En
Lettonie, dans la ligne de mire de Poutine
REPORTAGE.
Le pays balte à l'importante minorité russophone craint d'être visé après
l'invasion de l'Ukraine, mais fait confiance à la protection de l'Otan.
Le
dirigeant letton avait raison. Lui qui n'a eu de cesse d'alerter l'Occident sur
le danger représenté par Vladimir Poutine voit désormais son discours repris à
l'unisson en Europe. « Finalement, ils comprennent à qui nous avons
affaire », se réjouit Artis Pabriks, ministre de la Défense.
« L'agression de Poutine nous a ouvert les yeux, de manière réaliste, sur
la situation géopolitique dans laquelle nous nous trouvons », dit-il au Point.
La Lettonie est bien placée pour en parler. Ce pays balte, huit fois plus petit
que la France, a vécu sous occupation soviétique durant près d'un demi-siècle.
Il a regagné son indépendance en 1991, à la chute de l'URSS, en même temps que
les deux autres États baltes, Estonie et Lituanie.
Depuis son
adhésion couplée à l'Otan et à l'Union européenne en 2004, Riga a toujours été
jugée trop alarmiste par les chancelleries occidentales – France en tête –
soucieuses de maintenir le dialogue avec Moscou. « L'espoir fait vivre,
mais, dès le début, personne au Kremlin, et surtout pas Vladimir Poutine, ne
voulait vraiment de négociations, assure Artis Pabriks. Il avait besoin de
temps pour faire avancer ses positions. Notre analyse était basée sur ce que
les Russes avaient fait aux Géorgiens en 2008, aux Ukrainiens en 2014, puis en
Biélorussie en 2020, ce qui ne laissait pas beaucoup de place à
l'optimisme. »
Les Lettons se
savent aujourd'hui dans la ligne de mire de l'armée russe. « Si l'Ukraine
tombe, la pression augmentera ensuite sur nous, les Baltes, comme sur la
Finlande, la Suède et la Pologne, avertit le ministre letton de la Défense. Le
président russe ne reculera pas et doit donc être stoppé. » Loin de
céder aux exigences de Vladimir Poutine, qui réclame la démilitarisation pure
et simple des pays d'Europe de l'Est, le gouvernement letton vient de décider
au contraire d'accroître la part consacrée à ses dépenses militaires à
2,5 % de son PIB au cours des trois prochaines années. « On ne peut
pas négocier le désarmement de l'Europe, baisser la garde ou dissoudre les
armées, insiste Artis Pabriks. Si la France était voisine de la Russie, jamais
elle n'accepterait cela. »
Nous comptons sur les États-Unis
d’Amérique.Artis Pabriks, ministre de la
Défense de Lettonie
C'est en banlieue
est de Riga que 300 soldats de la 173e brigade aéroportée
de l'US Navy ont atterri le 24 février. Ils sont venus prêter
main-forte au groupement tactique multinational de l'Otan stationné en Lettonie
depuis 2017, dans le cadre de la présence avancée renforcée (EPF) de l'alliance
en Europe de l'Est. Créés après l'annexion de la Crimée par la Russie, ces
bataillons terrestres, composés de 1 200 soldats chacun, ont
également été déployés dans les deux autres pays baltes, ainsi qu'en Pologne.
Leur mission : fournir une réponse alliée immédiate à la moindre agression
ennemie.
« Les
buts de guerre du Dr Folamour de Moscou ne sont pas atteints »
Balles de tennis
Des militaires bravent le froid glacial pour s'affronter sur un
terrain de football, d'autres échangent des balles de tennis. L'ambiance est
bon enfant. Difficile d'imaginer que des dizaines de milliers de troupes russes
sont massées à moins de 200 kilomètres de là. Mais à en croire les
responsables, l'entraînement militaire se déroulerait ailleurs en forêt. Des
soldats en treillis surgissent de la salle de musculation flambant neuve. Âgés
d'une vingtaine d'années, ils portent un béret rouge et bombent le torse. Ils
sont américains et arrivent de la base de Vicence, dans le nord de l'Italie. La
tension se lit dans leurs yeux. « Je ne me rappelle pas avoir subi une
invasion de toute ma vie », avoue l'officier.
