mardi 15 mai 2018

D.TRUMP tient sa ligne de conduite : « l'Amérique aux américains et rien d'autres »!


« Qui peut aujourd'hui faire confiance à la parole des États-Unis ? »

ENTRETIEN. Selon Maya Kandel, spécialiste de la politique étrangère américaine, la présidence de Donald Trump consacre la fin du « siècle américain ».


Spécialiste de la politique étrangère américaine, docteur en histoire, animatrice du blog réputé Froggy Bottom, Maya Kandel vient de publier Les États-Unis et le Monde, de George Washington à Donald Trump (Perrin, 197 pages, 18 euros). Très accessible, ce livre inscrit la politique étrangère de Donald Trump dans une perspective longue, tout en proposant une analyse posée, sans conclusion hâtive. Pour autant, l'auteur est inquiète et ne s'en cache pas.
Le Point : Donald Trump a annoncé le 8 mai le retrait des États-Unis de l'accord sur le nucléaire iranien. Sa décision vous a-t-elle étonnée ?
Maya Kandel : Non, elle était attendue. Trump n'a cessé de dénoncer cet accord, le plus emblématique sans doute de l'héritage de son prédécesseur, Barack Obama, en politique étrangère. Alors que Trump a déjà retiré les États-Unis de l'accord de Paris et est revenu sur la normalisation des relations avec Cuba engagée par l'administration Obama, il restait le JCPOA (Joint Comprehensive Plan of Action). Cette décision confirme l'évolution observée à Washington depuis le début 2018 : après quelques flottements en 2017, où Trump s'en est remis à un « axe des adultes » sur de nombreux dossiers de politique étrangère, il revient désormais à ses instincts et à ses promesses de campagne. Mais il faut noter par ailleurs que, sur ce dossier, ce qui semble se limiter chez Trump à la volonté d'effacer l'héritage d'Obama rencontre des positions anti-iraniennes profondes et anciennes chez les républicains. Pour autant, l'appétence pour un changement de régime à Téhéran d'une partie de l'establishment de politique étrangère ne doit pas être confondue avec l'hostilité vis-à-vis de l'Iran de la base républicaine, et notamment des évangéliques. Pour cette base, que Trump ne veut pas (et ne peut pas) ignorer, la dénonciation de l'accord ne donne pas un blanc-seing à une nouvelle opération militaire américaine au Moyen-Orient : il faut rappeler ici que, sur la politique étrangère, les réactions les plus négatives des partisans de Trump ont concerné les frappes en Syrie.
Vous écrivez que le début de la présidence de Donald Trump semble consacrer la fin du « siècle américain ». Quel est ce « siècle » ?
Le terme vient d'un éditorial de Henry Luce dans le magazine Life , en février 1941. Alors que les États-Unis ne sont pas encore entrés en guerre, il les appelle à faire du XXe siècle un « siècle américain » en créant un environnement international favorable à la paix et à la prospérité par la diffusion du modèle politique et économique des États-Unis. Depuis le début du XXe siècle, les États-Unis étaient sans doute la première puissance économique, mais avaient refusé dans les années 1920 et 1930 d'assumer des responsabilités mondiales. Or, Luce et ses contemporains sont alors convaincus qu'une politique étrangère américaine plus interventionniste aurait pu empêcher la Seconde Guerre mondiale. Le siècle américain renvoie donc à la période qui s'ouvre à la fin de la guerre, marquée par une nouvelle politique étrangère américaine. Cette politique va s'appuyer sur les institutions internationales créées alors sous impulsion américaine, ONU, Banque mondiale, FMI, mais aussi sur un quadrillage militaire proprement impérial : après la fin de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis conservent les commandements militaires combattants qui couvrent toute la planète. Surtout, pour la première fois de leur histoire, ils ne démobilisent pas leurs forces armées après la guerre de Corée (1950). Le Congrès américain, qui jouait, en accord avec la Constitution, un rôle crucial en politique étrangère, abandonne ses prérogatives en la matière. Pour en savoir plus, je conseille la lecture de l'ouvrage essentiel de Pierre Melandri, Le Siècle américain, une histoire.
Vous écrivez que la fin de ce siècle américain commence en 2007-2008, avec la crise économique…
Disons que cette crise, la plus grave depuis 1929 aux États-Unis, joue un rôle de révélateur : les classes moyennes et populaires américaines ne soutiennent plus la politique étrangère, et en particulier le rôle américain de gendarme du monde. Mais, en réalité, cette remise en question de la politique étrangère américaine par les Américains commence dès la fin de la guerre froide (et même dès la guerre du Vietnam pour la gauche américaine), même si les attentats du 11 septembre 2001, par le choc qu'ils provoquent, vont la mettre en suspens quelque temps.
Obama avait déjà entamé un relatif désengagement américain, Trump le poursuit. Il y a bien une double spécificité du moment actuel : une spécificité liée à Trump, mais aussi une double remise en question de la politique étrangère soutenue par les élites de Washington : à l'intérieur par les Américains, qui considèrent que cette politique n'est pas bonne pour eux ; à l'international, en raison du déclin relatif de la puissance américaine.
Concernant la politique étrangère de Trump, quelques éléments sont déjà clairs : il n'est pas isolationniste, à condition que l'on ne confonde pas ce terme avec unilatéralisme. Sous Trump, l'implication des États-Unis dans les guerres en cours (Irak, Syrie, Yémen, Afghanistan, etc.) s'est intensifiée sur tous les terrains. Le Pentagone est beaucoup moins transparent, mais on voit que les effectifs militaires déployés augmentent, tout comme ceux des contractors (employés par des sociétés militaires privées, NDLR). Dans le domaine commercial, l'impression de rupture est plus nette, avec le retrait du TPP (accord de commerce transpacifique) et les renégociations en cours. La diplomatie est en revanche le parent pauvre, ce qui conduit à une accentuation de la militarisation de leur politique étrangère.
