EXCLUSIF.
Comment les salafistes endoctrinent
L'anthropologue
Florence Bergeaud-Blackler montre, dans une étude inédite, le rôle des femmes
dans la propagation d'un islam rigoriste.
C'est l'un des
angles morts de la recherche anthropologique : si les processus de
radicalisation fondamentaliste menant au djihadisme, et donc à la violence, ont
été étudiés, les techniques d'endoctrinement pouvant amener des gens
parfaitement pacifiques et insérés dans la société à adhérer au salafisme
restent largement méconnues, voire ignorées. Le risque de séparatisme, parfois
de radicalisation, s'étend pourtant bien au-delà des prisons et des salles de
prière rigoristes. En rassemblant autour de gâteaux et d'une tasse de thé des
femmes musulmanes de divers horizons, pratiquantes comme non pratiquantes,
l'anthropologue Florence Bergeaud-Blackler, chargée de recherche au Groupe
sociétés, religions, laïcité du CNRS, a mis au jour les processus de persuasion
et d'autopersuasion de groupe, les violences psychologiques exercées et la
façon dont les résistances exprimées par certaines étaient facilement
étouffées. Ses travaux, que Le Point a pu consulter, mettent pour la première fois
des mots sur ce trouble diffus qui traverse la société et dont l'interminable
débat sur le voile constitue un symptôme. Entretien.
L'appel de 101 musulman(e)s contre le voile
Vous êtes spécialiste du halal depuis près de vingt ans. Comment
en êtes-vous arrivée à étudier l'endoctrinement islamique ?
Florence Bergeaud-Blackler :
Le marché halal s'est développé de façon fulgurante pour s'étendre sur tous les
continents et s'est diversifié : de la viande à tous les produits de
consommation, l'environnement, les services… Dans mon livre « Le marché halal ou
l'invention d'une tradition », j'ai analysé les raisons de l'élargissement du
périmètre du halal, comment on était passés de l'abattage rituel aux hôtels
halal ou au burkini. Après l'offre, il me restait à comprendre la demande :
comment le « périmètre mental » du halal chez les acheteurs s'est-il élargi ?
Pourquoi des nouveaux produits et services halal (cosmétiques, médicaments,
hôtels) deviennent-ils, aux yeux de certains, des obligations religieuses ? Au
fond, qu'est-ce que les musulmans veulent quand ils demandent du halal ?
Comment avez-vous procédé ?
J'ai employé des méthodes moins suggestives que les sondages
classiques : les focus
groups, qui consistent à provoquer une discussion autour d'un thème
pour comprendre comment son sens est construit et discuté. J'ai travaillé avec
des groupes de femmes musulmanes, éduquées, de classe moyenne et populaire,
dans un centre social de la région de Marseille, et fait appel à Fadila
Maaroufi, doctorante belge, pour les animer avec moi. Puisque le halal renvoie à
la norme, nous avions supposé que les femmes religieusement éduquées allaient
dominer la discussion. Mais nous ne nous attendions pas qu'elles s'emploient à
convertir les autres à leur conception rigoriste de la norme, ni à voir que
même les moins pratiquantes finiraient par leur donner raison, y compris
lorsqu'il était question d'appliquer la charia…
Y a-t-il une stratégie d'endoctrinement salafiste ?
Au fil de la conversation, les principaux thèmes d'endoctrinement
salafiste se dévoilent, notamment la nécessité de la da'wa
(prédication), la lutte contre la discorde à l'intérieur de l'oumma
(la communauté), le retour à l'islam « authentique » par la purification de la
communauté, la lutte contre l'apostasie et la crainte du Jugement dernier et de
l'enfer. Deux ressorts importants de l'endoctrinement sont la victimisation et
la falsification de l'islam parental. L'une des participantes, militante d'une
association pour l'intégration, prônait le retour à l'islam « précolonial ». Je la cite : «
Les musulmans étaient traités comme des animaux, on s'est perdus dans les
ravages de l'alcoolisme et de la drogue. Les parents, ils faisaient ramadan,
l'Aïd, mais il n'y avait pas de religion réelle. La colonisation avait tout
bloqué. On s'est réapproprié la vraie histoire, l'islam comme avant la
colonisation. » Et d'ajouter : « La psychologue, elle me l'a dit qu'on [les
musulmans] avait été discriminés ! » Comme s'il fallait une
validation par les colonisateurs eux-mêmes.
Les femmes jouent-elles un rôle particulier dans cet
endoctrinement ?
