui donner une médaille à cet homme courageux !
Mais ce qui est très préoccupant
c’est le laxisme ou l’incompétence de nos services de renseignements et notre
fameuse DGSI en général dans cette affaire qui aurait voulu recruter certain de
ces individus indirectement impliqués !
Et les supposés auteurs de
cet attentats ratés et les autres indirectement impliqués, malgré des faits
avérés nient les faits et comme ils n’ont tués personnes avec notre code pénal
inadapté et notre justice laxiste, car n’étant pas d’exception, et surement
avec de bons avocats du style de qui vous savez comme notre ministre qui se
plait à dire que c’est un sentiment d’insécurité, ne risque pas grand-chose, le
parquet réclame un procès justifié espérons qu’il aura gain de cause !?
Espérons que nous aurons le
résultat de ce procès, s’il a lieu !?
Mais c’est quand même une
honte de nos services de renseignement et de notre justice !?
Comme quoi le manque de
rigueur en matière de terrorisme islamique est dangereux !
Jdeclef 11/11/2020 16h59
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