Les guerres dans lesquelles les États-Unis sont engagés n'en finissent pas, le pire exemple étant celui de l'Afghanistan. Qu'en pensez-vous ?
C'est vrai : l'empreinte globale des États-Unis, ses dépenses militaires sont celles d'une superpuissance, mais une superpuissance qui a du mal à gagner les guerres en cours. C'est aussi la conséquence de cette volonté de toujours privilégier l'outil militaire pour tout régler. C'est flagrant dans le cas du terrorisme : depuis 2001, les États-Unis ont fait évoluer leur approche, mais le phénomène terroriste ne cesse de s'étendre géographiquement. Et pourtant, Donald Trump augmente les moyens du Pentagone, tout en réduisant ceux du département d'État. On le voit notamment en Afrique. Le magazine militaire Stars and Stripes a beau vanter les mérites des soldats diplomates, en plus grand nombre et plus visibles, ce n'est pas la meilleure manière de s'attaquer au problème.
Quels signes percevez-vous dans le déplacement de l'ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem, qui aura lieu ce lundi 14 mai ?
Dans la revue de politique étrangère brésilienne Cadernos de Política Exterior , j'ai récemment publié un article (en français) dans lequel je recense vingt-trois études de cas. Cette étude, basée sur les décisions prises, et non les seules déclarations, montre plusieurs choses sur la politique étrangère de Trump. Sur les engagements militaires, il y a une forte continuité avec la politique de Barack Obama. Mais sur d'autres plans, Trump demeure obsédé par la volonté de défaire l'héritage de son prédécesseur, sur le climat, sur Cuba, sur l'Iran, les trois principaux succès d'Obama à l'international. Enfin, il y a les sujets sur lesquels il a des positions fortes depuis longtemps, qui forment le cœur de sa doctrine « America First » : l'immigration, le commerce, le multilatéralisme en général et les alliances en particulier. Trump s'adresse à ses électeurs et traduit l'idée au cœur de sa campagne, selon laquelle la politique étrangère américaine n'est plus bonne pour les intérêts américains, c'est un bad deal qu'il veut renégocier. Sur Jérusalem, il flatte sa base la plus fidèle, les évangéliques, qui ont voté pour lui et continuent de le soutenir à plus de 80 %.
Qu'en est-il de la question russe, si importante aujourd'hui ?
Ce dossier est chaotique, avec un cas de figure inédit : toute l'administration – ministères concernés et Congrès – a pris des mesures durcissant les relations avec la Russie : sanctions économiques, livraisons d'armes à l'Ukraine, augmentation du budget de l'Initiative de dissuasion européenne, etc. Mais ces mesures ont chaque fois été prises en dépit de Trump, voire contre sa volonté, qui n'a jamais eu un mot négatif à l'égard de Vladimir Poutine. Bien au contraire, il a multiplié les déclarations positives et appelé à une proximité accrue. On a un président qui, pour des raisons liées à ses affaires financières ainsi qu'aux conditions de son élection, réclame un rapprochement. Il faut également rappeler qu'avec Trump, c'est la première fois que la droite extrême entre à la Maison-Blanche. Sur plusieurs points, les positions de Trump font écho à une vision alternative des relations internationales, portée par le populisme contemporain et par la Russie. Cette vision centrée sur les rapports de force et la compétition internationale est caractérisée par l'hostilité au multilatéralisme, au libre-échange et à l'immigration, mais aussi par la priorité, voire l'obsession, pour la lutte contre le terrorisme – et le rapprochement avec Moscou.
Donald Trump est adepte de la manière forte. Mais son attitude verbalement agressive vis-à-vis de la Corée du Nord n'a-t-elle pas fait avancer les choses ?
Il semble en effet que les outrances verbales de Trump contre Kim Jong-un et ses promesses de déclencher « le feu et la fureur » aient suffisamment fait peur – justement parce que tout le monde le pensait capable de déclencher une guerre – pour amener les parties à la table de négociation, en particulier les Nord et Sud-Coréens. La « théorie du fou », revendiquée par Trump et qui consiste à laisser l'adversaire penser qu'on est capable de tout, semble avoir fonctionné. Reste à voir ce qui ressortira de ce sommet, surtout après la décision sur l'Iran : qui peut aujourd'hui faire confiance à la parole des États-Unis ?
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C’est vrai que cela change de chez nous avec nos précédents présidents ..?

Mais hélas à l’international, il ne garantit plus la parole des USA et mêmes de certains accords internationaux signés par son pays du temps de ses prédécesseurs !

C’est un matamore et cela lui plait, mais un menteur fantasque qui privilégie le protectionnisme économique de son pays et qui par ricochet complique à l’extrême les accords commerciaux avec l’Europe on le voit bien avec sa sortie de l’accord sur le nucléaire iranien par exemple !

Il n’hésite pas à menacer qui le gène on a vu avec le coréen du nord KIM JUNG UN et ça a marché semble-t-il (avec bien sur l’intervention en sous-main de la Chine…)

Il veut que les USA redeviennent la plus grande puissance du monde, il est en passe d’y arriver, même l’ennemi héréditaire le Russe POUTINE n’y peut pas grand-chose, car son pays est bien moins puissant depuis la fin d l’URSS !

Pendant le reste de sa mandature, il deviendra de plus en plus difficile de travailler et d’avoir des relations raisonnables avec ce président excessif !

Jdeclef 15/05/2018 10h40

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