La femme, en tant que mère et épouse, a un rôle central dans
l'éducation de la famille. On lui ajoute le rôle de « sœur », et elle devient
responsable de l'éducation de l'oumma. Les femmes sont considérées comme mauvaises
langues. En les rééduquant, on fait d'une pierre deux coups : on fait cesser la
fitna
(la division de la communauté) et on assure la transmission quotidienne, par les
mots et les gestes, de l'« islam authentique ». Les femmes endoctrinées
deviennent endoctrineuses, y compris au sein de leur famille, sans nécessairement
s'en rendre compte, d'ailleurs.
Dans vos groupes de discussion, les discours radicaux ne
rencontrent qu'une faible résistance de la part des femmes non pratiquantes.
C'est vrai, pourtant l'islam salafiste est minoritaire en France.
Toutes n'étaient pas d'accord a priori, mais elles se sont montrées sensibles
au charisme et aux arguments de la plus rigoriste, une femme très douce qui
leur est apparue comme un modèle de piété. L'islam salafiste repose sur
l'imitation des gestes et des paroles des « pieux anciens », dépositaires d'un
islam dit « authentique ». L'endoctrinement est adapté au contexte européen :
douceur mais fermeté sur les principes, solidarité entre femmes mais soumission
totale à Dieu. Ces femmes voient dans l'image idéalisée d'un prophète qu'elles
jugent féministe un recours contre la violence masculine. D'ailleurs, chez les
hommes aussi, on constate ce changement de ton. Fini, les vieilles harangues
effrayantes des prédicateurs saoudiens et des Frères musulmans de la première
génération.
Le ministre de l'Intérieur a annoncé la semaine dernière une
circulaire pour renforcer la lutte contre le salafisme. Cela vous semble-t-il
encourageant ?
La lutte contre les idéologies salafistes (le wahhabo-salafisme,
les Frères musulmans) se borne trop souvent à repérer les imams radicaux et à
les renvoyer dans leur pays. Mais ces idéologies se diffusent partout, pas
uniquement dans les mosquées, mais par des méthodes plus sournoises qui
s'intègrent à la vie quotidienne dans ce que j'appelle l'« écosystème halal ».
Cet écosystème permet au musulman de n'être, autant que possible, jamais
confronté à l'« illicite » et de vivre dans l'espace normatif du halal. Manger
entre soi, se marier entre musulmans, éduquer les enfants dans l'islam, bien
sûr. Mais aussi ne fréquenter que des espaces « halalisés », ne regarder que
des chaînes de télévision ou des vidéos qui éloignent du shaytan
(Satan). Comme l'a montré Fadila Maaroufi à Bruxelles, cela inclut aussi les
loisirs, ainsi que la médecine dite prophétique. Les femmes peuvent sortir de
chez elles voilées, mais leurs parcours dans la ville sont prédéterminés. Comme
c'est un modèle communautaire à vocation extensive et universaliste, plus on
gagne du terrain et moins l'enfermement est pénible.
Peut-on repérer les « signaux faibles » de radicalisation, comme
le souhaite Emmanuel Macron ?
Dans certains cas, peut-être, mais c'est illusoire. La vie
quotidienne s'insère dans la pratique religieuse et non l'inverse. Les prières,
les invocations, les rappels aux autres, les activités licites rapportent de
nombreux hassanat
(bonnes actions) qui pèseront dans la balance le jour du Jugement dernier,
sinon ce sera l'enfer. Au cours de nos entretiens, la jeune Soraya, qui ne
porte pas le voile et sort en boîte, explique qu'elle ne se sent « pas prête », mais que, lorsqu'elle s'engagera dans
l'islam, ce sera « sans hypocrisie et totalement ».
Si elle ne présente aucun signe de radicalisation, elle adhère au discours des
dévotes et porte déjà le voile dans sa tête.
Ne craignez-vous pas d'encourager la stigmatisation et de faire le
jeu de l'extrême droite ?
Bien au contraire ! Il faut comprendre que le fondamentalisme
religieux et l'extrême droite sont interdépendants. Ils s'appuient chacun sur
la vigueur de l'autre. Si vous épuisez l'un en mettant au jour ses stratégies,
l'autre en sera affaibli. L'islam salafiste prospère toujours sur les mêmes
terreaux : l'écosystème halal, la culpabilisation et la victimisation. Les
réduire, c'est permettre à d'autres formes d'islam de lui résister
EXTRAITS
« Chercher
« Chercher le halal en
tout »
« Lors des discussions, les groupes
se scindent en deux, chacune reconnaissant presque “naturellement” les pieuses
des autres simples croyantes. Au début d’une des séances, la pieuse Maryam,
vêtue d’un long voile, explique sa conception du halal. Elle lève les yeux au
ciel : “La première chose quand on prend le halal (…) c’est que ça descend
de quelqu’un qui n’est pas comme nous. (…) ça descend du Bon Dieu”. Le silence
s’installe, les femmes sont impressionnées. Maryam poursuit : “Il faut
chercher le halal en tout, car chaque chose est halal ou haram, et tout est dit
et expliqué dans le Coran.”