Au cœur de Riga,
dans le château du XVIe siècle faisant office de résidence
officielle du président de la République, le général de brigade Janis Kazocins,
conseiller à la sécurité nationale, est sur le pied de guerre. « On a
toujours pensé que Vladimir Poutine était rationnel, mais il ne le semble plus
autant qu'auparavant et sa menace d'utiliser l'arme nucléaire doit être prise
au sérieux », prévient cet ancien chef des services de renseignements
lettons. Si le président russe fait désormais l'unanimité contre lui, la marge
de manœuvre des pays occidentaux face à Moscou reste étroite. « Si l'on
engage des troupes de l'Otan sur le terrain ou si l'on impose une zone
d'exclusion aérienne au-dessus de l'Ukraine, cela impliquera d'être visé par
des frappes russes, ce qui conduira à la troisième guerre mondiale »,
avertit le conseiller à la sécurité nationale. « Il faudrait plutôt agir à
travers la société civile russe et des changements politiques graduels. Nous
observons déjà une scission entre une partie de la population russe et le
Kremlin. » Les sanctions économiques sans précédent prononcées contre
Moscou visent à accroître ce mécontentement.
Les forces de l'Alliance atlantique stationnées en Lettonie ont
avant tout une vocation dissuasive. « Nous nous sentons raisonnablement en
sécurité depuis que nous bénéficions de la présence avancée renforcée, confirme
Janis Kazocins. Celle-ci a beau ne pas être significative sur le plan
militaire, elle reste importante sur le plan symbolique, car elle implique une
vingtaine de membres de l'Otan, ce qui veut dire que si la Russie nous
attaquait, l'article 5 de la charte de l'alliance serait
activé. » Cette disposition stipule que l'ensemble des membres de l'Otan
se considèreraient alors comme agressés et pourraient alors riposter militairement.
Reste que l'organisation possède un point faible sur son flanc
oriental : le « corridor de Suwalki », ce passage étroit de
seulement une centaine de kilomètres entre l'exclave russe de Kaliningrad et la
Biélorussie, dans la zone frontalière entre la Pologne et la Lituanie. Sa
capture par l'armée russe couperait les pays baltes du reste de l'Europe.
« La fermeture de ce passage serait également vue comme une attaque contre
l'Otan, prévient le conseiller letton à la sécurité nationale. Il y aurait alors
de vastes conséquences. »
Ukraine :
Poutine est-il fou ? Le « tsar » (et la Russie) sur le divan
Des Lettons
manifestent quotidiennement leur soutien aux Ukrainiens devant l'ambassade de
Russie à Riga, une résidence de style Art nouveau placée sous haute protection
policière. Des chants patriotiques sont entonnés. Les automobilistes de passage
klaxonnent en solidarité. « Poutine nous aurait envahis si nous n'avions
pas été membres de l'Otan, juge Olga, en brandissant un drapeau ukrainien
au-dessus de sa tête. N'oubliez pas qu'il veut récupérer tous les anciens
territoires de l'URSS. » Née à Riga, cette étudiante en langues
de 22 ans d'origine ukrainienne se réjouit tout autant que son pays
fasse partie de l'Union européenne. « Cette adhésion nous a apporté
beaucoup de privilèges et de garanties, tant au niveau économique que de la
santé », souligne Olga, qui aimerait partir étudier à l'étranger dès le
prochain semestre dans le cadre du programme européen Erasmus. À l'entendre,
c'est l'avenir du vieux continent qui se jouerait aujourd'hui en Ukraine.
« Ce pays est la dernière garde de l'Europe face à la Russie »,
met-elle en garde.