Rania, une croyante enjouée, essaie d’expliquer que cette façon de
voir est excessive et, pour faire rire l’assemblée, raconte ses aventures
malheureuses avec une dame qui l’a interpellée dans la rue, l’accusant d’être “mal
voilée”… mais personne ne rit.
Une autre croyante, Salma, non voilée, la rappelle à l’ordre en la
culpabilisant et lui suggérant qu’elle aurait pu écouter cette personne et,
ajoute, sous le contrôle de Maryam : “Dieu seul juge (…) Même les choses
les plus graves peuvent être pardonnées comme ne pas porter le voile, se marier
à un non-musulman, remettre en question la religion.”
Maryam ajoute alors que c’est à chaque croyant de se rappeler le
licite et l’illicite et de le rappeler aux autres. Cela doit se faire avec
douceur : “Ma sœur, tu devrais peut-être t’occuper de tes enfants à la
maison pour les éduquer dans l’islam ou éviter de fréquenter des lieux habités
par le shaytan (Satan).”
Maryam : « Mais où tu vois des gens avec
des mains coupées ? »
Kahina,d’un
air dégoûté : « En Tunisie, les salafistes
demandent cette loi. »
Maryam : « Ne dis pas salafiste à la
légère… Le salafiyyin, c’est celui qui suit le kitab et la sounna, quelqu’un
qui est salafi il est tolérant, quand tu dis salafiste, c’est des mots qu’ils
ont sortis à la télé. Ça veut rien dire : il n’y a qu’un islam ! »
Salma confesse elle-même pratiquer la danse orientale, une
activité qu’elle reconnaît haram (illicite) et qu’elle devra arrêter, inch’a
allah. Cette femme de classe moyenne dit alors son admiration pour les
salafiyyines (les pieux anciens de l’islam salafiste) : “Les salafiyyines,
ils sont plus dans l’adoration” (…) C’est la télé encore qui dit djihadiste,
extrémiste, etc. Mais pour moi les salafiyyines, ils sont dans l’adoration, ils
veulent exceller.” Maryam, satisfaite, renchérit : “Il faut être souple,
il ne faut pas forcer pour entrer dans la religion, sinon tu provoques la
haine. Rien qu’avec mon comportement ça va te guider vers la bonne religion.”
Puis reprenant d’un ton plus ferme : “Ce n’est pas : tout
pendant les cinq prières, et rien le reste du temps !”
La jeune Soraya, qui se maquille et sort en boîte, confesse, les
larmes aux yeux, que son comportement n’est pas musulman, qu’en l’état, si elle
meurt subitement, elle ira brûler en enfer. Quand elle rentrera dans l’islam,
précise-t-elle, ce sera à 100 %, pas comme une “hypocrite” »
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Par ces dogmes radicaux extrémistes obscurantistes
moyenâgeux qui se développent sans que l'on ne s'en rende compte, car on les a
laissé prospérer dans certaines communautés et lieux connus !
Et nos gouvernements n'ont rien fait pour les stopper,
car nos dirigeants de tous bords depuis trente ans avec leur bienpensance
hypocrite n'ont rien fait pour au moins les réguler correctement, car
maintenant on voit le poids de cette religion, même dans le domaine public car
l'intégrisme dans une religion est la pire des choses et lave le cerveau des
plus faibles !
Bien que celle-ci par ses dogmes ne soit pas du tout
conforme aux valeurs de notre république et notre histoire ancestrale !
Par exemple : Que l'on parle déjà de charia et que
certains la pratique devrait être déjà sanctionné rigoureusement !
Cette anthropologue Florence Bergeaud-Blackler devrait
être remerciée pour cette étude très bien faite et notre gouvernement en
prendre connaissance, ainsi que nos dirigeants bienpensant pour qu'ils en
tiennent compte (mais hélas ne rêvons pas) car semble-t-il, ils semblent avoir
peur de celle-ci et ne pas savoir quoi faire et surtout agir !
Alors ils continuent à pratiquer la politique de
l'autruche ou à pousser la poussière sous le tapis en espérant que cela se
tasse, alors que c'est tout le contraire, car la goutte de trop fera déborder
le vase !
Jdeclef 24/10/2019 13h37
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