La Lettonie, au
même titre que l'Estonie et la Lituanie, s'est toujours considérée comme
européenne. Faisant partie de l'empire russe durant deux siècles, ces trois
États ont connu en 1918 une première période d'indépendance avant que
l'Union soviétique (en 1940), l'Allemagne nazie (de 1941 à 1945) puis
à nouveau l'URSS (en 1945) n'occupent leur territoire. « Les pays baltes
ont toujours été perçus comme une exception au sein de l'empire soviétique en
étant des Républiques occidentales, européennes, non slaves et non
orthodoxes », explique l'historienne lettone Una Bergmane, chercheuse à
l'université d'Helsinki. « Elles constituaient les trois régions les plus
riches de l'URSS et étaient surtout considérées comme des destinations de vacances,
où le niveau de vie était plus prospère qu'ailleurs. »
Déportations de masse
Sous l'occupation soviétique, la Lettonie n'échappe pas aux
déportations de masse instaurées par Joseph Staline et voit s'installer sur son
territoire un nombre croissant de populations russophones, séduites par les
stations balnéaires du littoral baltique. De 75 % en 1939, la part
des Lettons dans le pays chute à 50 % en 1989, tandis que la capitale
Riga devient majoritairement russophone. « L'augmentation de la communauté
russophone durant l'occupation soviétique a provoqué une vraie anxiété à la fin
des années 1980, avec l'impression que le letton avait de moins en moins de
place dans l'espace public », ajoute Una Bergmane. « Il s'est
développé à l'époque un grand sentiment d'appartenance culturelle à l'Europe,
et le retour vers ce continent a été l'un des principaux slogans du mouvement
d'indépendance. »
Il faudra
cependant attendre 1995 et un accord entre Moscou et Riga pour que
l'armée russe quitte définitivement la Lettonie, poste le plus avancé dont elle
disposait en Europe. Dès lors, les pays baltes entament les négociations pour
intégrer l'Otan et l'Union européenne. « Il y avait toujours la crainte
que la Russie puisse tenter de nous envahir à nouveau », explique Imants
Liegis, ancien ambassadeur de la Lettonie à l'Otan et en France. « Il
s'agissait de retrouver notre indépendance et notre sécurité. Nous avons repris
la place en Europe qui nous avait été niée pendant cinquante ans. »
La double accession des pays baltes à l'Otan et à l'UE
en 2004 irrite au plus haut point Moscou, qui estime que la promesse
qui lui aurait été faite en 1991 par les États-Unis de ne plus
étendre l'alliance vers l'Est est ainsi bafouée. « Mensonge et
désinformation », répond Imants Liegis, qui a également servi comme
ministre letton de la Défense entre 2009 et 2010. « Jamais une
telle promesse n'a été formulée, assure-t-il, et l'Otan, qui ne partage que 6 %
de ses frontières avec la Russie, reste une organisation défensive qui ne
constitue pas la moindre menace pour Moscou. » De la même manière, ce
diplomate de carrière, aujourd'hui chercheur à l'Institut letton des
Affaires internationales, estime que le Kremlin ment lorsqu'il affirme que la
communauté russe de Lettonie serait discriminée.
Loin du centre historique de Riga, de l'autre côté du fleuve
Daugava s'élève un immense obélisque de béton, couronné d'une étoile
soviétique. Construit en 1985, le « Monument de la victoire » est
dédié aux milliers de combattants de l'Armée rouge qui ont libéré la Lettonie
du joug nazi. Ils sont symbolisés par trois soldats de bronze géants, saluant
l'allégorie de la mère patrie. Ce matin, des éclats jaunes et bleus marquent
encore les dalles de pierre noircies au pied du monument. Les couleurs du
drapeau ukrainien ont été peintes par des opposants à l'invasion russe de
l'Ukraine. Elles ont été effacées à la hâte et recouvertes de fleurs par des
députés lettons russophones.
Il existe des similitudes entre
l’Ukraine et la Lettonie.Igor
Pimenov, élu du parti social-démocrate
« Nous sommes très en colère contre la Russie qui a agressé
l'Ukraine et violé tous ses engagements internationaux, mais il n'est pas
correct de s'en prendre ainsi au Monument de la victoire », se désole Igor
Pimenov, élu du parti social-démocrate Harmonie. « Cet édifice n'a pas été
construit à la gloire de la Fédération de Russie mais aux soldats de l'Armée rouge,
qui étaient russes mais aussi lettons, ukrainiens, ou biélorusses ! »
Né à Riga de parents russes, cet informaticien de formation fait partie de la
communauté russophone de Lettonie. Elle représente encore un tiers de la
population (1,9 million). « Il n'existe pas de discrimination légale
contre la minorité russophone de Lettonie », souligne dans un anglais
parfait le député de 69 ans. « En revanche, le gouvernement
letton poursuit une politique de réduction de l'instruction de la langue russe
à l'école, ce qui constitue à mon sens une violation de ses engagements
internationaux sur les droits des minorités. »
En 2012, la
majorité des Lettons a rejeté par référendum la désignation du russe comme
seconde langue officielle du pays. Depuis, seul le letton est utilisé dans
l'enseignement secondaire. Une situation qui n'est pas sans rappeler l'Ukraine,
où la suppression du statut de langue officielle du russe en 2014 a
servi d'excuse à Vladimir Poutine pour annexer la Crimée. « Il existe des
similitudes entre l'Ukraine et la Lettonie, où les gouvernements poursuivent
une politique visant à renforcer l'ukrainien et le letton, au détriment du
russe, estime ainsi Igor Pimenov. Ces offenses contre les minorités russophones
sont alors exploitées par des hommes politiques pro-russes. »
L'élu est d'autant plus amer que sa formation politique, dirigée
par des russophones et arrivée en tête des dernières législatives de 2018, n'a
pu accéder au gouvernement. Elle a été neutralisée par l'alliance conclue entre
cinq formations rivales qui l'accusaient d'être liée au Kremlin. « C'est
de la pure propagande russe que d'affirmer que les russophones seraient d'une
quelconque manière opprimés dans les pays baltiques », rétorque Marija
Golubeva, membre du parti Développement/Pour, qui a rejoint la coalition
gouvernementale. « Cela n'a absolument aucun fondement. » Elle-même
issue de la communauté russophone, elle est aujourd'hui ministre de l'Intérieur
de la Lettonie.
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Pourquoi
s'arrêterait il les occidentaux et USA avec leur OTAN bouclier inefficace si ce
n’est que celui-ci lui fait soi-disant peur ce qui lui sert d’alibi pour se protéger
car l’attaque est toujours plus efficace que la défense et les alliés des pays
libres et démocratiques ne veulent ou ne peuvent rien faire par peur d’une 3eme
guerre mondiale !?
Car bien
sur l’OTAN USA FRANCE ANGLETERRE alliés etc ; ont l’arme nucléaire aussi et peuvent ajouter
des missiles nucléaires rapidement au frontières européennes des anciens pays
qui était sous le rideau de fer de l’URSS tombé en 1989 après la chute du mur
et fin de la guerre froide et la réunification des deux Allemagnes qui du fait
de cette nouvelle crise frontalière à l’est réarme ou les pays scandinaves
comme par exemple la FINLANDE qui reconstitue son service militaire ou la SUEDE
qui a vu son ciel survolé par des avion russes !?
On peut
toujours demander à notre petit MACRON candidat à sa réélection entre deux meetings
de cette déplorable campagne électorale d’encore téléphoner à son interlocuteur
favori et tailler une bavette à bâton rompu pour lui demander de cesser de
jouer à la guerre qui effraie le monde entier de toute façon cela ne coute rien
et notre petit monarque sans couronne n’a aucun amour propre les insultes
diverses lui glisse dessus comme sur les plumes d’un canard et profitera
de ce geste courageux sans risque pour sa notoriété !?
Car s’il
est réélu, je le plains car il faudra qu’il assume ce nouveau mandat de chef d’état
et comme cette crise avec la Russie ne sera pas terminée à moins d’un miracle de
la part de POUTINE ou de son élimination car plus dangereux qu’un virus
sanitaire s’il est toujours présent !
Jdeclef 05/03/2022
14h06
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